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L'actualité corse - Année 2015

Dernière mise à jour : 30/12/2015

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DÉCEMBRE 2015

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Vous avez dit racisme anticorse?

Par Antoine ALBERTINI - 25/12/2015
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Jeudi 17 décembre 2015, Jean-Guy Talamoni est élu président de l’Assemblée de Corse au 3e tour de scrutin.
Dans quelques minutes, il prononcera un discours qui déchaînera un flot de critiques. (Photo Michel Luccioni)

Ainsi donc, pour une poignée de mots prononcés dans une très vieille langue qui ne menace rien ni personne puisqu’elle même se trouve gravement menacée d’extinction, la France, sixième puissance mondiale, nation riche et puissante parmi les nations riches et puissantes, titulaire d’un siège permanent au conseil de sécurité des Nations unies, disposant de la foudre atomique, fille aînée de l’Eglise et patrie des Arts et des Lettres, la France dont les armées combattirent du Mexique au Tonkin et du Sahel à la Norvège, se trouverait donc au bord de l’implosion, comme ébranlée dans ses fondements, par un discours en langue corse d’une durée très exacte de sept minutes et trente-sept secondes.

Depuis le jeudi 17 décembre dernier et l’installation de la nouvelle Assemblée de Corse, ces minutes, ces secondes, ont enflé jusqu’à faire sourdre des profondeurs d’une certaine pensée française des torrents de boue bileuse, de vomissures mêlées d’anathèmes, d’opprobre, de menaces et de malédictions sans équivalent. Depuis le jeudi 17 décembre, sitôt prononcé le discours de Jean-Guy Talamoni, nouveau président de l’Assemblée de Corse, quelques 300.000 habitants se retrouvent convoqués au banc des accusés et jugés coupables. De quoi ? D’avoir porté au pouvoir régional, par le simple effet du suffrage universel et démocratiquement exprimé, des nationalistes corses. La réaction épidermique d’une classe politique quasiment unanime en dit long sur sa stupeur et son impréparation à semblable événement. Paris, peut-on lire ici et là, n’avait pas « prévu ». Prévu quoi, au juste ? La victoire d’un courant de pensée qui structure le paysage politique de l’île depuis près d’un demi-siècle ? La marche vers le pouvoir de formations politiques dont les représentants ont imposé leur agenda et leurs revendications au cours de la précédente mandature, au point que soient adoptées par l’Assemblée de Corse des mesures – statut de résident, co-officialité de la langue corse, dont l’inspiration est évidente ?

Lors donc, voilà les nationalistes installés au perchoir de l’Assemblée de Corse et dans le fauteuil de président du Conseil exécutif. Autant dire : aux commandes de la région. Qu’on s’en félicite ou qu’on le regrette, qu’on voue aux gémonies leurs idées et leurs programmes, c’est désormais une réalité avec laquelle le bon sens commande d’interagir autrement que par l’outrance, la calomnie, les généralisations hâtives et les biais conceptuels. En lieu et place de quoi, la classe politique française a, dans sa quasi-unanimité, grimacé de haine en reprenant à son compte les poncifs les plus stigmatisants.

Ainsi a-t-on pu cette oubliable sénatrice brandir l’ultima ratio de l’argent public pour disqualifier l’usage de la langue corse par un élu ; tel ex-présentateur d’actualités sportives - que l’on tenait pour décédé, et depuis longtemps - mettre au défi les Corses d’arracher leur indépendance à la France ; tel ancien Premier ministre sommer le président de la République d’agir ; tel Rastignac d’extrême-droite exiger virilement que soit sifflée « la fin de la récréation ». Mais au nom de quoi ? Et pour quelles raisons ? Un discours en langue corse ? La forme ?
Le fond ? Les deux ? Parlons-en.

Des précédents accueillis dans le silence

La forme, d’abord. Il est manifeste de constater que les pudeurs républicaines se sont senties bien moins outragées par de singuliers précédents. On songe à François Bayrou s’exprimant dans la jolie langue béarnaise au Conseil général des Pyrénées-Atlantiques(1), ou aux dizaines de maires et de conseillers municipaux fraîchement élus en mars 2014 qui, de la gauche à la droite extrême, de l’Alsace à l’Aquitaine en passant par la Bretagne, ont déclamé leur amour des langues maternelles en prenant leurs nouvelles fonctions. On songe aussi à Jean-Yves Le Drian, actuel ministre de la Défense, prononçant des paroles en breton en retrouvant son siège de président de la région Bretagne 2. Le tout, sans même évoquer l’élection d’Alfred Marie-Jeanne, figure de l’indépendantisme martiniquais, à la tête du conseil régional de son île... événement accueilli par un assourdissant silence. Alors ? Pas de condamnation ? Aucune dénonciation ?

Quant au fond, il faut déduire de ces envolées martiales que la classe politico-médiatique n’avait jusqu’ici toléré les nationalistes corses qu’à la condition bien comprise, quoi que non formulée, de bien vouloir se cantonner au rôle de trublions, d’avoir la courtoisie de ne pas trop bousculer les équilibres locaux et, surtout, de contenir leur influence aux marges du jeu politique insulaire.

Qu’une ville comme Bastia se donne un maire nationaliste, passe encore : Gilles Simeoni, du reste, n’avait-il pas conclu d’alliance avec la droite et la gauche ? Qu’un siège de quelque comité Théodule consultatif soit réservé à un indépendantiste revendiqué, à la rigueur. Mais l’Assemblée de Corse ? Le pouvoir régional ? C’en était visiblement trop. Et Paris, pour s’être couché sans y penser, s’est réveillé douché, coupable de n’avoir ni su, ni voulu prendre la mesure du changement politique à l’oeuvre en Corse : à force d’avoir d’autres chats à fouetter, les minets se mettent à rugir – et on finit par les entendre.

Comment s’étonner, de surcroît, qu’un indépendantiste puisse tenir un discours… indépendantiste ? Croyait-on qu’à peine installé au perchoir de l’Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni se draperait de tricolore et entonnerait la Marseillaise ? Espérait-on qu’ébloui par cette soudaine mise en lumière, il se laissât aller à quelque tiédasserie ni trop indépendantiste, ni trop peu – un séparatisme, en somme, acceptable ? Laurent Marcangeli, député et maire (LR) d’Ajaccio, l’un des rares hommes politiques insulaires à s’être dressé contre l’injure, lui-même peu susceptible de complaisance et même de sympathies à l’égard de la revendication nationaliste, a eu à ce sujet des mots définitifs :

« M. Talamoni, que je connais depuis longtemps, est cohérent par rapport au discours qu’il porte depuis le début de son investissement dans la vie publique, a-t-il déclaré au Figaro. Les mots prononcés (…) sont d’une totale cohérence avec son engagement politique. Il est fidèle à ses valeurs, qui représentent 35 % du corps électoral corse. »

De telles évidences n’auront pas suffi, pourtant, à désarmer la verve des Fouquier-Tinville qui se succèdent face aux micros et aux caméras depuis dix jours.

Les perles des accusateurs publics

Passons sur la poussive ritournelle jacobine d’un Jean-Pierre Chevènement en état de coma politique avancé, général sans troupes retranché dans son réduit belfortain d’où il feint d’ignorer qu’à quelques kilomètres de sa porte, la belle Alsace vit depuis deux cent quatorze années sous l’empire d’un régime concordataire, vivante entorse aux principes d’égalitarisme républicain et de laïcité que l’ancien ministre de l’Intérieur porte en bandoulière de la même manière que les idiots du village arborent autour du cou un sifflet à roulette ou un réveille-matin.

Passons sur les éructations d’un Jean-Luc Mélenchon abonné à l’insuccès des urnes, qui remplit sur les plateaux de télévision le rôle du tonton poivrot pressé de raconter des blagues salaces en fin de repas.

Passons encore sur l’édito infamant de Jack Dion, scribouillard d’un hebdomadaire sans lecteurs contraint de publier sa prose sur les réseaux sociaux pour espérer y glaner les quelques pouces levés que se disputent habituellement collégiens analphabètes et pamphlétaires ratés.

Passons enfin sur Christophe Barbier, docteur ès approximatologie autant que journaliste de boudoir, dont la suffisance et la constance dans l’exécration finissent par honorer ceux qui en sont l’objet – non pas seulement les nationalistes corses mais, le doute n’est plus permis depuis longtemps, les Corses dans leur ensemble.

Mais que dire des élus nationaux de la République ? Des responsables politiques de premier plan ? Des Premiers ministres à la retraite ? Des éditorialistes de la presse « sérieuse » ?

Car une grande partie de la presse nationale porte aussi la responsabilité de cette déferlante, à coups de raccourcis, de formules à l’emporte-pièces, d’analyses ready-made que l’on rencontre d’ordinaire aux comptoirs des rades les moins fréquentables.

« Les mots ont un sens », écrivait Roland Barthes. Une formule à méditer, plus que jamais, lorsque Jean Guy Talamoni se retrouve bombardé président de « l’assemblée nationale corse » sur une chaîne d’informations en continu ; ou lorsque ce quotidien en ligne titre « La Corse tombe aux mains des nationalistes » - pourquoi ne pas écrire carrément : entre leurs « griffes » ?

