Melody Gardot est née le 2 février 1985 dans l’état du New Jersey, aux États-Unis. Elle grandit à Philadelphie, sur la côte nord-est. C'est là qu'elle est victime en 2003 d’un grave accident de vélo. Après avoir passé une année entière à l’hôpital, elle se remet petit à petit grâce à la musicothérapie. Elle apprend alors à jouer de la guitare et commence à composer des chansons.
Elle commercialise son premier maxi en 2005, intitulé Some Lessons - The Bedroom Sessions, qui comprend la plupart des morceaux qu’elle a écrits lors de sa convalescence. La radio locale WXPN l'encourage à façonner une maquette, rapidement reprise par le label Universal Records.
Son premier album, Worrisome Heart, sort en 2006. Son deuxième album studio, My One and Only Thrill (2009), est produit par Larry Klein.
Musicalement, son style mélange les influences du jazz vocal, du folk, du fado et de la bossa nova. Elle dit être influencée aussi bien par des artistes de blues ou de jazz que par des artistes de folk, de pop, de rock ou issus du répertoire de la musique classique, citant notamment les noms de Billie Holiday, Bessie Smith, Judy Garland, Janis Joplin, Helen Merrill, Miles Davis, Duke Ellington ou Georges Gershwin.
On
la compare déjà à Norah Jones ou Diana Krall, ses
performances pourraient également évoquer Peggy Lee, voire Tom Waits...
Cette jeune chanteuse au vibrato reconnaissable a un style très
personnel, entre jazz et blues.
LE MONDE | 11.05.09 |
A l'âge de 19 ans, Melody Gardot, jolie fille mince
comme il y en a tant, tombe victime d'un terrible d'accident. Vélo
contre 4 × 4 dans les rues de Philadelphie, Melody Gardot, née en 1985,
ne fait pas le poids. Coma profond, polytraumatismes avec lésions
cérébrales aggravées, dix-huit mois de lit à télécommande, elle
expérimente le grand âge et la mort. Pour revenir à la vie, un médecin
suggère la musicothérapie. Bloquée sur le dos, Melody Gardot ne peut
gratouiller que sa guitare. Elle était pianiste de bar : "Petite,
je chantais, mais personne ne voulait m'écouter ! Je passe une audition
pour entrer dans une chorale, on me refuse. A croire que ma voix était
horrible...", explique-t-elle, quelques jours avant son
concert
parisien à l'Alhambra, le 13 mai.
Sa voix parlée est douce, femme, enfant, aussi vive qu'une sauterelle,
timbrée jusqu'au baryton. L'allure générale, d'une star, brushing trois
fois par jour dans un style hésitant entre Catherine Deneuve et les
personnages de la série télévisée "Dallas", couleur digne de Van Gogh,
minceur préraphaélite, verres fumés, plus une nouvelle canne nacrée
dont elle est, à juste titre, très fière.
La canne tient l'équilibre. Depuis l'accident, les verres la protègent d'une hypersensibilité au soleil qu'elle aime si violemment. Sur son lit de douleur, elle enregistrait de petites chansons. Un copain en balance une sur Internet, succès mondial. Melody Gardot s'en irrite, mais en profite pour s'entourer. Vince Mendoza, grand arrangeur de Los Angeles, orchestre son nouvel album, paru fin avril, My One and Only Thrill (Verve/Universal Music) : "Je voulais quelqu'un de la stature de Gil Evans. Il a disparu, malheureusement. Vince Mendoza est très éclectique, très sensible, il laisse venir la musique." Et ces onomatopées qu'on assimile au scat ? "Non, je me sers de la langue des bébés, la langue d'avant le langage."
"J'AI BESOIN DE ME TESTER"
En scène, fascinante de précision et de look (lunettes noires, crinière, canne, talons aiguilles, rouge baiser), elle commence par une chanson a cappella : "Je n'en fais pas une règle, mais souvent, j'ai besoin de me lancer ainsi : c'est pour me tester, tester le public et le lieu. J'attaque avec un spiritual, No More My Lord, qu'Alan Lomax, l'ethnomusicologue, avait fait enregistrer par une femme en prison. Je me retrouve seule, nue, et je vois loin, comme un marin met au point sa longue-vue." Geste à l'appui.
Ce n'est pas du jazz, mais si le jazz d'aujourd'hui atteignait ce feeling tous les soirs, on n'en serait pas là. Depuis Berlin en mai 2008, où nous l'avions vue, pas mal de détails ont changé : "Je n'ai plus besoin de me battre avec mon corps. Ma voix ne me fait plus souffrir, et mes oreilles entendent davantage : plus de cordes, plus de tubas, plus de trombone."
