30/12/2011
Par Constant Sbraggia
Constant Sbraggia
Source : Corsica (www.club-corsica.com) - Copyright Corsica
C'est pour cette raison et pour beaucoup d'autres aussi que depuis cinq ans maintenant, la collectivité territoriale de Corse a décidé de participer au Salon international du patrimoine culturel qui se déroule à Paris au Carrousel du Louvre.
La collectivité territoriale de Corse est installée dans un stand de 65 mètres carrés et y dévoile « La Corse à la croisée des chemins. »
Exposition, vidéo-projections, diffusion de chant sacrés permettent de sensibiliser le grand public comme les nombreux professionnels à la sauvegarde et la valorisation du patrimoine culturel matériel et immatériel insulaire.
Des œuvres du photographe Georges Rousse sont présentées dans le cadre de ce salon sur le stand de la Corse, images qui appartiennent aux collections du centre méditerranéen de la photographie.
Paul Giacobbi, président du conseil exécutif de la collectivité territoriale de Corse, et Joseph-François Kremer-Marietti, directeur de la culture et du patrimoine à la CTC, étaient d'ailleurs présents le jour de l'inauguration de ce salon.
Preuve que la culture occupe une place importante au sein de l'institution. « En transférant à la CTC, la quasi-totalité de ses compétences et de son patrimoine protégé, l'État lui a confié une responsabilité majeure en matière de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel insulaire,a précisé Paul Giacobbi. D'autant que contrairement à ce que l'on a voulu nous faire croire, le patrimoine corse est très riche. Nous avons engagé une politique volontariste et ambitieuse dans ce domaine ».
Un service propre à la CTC
« C'est d'ailleurs pour cela que nous allons porter la rénovation du couvent Saint-François à Bastia, des casernes Montlaur à Bonifacio, Padoue à Corte, où encore du Fort Charley à Calvi. Nous réfléchissons également à la création de notre propre service d'archéologie préventive. Tous les ans, les fonds investis dans ce secteur sur les divers chantiers entrepris occupent une place importante du budget donc au lieu de payer un service de l'État, nous envisageons d'avoir nos propres archéologues. Nous ne sommes plus, pour notre patrimoine, dans l'attente mais dans l'action »,a poursuivi Paul Giacobbi lors de sa visite à Paris.
Une volonté bel et bien affichée par le président de l'exécutif qui va se confirmer dans les semaines à venir puisque la réhabilitation du couvent Saint-François de Bastia devrait débuter très prochainement. « Nous allons y consacrer 6 à 7 millions d'euros. Cela fait partie de notre souhait de rénover les grands bâtiments qui ont jalonné l'histoire de notre terre », a expliqué Paul Giacobbi. « À cela, se greffe le désir d'avoir un lieu de conservation dans lequel nos agents bénéficieraient des dernières technologies pour travailler. Enfin, les chapelles à fresques sont le troisième axe de réflexion autour du patrimoine corse. Elles sont présentes sur tout le territoire et pourraient constituer une porte d'entrée pour des gens avides de savoir et de culture. Des touristes que nous ne touchons pas aujourd'hui et qui trouveraient dans le circuit imaginé tout ce qu'ils recherchent. »
En matière de patrimoine et de développement harmonieux et intelligent, la Corse est véritablement à la croisée des chemins
OCTOBRE 2011
Revue Fora ! - n°9 - Décentrement
Le nouveau numéro de la revue Fora !
arrive en kiosques.
Numéro 9 (Automne-hiver 2011)
Emancipation
Ni tout à fait la même ni tout à fait une autre : transculturel, critique sociale et création
Au sommaire :
Anarcho- libertarisme, Chine, Thoreau, station-service, Gao Xingjian, Communautés, 70’s, post-nationalisme, Speranza...
La revue transculturelle corse est en vente chaque semestre et présente en kiosques en Corse.
Pour acheter Fora ! par correspondance ou trouver la liste des points de vente sur le continent :
www.revue-fora.org
La langue corse utilisée dans tous les actes institutionnels et administratifs de la vie publique de l'île. Promue et enseignée de façon systématique depuis la maternelle jusqu'à l'Université. Il s'agit là d'une révolution culturelle qui n'est plus seulement portée et soutenue par les nationalistes. Cette semaine, l'assemblée de Corse s'empare à bras-le-corps du sujet, et nul doute que l'hémicycle territorial servira de caisse de résonance pour se faire entendre jusqu'à Paris, puisqu'une révision de la Constitution sera nécessaire à la mise en application d'un statut d'officialité. Les termes même de statut et d'officialité, qui donnaient des boutons d'urticaire il n'y a pas si longtemps à la classe politique traditionnelle, sont désormais prononcés sans aucun tabou. Que l'on soit favorable, hostile ou partagé, il n'y a plus de barrière intellectuelle à les évoquer.
L'ancienne majorité avait posé les premiers jalons de la promotion de la langue corse, personne ne pourra le contester. Celle qui a repris le flambeau donne un nouvel élan des plus audacieux. La volonté politique du pouvoir territorial actuel s'est déjà manifestée de manière concrète. Les personnels et les crédits ont doublé en l'espace de quelques mois à peine. Et la Corse s'apprête à rejoindre, comme membre à part entière, le NPLD (Network to Promore Linguistic Diversity), le réseau de promotion de la diversité linguistique.
« Ce qui sera entrepris ne le sera pas au détriment de la langue française. La langue corse doit être appréciée comme un facteur d'intégration, pas de rejet ou de repli » insiste Pierre Ghionga qui défendra le rapport.
Le statut sera posé comme principe, et un comité de rédaction devrait être constitué pour faire des propositions concrètes d'ici la fin 2012.
Rentrer dans un cadre juridique précis
En attendant, il s'agira de progresser dans la formation des enseignants, la diffusion, la promotion et l'observation sociolinguistique. Mais surtout de faire sortir la langue corse du domaine du symbolique et de l'affectif pour la faire entrer dans un cadre juridique précis et contraignant. Un objectif qui sera en même temps un parcours d'obstacles à la fois politiques, psychologiques et juridiques. L'article 75 de la Constitution française est trop laconique, se limitant à reconnaître les langues régionales comme appartenant au patrimoine national. Il faudra qu'elle aille beaucoup plus loin pour valider la démarche de l'assemblée de Corse. Du boulot supplémentaire pour la commission, qui n'en manque déjà pas, de Pierre Chaubon, chargée des adaptations législatives. Ce sera en même temps un énième test pour le gouvernement sur sa volonté politique de faire franchir à la Corse un nouveau palier sur l'échelle de l'autonomie, comme l'est la récente demande de transfert de compétences fiscales dans le domaine des successions. Parallèlement, François Alfonsi, député européen nationaliste, travaille actuellement à une proposition de résolution qui sera soumise à la Commission européenne sur la sauvegarde des langues minoritaires menées de disparition.
Mais si les décisions politiques, et à tous les échelons, sont primordiales, il faut encore que soit perceptible l'adhésion de la société civile insulaire. C'est-à-dire de la majorité silencieuse. Et le silence, même en langue corse, reste le silence...
Source : Corse Matin http://www.corsematin.com
24 juillet 2011
18 juillet 2011
1er juillet 2011
Ce nouveau trimestriel, édité en format magazine, présente pour son premier numéro es 100 personnalités qui comptent en Corse dans différents domaines (sport, justice, politique, culture...)
Par Stéphane Durand-Souffland
20/06/2011
Après huit semaines d'audience, le verdict du procès d'Yvan Colonna est attendu ce lundi. Le verdict est attendu en toute fin d'après-midi au procès d'Yvan Colonna. Le 15 juin, le ministère public a requis la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une période de sûreté de 22 ans à l'encontre du berger corse, que les deux avocats généraux tiennent pour coupable d'avoir participé au dynamitage de la gendarmerie de Pietrosella, le 6 septembre 1997, et d'avoir assassiné le préfet Claude Erignac, à Ajaccio, le 6 septembre 1998.
Il est 10h20. Invité par le président Hervé Stephan à prendre la parole avant que la cour ne se retire pour délibérer, l'accusé se lève. Il est plus pâle que d'habitude et sa main, qui martèle la rambarde du box, trahit une émotion inédite. Dans la salle, présent en ces lieux pour la première fois, son fils Jean-Baptiste, âgé de 22 ans, ne le quitte pas des yeux. Voici la déclaration intégrale d'Yvan Colonna.
«J'ai le temps, Monsieur le Président? Je ne sais plus comment commencer... J'ai répété les mots mille fois, et là... En 1999, ma vie a basculé. Je me suis retrouvé dans une situation très difficile. J'e vous ai expliqué pourquoi j'ai réagi comme je l'ai fait: ma prise de recul [quatre années de fuite, ndlr], ce n'est pas un choix politique, mais un non-choix. Maintenant, j'en suis à 8 ans de prison pour un crime que je n'ai pas commis.
«Je n'ai jamais tué personne»
Ces épreuves m'ont profondément changé. Ma mère, ça fait cinq ans que je ne l'ai pas vue. Au parloir, elle faisait que pleurer alors je lui ai dit de ne plus monter. Mon fils est dans la salle: il y a sept mois que je ne l'avais pas vu, mais je ne lui fais aucun reproche. Les épreuves m'ont aussi permis de rester debout.
C'est dur de trouver les mots...
Vous allez vous retirer pour délibérer, ça va durer longtemps. Vous avez ma vie entre les mains. Comme mes avocats, Simeoni et Dupond-Moretti, j'ai peur, comme je n'ai jamais eu peur de ma vie. Je suis innocent. J'ai des convictions que je n'ai jamais cachées, elles m'ont aidé à tenir, mais je n'ai jamais été un assassin. Ma vie d'avant la prison prouve que j'ai toujours eu un respect profond de la vie. Quand j'étais militant, deux Tunisiens ont été assassinés par le FLNC, sous prétexte qu'ils faisaient du trafic de drogue: j'avais condamné cet acte. Pour Robert Sozzi [militant nationaliste dont l'assassinat avait été revendiqué par le FLNC en 1993, ndlr], j'ai aussi condamné. Pour mon service militaire, j'ai fait le pompier pour sauver des gens. En Corse, j'étais maître-nageur, j'en ai sauvé aussi. Il y a une cohérence dans ma vie, elle ne se limite pas à ce que vous en ont dit les policiers et les juges qui voulaient faire de moi un coupable.
Je n'ai jamais tué personne. Je n'ai jamais imaginé de tuer quelqu'un. Je ne me suis jamais mis en situation de le faire. Je n'ai pas participé à l'attaque de la gendarmerie de Pietrosella ni à l'assassinat du préfet Erignac. Je vous demande de me croire -je ne vais pas vous supplier, ça ne se fait pas. Je suis innocent. Je suis fatigué, fatigué, fatigué, j'ai envie de rentrer chez moi et de me reposer».
La cour s'est retirée pour délibérer à 10h40, après que le président eut relu les 36 questions -dont seules les quatre dernières portent sur l'assassinat- auxquelles elle devra répondre dans son arrêt motivé par écrit à la demande de la défense.
Ce transport de la cour d'assises constitue une victoire pour la défense, qui le demandait depuis 2007.
Une reconstitution de l'assassinat du préfet Érignac aura lieu lundi prochain à Ajaccio. Le médecin légiste qui avait procédé à l'autopsie de la victime, ainsi que deux experts balisticiens, seront présents à cet acte de procédure qui sera effectué à huis clos. Pierre Alessandri, condamné à la perpétuité en 2003 pour sa participation au crime, devrait apporter son concours - il a donné son accord de principe, contrairement au chef supposé du commando, Alain Ferrandi.
Les avocats d'Yvan Colonna réclamaient cette reconstitution depuis le premier procès de 2007: la décision de la cour constitue donc pour eux une victoire, qui clôt une séquence échevelée. Depuis vendredi, et la divulgation d'une photocopie présentée comme une lettre menaçante de M. Colonna à M. Alessandri, la défense est apparue fébrile et désordonnée, puis pugnace et ressoudée autour de Mes Dupond-Moretti et Dehapiot.