De ce concert d’inepties, la note la plus fausse aura été jouée par l’éditorialiste du Courrier picard, quotidien dont le nom évoque assez la lettre interne d’une entreprise de produits surgelés : une maigre colonne gribouillée dans le style bancal des polémistes de sous-préfecture, quelques petites phrases aveuglantes de bassesse, de petits mots en forme d’injures expulsés à la manière de flatulences d’après-banquet – il était question de châtaignes et de chèvres, comme il se doit. Comment, après cela et tant d’autres erreurs factuelles, de non-sens, d’absurdités, accorder le moindre crédit au reste de la production journalistique hexagonale ?

Le racisme anticorse, dernière forme de xénophobie légalement admise

Entendons-nous bien : n’importe qui – et l’auteur de ces lignes s’en est rarement privé – peut critiquer les revendications nationalistes, voire ceux qui les portent. Les sujets de polémique, après tout, ne manquent pas et le combat politique, pour idéologique qu’il soit, reste un combat. On pouvait ainsi objecter aux triomphateurs que leur courant de pensée a vu le pourcentage des suffrages exprimés en leur faveur en légère baisse par rapport à 2010, ou qu’au premier tour de scrutin, une liste du Front national sans moyens ni base militante a devancé les indépendantistes de près de 3 points, à quoi s’ajoutent de légitimes interrogations : novices dans l’exercice du pouvoir, les nationalistes s’en tirerontils ? Parviendront-ils à réformer et améliorer, à mener à leur terme les chantiers en cours ? Réussiront-ils à lutter contre la précarité qui touche 60.000 personnes dans une île désespérément pauvre ? Plus que tout, tiendront-ils ce pari politique : adjoindre enfin à la force du symbole l’efficacité d’une saine gestion publique ? De telles questions sont davantage que permises : elles sont absolument nécessaires à l’échange démocratique, à la confrontation rationnelle des points de vue.

A tel point que les intéressés eux-mêmes, qui ne sauraient ignorer leurs difficultés à venir et le poids des responsabilités qui pèsent dorénavant sur leurs épaules, ont pris soin de prévenir : « Le chemin sera long et nous ne disposons d’aucune baguette magique ». On peut enfin, plus généralement, se dresser contre l’idée d’autonomie – les arguments ne manquent pas, ici non plus – et dénoncer énergiquement une indépendance aux couleurs de l’aventure.

Mais ce qui est à l’oeuvre depuis dix jours s’écarte de la mise en perspective critique des récents résultats électoraux et n’entretient que de lointains rapports avec le débat serein et apaisé que réclame la situation.

Ce qui est à l’oeuvre depuis dix jours tient de l’habituelle cacophonie où s’unissent les voix d’éternels recalés du suffrage, de parlementaires à la carrière horizontale, d’hommes-troncs épuisants d’inculture, tous rassemblés dans cette occasion inespérée de laisser libre cours à la dernière forme de xénophobie légalement permise au pays des droits de l’Homme : le racisme anticorse.

L’expression n’a rien d’usurpé. Elle n’est pas tic de langage, pas davantage qu’elle ne fournit une commode échappatoire à la remise en question ou la critique. Elle se nourrit au contraire d’exemples puisés aux meilleures sources des directs radiophoniques et télévisés, des tweets officiels, des prises de paroles publiques, des communiqués, des interviews imprimées dans les colonnes de la grande presse.

Ainsi d’Henri Guaino s’improvisant psychiatre en estimant, au lendemain de la première séance de l’Assemblée de Corse, « On est chez les fous ».

Ainsi du sénateur (Nouveau Centre) et conseiller de Paris Yves Pozzo di Borgo suintant la xénophobie des baronnies finissantes, qui s’étonnait de l’outrecuidance d’un Jean-Guy Talamoni à « représenter la nation corse » en sa qualité de « fils de portuguais et de sarde » – assertion doublement fausse au demeurant, et truffée de fautes d’orthographe.

Ainsi de ce petit maître du Front national désignant les indépendantistes corses comme « les ennemis de la France » – au même titre que Daech, sans doute.

Il est flagrant, à la lecture de ces perles d’accusateurs publics, de constater combien l’intégration de la Corse à l’ensemble national ne procède pas de l’inclusion mais d’une forme de sanction, d’une punition infligée à un garnement récalcitrant qui n’en ferait qu’à sa tête – réflexe typique des sociétés au lourd passé colonial. Nulle part on ne lit, nulle part on n’entend que la Corse est française par les effets conjugués de l’histoire, de l’attachement à des valeurs partagées, par l’absolue nécessité d’un destin commun. Non.

La Corse doit être française par la grâce d’une évidence dont les contours, pourtant, n’apparaissent plus certains à tout le monde, ainsi qu’en témoigne le verdict des urnes. Voudrait-elle d’ailleurs s’affranchir de cette tutelle ? Grands dieux ! Il ne s’agirait alors que d’une marque d’arrogance, d’une foucade à réprimer par le verbe d’abord, d’autres moyens si nécessaire. Plus d’argent public ! Plus de subventions ! La diète ! Mais, que l’on sache, ces prétendues largesses n’ont jamais empêché l’île de figurer au premier rang des plus pauvres régions françaises...

La grande inconnue : la réponse du gouvernement

La débauche à laquelle nous avons assisté emportera quoi qu’il en soit des conséquences, lesquelles sont déjà perceptibles pour quiconque fréquente l’homme de la rue. La première d’entre elles aboutira à l’inverse de l’effet souhaité en jetant dans les bras du nouveau pouvoir régional des milliers de personnes écoeurées de se voir ainsi traînées dans l’ordure, et sans raison valable. « Qu’ils continuent comme ça, plastronnait un cadre indépendantiste quarante-huit heures après la cérémonie d’investiture territoriale : ils nous font gagner des sympathisants par centaines » - renfort auquel ne tardera pas à se joindre l’inévitable contingent des convaincus de la dernière heure, venus voler au secours de la victoire.

Le plus grand risque, toutefois, n’est pas là. Il se situe ailleurs, dans la réponse que saura – ou non - apporter le gouvernement à cette nouvelle donne politique corse. On sait que les mauvaises décisions accompagnent souvent l’exercice d’un pouvoir fragile et soumis à de fortes contraintes. On sait aussi que la Corse, dans l’époque chaotique que vit le pays, ne figure plus au rang des priorités gouvernementales. On devine également que sa situation politique actuelle suscite davantage l’embarras que l’intérêt.

« J’attends un dialogue serein et apaisé » a expliqué le Premier ministre Manuel Valls à Gilles Simeoni. Gageons que la formule ne tenait pas simplement de la marque de politesse. Car refuser de prendre la mesure des changements de tous ordres qui affectent la société insulaire – pour le meilleur et, parfois, le pire – reviendrait à condamner son avenir.

1. Le même, à propos des langues régionales, déclarait dans son discours de Toulouse le 10 mars 2012 « Qu’ei finit lo temps de la vergonha, que comença lo temps de la fiertat ».
2. Le 16 octobre dernier, cette même institution adoptait par ailleurs la « Convention spécifique État-Région pour la transmission des langues de Bretagne » qui prévoit notamment l’abolition de l’âge minimum pour les ouvertures de classes, une augmentation progressive des taux de recrutement d’enseignants bilingues.

Source URL: http://www.corsematin.com/article/derniere-minute/vous-avez-dit-racisme-anticorse.1940434.html

Justice pour l’île des justes.

Les récents évènements survenus à Ajaccio ont fait couler beaucoup d'encre. La presse continentale et une partie de la classe politique - qui il n'y a pas si longtemps clamait "pas d'amalgame !" ont souvent jeté l'opprobre sur l'ensemble du peuple corse. "Voilà où mènent le nationalisme exacerbé et la culture de la violence, le mépris des lois et des valeurs républicaines, et cette incroyable ivresse ethniciste jusqu’au point où le président d’une assemblée refuse de faire son discours inaugural dans la langue commune de la République avec un total mépris pour tous ceux qui ne comprennent pas ce qu’il dit", écrit par exemple Jean-Luc Mélenchon, archétype d'une classe politique française culturellement incapable de concevoir un "républicanisme" non jacobin.
Parmi les nombreuses prises de position - outre les déclarations exemplaires de Gilles Simeoni (*) et de Jean-Guy Talamoni - , j'ai retenu celle de Régis de Castelnau.
(*) " Vous êtes ici chez vous, et quand on vous touche c'est aussi à nous que nous touchons. " Gilles Simeoni à la communauté musulmane en Corse.

28 décembre 2015 - Régis de Castelnau

Corse

Il n’était pas trop confortable d’être corse en cette fin d’année.