En dehors du jazz, de Radiohead, et de la musique brésilienne, qu'aime-t-elle ? "Le tango. C'est une merveille. Je souffre de vertige cinétique. Voilà pourquoi, en scène, je m'agrippe au micro. Plus la canne. Mais dans le tango, vous voyez, quand vous vous tenez comme ça, allez, vous poussez votre partenaire, de sorte que, même si je sens le vertige arriver, sa main ferme dans mon dos fait que je ne tombe pas. Alors, je peux danser..." Expérience faite. Sur l'album, on l'entend rire. Dans la vie, aussi.
Francis Marmande
Source : Le Monde - Article paru dans l'édition du 12.05.09
La vie et l'amour en rhythm'n blues. Avec pugnacité mais sans illusions. Melody Gardot s'affermit et s'affirme en véritable crooneuse.
En trois albums, chacun plus réussi que le précédent, Melody Gardot s'est affirmée en chanteuse de la trempe des plus grandes parce qu'elle n'y mettait pas seulement une séduction irrésistible mais qu'elle développait une totale exigence artistique. Melody est de l'espèce des crooners, comme Ella Fitzgerald ou Marilyn Monroe. Dans My one and only thrill, elle enveloppait sa sensualité de satins pop-jazz ; dans The Absence, elle se drapait avec volupté et exubérance dans les couleurs latines. La voici à présent éprise d'un rhythm'n'blues moderne, toute féminité épanouie, voix ayant gagné en muscle autant qu'en chair, sensibilité affermie de soul sister, femme d'abord, avec grandeur et pugnacité. Non pas contre les hommes, ni même « tout contre » (Sacha Guitry), mais avec eux comme avec elles. Currency of man, traduisons : la monnaie de l'homme. Les nouvelles chansons de Gardot traitent de la vie et de l'amour, sans illusions, sans rejet non plus, avec une intelligence plongée roidement dans le réel. Car elle est douée côté paroles, notre star. On écoute Preacherman, sur le racisme de toujours, comme jadis Strange Fruit par Billie Holiday. Côté musique, elle recourt ici encore à Larry Klein, producteur notamment de Joni Mitchell, Tracy Chapman, Madeleine Peyroux, pour concrétiser ce grand projet : donner en chansons, avec des sons d'aujourd'hui dans des décors d'hier, la BO d'un film qui pourrait s'appeler « Est-ce ainsi que les hommes vivent ? » (Aragon, chanté par Léo Ferré). La version courte comprend dix titres, la longue, « The Artist's Cut », quinze. Et l'on hésiterait à parler de chef-d'oeuvre ? — Michel Contat
Le 09 février 2018 Melody Gardot sort « Live in Europe », un double album conçu comme un remerciement aux publics
de ses concerts. Enregistré entre 2012 et 2016 en Europe, il s’agit de son premier album live. Une carte postale de ses tournées
à travers l’Europe.
Installée à Paris depuis peu, la chanteuse Melody Gardot l’assure, le double album « Live in Europe »
représente pour elle plus qu’une compilation. Elle a en effet écouté elle-même les enregistrements de plus de
300 concerts captés entre 2012 et 2016 sur les scènes d’Amsterdam, Barcelone, Bergen, Lisbonne, Londres, Paris, Utrecht, Vienne et Zürich.
Après avoir analysé, disséqué chaque solo, chaque phrase, chaque note, elle a retenu les 17 moments qui lui
ont semblé les plus porteurs d’émotion, de sensibilité, tant en ce qui concerne ses interprétations que
les réactions et échanges avec le public. Elle confie « la raison d’être de ce projet : le » sentiment
«, la nostalgie, le souvenir. L’idée est de montrer ce qui se passe en concert. Car, en concert, il n’y a qu’une chose qui compte :
le cœur. »
Au fil des ans on a vu Melody Gardot quitter petit à petit le fond de la scène où elle se tenait à distance
du public. Ainsi lors de son concert du 02 juillet 2015 dans le cadre de « Jazz Vienne », on l’a vue habiter la scène
sans restriction et entretenir une relation très proximale et chaleureuse avec le public.
Après « Some Lessons - The Bedrooms Sessions », son premier EP sorti en 2008 avec des morceaux écrits durant sa convalescence, Mélody Gardot a publié « Worrisome Heart » en 2006, puis en 2009 « My One and Only Thrill » sous la direction artistique de Larry Klein. Cet album marquant a contribué à la faire largement connaître et reconnaître.
Après un détour du côté de la world-music en 2012 avec « The Absence », la chanteuse revient au jazz en 2015 avec « Currency Of Man ». En 2016 elle intervient sur « The Passion of Charlie Parker » où elle interprète The King of 52nd Street.
« Live in Europe », le premier album live de Melody Gardot, regroupe 17 plages enregistrées entre 2012 et 2016. Tous ses succès. De My One and Only Thrill à Baby I’m a Fool dont elle propose deux versions, l’une à Vienne (Autriche) en 2013 et l’autre à Londres en 2016. De Who Will Confort Me chanté à Amsterdam en 2015 à Les Etoiles interprétées en Français à Londres en 2016. De Lisboa interprété à Lisbonne en 2015 à Morning Sun enregistré à Paris en 2015. « Live in Europe », une belle occasion de se (re-)plonger dans l’univers sensible de Melody Gardot, cette chanteuse devenue aujourd’hui incontournable dans le monde du jazz vocal.
