Stan Getz

Dernière mise à jour : 08/11/2020

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Sous-estimé voire méprisé à une certaine époque après le succès de ses disques Getz/Gilberto, Stan Getz est l'un des plus importants saxophonistes de jazz. Chef de file de l'école cool, il combine une sonorité douce et feutrée apportées par le jeu novateur de son ainé Lester Young. Tendre, éthérée, élégante, sa musique contraste avec la rudesse des disciples de Coleman Hawkins, à la crudité du blues et aux duretés virtuoses du bebop. Elle eut une influence prépondérante sur l'évolution du jazz, par l'intermédiaire des musiciens de la côte Ouest.

Biographie

Né le 2 février 1927 à Philadelphie (Pennsylvanie, Etats-Unis), Stanley Gayetzsky voit le jour dans une famille juive d'origine ukrainienne qui a quitté Kiev au début du XXe siècle. Quelques années plus tard, la Dépression oblige le père Gayetzsky à se déplacer à New York. Le petit Stan se révèle un élève brillant, au point de sauter plusieurs classes. Ses parents rêvent de le voir médecin, mais son intérêt se porte cependant déjà sur la musique. Il possède une mémoire phénoménale et retient toutes les mélodies dès la première écoute.
Pour gagner l’argent qui manquait à ses parents, Stan achète des graines de tournesol en vrac, qu’il met dans des sachets de cent, et qu’il vend le dimanche, le long des allées de Croton Park.. Après s'être fait la main sur une série d'instruments (basson et contrebasse notamment), il se passionne pour le sax ténor et découvre Lester Young. À quatorze ans, il s’achète un sax pour trente-cinq dollars. Il passe huit heures par jour à jouer dans la salle de bains familiale et commence à se produire dans les bals le samedi soir, et dans les barmitsva.

A l'âge de quatorze ans, il intègre l'orchestre municipal des lycéens de New York, ce qui lui permet de recevoir des cours particuliers de musique.

Il fait ses débuts chez Dick Rogers en 1942, alors qu'il a 15 ans. Stanley finit par négliger sa scolarité pour tenter de commencer une carrière professionnelle, avant d'être ramené à l'école manu militari. C’est à l'âge de seize ans, en 1943, qu’il se choisit le nom de Stan Getz, et rencontre Jack Teagarden. Il intègre son orchestre, y apprend la vie de musicien. C'est là aussi que commence son addiction à l'alcool. Rapidement, il joue du réseau de connaissances de Teagarden et multiplie les collaborations, jouant aux côtés de Nat King Cole ou de Lionel Hampton. ll est engagé par Stan Kenton, dont l’orchestre compte plusieurs junkies. Stan Getz expérimente l’héroïne et en devient un grand consommateur. Il se produit dans les orchestres de Stan Kenton, Jimmy Dorsey, Benny Goodman.

En 1944, pour son premier enregistrement, Stan Getz accompagne Anita O’Day, vocaliste chez Stan Kenton. « And her Tears Flowed Like Wine » se vend à plus d’un million et demi de disques.

Sa carrière démarre réellement entre 1947 et 1949. Installé en Californie, il s'associe avec Butch Jones, dirige un trio, et est engagé par Woody Herman (1947-1949). Au sein de cette formation, il participe aux travaux des Four Brothers, surnom de la section des saxophonistes où figurent Zoot Sims, Herbie Steward et Serge Chaloff et enregistre en 1948 deux titres Four brothers et Early autumn dont le solo est passé à la postérité. Mais il ne se contente pas de participer à des ensembles, si brillants soient-ils : membre de la troupe de Herman jusqu'en 1949, il demeure ensuite dans des positions de leader ou de co-leader pour presque toutes ses sessions d'enregistrement, si l'on excepte ses participations aux légendaires concerts Jazz at the Philharmonic organisés par Norman Granz.

Dans les années 1950, Stan Getz voit sa réputation en tant qu'interprète de cool jazz se cimenter. En 1950, il enregistre des séances en leader pour le label Roost avec les pianistes Al Haig et Horace Silver. De 1951 à 1952, il joue avec le guitariste Jimmy Raney qui a rencontré Getz pour la première fois en 1945 à Chicago. Il enregistre notamment avec lui une remarquable séance « live » au Storyville de Boston le 28 octobre 1951. Il signe un contrat avec le producteur Norman Granz à la fin de l'année 1952. Il est accompagné pour ses premières séances pour Granz par le pianiste Duke Jordan. La pochette de l'album The Artistry of Stan Getz montre Getz recevant un baiser de son jeune fils.

