La création du village de Valle di Rostino (Valle di Rustinu, en langue corse)
se situerait dans le troisième quart du XVIème siècle. Les différents hameaux se
seraient développés à cette époque, à la suite de l'émigration des
habitants du village aujourd'hui disparu de Rescamone.
Les raisons de l'abandon du site de Rescamone sont diverses: on sait que vers 1554, le village fut incendié par les troupes
de Charles-Quint appelées en Corse par les Génois pour faire face à Sampiero Corso et à ses alliés
franco-ottomans. Les attaques répétées des troupes armées présentes dans la région entre 1550 et
1560 seraient l'une des explications. On évoque aussi une invasion de fourmis rouges, le tarissement des sources par les Génois
et les exactions des bandits.
Toujours est-il que l'exode des habitants vers l'autre côté de Santa-Maria donna naissance à un nouveau village nommé
Valle (1582), Rescamone-di-Rostino (1621), Valle-di-Rescamone (1625-1686), Pieve-di-Rescamone (1684), Valle à nouveau (1690),
Risciamone (1713-1735) et enfin Valle-di-Rostino (1790).
En outre, une magnifique mosaïque polychrome occupant l’espace interne de l’église a été dégagée. Des travaux plus récents (2007) réalisés par Jean-Pierre Mannoni, dans le périmètre proche de cet ensemble, ont fait apparaître des constructions plus anciennes encore, appartenant à l’Antiquité tardive (IIIe s.), dont le lien avec des pratiques cultuelles n’a pu être établi de manière certaine.
Depuis les années 1980, une partie des vestiges,
notamment le tapis de mosaïques ornant l’intérieur de l’église, a été recouverte d’un remblai de protection qui a rempli parfaitement son rôle
mais a, durant ces 35 dernières années, occulté les vestiges.
Le baptistère paléochrétien a, quant à lui, été laissé à l’air libre après
une campagne de consolidation et remise en état.
Malheureusement, le temps ainsi que l’absence de grillage de protection ont favorisé une
dégradation sérieuse du bâti : le piétinement des animaux laissé à paître en toute liberté, l’action des pluies sur ces terrains fragiles, et le soleil
qui a détruit la couverture de plastique destinée à protéger la piscine baptismale, ont entraîné une détérioration importante des constructions.
Le mur du bâtiment enserrant la piscine a perdu une partie de son élévation et celle-ci se trouve à l’heure actuelle dans un état bien pire qu’au moment de sa découverte.
Un projet de remise en état du site, de valorisation du potentiel archéologique et d’aménagement des abords afin d’en faciliter l’accès, a été requis.
Le site a été classé « Monument Historique » par arrêté du 15 mai 1991.
Il est donc composé de trois monuments :L'église paléochrétienne a été édifiée au Vème siècle sur le site d'une implantation romaine.
Elle aurait été reconstruite sur les ruines d'une église du haut Moyen Âge.
Agrandie, remaniée entre le VIème et le Xème siècle, elle prend son aspect définitif au XIIème siècle.
À quelques mètres de cet édifice fut construit, au XIIème siècle, le baptistère octogonal de Saint-Jean-Baptiste.
Occupé depuis l'Antiquité romaine,
La dernière, menée par Philippe Pergola,
Perdues en pleine nature, les ruines se dressent dans un site empreint de sérénité et au carrefour d’anciens sentiers muletiers, en surplomb de la vallée du Golo.
Au premier coup d’œil, l’église, engoncée dans le terrain, semble complètement de guingois. Cette situation s’explique par le fait qu’au cours des siècles,
de nombreux glissements de terrain se sont produits au point de menacer les constructions. Les travaux menés par la FAGEC à l’initiative de Geneviève Moracchini-Mazel
ont permis de dégager et de consolider ce qui restait.
Au cours de ceux-ci, des vestiges beaucoup plus anciens ont été mis au jour et sept niveaux de sol ont été identifiés.
Sous l’église actuelle, on a découvert les vestiges d’une petite basilique à trois nefs construite au 5e siècle édifiée à proximité d’une bourgade romaine.
Le sol était recouvert d’un pavement en mosaïques (non visibles) si semblables à celles de La Canonica qu’elles pourraient provenir du même atelier.
Accolé au mur sud, se dressait un petit édifice à abside abritant un baptistère cruciforme, lui aussi du 5e siècle.
Plus tard, vers le 10e siècle, l’église fut reconstruite sur les vestiges paléochrétiens sans doute à la demande du pape Grégoire le Grand, comme San Petrucolo d’Accia.
Seule l’abside n’a pas connu de modifications, seulement des pilastres ajoutés au 11e siècle.
Elle se caractérise, à l’extérieur, par un beau décor d’arcs reposant une fois sur deux sur un fin pilastre.
Des fragments de tuiles et briques romaines soulignent les arcatures. La fenêtre absidiale était couverte d’une archivolte échancrée aujourd’hui
présentée dans le mur du lavoir de Casalvana. D’autres éléments provennant de Santa Maria se retrouvent ailleurs comme le linteau de la porte occidentale
(sur place un moulage) et celui de la porte sud (?), tous deux intégrés dans la façade de l’église paroissiale Saint Michel (1646-1740).
A l’intérieur, l’arc triomphal présente lui aussi un intéressant jeu de polychromie.
L’édifice avait deux portes latérales : l’une au nord, l’autre au sud. Cette dernière a été obturée et peut-être surmontée d’un tympan présentant Adam et Eve
(tympan aujourd’hui présenté dans le baptistère). Ce tympan du 9e siècle est un remploi.
Au 12e siècle, la nef est allongée pour connaître les dimensions que nous lui connaissons, 16,85 m x 7 m. La façade occidentale est donc reconstruite ainsi
qu’une partie des murs nord et sud. A l’extérieur, un nouveau baptistère remplace celui qui était situé dans l’église.
La datation proposée par Geneviève Moracchini-Mazel n’est pas partagée par tous : si Daniel Istria et Roberto Coroneo reconnaissent la présence d’une première
église du haut Moyen-Âge, ils proposent de dater l’édifice actuel (y compris l’abside) de la fin du 11e-début 12e siècle. Daniel Istria attribue à la pieve un
rôle exclusivement ecclésiastique alors que certains avancent l’idée d’un rôle juridique et social supplémentaire.
Les dimensions du baptistère étonnent : près de 11m de diamètre. Deux portes y donnaient accès, la porte nord étant surmontée d’un tympan sculpté : un serpent
se mordant la queue.
Les murs, percés de 4 fenêtres en meurtrière, parfois soulignées d’un trait gravé, étaient décorés à l’extérieur d’une arcature avec modillons sculptés
(têtes humaines, motifs géométriques…). Certains de ceux-ci sont placés dans le mur de la fontaine de Casalvana.
La cuve baptismale a disparu mais un dessin du 18e siècle permet de la reconstituer : un bassin rectangulaire en maçonnerie peu profond entouré d’un muret
était surmonté d’une tour à gradins servant de support à la charpente en bois.
Cet édifice, le plus grand en Corse ayant gardé une partie de son élévation (3,65m), a souffert de glissement de terrain et a servi de carrière tout comme
l’église d’ailleurs dont le linteau triangulaire de la porte occidentale a été arrachée pour être réutilisé dans l’église de Valle.
Santa Maria resta église piévane jusqu’en 1646 car vu son isolement, les fonctions paroissiales furent transférées dans un autre oratoire. En 1740, l’église
ne servit que pour les trois fêtes importantes de la Vierge (la Nativité, la Purification et l’Assomption). L’abandon fut définitif au 19e siècle.