Témoin de la dernière heure
Elle a engrangé des éléments intéressants. Un spécialiste en téléphonie, certes poliment contredit par un confrère, met en doute le scénario retenu par l'accusation: selon M. Agnel, expert réputé qui a étudié, mandaté par la défense, les bornes activées par le portable du guetteur Didier Maranelli le soir de l'attentat, il est «impossible» que ce dernier soit arrivé sur place par l'itinéraire qu'il a présenté aux enquêteurs. Un ancien fonctionnaire des Renseignements généraux d'Ajaccio a, d'autre part, contredit le dogme âprement défendu par les hauts responsables policiers, selon lequel l'apparition du nom d'Yvan Colonna en mai 1999 comme tireur avait stupéfait les limiers de l'antiterrorisme. D'après M. Colombani, le berger de Cargèse était soupçonné d'avoir pressé la détente dès décembre 1998, il avait d'ailleurs été espionné pendant plusieurs mois, début 1999 - lui-même s'étant chargé d'écoutes téléphoniques apparemment favorables à l'accusé mais ne figurant pas au dossier.
Mercredi, la cour a entendu deux témoins attestant la présence d'Yvan Colonna dans son village, tard dans la nuit du 5 septembre 1997. Or, l'attaque de la gendarmerie de Pietrosella, prélude à l'assassinat du préfet, a été conduite le 6 entre minuit et 1 h du matin, horaire peu compatible avec une soirée à Cargèse…
Paul Donzella y tient un restaurant. En 2005, M. Colonna se souvient que, ce fameux 5 septembre 1997, il avait dégusté, avec son fils, une pizza dans l'établissement. Le tenancier confirme: il se remémore ce client parce que c'était «le seul nationaliste présent ce soir-là». À la barre, il maintient mordicus. Insolent comme un page, M. Donzella affirme avoir été rudoyé par le commandant Lebbos, policier controversé, qui aurait orienté la teneur de sa déposition. Comme le président s'étonne de ce qu'il ne s'en soit pas plaint plus tôt, il s'entend répondre: «Je vends des entrecôtes, je fais pas des procès-verbaux.»
Témoin de la dernière heure, Paul Donzella? Sans doute. Mais témoin embarrassant pour le ministère public, qui n'a pas grand-chose à se mettre sous la dent pour prouver la présence de l'accusé à Pietrosella, hormis les déclarations - discordantes pour ces faits - des membres du commando. L'avocat général Plantevin entreprend de déstabiliser M. Donzella, pointant des appels entre sa ligne téléphonique et celle du domicile de Stéphane Colonna, frère d'Yvan, mais le pizzaïolo a le verbe plus vif que la mémoire et il met les rieurs de son côté. L'échange est pour lui.
Le verdict approche. Lors des deux précédents procès, le kilo de plomb des dénonciations fournies en garde à vue par les conjurés et leurs compagnes a pesé plus lourd que le kilo de plumes glané par la défense dans les coulisses glauques de la procédure. Reprise de l'audience publique mercredi prochain.
Stéphane Durand-Souffland dans Le Figaro du 01/06/2011
Par Stéphane Durand-Souffland
Un silence glaçant, un cri du cœur, une pirouette épistolaire: la 25 e journée d'audience du troisième procès d'Yvan Colonna a été chargée.
Le silence, d'abord. Celui de Jeanne Finidori, ex-épouse d'Alain Ferrandi. Placée en garde à vue en même temps que son mari, le 21 mai 1999, elle avait livré une déposition accablante pour Yvan Colonna, racontant - avec un luxe de ces détails «qui ne s'inventent pas» comme les prise l'accusation - l'avoir vu arriver chez elle avec MM. Ferrandi et Alessandri dix minutes après l'assassinat du préfet Érignac, le 6 février 1998. Longtemps après, elle s'était mollement rétractée. Aujourd'hui, Mme Finidori, venue de si mauvaise grâce qu'elle refuse d'abord de prêter serment, n'accuse ni n'exonère le box. À chaque question, elle répond: «Je n'ai rien à dire.»
L'avocat général Plantevin: «Avez-vous quelque chose à déclarer sur l'implication d'Yvan Colonna?»
Le témoin: «Je n'ai rien à dire.» À cet instant, le mutisme de Mme Finidori fait plus de bruit que les déclarations tarabiscotées de son ex-mari, et ce «bruit» sourd résonne comme un glas sur les bancs de la défense.
Lettres apocryphesLe cri du cœur d'un père, ensuite. Jean-Hugues Colonna, ancien député socialiste, rappelle que lors de sa première déposition, le 23 mai 1999, il avait affirmé que son fils Yvan se trouvait à Cargèse aux alentours de 20 heures le soir de l'assassinat du préfet. Certes, cela n'exclut pas qu'il ait été présent une heure plus tard à Ajaccio pour participer à l'attentat, mais cela rend cette possibilité peu plausible. Surtout, M. Colonna, persuadé de l'innocence de l'accusé, raconte comment il reçoit un coup d'«assommoir» quand, placé en garde à vue le 26 mai, il s'entend dire que la police détient «la preuve» de la culpabilité de son premier fils - mensonge qui doit l'encourager à modifier ses déclarations du 23. «Mon anéantissement a été total», explique, au bord des larmes, ce prof de gym devenu parlementaire, ce républicain radical qui, par définition, croit ce que lui dit la police. «J'ai fortement douté», ajoute-t-il pour justifier la lettre adressée le 28 mai 1999 à Mme Érignac, dans laquelle, avec son épouse, le père du suspect alors en cavale demande «pardon pour le mal que nous vous avons fait».
La pirouette, pour finir. La défense verse aux débats une lettre d'Yvan Colonna écrite par elle-même. Les avocats ont fabriqué ce faux, déplaçant mots et paragraphes, à partir de la missive versée vendredi dernier par le directeur de la police judiciaire et que la cour refuse d'écarter des débats. Dans cette version, ce n'est plus Yvan Colonna qui menace Pierre Alessandri mais l'inverse. Le tour de passe-passe est assez amusant, mais il se double d'une offensive procédurale: la défense va former un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la cour maintenant la lettre initiale dans les débats, et même une question prioritaire de constitutionnalité car, selon la jurisprudence, ce type de pourvoi est irrecevable.
Sur le cruel silence de Mme Ferrandi, sur l'émotion secourable de son père, sur la multiplication de lettres apocryphes, Yvan Colonna n'avait, aujourd'hui, rien à dire.
Par Stéphane Durand-Souffland
08/06/2011
La défense d'Yvan Colonna va saisir la Cour de cassation à la suite de la décision mercredi de la cour d'assises de Paris de ne pas écarter des débats la photocopie d'une lettre attribuée au berger de Cargèse, remise le 27 mai par le directeur central de la police judiciaire.
Les avocats d'Yvan Colonna, rejugé pour la troisième fois pour l'assassinat du préfet Erignac, ont annoncé qu'ils allaient saisir la Cour de cassation d'une requête en examen immédiat.
L'audience a été suspendue le temps que la cour d'assises rédige l'arrêt lu à l'audience par son président, Hervé Stéphan.
Les avocats d'Yvan Colonna avaient demandé à la cour d'écarter cette photocopie de la lettre, rédigée en corse, et attribuée à Yvan Colonna, adressée à l'un des membres du commando qui a assassiné le préfet de Corse, Claude Erignac, le 6 février 1998.
Provenance indéterminée du document
Dans sa décision, la cour d'assises a estimé que la provenance indéterminée du document ou son caractère prétendument frauduleux ne suffisaient pas à l'écarter des débats, la cour se réservant d'en apprécier sa valeur probante.
Dans ce courrier, traduit à la demande de la cour d'assises par un magistrat en poste à Bastia, l'auteur supposé être Yvan Colonna s'adressait en termes violents à Pierre Alessandri, promettant la "guerre" s'il ne le dédouanait pas.
Les avocats du berger de Cargèse ont remis à la cour une autre traduction de ce courrier, la teneur étant moins violente que la première.
Dans un premier temps, la défense d'Yvan Colonna avait expliqué que cette lettre pouvait être analysée comme un cri de désespoir de l'accusé avant de contester l'authenticité de ce courrier dont il n'a été produit qu'une photocopie par le directeur central de la police judiciaire, Christian Lothion. Ce dernier avait refusé, pour des raisons de sécurité, de donner le nom de l'informateur qui lui avait remis ce document.
Stéphane Durand-Souffland dans Le Figaro du 08/06/2011
Par Jim Jarrassé
07/06/2011
La cour d'assises spéciale de Paris, qui rejuge Yvan Colonna pour l'assassinat du préfet Erignac en 1998, a tenu lundi soir une audience sur les lieux du crime. Peine perdue : les questions restent en suspens.
«Je n'ai rien à voir dans cette affaire, donc je ne participe pas».Yvan Colonna n'en dira pas plus. Le berger de Cargèse est resté muet lors de la mini-reconstitution opérée lundi, à Ajaccio, par la cour d'assises spéciale de Paris. Jugé pour la troisième fois pour l'assassinat du préfet Erignac, commis en 1998, Yvan Colonna, qui faisait son retour en Corse pour la première fois depuis son procès de 2007, conteste l'ensemble des faits qui lui sont reprochés. L'audience in situ, qui s'est tenue à huis clos et sous haute surveillance policière rue du Colonel Colonna d'Ornano, où Claude Erignac a été tué, n'a pas contribué à éclaircir la situation.
Au cœur des débats : la question de la taille du tireur, que les deux balisticiens présents sur les lieux n'ont pas pu trancher. L'un des avocats d'Yvan Colonna, Me Pascal Garbarini, a souligné que l'un des experts avait estimé que «le tireur devait nécessairement faire plus d'1,75 m, voire 1,80 m», alors que Colonna mesure 1,72 m. Une conclusion jugée vaine par l'accusation, qui rappelle que la rue Colonna est en pente et que des témoins ont dit que le préfet était plié en deux quand le tueur a fait feu sur lui, ce qui rend contestable toute conclusion technique. «On ne peut pas dire quelle était la taille du tireur», a résumé Me Benoit Chabert, l'avocat des parties civiles. «Ce transport conforte mes convictions sur la culpabilité d'Yvan Colonna» a-t-il ajouté, alors que la défense jugeait de son côté que l'audience lui était «très favorable»…
Statu quoMême flou autour des allégations de Pierre Alessandri, le seul des six membres du commando condamnés en 2003 à avoir accepté de donner des détails sur le déroulement du crime. Condamné à perpétuité comme coauteur de l'assassinat, il assure depuis 2004 être celui qui a tué le préfet de trois balles dans la nuque. Comme d'autres membres du commando, il avait mis en cause Yvan Colonna, son ami d'enfance, lors de sa garde à vue en mai 1999, et ne s'était rétracté que des mois plus tard. Selon Me Chabert, Alessandri, présent lors de la reconstitution, «a donné une version impossible. Il a placé le préfet Erignac à pratiquement deux mètres de l'endroit où on a trouvé son corps». Pour Me Garbarini, Pierre Alessandri a donné une version «très contradictoire avec celle qu'il avait donnée en garde à vue», et «on s'aperçoit qu'on ne peut ni s'appuyer sur l'une, ni s'appuyer sur l'autre». «Il me parait assez difficile dans ces conditions qu'Yvan Colonna puisse être reconnu coupable dans cette affaire», a-t-il assuré.
Lundi, sur les lieux du crime, chacune des parties s'est donc vue confortée dans ses convictions. Quant au parquet général, il se contente d'attendre «sereinement, après ce transport, la reprise des débats mercredi», selon Solène Dubois, magistrate chargée de la communication. Vers 0h30, mardi, la cour et la majorité des participants sont repartis vers Paris à bord d'un avion militaire Transall.