Depuis le 13 décembre il nous a été donné d’assister à une multiplication de prises à partie, d’amalgames et d’injures, où les Corses ont pris cher. Presse et réseaux et réseaux se sont déchaînés contre ces gens sans foi ni loi, portant des «indépendantistes » à la tête de la collectivité territoriale pour se lancer ensuite dans d’impardonnables ratonnades. Il faut reconnaître qu’ils ont fait fort les Corses, en votant au deuxième tour à 23 % des inscrits pour une liste « autonomiste » ayant fusionné avec des « indépendantiste » qui eux avaient obtenu 4,5 % des inscrits au premier… Un raz-de-marée dites donc ! Les républicains des deux rives se sont à nouveau réunis renforcés par une bien-pensance hétéroclite pour sonner le tocsin. Sûr de son coup et de son public, l’histrion Talamoni, devenu président de l’assemblée a prononcé son discours d’intronisation dans le patois toscan qu’il appelle « la langue corse ». Provocation réussie au-delà de toute espérance avec le redoublement des cris d’orfraie. De Guaino à Chevènement, en passant par Alain Juppé rappelant d’un tweet lapidaire l’article 2 de la constitution sur le français, langue de la République. De la part de quelqu’un qui depuis plus de trente ans a organisé et soutenu toutes les combines visant à démanteler la souveraineté française au profit de la bureaucratie européenne, cela témoigne d’un certain culot. On pouvait distinguer deux approches différentes dans les anathèmes, il y a tout d’abord ceux pour qui l’État doit intervenir contre les agissements de cette liste qualifiée d’extrême droite et restaurer « l’ordre républicain » ; ensuite, ceux qui prônant « le largage », souhaitent se débarrasser, en leur donnant l’indépendance de tous ces voyous paresseux, xénophobes amateurs de beurre et d’argent du beurre et qui nous coûtent si cher.

Première série de remarques : si les autonomistes l’ont emporté à une majorité très relative, c’est du fait de l’usure et de la dispersion du système clanique et par conséquent, à la régulière. Ajoutons que « l’insécurité culturelle » et la crise économique existent aussi en Corse où au moins, on n’a pas voté Front National. Le président de l’exécutif est Gilles Siméoni, élu maire de Bastia tout aussi régulièrement en 2014, autonomiste conséquent dont on ne sache pas qu’il ait mis sa ville à feu et à sang. Rappelons que la Collectivité Territoriale corse, au contraire des régions métropolitaines, fonctionne de façon démocratique avec une séparation de l’exécutif et du législatif. Le pouvoir de Talamoni sur son assemblée est le même que celui de Bartolone sur la sienne, c’est-à-dire pas grand-chose. Le risque de séparatisme est assez ténu, les revendications actuelles portent en général sur des mesures déjà souvent et largement utilisées par d’autres pays de l’UE, que ce soit dans le cadre de l’ultra-périphéricité, ou de la simple organisation nationale comme par exemple l’Espagne. La co-officialité de la langue corse est un colifichet, tous les Corses parlent très bien le français et aussi souvent le corse entre eux, quand ils n’ont pas envie qu’on les comprenne. Henri Guaino et beaucoup d’autres ont tonné contre la proposition de réserver la possibilité d’acquisition immobilière aux résidents sur l’île de plus de cinq ans. Chargé de l’étude juridico-économique de la question, et ayant conclu à la nécessité de cette solution, je me crois assez bien placé pour répéter que c’est la meilleure pour éviter une spéculation-blanchiment souvent d’origine mafieuse, une flambée des prix, la destruction des merveilles du littoral corse, et pour permettre à la majorité des habitants corses ou non qui le souhaitent, d’accéder à la propriété. Mais non, pour les républicains intégristes et ignorants, il vaut mieux laisser l’argent sale recommencer le désastre de la Côte d’Azur.

Le Corse-bashing battait son plein lorsqu’est arrivée la divine surprise du 26 décembre. Je vais immédiatement prendre la précaution de dire que les ratonnades ou les tentatives de ratonnades du 26 et des jours suivants sont intolérables. Et ne peuvent en aucun cas être justifiées par les événements de la veille. Elles ont été immédiatement et très vigoureusement condamnées par tous les responsables corses y compris et surtout Siméoni et Talamoni. Mais alors, quelle clameur ! Des mosquées et des églises profanées, tout comme des cimetières et d’autres édifices religieux, il y en a assez régulièrement. C’est complètement lamentable et malheureusement révélateur de tensions, mais jamais cela ne provoque un tel tollé. Tout le monde s’y est mis dirigeant politiques nationaux, médias, réseaux.

Avec comme d’habitude le caractère unilatéral de l’information. Les incidents de la nuit de Noël, l’embuscade tendue à des pompiers volontaires en intervention n’a pas provoqué, dans un premier temps le moindre écho. C’est seulement quand la manifestation de protestation a dégénéré que médias et politiques ont réagi. Et encore, il a fallu attendre pour avoir des détails sur l’agression des pompiers et sur sa gravité. Répétons encore une fois que ces événements ne peuvent en rien justifier la réaction des racistes corses bas du front. Mais il faut peut-être rappeler que dans une région comme la Corse, les pompiers bénéficient d’une grande affection, souvent d’ailleurs parce qu’il y en a dans toutes les familles, et en Corse la famille, elle est large et sacrée… Par ailleurs les fêtes catholiques y sont encore très importantes, et s’attaquer en les traitant de « sale corses de merde» à ceux qui sacrifient leur nuit de Noël familiale pour protéger, c’est plus qu’une profanation. Les habitants savent très bien que sur le continent, le nombre des attaques de pompiers en intervention est considérable (1600 par an !) et qu’elles ne font l’objet d’aucune répression. Le spectacle très inquiétant de la dérive en mode 9-3 de la fameuse « cité de l’empereur » d’Ajaccio suffit alors à faire sortir du bois, à la moindre étincelle, quelques identitaires imbéciles comme on en trouve malheureusement partout.

Alors, cet unanimisme à se passer les nerfs sur les habitants de la Corse a quelque chose de très gênant. D’abord parce que, et nous allons probablement le voir ailleurs, les mêmes causes produisant les mêmes effets, des choses identiques et peut-être plus graves peuvent se passer à tout moment. Ensuite parce qu’essentialiser les Corses comme le font les médias relève, qu’on le veuille ou non d’une certaine forme de racisme très déplaisant.

Par ce que s’il ne doit pas exister dans la République de « peuple » Corse, l’insularité et l’Histoire ont créé une identité, une culture, une langue qui font des Corses une population spécifique à forte personnalité. Qui a la chance d’habiter un des plus beaux endroits du monde mais qui fut très pauvre et où la vie ne fut pas toujours facile. Qui est encore attachée à des valeurs anciennes comme la famille, l’amitié, la parole et l’hospitalité, qui sait faire la cuisine comme personne, et la fête quand il faut. Les Corses entretiennent des rapports parfois élastiques avec le respect de la règle, et sont aussi capables d’être très cons. Mais la République devrait se rappeler, que s’ils nous ont donné un Empereur, quand elle les a appelés, ils ne lui ont jamais manqué. Je voyais circuler cette interpellation reprochant aux Corses d’avoir soi-disant oublié, lors des exactions de quelques-uns, le fait qu’ils avaient été libérés en 1943 par des goumiers marocains. J’ajoute qu’il n’y avait pas que des goumiers, il y avait mon père aussi. J’ajoute encore les Corses étaient nombreux dans la France Libre ainsi que dans la Résistance. Avec au premier rang Danielle Casanova communiste morte à Auschwitz. Et j’ajoute enfin que la Corse, qu’en Israël on appelle « l’île des justes », est la région française qui a le mieux protégé les juifs pendant la guerre.

Alors, amis Corses, soyez sympas ne vous formalisez pas, nous vous aimons. Les choses vont se calmer et nous vous faisons confiance, vous saurez mettre au pas les imbéciles.

peurspetits pas

Sept jours en Corse : Le front, l'affront, les effrontés

Par R. ANTECH - 20/12/2015
sept

C'est Josepha qui fait vaciller Marianne, Jean-Guy qui défie Manuel, Gilles qui boute le François hors de l'île et bientôt pourquoi pas, tamanta strada, hors de l'Elysée. Restons sérieux, et gardons un peu de cette raison qui fait encore les grandes nations...

Ce n'est pas la victoire des nationalistes en Corse, les 53 000 suffrages qui se sont portés sur eux, une part encore minoritaire d'indépendantistes, une autre plus large d'autonomistes, une dernière moins identifiée mais unie par une même volonté de reconnaissance identitaire, et pas même la ferveur et l'espérance qui s'est levée ici, qui menacent l'unité du pays.

Mais une frilosité très parisienne, un centralisme si peu démocratique, deux siècles et plus de jacobinisme républicain, une volonté de soumission plus que d'émancipation des peuples, une peur et une méconnaissance de la diversité et des différences, la négation enfin de faits culturels et historiques, qui le font trembler.

Quand la Corse aspire à plus de corsophonie sur son territoire, elle attise les relents de la corsophobie sur le Continent. Quand la Corse prétend à de nouveaux pouvoirs pour sortir de son sous-développement, pour devenir simplement maîtresse de son destin, elle s'attire les foudres des défenseurs d'une République une et indivisible, dans un front républicain dépassé, quand c'est un autre modèle qui est en jeu.