Si Stan Getz s'affirme très vite comme un musicien aussi génial que précoce, sa vie privée est déjà assez perturbée : consommateur de stupéfiants dès son adolescence, il collectionne les rencontres désagréables avec les représentants des forces de l'ordre, accumulant les « erreurs de jeunesse » en un triste contraste avec la sérénité de sa musique. Son mariage, en 1946, ne vient hélas pas l'apaiser, malgré la naissance de ses enfants.

L'instabilité causée par sa consommation de drogues provoque le départ de Jimmy Raney en cette fin d'année 1952. Il est remplacé par le tromboniste Bob Brookmeyer. En juin 1953, il joue avec Chet Baker au club d'Hollywood "The Haig".

Stan Getz participe aux grands festivals du monde avec le Jazz at the Philharmonie de Norman Granz, en 1950, époque de sa version de « Moonlight in Vermont ». Il gagne alors 1 000 dollars par semaine, qui passent directement dans l’achat d’héroïne. En décembre 1953, il est arrêté pour consommation d'héroïne. Il décide d’arrêter la drogue, et avale somnifères et alcool pour oublier… Un soir, alors qu’il est en tournée à Seattle, il attaque une pharmacie pour obtenir de la morphine. Il est arrêté à son hôtel. Il a vingt-sept ans. Il est condamné à six mois de prison ferme. Entre ces deux arrestations, il enregistre une séance avec le pianiste Jimmy Rowles et avec Dizzy Gillespie.

À sa libération, le public continue de le réclamer. Il est classé meilleur saxophoniste de l’année en 1955. Après un concert, il rencontre une richissime Suédoise, Monica Silfverskiold. Il abandonne femme et enfants et décide de partir en Europe. De 1955 à 1957, il enregistre abondamment pour le label Verve de Norman Granz avec Lionel Hampton, Sonny Stitt, Gerry Mulligan, Conte Candoli, Lou Levy. Il participe aux concerts du JATP, dont le mémorable concert du 29 septembre 1957 à l'Opéra House de Chicago avec Jay Jay Johnson et Oscar Peterson.

En 1956, il s'installe au Danemark, où il a trois enfants, deux avec sa nouvelle épouse légitime Monica, l'autre avec sa maîtresse également suédoise.

Cette vie privée chaotique ne signifie pas qu'il demeure inactif : bien au contraire, on le voit se produire aux côtés d'artistes européens (parmi lesquels le Français Martial Solal) et d'autres américains expatriés, comme Kenny Clarke. En 1958, il se produit en Europe et participe à Paris à la bande originale du film Les Tricheurs.

L'exil européen de Stan Getz dure jusqu'en 1960, date à laquelle il se remet au travail aux Etats-Unis, enregistrant avec la collaboration d'Eddie Sauter l'album Focus, qui compte parmi ses disques favoris. En 1962,

En 1962, il découvre le Brésil et la bossa nova. Son travail avec Charlie Byrd sur l'album Jazz Samba contribue largement à la découverte, par le public américain, de la bossa nova. Stan Getz creuse le filon dans ses albums suivants, atteignant son plus grand succès avec l'album Getz/Gilberto, réalisé en 1963 en collaboration avec João Gilberto (guitare, chant), Astrud Gilberto (chant) et Tom Jobim (chant, piano), qui rafle quatre Grammy Awards en 1965. La version du standard de Tom Jobim et Vinícius de Moraes : A Garota de Ipanema deviendra en anglais The Girl from Ipanema et sera la version de ce morceau la plus connue et la plus jouée sur les radios. C'est Getz lui-même qui a l'idée de faire reprendre les paroles de la chanson en anglais par Astrud Gilberto, qui n'était pas connue comme chanteuse à l'époque, paroles que João chante en portugais au début de cette version.

Le succès discographique de Stan Getz et de ses acolytes, dont le disque est classé dans les hit-parades pop, fait de lui un homme assez fortuné, à une époque où tous les jazzmen ne roulent pas sur l'or.

Si la période bossa nova de Stan Getz est pour lui une véritable mine d'or, le filon se tarit assez brusquement, pour des raisons assez vaudevillesques : Stan Getz a en effet eu une liaison avec Astrud Gilberto, épouse de João Gilberto. En conséquence, ce dernier ne souhaite pas poursuivre sa collaboration avec Stan Getz, qui doit renoncer aux rythmes latinos pour retourner à son registre jazz.