Jim Jarrassé dans Le Figaro du 07/06/2011
Par Stéphane Durand-Souffland
Une « mini-reconstitution» de l'assassinat du préfet Érignac devait avoir lieu dans la nuit de lundi à Ajaccio, sous très haute surveillance policière. C'est la première fois qu'une telle opération est organisée par la justice, depuis l'arrestation d'Yvan Colonna, en juillet 2003. Les lieux ont changé depuis le crime du 6 février 1998 et seuls ont été convoqués le médecin légiste et deux balisticiens - les témoins ont été dispensés par la cour d'assises de Paris. L'accusé qui clame son innocence, et Pierre Alessandri, condamné à perpétuité en 2003 et qui, depuis, affirme être l'assassin, devaient être présents. Un simple transport sur les lieux (sans experts ni complices présumés) n'avait pas donné grand-chose en 2007 : à quelles questions la cour cherche-t-elle à répondre sur place aujourd'hui ?
Combien d'hommes constituaient-ils le commando ?
Selon l'accusation, trois individus étaient au contact du préfet lors du crime : Yvan Colonna, Pierre Alessandri et Alain Ferrandi. La défense du premier n'a de cesse de plaider que son nom a été introduit dans les aveux des autres conjurés sous la pression des policiers et qu'il n'y avait que deux tueurs sur place. Or, M. Alessandri, pour la première fois publiquement, a déclaré le 26 mai qu'ils étaient bien trois : lui-même, M. Ferrandi et un complice qu'il a refusé de nommer à l'audience. Sera-t-il plus disert à Ajaccio ? S'il ne livre aucun nom, ce qui semble probable, son tardif dédouanement de M. Colonna restera sujet à caution.
Quelle était la taille du tireur ?
Cette problématique est apparue soudainement lors du premier procès Colonna, en 2007, sur une question balourde du ministère public au médecin légiste. Celui-ci a répondu que, d'après ses estimations, le tireur devait avoir sensiblement la même taille que la victime, soit 1,83 m - M. Colonna accuse 1,72 m sous la toise et M. Alessandri guère davantage. Sur place, le Dr Marcaggi et les deux balisticiens pourront peut-être affiner l'estimation. Ils disposent d'un point fixe : un impact de balle dans la façade d'un restaurant.
Mais la position exacte de la victime, courbée en deux car effrayée par plusieurs tirs l'ayant manquée selon un témoin hautement crédible, est impossible à fixer. De surcroît, la topographie des lieux - une courte portion de rue avec une déclivité marquée et une volée de marches - rend malaisés les calculs de trajectoires. Reste que cette opération, bien qu'aléatoire, est nécessaire : le fait qu'elle n'ait jamais été entreprise avant le troisième procès d'Yvan Colonna, quelles que soient les justifications avancées, est confondant.
La défense a-t-elle tout à gagner ?
Non. S'ils ne pouvaient pas renoncer à demander la reconstitution, les avocats d'Yvan Colonna se trouvent, à présent qu'ils l'ont obtenue, au pied du mur. Leur thèse des deux tueurs est anéantie par la dernière déclaration de Pierre Alessandri. Si ce dernier persiste à positionner trois hommes rue Colonel-Colonna-d'Ornano, la défense devra, comme dans la salle d'audience, s'efforcer d'en gommer un du tableau. Mais l'exercice sera plus difficile in situ.
Que va-t-il se passer mercredi et jeudi ?
L'audience reprend demain à 9 h 30. L'ex-épouse d'Alain Ferrandi viendra déposer - attendue le 20 mai, elle avait fait savoir qu'elle ne souhaitait pas se déplacer mais la cour a insisté : il s'agit d'un témoin capital, accablant pour Yvan Colonna qu'elle a décrit - en garde à vue et dans des conditions sujettes à controverse -, arrivant chez elle quelques minutes après le crime avec son mari et Pierre Alessandri. La cour doit aussi réentendre ce dernier, au sujet de l'incident de la lettre menaçante attribuée à Yvan Colonna (nos éditions du 1 er juin) : il devrait confirmer ne l'avoir jamais reçue. Ensuite, l'instruction à l'audience sera close par le président Stephan, qui fait montre d'un sang-froid à toute épreuve et auquel la défense a rendu hommage. Le verdict est attendu en milieu ou fin de semaine prochaine.
Par Stéphane Durand-Souffland
31/05/2011 |
Le directeur central de la Police judiciaire qui avait remis à la Cour ces quatre pages manuscrites photocopiées a témoigné.
«Dans quelle galère vous êtes-vous fourré ?», rigole Me Philippe Dehapiot. À la barre, Christian Lothion, directeur central de la police judiciaire (DCPJ) et à ce titre l'un des trois plus hauts policiers français, doit se le demander, tant la défense d'Yvan Colonna lui fait passer un pénible moment à la barre des témoins.
Vendredi, vers 18 h 15, M. Lothion faisait porter à la cour d'assises quatre pages rédigées en langue corse, présentées comme une lettre d'Yvan Colonna à Pierre Alessandri. Sidération. Dans ce courrier daté du 19 décembre 2010, l'accusé semble ordonner à son ex-ami proche, condamné à perpétuité pour l'assassinat du préfet Érignac, de le dédouaner de manière convaincante. Samedi, plusieurs avocats du berger de Cargèse attestent que ce dernier est l'auteur du diktat.
Hier, à 15 h 30, M. Lothion se présente au micro. En quelques mots, il explique que vendredi matin, vers 9 heures, «quelqu'un» qu'il refuse de nommer mais qu'il «connaît professionnellement» lui demande audience. Le DCPJ rencontre séance tenante cette personne «dans le secteur» de son bureau et réceptionne la photocopie. Le ministère public commet une erreur de débutant en ne posant aucune question au témoin pour déminer le terrain, endormir l'auditoire et rappeler, en préambule, les déclarations hâtives du week-end qui vont hérisser le banc d'en face.
C'est donc un grand flic dispos et non échaudé qui se trouve livré à la défense. Me Dehapiot ouvre le bal. Ironique et fin procédurier, il s'étonne qu'un fonctionnaire de ce rang accepte de jouer les «facteurs». «Rien ne m'interdit de recueillir moi-même des renseignements, cela fait partie de la passion du métier», justifie M. Lothion, sans savoir qu'il vient de livrer sa meilleure réplique. Me Dehapiot feint de vouloir lui arracher l'identité de sa «source» : il sait parfaitement qu'il ne l'obtiendra pas, mais met le témoin mal à l'aise en l'obligeant à esquiver sur le cheminement de la pièce et son authenticité.
Me Dupond-Moretti imagine ensuite la rencontre entre M. Lothion et son «indic», qu'il tutoie, admet l'intéressé : «Vous lui dites : au fait, Albert, comment tu l'as eue, la photocopie ?»
Le témoin : «J'ai essayé de le savoir, il n'a pas répondu.»
Me Dupond-Moretti, cruel : «Vous ressemblez à Pierre Alessandri interrogé par l'avocat général Plantevin (le condamné de 2003 avait refusé de répondre au ministère public). Et Albert, il l'a eu en main, l'original ?»
Le témoin : «Je ne sais pas… Moi, non.» Me Gilles Simeoni, à présent, propose un historique de son cru des coups tordus de la police en Corse et en déduit que la lettre est un faux qu'il convient d'écarter des débats. Me Antoine Sollacaro se lève et, instantanément, écume de rage. Tournant sur lui-même comme un lapin Duracell branché sur 10 000 volts, il hurle : «Nous exigeons que l'original soit versé ! Vous êtes le messager du faux, vous en subirez les conséquences ! Vous vous comportez comme un barbouze ! Donnez-nous le nom de votre informateur ! On ne peut pas en rester là, vous avez compris ?»
Le témoin, sans doute plus intrigué qu'effrayé par l'assaut : «Je ne suis pas sourd.»
Me Pascal Garbarini, laissant entendre que la «gorge profonde» pourrait avoir l'accent du maquis : «La personne que vous avez rencontrée parle corse ?»
Le témoin, un peu flottant : «Je pense… qu'il savait ce qu'il y avait dans la lettre. Moi, c'est sûr, je ne comprends pas.»
Retour de Me Dupond-Moretti : «Est-il certain que cette lettre est complète ?»
Le témoin : «Absolument pas.»
L'avocat : «Est-il exclu qu'on ait ajouté un paragraphe ?»
Le témoin, comme s'il déchirait lui-même la pièce qu'il a fournie : «Sur une photocopie, tout est possible.»
Me Garbarini(*), partie civile, ironise sur «l'extraordinaire rétropédalage» de ses confrères et cite avec gourmandise leurs propos tels que rapportés dans la presse sur ce qu'ils nomment aujourd'hui «torchon» : «Réaffirmation d'innocence» (Me Simeoni) ; «Cri du cœur d'un homme à bout» (Me Garbarini) ; «Une erreur» (Me Sollacaro). Puis, désignant Yvan Colonna : «Le tueur, c'est lui !»
Me Dupond-Moretti réplique et se fait à cet instant l'avocat de toute la défense, volant à la rescousse des exégèses du week-end. «Vous ne pourrez pas affirmer que cette lettre est authentique», conclut-il, lui qui n'a jamais parlé, dans les médias, de la photocopie dont il vient d'être fait litière.
Le plus parlant, finalement, ce sont les silences. Celui de l'accusation, comme celui de l'accusé, qui ont laissé carte blanche qui à la partie civile, qui à la défense. Comme si chacun avait à redouter quelque chose de l'irruption de quatre pages en langue corse surgies de nulle part et d'origine non contrôlée.
Stéphane Durand-Souffland dans Le Figaro du 31/05/2011
(*) Erreur d'impression, bien sûr.
Par Stéphane Durand-Souffland
Le Figaro, 20/05/2011 |
La compagne de Ferrandi n'est pas venue au procès. Celle d'un autre membre du commando dit tout.
L'un des témoins les plus attendus au procès d'Yvan Colonna se défile. Jeanne Finidori, ex-épouse d'Alain Ferrandi, avait livré, lors de sa garde à vue de mai 1999, une déposition accablante pour l'accusé.
Elle relatait avoir vu arriver à son domicile, le 6 février 1998, quelques minutes après l'assassinat du préfet Érignac, son mari, Pierre Alessandri et Yvan Colonna. Le trio tire les rideaux avant de s'isoler et de parler à voix basse. Puis, Alain Ferrandi allume la radio, où la nouvelle du crime tourne en boucle. S'approchant de son épouse, il lui demande : «Ça va ?» Elle lui répond, comprenant ce dans quoi son mari a trempé : «Non.» M. Ferrandi, en garde à vue, a reconnu sa participation sans donner les noms de ses complices. Mais il répond aux policiers que sa femme dit la vérité. Il sera condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, tout comme Pierre Alessandri.
Au fil des procès consacrés à l'attentat d'Ajaccio, la mémoire de Mme Filidori décline. Cette femme, dont la vie a été brisée par les agissements d'Alain Ferrandi, n'en peut plus de venir affronter la cour d'assises, les questions de la partie civile et du ministère public, qui la somment de confirmer ses dires, et la supplique muette de la défense qui rêve de l'entendre se rétracter de manière convaincante. Elle a donc, pour la première fois, décidé de ne pas se présenter à la barre, et en a averti la cour par un fax daté du 20 mai : «Depuis de très nombreuses années et par la force des choses, mon fils et moi-même subissons et assumons de notre mieux les choix personnels de mon ex-mari, Alain Ferrandi, qui a pris, lors de son procès (en 2003, NDLR), sa part de responsabilité dans ce drame qu'a été l'assassinat de M. Érignac (…). Aujourd'hui, il nous semble légitime à tous deux de prétendre à un peu de discrétion et de tranquillité.» Mais il est peu probable que la cour accepte de se passer de Mme Finidori. Si elle persiste dans son refus, le président peut la faire conduire de force au palais de justice de Paris.
Corinne Cau, en revanche, est présente. L'ex-épouse de Marin Ottaviani, condamné à vingt ans de réclusion en 2003, livre même une anecdote inédite : selon elle, le chauffeur du commando se serait mis à table en garde à vue après l'avoir fait venir auprès de lui. Ce qui ne figure sur aucun procès-verbal. «Un policier est venu me chercher et m'a dit que Martin était prêt à tout avouer, mais qu'il demandait sa femme.»