La victoire des nationalistes en Corse n'a pas réveillé les démons du séparatisme. Elle a sorti de leur lit les fantômes d'un républicanisme usé et déconfit. Avec pour porte-voix, Chevènement, Liennemann, Mélenchon, Barbier qui pensent encore que l'île n'est bonne qu'à tendre la sébile, et Fillon enfin qui, en son temps, annonça depuis la Corse la faillite d'un Etat quand il sonne ici celle de ses idées pour la Corse.

Que la paix soit avec vous...

Elle tient cette déferlante de peurs exhibées, dans l'ignorance de ce qui se passe réellement ici. De ce serment prêté devant les électeurs celui-là, que le droit d'un peuple à disposer de lui-même serait bien sûr respecté, que rien ne lui serait imposé autrement que par le vote qui s'impose finalement à tous, que sa voix compterait donc dans les urnes quand le temps serait venu de s'exprimer sur un véritable statut d'autonomie, ou plus loin encore sur une indépendance, mais que ce temps n'est pas venu.

Alors, ce n'est pas un discours présidentiel en langue corse, et un autre qui a jeté un ponte novu entre deux langues soeurs plutôt qu'ennemies, les références à la Nation et au peuple corse, l'hymne sacré et religieux de la Corse sorti du fond des âmes dans ce temple de la démocratie et de la laïcité qu'est l'Assemblée, la bandera qui s'agite pour acclamer chacun des votes, pas même ce serment posé sur l'une des bibles, l'un des Livres de la révolution paoliste pour la Corse, qui signifient que l'île a largué les amarres avec la France, par le résultat d'une élection dont la séparation n'était pas l'enjeu.

Tous ces signes, ces actes, ces gestes, sont l'expression, l'accomplissement d'un temps démocratique tellement serein qu'il contrarie les pourfendeurs de la Corse, et qui a vu la victoire d'une famille politique sur deux autres, droite et gauche qui ont exercé le pouvoir sur ce territoire, sous toutes ses formes, et à tous les étages si l'on peut dire, depuis des siècles. Et qui avec beaucoup de dignité et de classe parfois, comme chez Paul Giacobbi, ont accepté leur défaite.

Ils marquent ces symboles qui sont parfois davantage que de simples symboles, une alternance politique apaisée, tranquille, naturelle, et surtout désirée par le peuple. Et l'on s'étonne que les réactions venues de l'extérieur, où l'on sait tout en revanche des tourments et de la violence d'une île jusqu'à l'excès du verbe, n'aient pas davantage porté le témoignage d'une Corse pacifiée.

Pour les contempteurs, pour les Cassandre aussi, il serait temps de déposer les armes.

La peur du vide et du trop-plein

Car le gouvernement de la Corse, cette appellation qui a pu choquer, interpeller ailleurs, mais qui n'est pas usurpée, aura fort à faire sur d'autres fronts que celui de l'idéologie mal interprétée, mal commentée, mal embouchée.

À peine aux affaires, et déjà les affaires qui se rappellent à lui. Perquisitions dans les bureaux de la collectivité, à l'étage de la direction générale des services et des finances aussi, dans le cadre d'une enquête sur des marchés publics, trente millions d'euros en question, une paille, sur des soupçons de favoritisme et de corruption. La passation des marchés publics, le côté obscur de la force pour toute collectivité, et qui appelle toujours plus de transparence, comme la "chambre de cristal" imaginée par Pasquale Paoli dans l'administration de la Nation corse.

À peine arrivée au port des affaires, la SNCM a déjà repris la mer, mais c'est l'amer qui reprend les hommes.

La compagnie attribuée à Patrick Rocca n'en finit pas de faire des vagues alors que l'entrepreneur corse n'est pas encore à la barre. Recours devant le tribunal de commerce de Marseille renvoyé et les concurrents de toujours, Corsica Maritima et Daniel Berrebi, qui s'allient maintenant pour lancer une ligne de fret entre Toulon et Bastia dès la nouvelle année. Avec la compagnie régionale qui devrait ressortir des cartons à la faveur de la nouvelle Assemblée, il pourrait ainsi y avoir dans un futur proche, quatre armateurs et plus encore à prétendre opérer entre Continent et Corse. Ou comment passer de la peur du vide au trop-plein, du quasi-monopole sur les lignes à la concurrence presque sauvage sur toute la ligne.

Si l'on ne veut pas que cette nouvelle bataille navale fasse plus de dégâts pour l'emploi que le plan social engagé pour le sauvetage de la SNCM, que d'autres marins descendent ainsi à quai, il faudra dans l'écriture de la future délégation de service public penser à la ligne de flottaison des compagnies elles-mêmes.

À peine aux affaires et déjà cet autre trop plein, trop-plein d'ordures, au propre si l'on peut écrire, mais pas au figuré cette fois, qui se manifeste. Le centre d'enfouissement de Viggianello dégueule, parvenu à saturation pour cette fin d'année. Vico, qui doit recevoir les surplus de déchets, arrive à saturation... de patience. On a beau faire le tri, ce qui n'est pas suffisamment fait, on revient toujours au même constat, au même état de crise permanent.

Celui-là ne réclame aucune indépendance, ne retient aucun commentaire continental, mais requiert seulement l'attention des élus.

Le changement peut aussi commencer par là, dans la poubelle où on l'a si souvent abandonné...

Discours de Gilles Simeoni, président du conseil exécutif de Corse

Le dirigeant nationaliste Gilles Simeoni, 48 ans, a été élu jeudi à Ajaccio président du conseil exécutif de la Collectivité territoriale de Corse. "Le peuple Corse existe, il va construire son destin dans la paix et la démocratie", a-t-il déclaré lors de son discours d'installation. 

Un tonnerre d'applaudissements a accueilli l'annonce de son élection par le nouveau président de l'Assemblée de Corse, l'indépendantiste Jean-Guy Talamoni, élu deux heures plus tôt.

Des dizaines de nationalistes massés dans les tribunes ont scandé "Libertà" en agitant des drapeaux corses à tête de Maure.

"Le peuple corse existe et il sera reconnu"

"Le peuple Corse existe, il va construire son destin dans la paix et la démocratie", a déclaré Gilles Simeoni à l'adresse de l'Etat, l'invitant à faire sa part de chemin.

"Ce cheminement politique, cette logique d’émancipation passent nécessairement par une relation repensée et reformulée à l’Etat. Un Etat qui ne peut plus être le seul à vouloir échapper à l’évidence : le peuple corse existe et il sera reconnu, parce que cela est conforme à l’Histoire et au Droit."

"La Corse, territoire insulaire, bénéficiera d’un statut lui conférant pouvoir législatif, parce que cela s’imposera de façon naturelle comme une évolution politique et institutionnelle inéluctable, y compris au plan européen. Dans ces conditions, le choix, par l’Etat, du silence, a fortiori celui de la prolongation d’un rapport de force conflictuel, tourne le dos à l’Histoire, tant sur le terrain des idées que sur celui des faits. Dans ces conditions le moment est venu d’ouvrir un dialogue serein et constructif", a encore indiqué le nouveau président de l'exécutif insulaire.

"A partir d'aujourd'hui une autre histoire commence et nous allons l'écrire ensemble", a-t-il déclaré avant de conclure "Evviva a Corsica ! Evviva u populu corsu ! Evviva a demucrazia !".

Un discours longuement applaudi et salué par le public qui a ensuite entonné le Dio vi salvi, Regina, l'hymne national corse.

Le texte intégral du discours


Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les conseillers à l’Assemblée de Corse et conseillers exécutifs,
Chers collègues, Mesdames, Messieurs, Cari cumpatriotti,

Mes premiers mots seront bien sûr pour saluer, avec respect et admiration, les hommes qui m’ont précédé dans ces hautes fonctions au service de la Corse ; le regretté Prosper Alfonsi, le regretté Jean Paul de Rocca Serra, Jean Baggioni, Ange Santini, Paul Giacobbi.
Tous ont servi la Corse, en conformité avec l’idée qu’ils se faisaient de leur tâche et je tiens bien sûr à leur rendre hommage.

Je me tourne également vers les trois anciens présidents de l’Assemblée de Corse, José Rossi et Camille de Rocca Serra, que je salue respectueusement, et Dominique Bucchini, que nous avons eu le privilège d’avoir comme Président pendant la mandature écoulée : vous êtes, Dominique, depuis des décennies un militant infatigable et exemplaire. Vous avez été, pour nous tous et pour les Corses, un très grand Président.

So felice di girà mi ver Ghjuvan Guidu Talamoni, novu Presidente di l’Assemblea di Corsica, chi porta oramai nant’à e so spalle tante rispunsabilità è tante speranze. Simu fieri chè tù sia u prima Naziunale à esse Presidente di a Corsica oghjinca.

Enfin, je voudrais, en quelques mots, adresser un amical salut à mes collègues élus de l’ancienne mandature et à l’ensemble des fonctionnaires de la Collectivité territoriale que j’ai connus à l’occasion de celle-ci. J’ai beaucoup appris au contact des uns et des autres, tant au plan humain qu’au plan politique, et je tiens à les en remercier.
 