Ce retour aux sources n'est pas pour autant une régression, l'album Sweet Rain, réalisé avec Chick Corea, se révélant l'un de ses plus gros succès de ventes. Le début des années 70 est particulièrement riche pour lui, avec des albums très estimés comme Dynasty, Captain Marvel ou The Peacocks. Ne renonçant pas aux expérimentations, il tâte, au cours de la décennie, de la fusion et de l'« electric jazz » et fâche certains puristes, avant de les rassurer en revenant à des sonorités plus acoustiques au tournant des années 80.

En 1986, le magazine Jazz Down Beat l'inclut dans son « Hall of Fame ». Mais la santé de Stan Getz ne suit plus. En 1988, il apprend qu’il est atteint d’un cancer du foie, et arrête toute consommation d’alcool et de drogues. Dans la nuit du 6 juin 1991, dans sa maison de Malibu en Californie, il demande à ses proches de l’installer devant la baie vitrée face à l’océan Pacifique. Deux heures plus tard, il meurt d’une crise cardiaque. Il avait soixante-quatre ans. Ses cendres furent jetées à neuf miles de la côte, ainsi que son saxophone, qui l’accompagna dans son dernier voyage. Ses proches étaient dans le yacht de son ami d’enfance, le trompettiste Shorty Rodgers.

Style

A la fin des années 1940, Stan Getz s'oriente vers le cool jazz, cette forme adoucie du jazz, souvent interprétée par les musiciens blancs comme contrepoints aux rythmes agressifs du be-bop ; il est par ailleurs très influencé par le jeu suave et délicat de Lester Young.

Vers le milieu des années 1950, au moment où le hard bop supplante le cool jazz, Stan Getz évolue à l'intérieur même de son style, vers une expression plus virile. Sa sonorité se dilate ; sa technique parfaite lui permet une exploitation plus totale des ressources de l'instrument; il mêle douceur et punch, devient un artiste complet, improvisateur toujours en verve, véhément et raffiné, assumant les tâches les plus ambitieuses comme les plus routinières, à l'aise aussi bien avec Dizzy Gillespie ou Chet Baker qu'avec des orchestres à cordes ou des rythmes brésiliens.

Au-delà du folklore du jazzman maudit et tourmenté, Stan Getz laisse l'image d'un musicien au talent particulièrement varié, capable d'interprétations d'un grand classicisme comme de vibrantes audaces musicales. Artiste de pointe de la fusion entre musiques du monde et jazz, Stan Getz reste l'une des figures les plus innovantes du jazz.

Discographie

Getz/Gilberto, mètre étalon mondial de la bossa nova

Source : http://www.musiqxxl.fr/getz-gilberto/

Succès et qualité sont comme le Soleil et la Lune : ils se courent après sans jamais se rencontrer, sauf, lors de rares éclipses.

Tel est le cas de Getz/Gilberto, un beau disque dont le succès commercial doit beaucoup à un concours de circonstances et à quelques malentendus.

Au printemps 1961, le gouvernement américain donna un coup de pouce au destin du label Verve et contribua même à changer la face du jazz moderne, en envoyant le guitariste Charlie Byrd en Amérique du Sud dans le cadre d’une tournée diplomatique. Le gouvernement États-unien voyait dans l’exportation culturelle un outil politique positif. Dans ce cas, néanmoins, ce fut plutôt ce que Byrd allait importer en Amérique du Nord qui serait positif.

À son retour, Byrd rencontra Stan Getz au Showboat Lounge de Washington et l’ayant ramené chez lui, lui fit écouter des disques de bossa-nova de Joao Gilberto et Antonio Carlos Jobim. Il ne restait plus qu’à convaincre Creed Taylor de faire un disque.

En octobre 1961, Getz et Byrd réalisèrent quelques enregistrements de jazz samba qui ne sortirent pas, avant de s’associer avec Gene Byrd, le frère de Charlie, à la guitare et à la basse, avec Keter Betts à la basse, Buddy Deppenschmidt à la batterie et Bill Reicheach aux percussions.

Betts et Deppenschmidt, qui étaient du voyage en Amérique du Sud avec Byrd, connaissaient bien le son et plus important encore, les rythmes brésiliens. Ils enregistrèrent ensemble le 13 février 1962 au Pierce Hall, dans la AU Souls Unitarian Church de Washington, pour profiter de son excellente acoustique.

C’est ainsi que sort Jazz Samba en Avril 1962, une relecture jazz et instrumentale de morceaux de bossa nova. Le disque remporte un grand succès, que Getz prolonge avec Jazz Samba Encore! mais sans les musiciens du premier disque, remplacés ici par Antonio Carlos Jobim au piano et à la guitare ainsi que Luiz Bonfa.