Un incident
Au moment où Mme Cau relate que, «calme et détendu», il la regarde «droit dans les yeux» en lui disant : «Corinne, c'est moi», survient un incident. Me Dupond-Moretti fait remarquer qu'un témoin, cité pour le 31 mai, est assis dans la salle, ce qui est proscrit par le Code de procédure pénale. Il s'agit d'un journaliste du Monde, Jacques Follorou, raccompagné à la sortie par le service d'ordre et, si l'on en croit son large sourire, nullement ému d'offrir par sa bourde un moyen de cassation potentiel…
L'audience s'achève avec Éric Tessier. Ce commandant de police de 53 ans a été muté avec d'autres, en février 1998, à la division nationale antiterroriste (DNAT) pour en étoffer les effectifs. Il affirme que le nom d'Yvan Colonna faisait partie des «objectifs» initiaux des arrestations de mai 1999, car son nom semblait sur toutes les lèvres à la DNAT - ce que nient farouchement les responsables du service. Or, lorsque la liste des personnes interpellées est finalisée, le berger de Cargèse n'y figure pas. Le fonctionnaire s'en étonne, dit-il, auprès de son supérieur direct, qui l'envoie aux pelotes.
Le dossier regorge d'incongruités comme celle-ci (voir nos éditions d'hier). Jusqu'à présent, elles n'ont pas suffi pour qu'Yvan Colonna soit innocenté, tant pèsent les déclarations - et les sous-entendus - des membres du commando et de leurs compagnes. Mme Finidori note dans sa lettre que son ex-mari a pris «sa part de responsabilité», comme si d'autres ne l'avaient pas fait. Dans cette affaire, faute de preuves matérielles, la tentation est grande de faire de certains témoins des oracles.
Stéphane Durand-Souffland dans Le Figaro du 20/05/2011
20/05/2011
Par Stéphane Durand-Souffland
17/05/2011 |
Roger Marion a affronté le tir nouri des avocats sans remettre en cause les enquêtes de ses services.
Si Roger Marion enseignait les mathématiques, il pourrait se vanter d'avoir une approche révolutionnaire de sa science et proposerait des équations insolites. Par exemple: chargé de résoudre l'assassinat du préfet de Corse, vous êtes persuadé que les commanditaires se trouvent dans le «milieu agricole subversif», vous arrêtez finalement un professeur agrégé de géographie et un de ses collègues certifié en maths qui seront acquittés, expliquez en quoi votre raisonnement est imparable.
Témoin à la cour d'assises devant laquelle comparaît Yvan Colonna, Roger Marion, 64 ans, fut, à partir du 6 février 1998, le principal responsable de la traque des tueurs d'Ajaccio, en tant que chef de la Division nationale antiterroriste. Il dépose à cette barre pour la cinquième fois, et cette routine confère à celui que ses hommes surnommaient «Eagle 4» (pour «y gueule fort») une sorte de détachement suprême. Il a toujours cette gestuelle pittoresque, faite de prestes génuflexions, de balancements d'arrière en avant, de mouvements de mains virevoltants, mais il contient parfaitement son tempérament éruptif pendant les cinq heures qu'il passe au micro.
Le préfet Marion estime qu'il a bien fait de suivre immédiatement après le crime la «piste agricole» puisque c'est à travers elle que ses troupes arriveront aux six individus définitivement condamnés, dont certains désigneront Yvan Colonna comme étant le tireur. Ces aveux «ont été recueillis dans le respect de la déontologie policière», affirme le témoin. Peu lui importe que des dizaines de personnes aient été interpellées à tort et restent, à ce jour, mises en examen dans le volet agricole - une manière de jachère judiciaire.
Des souvenirs qui fâchent
M. Marion ne manque pas d'arguments pour rappeler comment la DNAT est remontée à MM. Alessandri, Maranelli et Ferrandi, trahis par leurs téléphones portables. Selon lui, quand il apprend que ses amis sont placés en garde à vue, le 21 mai 1999, Yvan Colonna, certes, ne s'enfuit pas immédiatement dans le maquis (l'intéressé préfère l'expression «prendre du recul»), mais «il prend ses dispositions», retirant une forte somme à la banque. Plus que les autres années, M. Marion cite le successeur de Claude Erignac, Bernard Bonnet, dont il fait en quelque sorte son préfet-sombrero. Pourtant, il prétend n'avoir consulté qu'en janvier 1999 ses fameuses notes, fruit d'une enquête parallèle confiée à la gendarmerie et envoyées à Paris fin novembre 1998.
La défense part à l'assaut. Mais le rusé policier est un as de l'esquive. En tant que patron de l'enquête, il est censé tout savoir. Mais là, comme un lieutenant stagiaire, il répond qu'il ne peut utilement témoigner que sur les actes qu'il a lui-même accomplis. Surtout, il se coupe sur certains points embarrassants. Les Renseignements généraux avaient-il placé une balise sous la voiture d'Yvan Colonna fin 1998 pour surveiller ses déplacements - ce qui signifierait que les soupçons sur le berger de Cargèse existaient avant mai 1999? Le témoin refuse de répondre, ou répond qu'il ne sait pas, ou répond à côté. Autre point flou: Yvan Colonna a-t-il été placé sur écoutes par les mêmes RG? Le témoin biaise, réfute, admet, perd la mémoire... Face à lui, les cinq conseils de l'accusé attaquent. Me Dupond-Moretti tournicote, énumérant les souvenirs qui fâchent sans faire donner l'artillerie lourde, Me Dehapiot oppose son cartésianisme à la logique baroque de M. Marion, Me Garbarini ne pose qu'une question - mais une bonne -, Me Simeoni s'enfièvre, Me Antoine Sollacaro s'emporte («vous êtes un manipulateur et un pitre»). M. Marion oscille, plie les genoux, rajuste machinalement son veston, mais ne rompt pas.
Il est tout de même troublant que des responsables policiers de ce rang soient, quand cela les arrange, aussi fuyants devant une cour d'assises, dans un tel dossier qui exigerait des dépositions irréprochables. Leur façon à eux de «prendre du recul»?
© Le Figaro
Par Stéphane Durand-Souffland
13/05/2011 |
Vif échange entre Me Dupond-Moretti, défenseur du berger corse, et Me Baudelot, conseil de Mme Érignac.
La deuxième semaine du procès d'Yvan Colonna s'achève dans un climat de vive tension. Alors que Me Dupond-Moretti, conseil de l'accusé, vient de questionner longuement un témoin de choix, ancien chef du SRPJ d'Ajaccio, Me Yves Baudelot, conseil de la famille du préfet assassiné, s'adresse à la cour : «Mme Érignac trouve cela indigne, insupportable. Le procès des policiers et des juges n'est pas celui que vous avez à juger». C'est la première fois, depuis 2007, que Dominique Érignac intervient de la sorte à l'audience. Me Dupond-Moretti réplique : «Mme Érignac a des droits, mais pas tous les droits. J'ai de la compassion pour ce qu'elle vit, mais si la contestation des méthodes d'enquête est interdite au nom de la compassion, je quitte le procès».
Au tour de l'avocate générale, Annie Grenier, régulièrement asticotée pour son rôle présumé au sein du cabinet Pasqua à l'Intérieur (1993-1995), où des tractations avaient lieu avec des nationalistes corses «durs» : «En tant que conseiller technique, je suivais l'élaboration des textes de loi, c'est tout. Je n'ai jamais servi le café à François Santoni (ex-chef du FLNC-Canal historique, qui le prétend dans un livre, ndlr), ni participé à des réunions intimes avec des chefs nationalistes». Son collègue, Alexandre Plantevin, jaillit pour la conforter et charge Me Dupond-Moretti, faisant montre d'un tempérament singulièrement fougueux. Le président Stephan, d'un calme olympien, suspend l'audience pour apaiser les esprits, mais un incident éclate alors entre Mes Garbarini (défense) et Courcelle-Labrousse (partie civile), deux avocats d'ordinaire extrêmement courtois qu'il convient à cet instant de séparer, par prudence.
À l'origine de cette surchauffe passagère : le témoignage de Demetrius Dragacci. Aujourd'hui retraité, l'ex-directeur du SRPJ d'Ajaccio, qui sera évincé par son rival de la division antiterroriste, ressemble à Anthony Quinn bronzé. Il n'a pas démérité, loin de là : c'est lui qui a, notamment, l'idée lumineuse, au soir du 6 février 1998, de faire saisir la liste de tous les appels téléphoniques passés en ville, ce qui conduira à l'interpellation du commando. Mais Me Dupond-Moretti l'oblige à faire visiter à la cour les coulisses peu reluisantes de l'enquête : rivalités policières de caniveau, création d'un «dossier-poubelle» - l'expression est du témoin -, sous la forme d'une procédure-bis destinée à ratisser plus large sans être gêné par la défense qui n'y a pas accès, coups tordus en tout genre aux forts relents d'égout judiciaire… M. Dragacci jouit d'un talent particulier : une fois qu'il a décliné son état civil, que tout le monde saisit parfaitement, il ne répond clairement à aucune question mais parle sans discontinuer, ce qui énerve à la fois ceux qui pensent que le sujet importe (la défense) et ceux qui le trouvent hors de propos (le camp d'en face). D'où les éclats de voix de fin d'après-midi.
En début de soirée vendredi, la défense dépose officiellement une demande de reconstitution. Encore un sujet qui fâche. Reprise des débats lundi.
© Le Figaro
Même motif, même punition. A l’aube de ce troisième procès d’Yvan Colonna, il flotte comme un air de déjà-vu. Celui d’un procès un peu «joué d’avance », avec un accusé désigné en 1999 comme le tireur du commando Erignac et présenté comme coupable depuis lors, y compris par le président de la République lorsqu’il n’était encore que ministre de l’Intérieur.
Comme les deux fois précédentes, la grande salle d’assises du palais de justice de Paris reste immuable, avec ses boiseries anciennes et ses fresques murales. Immuable également le « cérémonial » de l’arrivée des parties civiles et des proches de l’accusé dans les couloirs et la salle des pas perdus. Et récurrent le retard pris dès le premier jour d’audience sur le calendrier élaboré. Avec une tâche compliquée pour le président Hervé Stéphan : celle de courir après le temps.
Dans ces conditions, il restait une solution à la défense d’Yvan Colonna : imprimer son propre rythme. Ce qu’elle a fait avant même l’ouverture des débats proprement dits par la voix de Me Philippe Dehapiot. Dès la fin de l’appel des témoins, le défenseur déposait des conclusions sur quatre questions.
Les deux premières concernaient la nature même de la cour d’assises spécialement composée qui prend ses décisions à la majorité simple (alors que les cours d’assises classiques fondent leur verdict de culpabilité sur la majorité des deux tiers). Et sur le fait que cette juridiction, bien que formée uniquement de magistrats, n’est pas tenue de motiver ses décisions en droit. « Est-ce que votre cour va se satisfaire de vieilles dispositions ? », a demandé l’avocat en se fondant sur une décision du Conseil constitutionnel du 1er avril 2011.
La troisième question résulte de l’annulation du procès en appel par la Cour de cassation le 30 juin dernier. La défense d’Yvan Colonna demande que le procès-verbal de l’audience ne soit pas versé au débat afin de repartir totalement à zéro.
La quatrième, enfin, était attendue depuis les décisions prises le 15 avril dernier par la Cour de cassation qui a annulé quatre procédures au motif que l’avocat n’était pas présent lors des gardes à vue. Estimant que l’actualité a connu, ces derniers mois , « une révolution juridique », Me Dehapiot demande à la cour d’en tirer les conséquences.
Immédiatement, Me Yves Baudelot qui a rejoint les conseils de la famille Erignac s’étonnait de ces conclusions tardives et demandait un délai pour y répondre de manière argumentée. Me Benoît Chabert, pour l’Etat y souscrivait également. Tout comme l’avocat général Annie Grenier. Tous ont demandé une suspension jusqu’à ce matin.
La lettre de la loi et les principes
La parole étant à nouveau à la défense, c’est Me Eric Dupont Moretti qui a sonné la première charge. S’étonnant que l’on s’étonne : « Ces décisions du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation nous les connaissons tous. Et en tant qu’avocats nous nous en sommes tous félicités... ».