Je me réjouis également d’apprendre tout autant au côté des collègues élus lors des élections territoriales des 6 et 13 décembre et suis certain que nous accomplirons ensemble du bon travail au service de la Corse.

Dimanche 13 décembre 2015, le suffrage universel a parlé. Les Corses se sont exprimés.
Ils ont choisi, en leur âme et conscience, en femmes et en hommes libres, de rompre avec le système politique ancien.

Ils ont choisi, en leur âme et conscience, en femmes et en hommes libres, d’ouvrir un chemin nouveau : celui de la démocratie et de l’espoir, celui de la paix et du développement, celui d’un peuple corse reconnu dans ses droits et maître de ses choix essentiels, celui d’une société corse émancipée, ouverte et généreuse.

Ce choix s’est fait de façon massive : il a transcendé les générations et les appartenances politiques. Il a uni, dans un même élan et dans une même ferveur, villes et villages, littoral et intérieur, Corses qui vivent ici et Corses de la diaspora, Corses d’origine et Corses d’adoption.
Il s’est aussi exprimé, dans ses modalités, avec une détermination tranquille et une sérénité qui ont conféré au scrutin la puissance d’une lame de fond.

Nous avons parfaitement pris la mesure de ce que représente ce soutien exceptionnel : les résultats du scrutin - plus de 53.000 suffrages représentatifs d’un vote d’adhésion et de conviction - donnent à la nouvelle majorité issue des urnes une légitimité démocratique et politique particulièrement forte.

Et nous avons également compris ce qu’il signifie : la lucidité politique et l’honnêteté intellectuelle commandent en effet de dire clairement que de nombreux hommes et femmes qui ont voté pour la liste « Pè a Corsica » dimanche dernier ne partagent pas nécessairement la totalité de nos convictions et de nos engagements.

Leur soutien et leur confiance n’en ont que plus de prix.
Ils nous confortent dans notre conviction que la victoire du dimanche 13 décembre ne peut pas être celle d’un camp sur un autre, ou de 36% du corps électoral sur les 64% restants.
Elle est et doit devenir chaque jour un peu plus à partir d’aujourd’hui la victoire de la Corse et de l’ensemble des Corses.
Je veux d’abord m’adresser à nos concurrents d’hier, aujourd’hui collègues élus de l’opposition.
 
Vous le savez, nous combattons, de façon démocratique mais sans faiblesse, un système archaïque, ce que nous considérons être ses travers, ses dérives, ses excès.
Nous le combattons, de façon démocratique, parce que nous pensons qu’il a fait et continue de faire beaucoup de mal à la Corse.
Pour autant, nous vous respectons profondément dans vos convictions.
Nous apprécions vos qualités, nous vous estimons, et nous savons que vous aimez la Corse tout autant que nous.

Vous serez bien évidemment totalement respectés dans vos choix, y compris s’ils sont radicalement différents des nôtres, et s’ils vous conduisent à nous critiquer ou à nous combattre.

Mais sachez, quoi qu’il en soit, que notre volonté d’ouverture reste plus que jamais réaffirmée.
Nous souhaitons travailler avec vous au service de la Corse.
Nous sommes persuadés que c’est ce que les Corses attendent de nous tous : refuser les logiques d’assistance, de clientélisme, de collusions, et nous engager ensemble pour la démocratie, la transparence, et la construction d’une société corse développée, juste, et solidaire.

C’est à cette condition que nous serons, les uns et les autres, à la hauteur des espérances et des enjeux.
Car ce que nous vivons depuis dimanche n’est pas, nous l’avons tous compris, une simple victoire électorale ou politique.

Il n’y a d’ailleurs ni triomphalisme, arrogance, ou esprit de revanche chez les gagnants, pas plus qu’on ne trouve amertume, désarroi ou hostilité chez les battus.
Plutôt la conscience partagée, chez les uns et les autres, de vivre ensemble, de façon apaisée, un moment charnière de l’histoire de notre île.
Ce moment charnière marque d’abord l’aboutissement d’une longue route.
Il est aussi et surtout le point de départ d’une nouvelle ère.
La fin d’une longue route, car notre combat vient de loin :
- il puise à l’Histoire de ce pays comme aux valeurs universelles de fraternité entre les hommes et les peuples, de tolérance, d’égalité, de démocratie.
- Il trouve ses racines dans cette première Révolution de Corse initiée au détour du XVIIIème siècle, cette Révolution qui devint un phare et une référence pour l’Europe des Lumières.
- Il s’inscrit dans le fil historique de cinquante années de luttes contemporaines du peuple corse pour la reconnaissance de ses droits : droit à la langue et à la culture, droit à la mémoire, droit à la terre, droit à la justice, droit à la dignité, droit au développement, droit, tout simplement, à la vie.

Nous savons désormais que ce combat, dont tout laissait penser qu’il ne pouvait être que perdu, est gagné.
Qu’il sera gagné dans la démocratie, dans l’allégresse, dans la joie.
Qu’il sera gagné grâce à l’expérience des anciens, grâce aux sacrifices des militants, grâce à l’enthousiasme et la créativité de la jeunesse, grâce à l’implication des forces vives.
En ce moment d’extrême émotion, mes premières pensées vont bien sûr à celles et ceux qui, d’un camp ou de l’autre, ont perdu la vie au cours de ces années tourmentées.
A leurs familles dont le temps n’a pas effacé la douleur.
Elles vont aussi à ces générations de femmes et d’hommes qui, pendant des décennies, ont sacrifié leur vie familiale, professionnelle, leur liberté souvent, leur vie quelquefois.
Beaucoup d’entre eux nous ont quitté, sans avoir pu vivre cette journée baignée de soleil et de bonheur.
D’autres restent prisonniers.
Que leurs enfants et leurs familles, qui nous regardent, sachent qu’ils sont tous là, à nos côtés.
Que nous n’avons rien oublié de leur sourire, de leur voix, de leur visage.
Que nous n’avons rien oublié non plus des occupations, des manifestations, des nuits d’angoisse, des parloirs de prison, des silences de nos pères, des larmes de nos mères, des injustices subies qui ont été notre lot pendant des décennies.
C’est parce que nous sommes les enfants et les acteurs de cette histoire douloureuse que nous voulons transmettre aux générations d’aujourd’hui et à celles de demain une Corse apaisée, vertueuse, pour laquelle la démocratie sera aussi nécessaire et naturelle que l’air que l’on respire.

Le moment est venu de construire la paix.
C’est le premier engagement que nous avons pris devant notre peuple.
 
C’est le mandat fondateur que nous ont donné les Corses qui nous ont fait confiance.
C’est la première mission que nous nous sommes fixés.
Car la paix n’est pas que la promesse de lendemains heureux.
Elle est aussi la pierre fondatrice d’une oeuvre plus vaste, plus ample, mais ô combien exaltante : celle qui consiste à construire ce pays, à le doter ensemble des moyens de son émancipation politique, économique, sociale, et culturelle.
La confiance massive que nous ont témoigné les Corses, l’espoir et l’enthousiasme suscités par notre démarche, particulièrement auprès de la jeunesse, nous honorent, nous engagent, et nous obligent.
Nous avons bien sûr pris, individuellement et collectivement, la mesure des responsabilités qui sont les nôtres.
Nous savons que les Corses, ceux qui ont voté pour nous, comme ceux qui ont fait d’autres choix, attendent beaucoup de nous.
Un travail immense nous attend, dans tous les domaines.
Je suis profondément convaincu que l’intelligence et l’action collectives nous permettront de le mener à bien.
La journée d’aujourd’hui n’est donc pas que l’aboutissement d’une longue route. Elle est aussi le début d’une nouvelle ère.
La mandature à venir est certes courte.
Elle doit être marquée, dès le lendemain de notre prise de fonction, par l’instauration de la démocratie réelle, de la transparence, et de l’équité, dans tous les actes de la vie publique : accès à l’emploi public, marchés publics, subventions,...
Il s’agit d’un enjeu majeur, non seulement pour redonner confiance aux citoyens en la politique, mais aussi pour écarter tout risque de dérive ou de collusion, notamment en matière d’argent public.
Plus que jamais, la maxime de Pasquale Paoli doit guider chacun de nos pas et chacun de nos choix : « Il faut que notre administration ressemble à une maison de cristal où chacun puisse voir ce qui s’y passe. Toute obscurité mystérieuse entretient l’arbitraire du pouvoir et entretient la méfiance du peuple ».
De même, je souhaite que la gouvernance de la Corse évolue dans le sens du plein respect des prérogatives de chaque organe ou institution, tout en renforçant les convergences et les complémentarités : exécutif, Assemblée de Corse, office et agences, conseil économique social et culturel.