La même année, les grands noms brésiliens de la bossa nova se produisent aux États-Unis lors d’un fameux concert au Carnegie Hall de New-York. Le très inspiré producteur de jazz américain Creed Taylor, déjà derrière Jazz Samba décide alors de réunir les créateurs de la bossa nova, Antonio Carlos Jobim et João Gilberto avec son poulain Stan Getz, pour un album destiné au marché américain. Ce sera Getz Gilberto.

Quand il sort en 1964, le disque est un triomphe et consacre définitivement la bossa nova au rang de phénomène mondial. Rien qu’aux États-Unis, il reste 96 semaines dans les charts, dépassé seulement par A Hard Day’s Night des Beatles. Le paradoxe est qu’au même moment, le genre périclite au Brésil. Un coup d’État militaire a frappé le pays, balayant avec lui l’optimisme moderniste de la bossa nova désormais anachronique.

Dans ce contexte tendu, beaucoup de musiciens brésiliens, dont non des moindre, profiteront de la bossa nova craze pour faire carrière aux États-Unis ou en Europe.

Quoi qu’il en soit, Getz Gilberto devient bientôt aux yeux des Gringos du monde entier, le mètre étalon de la bossa nova. A bien des égards, l’album respecte les canons du genre, bien plus que les disques de Byrd et Getz. João Gilberto a encore épuré son chant par rapport à ses premiers enregistrements et la batida hypnotique de sa guitare est même mieux mise en avant.

Antonio Carlos Jobim, au piano, distille son jeu impressionniste et parcimonieux. Il signe la quasi totalité des compositions, toutes de hautes volées, dont quelques unes déjà enregistrées (Corcovado, Desafinado).

Le reste du répertoire est composé de deux vieilles sambas des compositeurs fétiches de João Gilberto (Dorival Caymmi et Ary Barroso). Toujours dans la continuité, on retrouve Milton Banana à la batterie, déjà présent sur les premiers albums de Gilberto.

Néanmoins, l’influence new-yorkaise est plus que présente. Les arrangements orchestraux disparaissent, ce qui n’est pas sans nous déplaire ; contrebasse et saxophone font leur entrée. Ce dernier instrument n’est pas exotique au Brésil, depuis qu’il y a été popularisé par Pixinguinha. Mais Getz en joue en jazzman. Sur quatre temps et en soliste, il improvise, loin des contrepoints discrets auxquels samba et bossa nova relèguent les instruments à vent.

Marché américain oblige, deux morceaux sont traduits en anglais : Corcovado devient Quiet Nights of Quiet Stars et Garota da Ipanema, The Girl from Ipanema. C’est la femme de João, Astrud Gilberto, alors sans expérience professionnelle qui les interprète. Son interprétation emprunte beaucoup au style dépouillé de son mari, auquel elle ajoute son brin de charme, juvénile et naturel. L’essai est tellement concluant, que ses morceaux sortent en single en version raccourcie avec seulement ses couplets. Ce sont ces versions anglophones teintées de jazz qui sont diffusées à la radio et qui restent jusqu’à aujourd’hui l’incarnation à l’étranger de la bossa nova.

L’album reçoit les Grammy du meilleur album jazz instrumental (sic) et du meilleur album tout court, un exploit pour un disque pas tout à fait américain. Tout ceci explique que le genre qui était une évolution de la samba, est vu à hors du Brésil comme un courant du jazz.

L’histoire donnera plutôt raison aux Gringos. La bossa nova ne sera jamais vraiment acceptée par les sambistas comme l’héritière qu’elle est pourtant, mais influencera en revanche ce qui sera connu sous le nom de MPB. En revanche, les morceaux de bossa nova se transformeront bel et bien en standards de jazz, interprétés par les plus grands, de Franck Sinatra, à Miles Davis mais aussi par une foule de musiciens plus médiocres qui colleront au genre une image de musique d’ascenseur.

Cette musique finira par incarner dans l’imaginaire mondial, bien plus que la musique brésilienne, un Brésil idyllique, un monde raffiné, romantique et éternellement estival, un rêve proche mais inaccessible, à l’image de cette fille sur la plage d’Ipanema, grande, bronzée, jeune et adorable et qui passe en marchant, sans nous voir.