Entrant immédiatement dans le dossier, il a rappelé la garde à vue cauchemardesque de Stella Castela, Il a rappelé que, dans cette affaire un homme avait eu le tympan crevé lors de sa garde à vue. En concédant que dans ce dossier « s’il n’y a plus les gardes à vue, il ne reste plus rien ».
Il était relayé par Me Gilles Simeoni qui insistait : « Nous ne sommes pas dans l’abstraction juridique. C’est l’application directe des principes qui sont la pierre d’angle de notre démocratie.»
En conclusion de cette première charge de la défense, Me Antoine Sollacaro ironisait : « Comment les professionnels du droit que nous sommes tous pouvaient-ils ignorer que nous poserions ces questions ? Demander un délai c’est tout de même un sacré manque de préparation...»
Après cette première passe d’arme, le président a suspendu l’audience jusqu’à 18 heures. A la reprise des débats, c’est Me Yves Baudelot qui a argumenté point par point pour l’ensemble des parties civiles. Il n’a pas totalement exclu le principe d’un verdict motivé, en précisant que la chambre criminelle de la Cour de cassation allait statuer d’ici à la fin de la semaine sur ce point. Il a concédé que les procès-verbaux du procès annulés en appel pouvaient être ôtés du dossier.
Concernant les gardes à vue sans avocat, il a rappelé que, dans cette affaire, elles remontent à 1999 et que la Cour de cassation avait motivé sa décision à partir de celles prises par la Cour européenne des droits de l’homme en 2008 et 2009.
« Je me réjouis que l’avocat puisse désormais être présent en garde à vue. Mais je ne suis pas d’accord pour dire que toutes les gardes à vue antérieures devraient être annulées... » Un point de vue plus restrictif encore était abordé par l’avocate générale Annie Grenier. Qui, dans un plaidoyer pour la justice antiterroriste, a clamé : « Il faut être un peu cohérent et ne pas dynamiter notre procédure ! », avant de considérer que cette juridiction offre « toutes les garanties requises », à la défense.
Froidement, Me Philippe Dehapiot a répondu que s’il considérait comme « respectable » la position des parties civiles, il n’avait « pas trouvé un élément pertinent », dans celle du parquet. La cour rendra sa décision sur l’ensemble de ces questions ce matin à l’ouverture des débats. Mais le ton est donné. Et le président qui a systématiquement fait en sorte de mener sereinement l’audience risque d’avoir une tâche bien difficile dans les semaines à venir.
Isabelle Luccioni (Corse Matin, mardi 3 mai 2011
MAI 2011
La revue Fora ! est en mutation. Elle avait annoncé sa disparition. Elle est toujours là. Et même si, entre banlieues, Arabes méprisés, blessures du paysage, elle ne donne pas de la Corse une image toujours souriante, la publication est plus fraîche et joyeuse que jamais. Longue vie à elle.
Comment va Fora ? Pour une fois, le point d’interrogation remplaçait celui d’exclamation. Comment va Fora ? demandais-je à son animatrice-directrice de la publication-rédactrice en chef, Vanina Bernard-Leoni.
Elle va bien, me répondit la jeune femme, mais la revue va s’arrêter. Nous avons exploré diverses facettes de l’identité de la Corse, en la rapprochant d’autres univers avec lesquels l’île a des ressemblances, des dissemblances. Nous avons examiné les liens de la Corse avec d’autres îles, des pays latins, l’Italie, l’Afrique du Nord, des minorités… Voilà. Nous voulions le faire. Nous l’avons fait. Ce fut un beau geste, un bel acte culturel, une aventure passionnante. Le résultat a été à la hauteur de nos espérances. Maintenant, pour l’avenir, nous voulons éviter la routine. Il faut que ça s’arrête. Sans doute commencerons-nous autre chose. Probablement sous une autre forme, avec un autre nom…
Réponse compréhensible, exemplaire, qui forçait le respect, mais qui ne gommait pas une désagréable mélancolie. On avait fini par s’y habituer, à cette petite revue paraissant tous les six mois. On avait fini par l’aimer, sa maquette originale, ses textes provocateurs, ses images décalées, son regard tendre et acide sur la réalité insulaire et sur le monde. Et puis cette promesse éditoriale, qui avait la force d’une devise – « pour vous dépayser sans vous déraciner » –, on la trouvait exactement adaptée aux attentes de la vie intellectuelle insulaire, et on trouvait que l’équipe de rédaction s’y soumettait toujours avec une grande souplesse. Bref, sinon une histoire d’amour, du moins une rencontre était née. Et patatras ! Tout se cassait la figure. Adieu veau, cochon, couvée ! La jeune revue repliait son élégance, son air de ne pas y toucher, ses angles et ses remarques inattendus, et elle nous abandonnait à notre conformisme. Qu’allions-nous devenir ?
Nous attendions. Nous espérions.
Et puis l’hiver est arrivé, puis le printemps s’est annoncé, et avec ces saisons une nouvelle livraison de Fora ! – qui avait retrouvé son point d’exclamation. Un numéro, assure le comité de rédaction, qui est « à mi-chemin ». A certains égards, il est bien le n° 8 de l’ancienne revue. Corse et banlieue, deux périphéries, sont mises en parallèle, scrutées, interrogées. Et les coups d’œil, sérieux, iconoclastes, amusants, ressemblent à ceux qu’on appréciait. Mais le numéro ne se limite pas à cela. D’autres thèmes, d’autres regards, d’autres rapprochements ont fait leur irruption dans cette livraison.
Le comité de rédaction présente ainsi le nouveau bébé :
Sans qu’on la débaptise, Fora ! – « dehors », vous vous rappelez ? – s’autorise à « sortir » de son pré carré, « sortir » de ses gonds, s’échapper. Certes, la pensée transculturelle nous menait – du moins était-ce le projet – à l’analyse du fait insulaire contemporain, mais nous avons décidé de parfois nous passer de truchement pour regarder en face les transformations de notre société. Fora ne désigne plus seulement l’ailleurs-miroir, détour ou même échappatoire. Fora veut mieux montrer l’ici, ses à-côtés, des bas-côtés. Ses bords de routes, ses marges, sa banalité. Péri-urbanité. Rurbanité. Suburbia. Architecture commerciale. Transit. Chantier. Gris ciment. Infinie mobilité. Déterritorialisation. Fora ! voudrait penser ce c’est qu’habiter en Corse aujourd’hui. Et reterritorialiser.
Et pour illustrer ce projet, une collection de contributions qui montrent la société corse d’aujourd’hui. On pense à ce qu’avait écrit Jérôme Ferrari dans ses romans « corses », aux livres de Marc Biancarelli. On est assez loin de Colomba, de Mérimée, de Tino Rossi, assez loin d’une image complaisante et poussiéreuse d’une Corse mythifiée. La Corse qu’invitent à découvrir Fabien Abraini, Marceddu Jureczek, François Farellacci, Max Ristori, Fabien Danesi – pour citer quelques-uns des contributeurs de ce numéro – est assez loin du paradis pour touristes que vantent les brochures sur papier glacé. C’est une terre en chantier, imparfaite, avec ses blessures, ses misères – sa misère fondamentale, qui est consumériste et moderne, qui ne rechigne pas plus à polluer les paysages qu’à indignement exploiter les Arabes, les pauvres, les autres –, terre de laideur autant qu’île de beauté. Sur le plan moral comme dans la géographie. Parce que la vie est ainsi, le siècle est ainsi, et que la Corse est vivante, dans son temps, dans son monde, et n’a pas encore trouvé les voies et moyens d’échapper à cette fatalité.
Elle est stimulante, cette petite revue. Son ton est agréable, comme son format, sa curiosité, sa vivacité. Pour la suite – pour un numéro neuf tout neuf, souhaite-t-elle –, elle lance des appels à projets, à idées, à suggestions. Dépêchons-nous. Avec Fora !, l’avenir est déjà là.
Revue Fora ! La Corse vers le monde, n° 8, Hiver-printemps 2011, 7,50 €
Robert Colonna d’Istria dans Corsica n°139 - avril 2011
AVRIL 2011
Corse Matin, 22/03/2011
FEVRIER 2011
Alors, pourquoi un n°7½ et pas un simple n°8 ? La réponse est ici.
Et avant de vous plonger dans ce nouveau numéro, vous pouvez évidemment faire un petit tour du propriétaire en consultant le sommaire.
Le premier film de fiction sur l'affaire Erignac est diffusé le 25 février à 20 h 40 sur Arte. Réalisé par le cinéaste corse Antoine Santana, ce drame a pour titre Main basse sur une île. Il a été tourné au printemps dernier à Ajaccio et dans les villages de Coti-Chiavari et Bastelica, en Corse-du-Sud.
Réalisé par Antoine Santana, il est interpréta par François Berléand mais également Alexandre Steiger, Héléna Soubeyrand, Jean-Michel Portal et plusieurs comédiens corses comme Didier Ferrari, Lionel Tavera et Jean-Emmanuel Pagni.
Antoine Santana n'est pas un inconnu des cinéphiles. Après avoir été longtemps l'assistant de Benoît Jacquot, il a mis en scène deux longs-métrages : Un moment de bonheur qui représenta la France en 2002 à la Mostra de Venise et La ravisseuse, un récit historique dont l'héroïne était l'actrice Isild Le Besco.
Entre manipulations et trahisons
Pour son troisième opus, Antoine Santana a donc décidé de s'appuyer sur un contexte corse très réaliste afin de relater à sa manière la terrible affaire Erignac, du nom du préfet de Corse assassiné à Ajaccio le 6 février 1998. « Mon film est adapté du livre de Jean-Paul Brighelli intitulé Viande froide et publié aux éditions Ramsay en 2003, nous a confié Antoine Santana. J'ai tout mis en oeuvre pour que mon scénario ne soit pas une simple chronique judiciaire. Les faits se déroulent en Corse mais auraient pu se produire n'importe où. En France comme ailleurs, on peut trouver en effet ce type de manipulations et de trahisons au nom de l'État, du prétendu débat politique ou tout simplement des réalités financières en jeu ». Et le cinéaste d'ajouter : « Dans mon film, l'objectif du pouvoir politique consiste à créer les conditions de l'assassinat de l'un de ses représentants puis de chercher à humilier et soumettre toute une population pour lui faire expier ce crime ».
Déstabiliser le pouvoir en place
Dans Main basse sur une île, François Berléand joue le rôle d'un commissaire de police à la retraite qui raconte à son biographe comment il fut contacté par un homme politique afin de monter une opération devant déstabiliser le pouvoir en place en Corse. Le but étant de mettre sur pied un faux attentat contre le préfet de Région. Le problème est que ce commissaire sera doublé par un agent des services spéciaux et que le faux attentat deviendra malheureusement un véritable meurtre. Financé par ADR Productions et la chaîne franco-allemande Arte, ce film dont la bande musicale est signée Olivier Daviaud dure 90 minutes. Avant sa diffusion télévisée, il a été présenté à trois reprises en avant-première dans l'île, à Porto-Vecchio, Ajaccio et Bastia il y a quelques semaines. Le succès fut toujours au rendez-vous.
Antoine Santana qui, au début de ce mois de février présidait le Jury du Festival italien de Bastia, est sur le point de tourner une nouvelle fiction. Il s'agit d'une adaptation du livre d'Andrée Chedid L'enfant multiple. Les prises de vue auront lieu en juin prochain à Paris et au Liban. L'un des rôles principaux devrait être tenu par Éric Cantona qui délaisse de plus en plus les terrains de beach-foot pour les plateaux de cinéma.
(Source : Corse Matin du 25 février 2011)
JANVIER 2011
Par Stéphane Durand-Souffland
18/05/2011
Le successeur de Claude Érignac avait remis des notes au procureur. Elles ne figurent pas au dossier. Les explications du juge Bruguière sont très attendues.
Ce maintien un peu roide, cette voix plus haut perchée qu'on ne l'attendait, ce débit aisé, cette propension - difficilement tenue en laisse - à l'autocélébration, cette gestuelle d'orateur professionnel qui rajuste mécaniquement le micro du pouce et de l'index pendant que, de la tête, il regarde alternativement à gauche et à droite avec la régularité d'un essuie-glace bien huilé, pas de doute, l'ancien préfet Bernard Bonnet est en grande forme.