Enfin, l’implication de l’ensemble des forces vives dans la définition et la mise en œuvre du projet collectif dont va se doter la Corse est la condition sine qua non de la réussite de celui-ci.
Dans tous les domaines, nous travaillerons donc avec ces forces vives : les élus de terrain, les chambres consulaires, les syndicats, les associations, les acteurs économiques, sociaux et culturels, les chômeurs, les retraités, les Corses de la diaspora, la jeunesse...
Il nous appartiendra de donner des signes forts, et rapides, en la matière.
Je souhaite aussi m’adresser directement et publiquement, dès aujourd’hui, à l’ensemble des personnels de la Collectivité territoriale de Corse ainsi qu’à ceux des Offices et Agences.
Ils seront bien évidemment totalement respectés et défendus dans leurs convictions, dans leurs droits, et dans leurs prérogatives.
Je connais leur attachement au service public et à l’intérêt général, et je mesure combien leur implication est déterminante dans la réussite des politiques publiques mises en œuvre par la Collectivité territoriale de Corse.
Je sais que la Collectivité pourra compter sur eux pour que nous réussissions ensemble au service de la Corse, et de l’intérêt général.
Les deux courtes années qui se présentent à nous doivent également nous permettre de commencer à traiter et régler des problèmes pendants depuis des décennies : transports, déchets, désertification de l’intérieur, sous-développement économique et social.
Elles doivent de même nous conduire à construire la collectivité unique, dans le respect des personnels et de leurs statuts, avec le souci constant de l’équité et des équilibres territoriaux entre le littoral et l’intérieur, entre le Nord et le Sud, entre Bastia et Aiacciu, dans le respect des territoires historiques de la Corse aujourd’hui menacés, comme l’Alta Rocca, par une réforme de l’intercommunalité inadaptée, enfin par la prise en compte scrupuleuse de l’exigence de proximité des citoyens.
Enfin, ce mandat, quoiqu’écourté, doit voir la mise en œuvre des délibérations de l’Assemblée de Corse, restées à ce jour sans suite ni effets : coofficialité de la langue corse, transfert de la compétence fiscale et arrêté Miot, politique foncière et statut de résident, pouvoir législatif, inscription de la Corse dans la Constitution.
 
C’est là une nécessité vitale et absolue, comme en matière de langue, de terre, ou de fiscalité du patrimoine, avec le retour annoncé au droit commun en matière d’arrêté Miot.
C’est aussi une exigence démocratique, car la Corse ne peut accepter que les délibérations de l’Assemblée de Corse, institution garante des intérêts matériels et moraux du peuple corse, restent sans suite ni effet.
Cette prise en compte, bien qu’indispensable, ne sera bien sûr possible que si l’Etat accepte enfin de s’impliquer dans la définition et la mise en œuvre d’une solution politique globale.
En ma qualité de Président du Conseil exécutif de Corse, je tiens donc à m’adresser solennellement au Gouvernement et à l’Etat.
Le peuple corse existe. Il est le peuple d’une petite île d’Europe et de Méditerranée, qui va construire et assumer son destin, dans la paix et la démocratie.
Un peuple ouvert, fraternel, solidaire, désireux de continuer à intégrer, comme il l’a fait depuis des siècles, celles et ceux qui, quelle que soit leur origine, leur religion, ou leur couleur de peau, choisissent de vivre dans cette île, d’en apprendre la langue, d’en partager les passions, les rêves et les espoirs.
Ce cheminement politique, cette logique d’émancipation passent nécessairement par une relation repensée et reformulée à l’Etat.
Un Etat qui ne peut plus être le seul à vouloir échapper à l’évidence : le peuple corse existe et il sera reconnu, parce que cela est conforme à l’Histoire et au Droit.
La Corse, territoire insulaire, bénéficiera d’un statut lui conférant pouvoir législatif, parce que cela s’imposera de façon naturelle comme une évolution politique et institutionnelle inéluctable, y compris au plan européen.
Dans ces conditions, le choix, par l’Etat, du silence, a fortiori celui de la prolongation d’un rapport de force conflictuel, tourne le dos à l’Histoire, tant sur le terrain des idées que sur celui des faits.
Dans ces conditions le moment est venu d’ouvrir un dialogue serein et constructif.
Un dialogue qui nous permettra d’aborder ensemble, avec un calendrier de mise en œuvre, les différents points contenus dans notre contrat de mandature, contrat validé massivement par le peuple.
Je dis à Paris, au Gouvernement et à l’Etat : prenez la mesure de la révolution démocratique que la Corse vient de vivre.
 
Comprenez enfin que toutes les conditions sont réunies pour que puisse s’ouvrir un nouveau chapitre de l’histoire de cette île.
Faites, vous aussi, votre part de chemin, pour que les jeunes d’aujourd’hui, nos enfants, qui sont la prunelle de nos yeux, mais aussi les générations à venir ne connaissent rien du sous-développement chronique, de l’exil, de la dépossession, qui ne pourraient que rouvrir le cycle infernal de la révolte et de la violence.
Cinquant’anni fà, avemu fattu un sonniu. A rombu di lotte, di strapazzi, di sacrifizii, avemu suminatu speranza è fiaccula di vita. A causgiula di a cuscenza naziunale, sguasi spinta, hà infiaratu pieve è paesi.
Simu un populu. Simu vivi. E simu arritti.
Et nous le disons avec toutes nos forces, avec toute notre âme, au nom des générations passées, de celles d’aujourd’hui et de celles de demain :
La Corse a droit à la paix. La Corse a droit au bonheur. La Corse a droit à la vie. Nous allons, avec tous les Corses, faire que le rêve devienne réalité.

Oui, cela a été un long, un très long chemin. Tamanta strada...

Mais à partir d’aujourd’hui, une autre Histoire commence.
 
Et nous allons l’écrire ensemble. L’avemu da scrive inseme.
Evviva a Corsica ! Evviva u populu corsu ! Evviva a demucrazia ! 

Le discours de Jean-Guy Talamoni (et sa traduction en français)

Installation de l’Assemblée de Corse, le 17.XII.2015

Aujourd’hui, plus que jamais, il nous faudra faire de cette Assemblée un lieu de démocratie où chacun pourra dire ce qu’il estimera être le plus favorable au bien commun.
Et notre devoir sera de permettre à chacun d’être écouté, en cherchant, chaque fois que ce sera possible, à faire parler la Corse d’une seule voix. Le respect de l’autre, la volonté de convaincre et de servir les intérêts supérieurs de la Corse guideront nos pas à tous, j’en suis convaincu.
En ce qui me concerne, je serai naturellement le président de tous les élus de cette Assemblée.

Mais auparavant, il me faut dire quelques mots au nom des miens, au nom de cette partie du mouvement national qui n’a jamais accepté de reconnaître le principe de la tutelle française sur la Corse.
Au nom de tous ceux qui, depuis 1768, n’ont cessé de combattre pour que la Corse demeure une nation.
Au nom de ceux qui n’ont jamais renoncé à l’idée d’indépendance.
Et aujourd’hui, nous sommes arrivés ici, et nous sommes arrivés victorieux, avec nos frères de Femu a Corsica que je veux saluer.
Mais nous sommes arrivés ici également avec ce que nous sommes et ce que nous portons.
Nous sommes arrivés ici avec tous ceux qui, comme nous, ont toujours combattu les autorités françaises sur la terre de Corse.
Nous sommes arrivés ici avec les fusiliers de Paoli, tombés à u Borgu et à Pontenovu, nous sommes arrivés ici avec les militants du Front morts pour la Corse.
Nous sommes arrivés ici avec Marcu Maria Albertini et Ghjuvan Battista Acquaviva.
Nous sommes arrivés ici avec la foule immense et muette de tous ceux qui ont donné leur vie pour que vive le peuple corse.
Nous sommes arrivés ici avec nos prisonniers.
Nous sommes arrivés ici avec nos recherchés.
Nous sommes arrivés ici avec le souvenir de nos souffrances, de nos erreurs aussi, mais avec notre foi, avec notre sincérité.
Nous sommes arrivés ici avec les larmes des mères désespérées, des épouses affligées.
Mais nous sommes arrivés ici avec le rire de nos enfants, avec l’espoir immense qui nous transporte, avec l’amour de notre terre et de notre peuple.
Nous sommes arrivés ici avec tous les nôtres, et nous sommes venus pour tendre la main.
Pour tendre la main à tous les Corses, mais aussi à ceux qui sont arrivés chez nous il y a peu, et qui sont venus en amis pour partager notre destin.
Nous sommes arrivés pour tendre la main à ceux qui, dimanche, n’ont pas choisi de nous envoyer ici.
Pour tendre la main à ceux qui, à l’Assemblée de Corse, ont toujours rejeté nos idées.
Pour tendre la main aux élus corses qui ne voulaient pas entendre parler de notre nationalisme.
Pour tendre la main aux Corses qui depuis quarante ans se sont opposés à notre mouvement.
Pour tendre la main, même, aux enfants de ceux qui, il y a trente ans, nous ont combattus avec les armes payées par la France.
Pour tendre la main, à tous ceux qui, dimanche, ont appris notre victoire avec tristesse et inquiétude.
Nous leur disons : vous n’avez rien à craindre.
Abandonnez donc cette peur, vous qui entrez, avec nous, sur la voie de l’avenir.
L’heure est venue de la réconciliation de notre communauté avec elle-même.
La Corse appartient à tous les Corses, et le gouvernement national, le premier depuis le XVIIIe siècle, sera celui de tous.
Pour travailler avec nous, nous ne demanderons jamais à personne de renier ni son parcours, ni ses idées, ni sa fidélité, comme nous n'avons jamais accepté de renier notre histoire, nos opinions et nos solidarités.
Demain, tous ensemble, nous travaillerons au bien commun.
Demain, tous ensemble, nous mettrons en œuvre une nouvelle politique, pour la langue, pour la terre, pour un développement au service des Corses, pour la justice sociale.
Demain, nous rencontrerons les représentants de la société corse, employés du public et du privé, artisans, commerçants, agriculteurs, travailleurs culturels, enseignants, étudiants, chômeurs et retraités, socioprofessionnels, associations et syndicats…
Nous les rencontrerons pour élaborer un véritable projet de société, largement partagé par les Corses.
Demain, nous irons ensemble à Paris et à Bruxelles, avec la force que nous ont donné les Corses dimanche, et nous négocierons les moyens de droit nécessaires pour faire que le peuple corse vive bien et qu’il soit maître sur sa terre.
Demain, nous obtiendrons l’amnistie des prisonniers et des recherchés.
Demain, les portes des prisons s’ouvriront car les Corses le veulent et que personne ne pourra s’opposer à cette volonté populaire.
Dimanche, en votant pour les nationalistes, le peuple corse a dit que la Corse n’était pas un morceau d’un autre pays mais une nation, avec sa langue, sa culture, sa tradition politique, sa manière d’être au monde.
Le peuple corse a voulu qu’un nationaliste soit président du Conseil exécutif de la Corse.
Il a voulu également qu’un indépendantiste soit président de cette Assemblée, sanctuaire de la démocratie corse.
Nous essayerons, avec humilité, de nous montrer dignes de cette confiance.
Je terminerai avec deux mots que l’on trouve souvent dans les vieux écrits de nos ancêtres. Aujourd’hui, ces paroles sont plus précieuses que jamais : « Vivez heureux ! »
Evviva a Nazione,
Evviva a Corsica !