But beautiful (Bill Evans, Stan Getz), l’unique Live des monstres sacrés post-bebop

Source : http://www.musiqxxl.fr/bill-evans-stan-getz-but-beautiful/

Stan Getz Bill Evans – Enregistré les 9 août 1974 au Singer Concertzaal (Laren, Hollande) et 16 aout 1974 au Middelheim (Atwerp, Belgique) – Milestone records

Bill Evans et Stan Getz, deux des improvisateurs les plus lyriques du jazz post-bebop, n’ont presque jamais enregistré ensemble. Leur seule collaboration en studio, pour Verve en 1964, a été si infructueuse, du moins dans leur esprit, qu’ils ont contractuellement demandé à leur maison de disque de ne pas sortir l’album (Il a quand même été publié en 1973 sous le nom de « Stan Getz & Bill Evans »).

En 1974, soit dix ans plus tard, Stan Getz Bill Evans se produisent à nouveau ensemble lors de concerts aux Pays-Bas et en Belgique. Le résultat, cette fois-ci, est bien meilleur. Le seul autre enregistrement du duo dresse un portrait fascinant de deux jazzmen extraordinaires. Mais comme l’album Verve, il est parfois teinté de frictions.

Getz s’accorde presque parfaitement avec le trio d’Evans (avec le bassiste Eddie Gómez et le batteur Marty Morell), avec un seul point sensible : Getz a ignoré la demande du pianiste de ne pas jouer le « Stan’s Blues » sous-répété, ce qui a poussé Evans à abandonner rapidement et à faire signe à ses acolytes d’éviter leurs propres solos.

Getz fait alors ce qui semble être un geste musical d’excuse en offrant spontanément un début impromptu de « Happy Birthday to You », en célébration du 45e anniversaire d’Evans, au début de « You and the Night and the Music ».

Mais il y a aussi une différence importante avec l’album studio. Dans ce cas, la parade et le combat musical qui ont lieu entre les deux est plus intrigant que distrayant, en partie parce qu’il provoque un jeu extrêmement riche de la part des deux musiciens.

Le solo d’Evans sur « Funkallero » par exemple et le rendu chaleureusement conversationnel, mais jamais effusif, de « Emily », de Getz. Sur l’un des titres, un duo Getz-Evans, « The Peacocks » de Jimmy Rowles, une lecture atmosphérique que l’on peut décrire comme une performance de jazz classique.

D’autres titres ne fonctionnent pas aussi bien. Getz a souvent éprouvé de l’agacement vis à vis de l’image du joueur cool qui lui colle à la peau. Souvent, sans doute dans le but de démontrer ses qualités les plus audacieuses, il a poussé son improvisation au-delà de ses propres limites. Le résultat, un son agressif dans les aigus qui jaillit de sa corne comme un glapissement belligérant.

Bill Evans, à l’inverse, semble quelque peu prudent et trop décontracté dans sa recherche d’un équilibre entre son lyrisme harmonique et le souffle libre de Stan Getz.

L’art de Getz se situe sur la pente cotonneuse, cet équilibre précaire conquis sur les malversations de la vie et la douleur d’exister. Sa musique est forte et paisible, douloureusement lyrique mais toujours emplie d’une élégance naturelle. Des fées sur son berceau ou quelques suppléments d’âme auront bien fait les choses.

« J’ai réalisé il y a peut-être une vingtaine d’années que j’ai reçu de Dieu un don pour rendre heureux les gens durant une heure ou deux, grâce à ma musique.« 

Ce halo brumeux qui entoure la sonorité ample et chaleureuse de Stan Getz, cette fêlure qui transparaît dans la puissance féline de son jeu en ont ému plus d’un. A l’évidence, le charme agit toujours, plus que jamais. Seules les statues resteront de marbre.

Ce deuxième disque, composé du Bill Evans Trio (bassiste Eddie Gómez et batteur Marty Morell) et de leur invité Stan Getz lors d’une tournée européenne en 1974, a été conservé dans une chambre forte pendant 22 ans. L’album est considéré comme une « réédition vitale » par le magazine Billboard.

Publié à l’origine par le label de bootleg Jazzdoor avec six sélections d’un concert à Laren, Hollande en 1974, Milestone a acquis les masters pour une sortie officielle et a ajouté quatre morceaux bonus d’un concert à Anvers, Belgique une semaine plus tard.

CREDITS :

  • Bass – Eddie Gomez
  • Drums – Marty Morell
  • Piano – Bill Evans
  • Tenor Saxophone – Stan Getz (tracks: 1 to 8)

#1, 2, 9, 10: Recorded August 9, 1974 at the Singer Concertzaal, Jazz Festival in Laren, Holland.
Others: Recorded August 16, 1974 at Middelheim in Atwerp, Belgium.

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