Invité à livrer son témoignage au troisième procès d'Yvan Colonna, le successeur de Claude Érignac, assassiné le 6 février 1998, parvient presque à faire oublier son implication dans la pantalonnade des paillotes incendiées, un an plus tard. Son propos est plus clair que lors de ses précédentes prestations. Que dit-il ? Que le 18 novembre 1998, puis le 11 décembre suivant, il est venu à Paris rencontrer le procureur de la République de l'époque, Jean-Pierre Dintilhac. Il lui a remis des notes selon lesquelles Alain Ferrandi était le chef du commando de tueurs, révélant qu'une tentative avortée - au sujet de laquelle il n'y aura jamais d'enquête approfondie - avait eu lieu quelques semaines avant l'assassinat. Parmi les complices potentiels de M. Ferrandi, le préfet Bonnet citait un Colonna, mais pas Yvan : son frère Stéphane. Le haut fonctionnaire tient ces «tuyaux» d'un informateur, connu sous le pseudonyme de «Corte».
«Je ne connais que des bouts de vérité, admet le témoin. Il est vrai que je n'ai jamais cité le nom d'Yvan Colonna. Mais des convergences rendent crédible sa possible implication. Il avait le profil, pas plus, pas moins.» Sans pouvoir le prouver, le témoin estime que le berger, accusé d'être le tireur de la rue Colonel-d'Ornano, faisait partie du FLNC du secteur Cargèse-Sagone, vivier criminel dans lequel aurait puisé Alain Ferrandi pour constituer le «groupe des anonymes» interpellé en mai 1999, tandis que M. Colonna prend le maquis pour quatre ans.
La déposition de M. Bonnet ressemble à un panier bien garni qui offre à boire à l'accusation et à manger à la défense. Elle arrange l'accusation, car présente l'accusé comme un suspect non négligeable dès la fin de l'année 1998, alors que l'exploitation de la «piste agricole» fait figure de «trop long égarement». Le fait que plusieurs autres révélations de «Corte» sur l'entourage d'Alain Ferrandi aient été validées par la justice donne également du prix à ses dires sur Yvan Colonna.
Mais «Corte» a aussi désigné deux hommes qui seront acquittés en 2006 : les Bastiais Andriuzzi et Castela. Et c'est au tour de la défense de faire son miel des notes Bonnet remises au procureur le 16 novembre 1998. La date importe, car il existe au dossier un procès-verbal de la police antiterroriste daté d'août 1998 et faisant état d'un fait survenu le 6 octobre suivant. Comme les limiers de la DNAT ne passent pas forcément pour des extralucides - ils sont encore sous le charme du «mirage» de la piste agricole, persifle le témoin -, on ne peut que s'étonner. Mais il y a plus intrigant : «Corte» se trompe en chuchotant à l'oreille du préfet Bonnet. Il ne dénonce pas «Castela», mais un «Castola». Or, dans le fameux PV d'août, ce patronyme apparaît également à la place de Castela…
Pour la défense, aucun doute : la DNAT a voulu chiper, en novembre, les conclusions de M. Bonnet, pour en tirer, seule, le profit, et sortir enfin de l'ornière agricole. Un autre fait plaide en faveur de cette thèse : les notes du préfet n'apparaissent nulle part dans le dossier. Le procureur Dintilhac affirme, sous serment, qu'il les a transmises au juge Bruguière. Lequel a toujours protesté du contraire, ce qui fait quelque peu désordre. Le magistrat, surnommé l'«Amiral», est attendu à la barre le 27 mai : il peut d'ores et déjà préparer son ciré, le temps s'annonce à l'orage.
© Le Figaro
En me promenant sur le net, je suis tombé par hasard sur un forum de haute tenue, et plus précisément sur l'article : "Dictature financière et réponses citoyennes" signé Dominique Taddei.
Créé à l’automne 2009 par Marie-Noëlle Acquaviva, Toni Casalonga et Dominique Taddei, le Forum des Citoyens Actifs se propose d’offrir à tous les Balanins un espace citoyen de débats et de propositions.
Il propose, 5 fois par an, un buffet-débat sur un thème concernant la micro-région : démographie, emploi, cohérence de l’espace balanin, foncier, logement, agriculture, etc. ont déjà été abordés.
Mais ces rencontres ne suffisent pas, et le Forum est également un lieu de débat permanent sur Internet.
A découviri à cette adresse : http://fcabalagne.wordpress.com/
17/11/2011
L'initiative rejoint la politique de la direction langue corse à la collectivité territoriale, à savoir favoriser un usage à tous les niveaux de la société insulaire. « Pourquoi pas les animateurs »,a lancé Pierre Ghionga, conseiller territorial chargé du dossier linguistique, considérant l'importance de ces titulaires du Bafa, le brevet d'aptitude à des fonctions bien connues auprès du jeune public, dans les colonies de vacances et autres centres de loisirs. Voilà comment le projet Bafa lingua corsa a été confié à des structures habilitées à délivrer cette qualification.
Le CPIE A Rinascita s'est donc associé à la Falep de Haute-Corse et au Cema de Bastia. « Nous formons entre 50 et 60 personnes par an »,rappelle Fabien Arrighi, directeur de A Rinascita, une association rompue aux sessions d'un Bafa habilité par le ministère de l'Éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative. « C'est une démarche qui complète bien celle des sites scolaires bilingues »,souligne Antoine Feracci, président de A Rinascita. « C'est un rouage important de la politique territoriale en la matière »,ajoute Pierre Ghionga.
A Casa di a Lingua un outil fédérateur
Être corsophone, à l'écrit comme à l'oral, telle est la condition prérequise pour suivre cette première session théorique de base. « Il ne s'agit pas d'apprendre la langue,précise Fabien Arrighi,mais de transposer son usage dans la fonction d'animateur ». 12 stagiaires âgés de 17 ans au moins seront sélectionnés pour retrouver, du 18 au 26 novembre prochains, dans les locaux de A Rinascita, l'encadrement de la formation, lequel sera renforcé par des intervenants possédant les compétences requises pour donner au brevet toute sa dimension linguistique. Le programme prévoit également deux journées d'immersion sur la commune de Moltifao.
Au-delà du lancement de ce projet, A Rinascita devrait prochainement franchir un autre cap en tant qu'association au service de la diffusion de la langue corse. Elle a, en effet, fait acte de candidature pour accueillir A Casa di a Lingua. « C'est un outil qui rejoint la politique de territorialisation,explique Pierre Ghionga. Nous nous efforçons d'installer sur chacun des neuf territoires, des structures référentes pour qu'elles jouent un rôle fédérateur dans le domaine de la langue corse. La première de ces Case di a Lingua va prochainement voir le jour en Balagne ».À Corte, ce même outil a donc toutes les chances de devenir un nouveau service du CPIE A Rinascita.
Pour en revenir à la prochaine session Bafa, les intéressés sont priés d'engager leur démarche d'inscription en se connectant au site suivant : http : www.jeunes.gouv.fr/bafa-bafd [1].
URL source: http://www.corsematin.com/article/academie-de-corse/le-premier-bafa-en-langue-corse-la-semaine-prochaine
L'histoire d'E Case di a lingua commence en 2007, lorsque l'assemblée de Corse propose leur création sur tout le territoire, dans le cadre du Plan de développement de la langue. À travers elles, l'objectif est de promouvoir la langue et la culture corse par des activités culturelles telles que chant, théâtre ou jeux. Le 19 janvier 2011, A Casa balanina di a lingua est portée sur les fonts baptismaux par différents acteurs culturels balanins au Spaziu de L'Île-Rousse. C'est la première de Corse.
Dix mois plus tard, les représentants du centre Voce, du Svegliu Calvese et de L'Aria ont mis sur pied une manifestation appelée Parolle offerte. Elle marquera la première action de terrain de A Casa balanina di a lingua les 11, 12 et 13 novembre.
Ouverts à tous corsophones ou non
Parolle offerte,se décline donc en trois journées. Et sur trois sites : vendredi à Pigna, samedi à Pioggiola et dimanche à Calvi. Durant celles-ci, ateliers, rencontres et échanges sur différents thèmes abordés in lingua nustrale permettront de pratiquer le Corse en s'amusant. « L'objectif est le multilinguisme, remarque Toni Casalonga, du centre culturel Voce. Toutes les langues sont donc les bienvenues. »Si les corsophones sont essentiels à ces rencontres, notamment pour enrichir le vocabulaire, pour les autres, pas de complexe à avoir. Les personnes pratiquant peu ou ne parlant pas le corse sont aussi invitées à participer. Car le but est de partager la richesse de la langue et de la culture insulaires. Non de promulguer une élite hermétique. Et les représentants sont tous d'accord : « Il faut faire tomber les blocages vis-à-vis de la langue. » Trop de personnes en Corse n'osent plus l'utiliser de peur de « mal parler », de faire des fautes, d'employer des termes inappropriés. « Pourquoi, vous ne fréquentez que des gens qui s'expriment dans un français irréprochable ? », souligne avec beaucoup de finesse Dominique Bianconi, du Svegliu Calvese. Bien vu. « Par le jeu, je suis certain que les gens parleront corse », remarque Serges Lipszyc, directeur de L'Aria.
Une démarche d'ouverture qui - les acteurs de terrain l'espèrent - sera suivie par de nombreuses autres manifestations. Pour aborder le corse autour de l'échange. Et de la rencontre.
Savoir +
A Casa balanina di a lingua est sur facebook sous l'appellation : Casa Balanina.
La manifestation a été organisée en partenariat avec la CTC.
Étaient présents, pour le Svegliu Calvese : Marie-Line Cardi et Dominique Bianconi ; pour L'Aria : Marie-Laure Poveda et Serge Lipszyc ; pour le centre culturel Voce : Elia Vallecalle et Toni Casalonga.
20/05/2011
Par Stéphane Durand-Souffland
18/05/2011
Le successeur de Claude Érignac avait remis des notes au procureur. Elles ne figurent pas au dossier. Les explications du juge Bruguière sont très attendues.
Ce maintien un peu roide, cette voix plus haut perchée qu’on ne l’attendait, ce débit aisé, cette propension - difficilement tenue en laisse - à l’autocélébration, cette gestuelle d’orateur professionnel qui rajuste mécaniquement le micro du pouce et de l’index pendant que, de la tête, il regarde alternativement à gauche et à droite avec la régularité d’un essuie-glace bien huilé, pas de doute, l’ancien préfet Bernard Bonnet est en grande forme.
Invité à livrer son témoignage au troisième procès d’Yvan Colonna, le successeur de Claude Érignac, assassiné le 6 février 1998, parvient presque à faire oublier son implication dans la pantalonnade des paillotes incendiées, un an plus tard. Son propos est plus clair que lors de ses précédentes prestations. Que dit-il ? Que le 18 novembre 1998, puis le 11 décembre suivant, il est venu à Paris rencontrer le procureur de la République de l’époque, Jean-Pierre Dintilhac. Il lui a remis des notes selon lesquelles Alain Ferrandi était le chef du commando de tueurs, révélant qu’une tentative avortée - au sujet de laquelle il n’y aura jamais d’enquête approfondie - avait eu lieu quelques semaines avant l’assassinat. Parmi les complices potentiels de M. Ferrandi, le préfet Bonnet citait un Colonna, mais pas Yvan : son frère Stéphane. Le haut fonctionnaire tient ces «tuyaux» d’un informateur, connu sous le pseudonyme de «Corte».
«Je ne connais que des bouts de vérité, admet le témoin. Il est vrai que je n’ai jamais cité le nom d’Yvan Colonna. Mais des convergences rendent crédible sa possible implication. Il avait le profil, pas plus, pas moins.» Sans pouvoir le prouver, le témoin estime que le berger, accusé d’être le tireur de la rue Colonel-d’Ornano, faisait partie du FLNC du secteur Cargèse-Sagone, vivier criminel dans lequel aurait puisé Alain Ferrandi pour constituer le «groupe des anonymes» interpellé en mai 1999, tandis que M. Colonna prend le maquis pour quatre ans.