Le discours émouvant d'Edmond Simeoni

Une soirée historique !

edmond

Le rêve, caressé depuis près d’un demi-siècle par les Nationalistes corses, s'est réalisé, dimanche soir, à l'issue du scrutin territorial ! Du choc aux larmes, de l’incrédulité à la joie, c’est avec une émotion intense que les leaders, les candidats, les militants, jeunes et vieux, ont vécu l’annonce d’une victoire qu’ils ont arraché, à la force de leur foi et de leurs convictions, en moins d’une semaine. Retour sur une soirée qui marquera l’histoire.

C’était comme un frémissement qui s’est propagé depuis le matin, s’insinuant comme une promesse, s’enflant comme une bise qui se lève. Une sensation de vivre un jour pas ordinaire, d’une soudaine fébrilité, cette intuition aigue semblable à celle qui précède les tremblements de terre. « On sentait, depuis le milieu de la semaine, que quelque chose se passait, quelque chose d’énorme. On a tellement bossé, on a fait le porte-à-porte, on est allé chercher chaque voix. On a bien vu que les gens adhéraient. Et puis, dimanche, au fur et à mesure que les heures passaient, on a senti monter une excitation. On sentait que ça y était, mais on avait peur d’y croire et d’être déçu ! », raconte un militant bastiais de Femu a Corsica, encore abasourdi. A Bastia, l’épicentre du séisme, le frémissement devient rumeur, bruit de fond, dès que les premiers chiffres des communes rurales commencent à affluer. Au bureau centralisateur, comme dans les deux permanences de Femu a Corsica et de Corsica Libera où les militants des deux formations se mêlent indistinctement, on retient son souffle. Alea jacta est ! Les dés sont jetés !
 
De la stupeur à l’attente
Soudain, juste avant 19 heures, c’est la stupeur ! Une estimation partielle donne les Nationalistes en tête avec 800 voix d’avance sur 290 communes, toutes rurales. A la permanence de Corsica Libera, un journaliste, qui lit les résultats sur son téléphone portable, lance à l’indépendantiste Eric Simoni : «  Vous êtes en tête sur les communes rurales ! L’élection a basculé ! C’est fait ! ». Le leader d’Une alba nova per Bastia, membre de l’Exécutif de Corsica Libera, en reste saisi ! Presque assommé ! Puis, après quelques instants de silence, il reprend son habituelle placidité et opte pour la prudence : « C’est trop tôt ! Il faut attendre ! On ne sait pas ! ». Le journaliste insiste : « Mais, non ! C’est fait ! Il reste maintenant à tomber les résultats des communes urbaines. Paul Giacobbi ne peut plus gagner. A droite, c’est la débandade ». Eric Simoni, qui craint une désillusion, réplique : « Non ! Non ! Attendez ! N’annoncez rien ! ». Autour de lui, personne n’a encore pris la mesure de ce qui s’annonce. Personne n’ose, encore, y croire ! « On a déjà gagné la victoire politique, alors si maintenant on gagnait la victoire électorale… », glisse un militant, lui aussi, un peu sonné.
 
Entre espoir et certitude
A quelques dizaines de mètres de là, au bureau centralisateur, place du marché, les militants d’Inseme et de Femu commencent à arriver. La rumeur enfle de plus en plus. La joie et l’espoir se lisent sur les visages. En apprenant les premières nouvelles, Hyacinthe Vanni, conseiller territorial sortant de Femu a Corsica, s’écrie, rayonnant : « C’est bon ! On a gagné ! ». Cette certitude, il la martèle depuis des mois. « Je n’en ai jamais douté ! Les gens n’en peuvent plus de ce système. Ils savent qu’ils peuvent faire confiance à Gilles ! Je savais qu’on réussirait ». A l’intérieur, le maire de Bastia, Gilles Simeoni, fébrile, a des étoiles plein les yeux. Il a, peu à peu, au fil de la journée compris, lui aussi, qu’il allait gagner. Il le sent, mais ne s’autorise pas encore à se laisser aller. Il interroge la presse : « Qu’en pensez-vous ? On y est, non ? Je crois bien qu’on y est ! Nous progressons partout ». Il sait aussi, depuis la fin du dépouillement du bureau 1 qu’il préside, qu’il va remporter son pari sur Bastia d’atteindre 5000 voix. Il ne connaît pas encore le chiffre final : 5760.
 
Un sondage belge
Autour de lui, peu de militants, ils sont partis à la permanence quêter des informations. Ceux, qui sont restés, marqués par la désillusion du 1er tour, sont, étrangement, peu loquaces, plongés dans une attente un peu tendue. Les résultats des communes urbaines commencent à tomber, de plus en plus surprenants. Borgo, Lucciana, Ile Rousse… Les Nationalistes sont en tête. C’est un nouveau choc. Gilles Simeoni, incrédule, n’en revient pas ! Les téléphones crépitent et les résultats affluent. L’annonce d’un sondage belge, qui donne la liste Pè a Corsica à 37 %, laisse les militants groggy. « C’est un tsunami », éclate l’un d’eux ! Les médias étrangers reprennent, en chœur, l’information. D’un coup, l’onde de choc se propage, les militants commencent à envahir la salle, mais le maire veut attendre l’estimation de 20 heures. Quelqu’un annonce que le score à Ajaccio est « énorme ! », la liste est 2ème derrière la droite. Gilles Simeoni reçoit un SMS de Laurent Marcangeli qui confirme la victoire et lui souhaite Bonne chance !
 
La victoire de la Corse
Mais, il n’est toujours pas 20 heures et, seule, Bastia le sait ! Alors, les téléphones se déchainent et la nouvelle se répand, dans toute l’île, comme une trainée de poudre : « On a gagné ! ». Au bout du fil, la même stupeur incrédule : « Pour de bon ? ».  Plus aucun doute n’est possible. Ensuite, tout s’accélère, la foule envahit l’ancienne mairie. L’émotion et la joie débordent. De vieux militants serrent dans leurs bras leur leader charismatique et se mettent à pleurer. Cette victoire, ils n’y croyaient plus. Ce rêve, qu’ils ont conçu, il y a un demi-siècle, est devenu, ce dimanche soir, réalité. « Nous sommes heureux ! C’est un des plus beaux jours de notre vie ! », confie l’un d’eux. « Les Corses ont voté en hommes libres, enfin ! », dit un autre. Tout le monde attend la venue de la figure légendaire du nationalisme corse, Edmond Simeoni, dont les premiers mots ont la force du symbole : « Ce soir, ce n’est pas la victoire des Nationalistes, c’est la victoire de la Corse ! ». Max, son frère et compagnon de lutte, reste pragmatique et lucide : « Maintenant, il faut se mettre au travail. Il y a tellement à faire ! Il y a tout à construire ! ».
 