Cinq ans que Melody Gardot n’avait pas sorti de disque studio. "Currency of Man”, son précédent mélangeait avec bonheur jazz, soul, blues et gospel. "Sunset in the Blue” célèbre le Brésil et le jazz, la chanteuse interprétant une poignée de standards – You Won’t Forget Me qu’Helen Merrill fut la première à chanter en 1956, Moon River, I Fall in Love Too Easily – et des compositions originales.
Splendidement arrangé par Vince Mendoza qui orchestra pour Joni Mitchell "Both Sides Now” et "Travelogue”, ce nouvel album est à nouveau produit par Larry Klein qui confirme son immense talent artistique. Outre des disques pour Joni Mitchell, son mari entre 1982 et 1994, on lui doit ces dernières années d’excellents albums d’Herbie Hancock, de Madeleine Peyroux, Curtis Stigers, Lizz Wright, Ana Moura, Hailey Tuck, Molly Johnson et plus récemment de Kandace Springs ("The Women Who Raised Me”, son meilleur opus), Klein leur donnant à tous un brillant exceptionnel.
"Sunset in the Blue” fait partie de ses grandes réussites. Il suffit d’ écouter If You Love Me, sa première plage pour être immédiatement séduit par l’écrin de cordes magnifiant la voix sensuelle de la chanteuse. Une voix chaude et troublante au grain inimitable, le chant d’une sirène qui aurait sûrement envoûté Ulysse lors de son interminable Odyssée. À ces violons et violoncelles, le plus souvent ceux du Royal Philharmonic Orchestra rassemblés à Londres dans les studios d’Abbey Road, se mêlent parfois des vents, l’orchestre au grand complet déployant ses fastes dans un superbe Ave Maria, le Global Digital Orchestra (cinquante musiciens) se faisant également entendre dans From Paris With Love.
Larry Klein (photo) joue de la contrebasse dans There Where He Lives in Me et Um Beijo et de la guitare dans From Paris With Love. Discrètes, les sections rythmiques comptent dans leurs rangs le bassiste Chuck Berghofer, le batteur Vinnie Colaiuta et le percussionniste Paulinho Da Costa, tous musiciens confirmés. If You Love Me et Um Beijo bénéficient de la trompette de Till Brönner et Won’t Forget Me du saxophone ténor de Donny McCaslin. Le chanteur de fado António Zambujo accompagne Melody Gardot dans C’est magnifique et un quintette l’entoure dans le très brésilien Ninguém, Ninguém chanté en portuguais. Souvent confié à Anthony Wilson, la guitare rythme la musique et tient une place importante dans de nombreux morceaux, dans Love Song surtout, son instrument dialoguant alors avec la chanteuse, et dans I Fall in Love Too Easily, seule pièce en trio de l’album qui lui permet de prendre un bref chorus.
La chanson des vieux amants proposée en bonus diffère sensiblement de celle arrangée par Fred Pallem dans "Brel, ces gens-là” (Decca / Universal), un hommage à Jacques Brel produit par Larry Klein et publié l’an dernier. Alors que Melody Gardot y est accompagnée par un quatuor à cordes et le guitariste Mitchell Long, les cordes du Royal Philharmonic Orchestra (non crédité dans le livret) donnent ici beaucoup d’ampleur à cette chanson inoubliable que la voix de Melody qui la chante en français rend très émouvante.
Enregistré avec Sting et le guitariste Dominic Miller, Little Something, le second bonus de "Sunset in the Blue” ne devait pas initialement en faire partie. Banalisé par un autre producteur (Jen Jis), destiné aux radios et relevant davantage de la variété, il reste anecdotique au regard des suaves merveilles que contient ce cinquième album studio de la chanteuse, le plus laid-back de la discographie de l'une des grandes Dames des jazz(s) d'aujourd'hui.
« Entre eux deux » tout est dit ou presque. Car cet album est en effet celui d’une partition entre la voix de Melody Gardot et les deux mains au piano de Philippe Powell. Cette série de chansons, en français et en anglais, s’inscrit dans le registre de l’amour. Rien de bien original, direz-vous.
Les amateurs de choses qui dissonent, qui mitraillent ou qui explorent ne s’y retrouveront pas. Ici, tout est bien léché et policé, à l’image de ce que propose Melody Gardot. Rien de neuf sous le soleil, là encore. En revanche, si vous aimez quand on chante que Paris est la capitale de l’amour ou si vous êtes adeptes de cette ambiance doucereuse sous la couette, Entre eux deux est fait pour vous.
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