La déposition de M. Bonnet ressemble à un panier bien garni qui offre à boire à l’accusation et à manger à la défense. Elle arrange l’accusation, car présente l’accusé comme un suspect non négligeable dès la fin de l’année 1998, alors que l’exploitation de la «piste agricole» fait figure de «trop long égarement». Le fait que plusieurs autres révélations de «Corte» sur l’entourage d’Alain Ferrandi aient été validées par la justice donne également du prix à ses dires sur Yvan Colonna.
Mais «Corte» a aussi désigné deux hommes qui seront acquittés en 2006 : les Bastiais Andriuzzi et Castela. Et c’est au tour de la défense de faire son miel des notes Bonnet remises au procureur le 16 novembre 1998. La date importe, car il existe au dossier un procès-verbal de la police antiterroriste daté d’août 1998 et faisant état d’un fait survenu le 6 octobre suivant. Comme les limiers de la DNAT ne passent pas forcément pour des extralucides - ils sont encore sous le charme du «mirage» de la piste agricole, persifle le témoin -, on ne peut que s’étonner. Mais il y a plus intrigant : «Corte» se trompe en chuchotant à l’oreille du préfet Bonnet. Il ne dénonce pas «Castela», mais un «Castola». Or, dans le fameux PV d’août, ce patronyme apparaît également à la place de Castela…
Pour la défense, aucun doute : la DNAT a voulu chiper, en novembre, les conclusions de M. Bonnet, pour en tirer, seule, le profit, et sortir enfin de l’ornière agricole. Un autre fait plaide en faveur de cette thèse : les notes du préfet n’apparaissent nulle part dans le dossier. Le procureur Dintilhac affirme, sous serment, qu’il les a transmises au juge Bruguière. Lequel a toujours protesté du contraire, ce qui fait quelque peu désordre. Le magistrat, surnommé l’«Amiral», est attendu à la barre le 27 mai : il peut d’ores et déjà préparer son ciré, le temps s’annonce à l’orage.
© Le Figaro
Par Stéphane Durand-Souffland
17/05/2011 |
Roger Marion a affronté le tir nouri des avocats sans remettre en cause les enquêtes de ses services.
Si Roger Marion enseignait les mathématiques, il pourrait se vanter d’avoir une approche révolutionnaire de sa science et proposerait des équations insolites. Par exemple: chargé de résoudre l’assassinat du préfet de Corse, vous êtes persuadé que les commanditaires se trouvent dans le «milieu agricole subversif», vous arrêtez finalement un professeur agrégé de géographie et un de ses collègues certifié en maths qui seront acquittés, expliquez en quoi votre raisonnement est imparable.
Témoin à la cour d’assises devant laquelle comparaît Yvan Colonna, Roger Marion, 64 ans, fut, à partir du 6 février 1998, le principal responsable de la traque des tueurs d’Ajaccio, en tant que chef de la Division nationale antiterroriste. Il dépose à cette barre pour la cinquième fois, et cette routine confère à celui que ses hommes surnommaient «Eagle 4» (pour «y gueule fort») une sorte de détachement suprême. Il a toujours cette gestuelle pittoresque, faite de prestes génuflexions, de balancements d’arrière en avant, de mouvements de mains virevoltants, mais il contient parfaitement son tempérament éruptif pendant les cinq heures qu’il passe au micro.
Le préfet Marion estime qu’il a bien fait de suivre immédiatement après le crime la «piste agricole» puisque c’est à travers elle que ses troupes arriveront aux six individus définitivement condamnés, dont certains désigneront Yvan Colonna comme étant le tireur. Ces aveux «ont été recueillis dans le respect de la déontologie policière», affirme le témoin. Peu lui importe que des dizaines de personnes aient été interpellées à tort et restent, à ce jour, mises en examen dans le volet agricole - une manière de jachère judiciaire.
Des souvenirs qui fâchent
M. Marion ne manque pas d’arguments pour rappeler comment la DNAT est remontée à MM. Alessandri, Maranelli et Ferrandi, trahis par leurs téléphones portables. Selon lui, quand il apprend que ses amis sont placés en garde à vue, le 21 mai 1999, Yvan Colonna, certes, ne s’enfuit pas immédiatement dans le maquis (l’intéressé préfère l’expression «prendre du recul»), mais «il prend ses dispositions», retirant une forte somme à la banque. Plus que les autres années, M. Marion cite le successeur de Claude Erignac, Bernard Bonnet, dont il fait en quelque sorte son préfet-sombrero. Pourtant, il prétend n’avoir consulté qu’en janvier 1999 ses fameuses notes, fruit d’une enquête parallèle confiée à la gendarmerie et envoyées à Paris fin novembre 1998.
La défense part à l’assaut. Mais le rusé policier est un as de l’esquive. En tant que patron de l’enquête, il est censé tout savoir. Mais là, comme un lieutenant stagiaire, il répond qu’il ne peut utilement témoigner que sur les actes qu’il a lui-même accomplis. Surtout, il se coupe sur certains points embarrassants. Les Renseignements généraux avaient-il placé une balise sous la voiture d’Yvan Colonna fin 1998 pour surveiller ses déplacements - ce qui signifierait que les soupçons sur le berger de Cargèse existaient avant mai 1999? Le témoin refuse de répondre, ou répond qu’il ne sait pas, ou répond à côté. Autre point flou: Yvan Colonna a-t-il été placé sur écoutes par les mêmes RG? Le témoin biaise, réfute, admet, perd la mémoire... Face à lui, les cinq conseils de l’accusé attaquent. Me Dupond-Moretti tournicote, énumérant les souvenirs qui fâchent sans faire donner l’artillerie lourde, Me Dehapiot oppose son cartésianisme à la logique baroque de M. Marion, Me Garbarini ne pose qu’une question - mais une bonne -, Me Simeoni s’enfièvre, Me Antoine Sollacaro s’emporte («vous êtes un manipulateur et un pitre»). M. Marion oscille, plie les genoux, rajuste machinalement son veston, mais ne rompt pas.
Il est tout de même troublant que des responsables policiers de ce rang soient, quand cela les arrange, aussi fuyants devant une cour d’assises, dans un tel dossier qui exigerait des dépositions irréprochables. Leur façon à eux de «prendre du recul»?
© Le Figaro
Par Stéphane Durand-Souffland
13/05/2011 |
Vif échange entre Me Dupond-Moretti, défenseur du berger corse, et Me Baudelot, conseil de Mme Érignac.
La deuxième semaine du procès d’Yvan Colonna s’achève dans un climat de vive tension. Alors que Me Dupond-Moretti, conseil de l’accusé, vient de questionner longuement un témoin de choix, ancien chef du SRPJ d’Ajaccio, Me Yves Baudelot, conseil de la famille du préfet assassiné, s’adresse à la cour : «Mme Érignac trouve cela indigne, insupportable. Le procès des policiers et des juges n’est pas celui que vous avez à juger». C’est la première fois, depuis 2007, que Dominique Érignac intervient de la sorte à l’audience. Me Dupond-Moretti réplique : «Mme Érignac a des droits, mais pas tous les droits. J’ai de la compassion pour ce qu’elle vit, mais si la contestation des méthodes d’enquête est interdite au nom de la compassion, je quitte le procès».
Au tour de l’avocate générale, Annie Grenier, régulièrement asticotée pour son rôle présumé au sein du cabinet Pasqua à l’Intérieur (1993-1995), où des tractations avaient lieu avec des nationalistes corses «durs» : «En tant que conseiller technique, je suivais l’élaboration des textes de loi, c’est tout. Je n’ai jamais servi le café à François Santoni (ex-chef du FLNC-Canal historique, qui le prétend dans un livre, ndlr), ni participé à des réunions intimes avec des chefs nationalistes». Son collègue, Alexandre Plantevin, jaillit pour la conforter et charge Me Dupond-Moretti, faisant montre d’un tempérament singulièrement fougueux. Le président Stephan, d’un calme olympien, suspend l’audience pour apaiser les esprits, mais un incident éclate alors entre Mes Garbarini (défense) et Courcelle-Labrousse (partie civile), deux avocats d’ordinaire extrêmement courtois qu’il convient à cet instant de séparer, par prudence.
À l’origine de cette surchauffe passagère : le témoignage de Demetrius Dragacci. Aujourd’hui retraité, l’ex-directeur du SRPJ d’Ajaccio, qui sera évincé par son rival de la division antiterroriste, ressemble à Anthony Quinn bronzé. Il n’a pas démérité, loin de là : c’est lui qui a, notamment, l’idée lumineuse, au soir du 6 février 1998, de faire saisir la liste de tous les appels téléphoniques passés en ville, ce qui conduira à l’interpellation du commando. Mais Me Dupond-Moretti l’oblige à faire visiter à la cour les coulisses peu reluisantes de l’enquête : rivalités policières de caniveau, création d’un «dossier-poubelle» - l’expression est du témoin -, sous la forme d’une procédure-bis destinée à ratisser plus large sans être gêné par la défense qui n’y a pas accès, coups tordus en tout genre aux forts relents d’égout judiciaire… M. Dragacci jouit d’un talent particulier : une fois qu’il a décliné son état civil, que tout le monde saisit parfaitement, il ne répond clairement à aucune question mais parle sans discontinuer, ce qui énerve à la fois ceux qui pensent que le sujet importe (la défense) et ceux qui le trouvent hors de propos (le camp d’en face). D’où les éclats de voix de fin d’après-midi.
En début de soirée vendredi, la défense dépose officiellement une demande de reconstitution. Encore un sujet qui fâche. Reprise des débats lundi.
© Le Figaro
Même motif, même punition. A l’’aube de ce troisième procès d’Yvan Colonna, il flotte comme un air de déjà-vu. Celui d’’un procès un peu «joué d’avance », avec un accusé désigné en 1999 comme le tireur du commando Erignac et présenté comme coupable depuis lors, y compris par le président de la République lorsqu’il n’était encore que ministre de l’Intérieur.
Comme les deux fois précédentes, la grande salle d’’assises du palais de justice de Paris reste immuable, avec ses boiseries anciennes et ses fresques murales. Immuable également le « cérémonial » de l’arrivée des parties civiles et des proches de l’accusé dans les couloirs et la salle des pas perdus. Et récurrent le retard pris dès le premier jour d’audience sur le calendrier élaboré. Avec une tâche compliquée pour le président Hervé Stéphan : celle de courir après le temps.
Dans ces conditions, il restait une solution à la défense d’Yvan Colonna : imprimer son propre rythme. Ce qu’’elle a fait avant même l’’ouverture des débats proprement dits par la voix de Me Philippe Dehapiot. Dès la fin de l’appel des témoins, le défenseur déposait des conclusions sur quatre questions.
Les deux premières concernaient la nature même de la cour d’’assises spécialement composée qui prend ses décisions à la majorité simple (alors que les cours d’assises classiques fondent leur verdict de culpabilité sur la majorité des deux tiers). Et sur le fait que cette juridiction, bien que formée uniquement de magistrats, n’est pas tenue de motiver ses décisions en droit. « Est-ce que votre cour va se satisfaire de vieilles dispositions ? », a demandé l’avocat en se fondant sur une décision du Conseil constitutionnel du 1er avril 2011.
La troisième question résulte de l’’annulation du procès en appel par la Cour de cassation le 30 juin dernier. La défense d’Yvan Colonna demande que le procès-verbal de l’audience ne soit pas versé au débat afin de repartir totalement à zéro.
La quatrième, enfin, était attendue depuis les décisions prises le 15 avril dernier par la Cour de cassation qui a annulé quatre procédures au motif que l’avocat n’était pas présent lors des gardes à vue. Estimant que l’actualité a connu, ces derniers mois , « une révolution juridique », Me Dehapiot demande à la cour d’en tirer les conséquences.
Immédiatement, Me Yves Baudelot qui a rejoint les conseils de la famille Erignac s’’étonnait de ces conclusions tardives et demandait un délai pour y répondre de manière argumentée. Me Benoît Chabert, pour l’Etat y souscrivait également. Tout comme l’avocat général Annie Grenier. Tous ont demandé une suspension jusqu’à ce matin.
La lettre de la loi et les principes
La parole étant à nouveau à la défense, c’’est Me Eric Dupont Moretti qui a sonné la première charge. S’’étonnant que l’’on s’’étonne : « Ces décisions du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation nous les connaissons tous. Et en tant qu’avocats nous nous en sommes tous félicités... ».
Entrant immédiatement dans le dossier, il a rappelé la garde à vue cauchemardesque de Stella Castela, Il a rappelé que, dans cette affaire un homme avait eu le tympan crevé lors de sa garde à vue. En concédant que dans ce dossier « s’il n’y a plus les gardes à vue, il ne reste plus rien ».
Il était relayé par Me Gilles Simeoni qui insistait : « Nous ne sommes pas dans l’’abstraction juridique. C’’est l’’application directe des principes qui sont la pierre d’angle de notre démocratie.»
En conclusion de cette première charge de la défense, Me Antoine Sollacaro ironisait : « Comment les professionnels du droit que nous sommes tous pouvaient-ils ignorer que nous poserions ces questions ? Demander un délai c’est tout de même un sacré manque de préparation...»
Après cette première passe d’’armes, le président a suspendu l’’audience jusqu’à 18 heures. A la reprise des débats, c’est Me Yves Baudelot qui a argumenté point par point pour l’ensemble des parties civiles. Il n’a pas totalement exclu le principe d’un verdict motivé, en précisant que la chambre criminelle de la Cour de cassation allait statuer d’ici à la fin de la semaine sur ce point. Il a concédé que les procès-verbaux du procès annulés en appel pouvaient être ôtés du dossier.
Concernant les gardes à vue sans avocat, il a rappelé que, dans cette affaire, elles remontent à 1999 et que la Cour de cassation avait motivé sa décision à partir de celles prises par la Cour européenne des droits de l’homme en 2008 et 2009.
« Je me réjouis que l’’avocat puisse désormais être présent en garde à vue. Mais je ne suis pas d’’accord pour dire que toutes les gardes à vue antérieures devraient être annulées... » Un point de vue plus restrictif encore était abordé par l’avocate générale Annie Grenier. Qui, dans un plaidoyer pour la justice antiterroriste, a clamé : « Il faut être un peu cohérent et ne pas dynamiter notre procédure ! », avant de considérer que cette juridiction offre « toutes les garanties requises », à la défense.
Froidement, Me Philippe Dehapiot a répondu que s’’il considérait comme « respectable » la position des parties civiles, il n’’avait « pas trouvé un élément pertinent », dans celle du parquet. La cour rendra sa décision sur l’’ensemble de ces questions ce matin à l’’ouverture des débats. Mais le ton est donné. Et le président qui a systématiquement fait en sorte de mener sereinement l’audience risque d’avoir une tâche bien difficile dans les semaines à venir.
Isabelle Luccioni (Corse Matin, mardi 3 mai 2011
La revue Fora ! est en mutation. Elle avait annoncé sa disparition. Elle est toujours là. Et même si, entre banlieues, Arabes méprisés, blessures du paysage, elle ne donne pas de la Corse une image toujours souriante, la publication est plus fraîche et joyeuse que jamais. Longue vie à elle.
Comment va Fora ? Pour une fois, le point d’interrogation remplaçait celui d’exclamation. Comment va Fora ? demandais-je à son animatrice-directrice de la publication-rédactrice en chef, Vanina Bernard-Leoni.
Elle va bien, me répondit la jeune femme, mais la revue va s’arrêter. Nous avons exploré diverses facettes de l’identité de la Corse, en la rapprochant d’autres univers avec lesquels l’île a des ressemblances, des dissemblances. Nous avons examiné les liens de la Corse avec d’autres îles, des pays latins, l’Italie, l’Afrique du Nord, des minorités… Voilà. Nous voulions le faire. Nous l’avons fait. Ce fut un beau geste, un bel acte culturel, une aventure passionnante. Le résultat a été à la hauteur de nos espérances. Maintenant, pour l’avenir, nous voulons éviter la routine. Il faut que ça s’arrête. Sans doute commencerons-nous autre chose. Probablement sous une autre forme, avec un autre nom…
Réponse compréhensible, exemplaire, qui forçait le respect, mais qui ne gommait pas une désagréable mélancolie. On avait fini par s’y habituer, à cette petite revue paraissant tous les six mois. On avait fini par l’aimer, sa maquette originale, ses textes provocateurs, ses images décalées, son regard tendre et acide sur la réalité insulaire et sur le monde. Et puis cette promesse éditoriale, qui avait la force d’une devise – « pour vous dépayser sans vous déraciner » –, on la trouvait exactement adaptée aux attentes de la vie intellectuelle insulaire, et on trouvait que l’équipe de rédaction s’y soumettait toujours avec une grande souplesse. Bref, sinon une histoire d’amour, du moins une rencontre était née. Et patatras ! Tout se cassait la figure. Adieu veau, cochon, couvée ! La jeune revue repliait son élégance, son air de ne pas y toucher, ses angles et ses remarques inattendus, et elle nous abandonnait à notre conformisme. Qu’allions-nous devenir ?
Nous attendions. Nous espérions.
Et puis l’hiver est arrivé, puis le printemps s’est annoncé, et avec ces saisons une nouvelle livraison de Fora ! – qui avait retrouvé son point d’exclamation. Un numéro, assure le comité de rédaction, qui est « à mi-chemin ». A certains égards, il est bien le n° 8 de l’ancienne revue. Corse et banlieue, deux périphéries, sont mises en parallèle, scrutées, interrogées. Et les coups d’œil, sérieux, iconoclastes, amusants, ressemblent à ceux qu’on appréciait. Mais le numéro ne se limite pas à cela. D’autres thèmes, d’autres regards, d’autres rapprochements ont fait leur irruption dans cette livraison.
Le comité de rédaction présente ainsi le nouveau bébé :
Sans qu’on la débaptise, Fora ! – « dehors », vous vous rappelez ? – s’autorise à « sortir » de son pré carré, « sortir » de ses gonds, s’échapper. Certes, la pensée transculturelle nous menait – du moins était-ce le projet – à l’analyse du fait insulaire contemporain, mais nous avons décidé de parfois nous passer de truchement pour regarder en face les transformations de notre société. Fora ne désigne plus seulement l’ailleurs-miroir, détour ou même échappatoire. Fora veut mieux montrer l’ici, ses à-côtés, des bas-côtés. Ses bords de routes, ses marges, sa banalité. Péri-urbanité. Rurbanité. Suburbia. Architecture commerciale. Transit. Chantier. Gris ciment. Infinie mobilité. Déterritorialisation. Fora ! voudrait penser ce c’est qu’habiter en Corse aujourd’hui. Et reterritorialiser.
Et pour illustrer ce projet, une collection de contributions qui montrent la société corse d’aujourd’hui. On pense à ce qu’avait écrit Jérôme Ferrari dans ses romans « corses », aux livres de Marc Biancarelli. On est assez loin de Colomba, de Mérimée, de Tino Rossi, assez loin d’une image complaisante et poussiéreuse d’une Corse mythifiée. La Corse qu’invitent à découvrir Fabien Abraini, Marceddu Jureczek, François Farellacci, Max Ristori, Fabien Danesi – pour citer quelques-uns des contributeurs de ce numéro – est assez loin du paradis pour touristes que vantent les brochures sur papier glacé. C’est une terre en chantier, imparfaite, avec ses blessures, ses misères – sa misère fondamentale, qui est consumériste et moderne, qui ne rechigne pas plus à polluer les paysages qu’à indignement exploiter les Arabes, les pauvres, les autres –, terre de laideur autant qu’île de beauté. Sur le plan moral comme dans la géographie. Parce que la vie est ainsi, le siècle est ainsi, et que la Corse est vivante, dans son temps, dans son monde, et n’a pas encore trouvé les voies et moyens d’échapper à cette fatalité.
Elle est stimulante, cette petite revue. Son ton est agréable, comme son format, sa curiosité, sa vivacité. Pour la suite – pour un numéro neuf tout neuf, souhaite-t-elle –, elle lance des appels à projets, à idées, à suggestions. Dépêchons-nous. Avec Fora !, l’avenir est déjà là.
Revue Fora ! La Corse vers le monde, n° 8, Hiver-printemps 2011, 7,50 €
Robert Colonna d’Istria dans Corsica n°139 - avril 2011
Corse Matin, 22/03/2011
FEVRIER 2011
Alors, pourquoi un n°7½ et pas un simple n°8 ? La réponse est ici.
Et avant de vous plonger dans ce nouveau numéro, vous pouvez évidemment faire un petit tour du propriétaire en consultant le sommaire.
Le premier film de fiction sur l’affaire Erignac est diffusé le 25 février à 20 h 40 sur Arte. Réalisé par le cinéaste corse Antoine Santana, ce drame a pour titre Main basse sur une île. Il a été tourné au printemps dernier à Ajaccio et dans les villages de Coti-Chiavari et Bastelica, en Corse-du-Sud.
Réalisé par Antoine Santana, il est interpréta par François Berléand mais également Alexandre Steiger, Héléna Soubeyrand, Jean-Michel Portal et plusieurs comédiens corses comme Didier Ferrari, Lionel Tavera et Jean-Emmanuel Pagni.
Antoine Santana n’est pas un inconnu des cinéphiles. Après avoir été longtemps l’assistant de Benoît Jacquot, il a mis en scène deux longs-métrages : Un moment de bonheur qui représenta la France en 2002 à la Mostra de Venise et La ravisseuse, un récit historique dont l’héroïne était l’actrice Isild Le Besco.
Entre manipulations et trahisons
Pour son troisième opus, Antoine Santana a donc décidé de s’appuyer sur un contexte corse très réaliste afin de relater à sa manière la terrible affaire Erignac, du nom du préfet de Corse assassiné à Ajaccio le 6 février 1998. « Mon film est adapté du livre de Jean-Paul Brighelli intitulé Viande froide et publié aux éditions Ramsay en 2003, nous a confié Antoine Santana. J’ai tout mis en oeuvre pour que mon scénario ne soit pas une simple chronique judiciaire. Les faits se déroulent en Corse mais auraient pu se produire n’importe où. En France comme ailleurs, on peut trouver en effet ce type de manipulations et de trahisons au nom de l’État, du prétendu débat politique ou tout simplement des réalités financières en jeu ». Et le cinéaste d’ajouter : « Dans mon film, l’objectif du pouvoir politique consiste à créer les conditions de l’assassinat de l’un de ses représentants puis de chercher à humilier et soumettre toute une population pour lui faire expier ce crime ».
Déstabiliser le pouvoir en place
Dans Main basse sur une île, François Berléand joue le rôle d’un commissaire de police à la retraite qui raconte à son biographe comment il fut contacté par un homme politique afin de monter une opération devant déstabiliser le pouvoir en place en Corse. Le but étant de mettre sur pied un faux attentat contre le préfet de Région. Le problème est que ce commissaire sera doublé par un agent des services spéciaux et que le faux attentat deviendra malheureusement un véritable meurtre. Financé par ADR Productions et la chaîne franco-allemande Arte, ce film dont la bande musicale est signée Olivier Daviaud dure 90 minutes. Avant sa diffusion télévisée, il a été présenté à trois reprises en avant-première dans l’île, à Porto-Vecchio, Ajaccio et Bastia il y a quelques semaines. Le succès fut toujours au rendez-vous.
Antoine Santana qui, au début de ce mois de février présidait le Jury du Festival italien de Bastia, est sur le point de tourner une nouvelle fiction. Il s’agit d’une adaptation du livre d’Andrée Chedid L’enfant multiple. Les prises de vue auront lieu en juin prochain à Paris et au Liban. L’un des rôles principaux devrait être tenu par Éric Cantona qui délaisse de plus en plus les terrains de beach-foot pour les plateaux de cinéma.
(Source : Corse Matin du 25 février 2011)
JANVIER 2011
Haut de page Accueil Page précédente En savoir plus Mentions légales
Les archives de la page :
2018
2017
2016
2015
2014
2013
2012
2011
2010
2009
2008
2007
2006