Le courage politique
Sur la place du Marché, la jeunesse exulte. Jean-Guy Talamoni et les militants de Corsica Libera déboulent en masse. Les deux leaders, dont l’un sera le premier président nationaliste de l’Exécutif territorial, et l’autre, le premier président nationaliste de l’Assemblée de Corse, sont portés en triomphe. La jeunesse envahit les rues et remonte jusqu’à la statue de Pascal Paoli à qui elle rend en chantant un hommage émouvant. Devant la permanence de Femu a Corsica, la foule réclame Edmond qui monte sur le capot d’une voiture et, in lingua nustrale, rappelle, avec une émotion contenue, le long chemin parcouru. Quand Jean-Christophe Angelini débarque de Porto-Vecchio, les trois leaders, pressés par la foule, le remplacent sur le capot et affirment, l’un après l’autre, qu’ils seront au travail dès ce lundi matin et que désormais, tout va changer, qu’ils sauront imposer la coofficialité de la langue, le statut de résident et tout ce pourquoi les Nationalistes se battent depuis des années. « C’est un moment qu’aucun de nous n’aurait jamais pu imaginer vivre, et pourtant, nous le vivons ! Ce qui s’est passé ce soir, c’est d’abord la maturité, l’intelligence collective et le courage politique de l’ensemble du mouvement national… Nous avons un travail extraordinaire devant nous, mais nous nous sommes donnés les moyens de l’accomplir et nous allons continuer à renforcer l’union de tous les Nationalistes », promet Gilles Simeoni. Tous trois l’assurent : désormais, tout commence…

N.M.
Source :http://www.corsenetinfos.corsica

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Territoriales 2015 : Quelles pratiques démocratiques ? La réponse de N.Paganelli (PUDEMU)

Mon cher Daniel,
Je te remercie de l’attention que tu as bien voulu porter à la démarche du collectif PUDEMU initiée avec quelques amis, il y a un peu plus de trois mois. Je te remercie également pour tes remarques qui sont toujours pertinentes et qui me permettent de préciser la position que nous entendons défendre.

Dire que la démarche de PUDEMU vise à substituer au clivage gauche/droite, le clivage peuple/caste peut paraître lapidaire dans sa formulation mais l’affirmation comporte une part de vérité. En effet, si les principes de base autour desquels s’articulent la pensée de droite et la pensée de gauche demeurent parfaitement différents (nous dirons pour simplifier que la droite pense toujours que le libre jeu des acteurs conduit à un optimum alors que la gauche pose d’emblée le principe qu’une régulation est indispensable pour l’atteindre), il n’en demeure pas moins que la pratique des gouvernants du monde entier a quelque peu émoussé ce distinguo à tel point que les équipes gouvernementales, régionales et locales sont aujourd’hui, bien souvent, de concocter des listes dites « d’ouverture ». Je constate le phénomène, je ne le condamne pas en soi mais je suis obligé d’admettre que l’ancien clivage idéologique a, depuis quelques années, pris du plomb dans l’aile.

Dès lors, si cet ancien clivage s’est émoussé, serions-nous entrés dans le monde des « bisounours », dans cette société des égaux que bien des observateurs anglo-saxons nous ont annoncé dès le début des années 60 ?
Bien sûr que non !

John Kenneth Galbraith avait soutenu la thèse dans Le Nouvel Etat industriel, qu’une technostructure s’était peu à peu accaparée la gouvernance des grandes entreprises qu’elles soient privées ou publiques et que le phénomène pouvait s’observer à l’Ouest comme à l’Est (c’était à l’époque la summa divisio). Il se trouve que cette technostructure a, depuis, pénétré la sphère de la gouvernance les Etats. Fouillez les parcours, analysez les écrits, scrutez les attitudes : vous verrez qu’une armée d’hommes ayant des cursus similaires, passant parfois des cabinets ministériels à la direction des grandes entreprises, entretenant entre eux des rapports dépassant la simple connivence sont aux postes de commande et y demeurent le plus longtemps possible. En cas d’alternance politique, ils quittent le devant de la scène pour se regrouper dans les coulisses mais, in fine, sont remplacés par des clones que seule distingue la couleur du fanion qu’ils arborent. En ce sens oui, il y a bien un divorce entre cette élite monochrome qui nous gouverne et la masse bigarrée des citoyens réduite au rang de spectatrice.

Dès lors, mon cher Daniel, tu as parfaitement raison de me demander comment ce « nous » peut-il s’organiser face à une oligarchie parfaitement rodée à l’utilisation des réseaux et à la stratégie de haut niveau. Une oligarchie qui sait utiliser les mécanismes légaux lorsqu’elle y trouve satisfaction et qui sait aussi les contourner lorsque le vote citoyen infirme ses plans (je pense tout naturellement à la ratification par voie parlementaire du traité européen pourtant rejeté par le peuple). A mon sens, c’est au peuple lui-même d’imaginer un mode de fonctionnement capable de lui convenir. A chaque fois dans l’Histoire, qu’un divorce s’est installé entre les citoyens et ses représentants on a vu surgir des assemblées où les acteurs prenaient la parole, délibéraient et tentaient de mettre en œuvre les décisions. Il ne m’échappe pas que ce mode de fonctionnement nécessite une organisation, des règles, des contrôles faute de quoi les assemblées se métamorphosent en moulins à paroles inefficaces (rappelons-nous de la Commune de Paris) ou en chambres d’enregistrement en raison de l’entrisme pratiqués par des groupes habiles et décidés (le noyautage des soviets par les bolchéviques en est l’exemple le plus caractéristique).

N’oublions pas une chose, le système que nous connaissons en France est né de la pensée politique des Lumières, il n’est pas une catégorie universelle et intemporelle. De la même manière, le mode d’organisation de la nouvelle représentation populaire va s’élaborer ici et maintenant en forgeant ses propres règles qui ne sortiront pas pures et parfaites du cerveau de quelques-uns. Puisque le mouvement se prouve en marchant, c’est en fonctionnant que le nouveau mouvement social trouvera les règles qui lui conviennent étant entendu qu’il doit éviter deux écueils : l’absence de normes pouvant le conduire à la désagrégation et l’édiction de normes trop complexes pouvant générer une nouvelle caste dirigeante.

Tout cela, me diras-tu, implique que les citoyens se mobilisent, qu’ils participent aux débats or nous assistons à un désintérêt croissant de ces derniers envers la chose publique… Dès lors qu’adviendra-t-il de ceux qui ne souhaitent pas prendre part aux débats en se réfugiant dans la sphère limitée de leurs intérêts personnels ? Je te sais trop habile pour ne pas avoir anticipé ma réponse… Le désintérêt pour la chose publique qui est une donnée incontestable et qui se manifeste, par exemple, par les taux d’abstention record aux consultations électorales est bien le fruit de l’inadéquation entre le mode de fonctionnement du système et les aspirations du plus grand nombre. On peut raisonnablement imaginer que si les citoyens sont appelés à forger les nouvelles règles, ils en seront les acteurs passionnés. Comment ne pas comprendre ce désintérêt actuel pour le débat public lorsque le seul contact direct que peuvent avoir certains élus avec le peuple qu’ils sont censés représenter, se résume à des parades sur les marchés dominicaux à la veille des nouvelles consultations électorales ?

Ne me fais pas dire ce que je ne dis pas, à savoir que tous les élus se valent et qu’ils sont tous coupés du réel. Loin de là, la grande majorité des élus des petites communes font un travail remarquable, ingrat, obscur puisqu’ils ne font presque jamais la une des grands médias. Ces gens là doivent être respectés mais, hélas, ils ne sont pas représentatifs malgré leur nombre parce que les postes stratégiques sont occupés par de véritables professionnels dont la seule motivation est de perdurer.

La célèbre formule de Churchill « La démocratie est le pire des système mais je n’en connais pas de meilleur » est spirituelle mais elle ne s’applique pas à la démarche à laquelle je souscris car elle est plutôt destinée à ceux qui souhaitent lui substituer une dictature ou un régime tellement idéal et pur qu’il n’a aucune chance de voir le jour.

Personnellement je crois en la démocratie mais je sais aussi que cette dernière a tendance à se dévitaliser si les règles qui la font vivre ne sont réactualisées. Roberto Michels, dans son ouvrage sous-titré : Essai sur les tendances oligarchiques des démocraties avait déjà souligné le paradoxe de nos sociétés : la démocratie implique une organisation et donc des règles, règles qui, bien souvent, ne sont maîtrisées que par ceux qui ont l’habitude de les utiliser… d’où les détournements de pouvoir à leur profit. Il en concluait que par conséquent la démocratie était impossible.
Je ne le suivrai pas sur ce point car, en fait, la démocratie exige une vigilance et une adaptation permanentes, elle n’est pas une situation acquise mais doit se comprendre comme un mode de fonctionnement à conquérir et à réinventer sans cesse afin de contrer les tendances liberticides qui semblent être une constante du comportement humain.

Ainsi, pour en arriver à la revendication phare de PUDEMU, qui est la lutte contre le cumul des mandats, je ne peux souscrire à l’analyse qu’un député serait plus efficace s’il était également conseiller régional, et que ce dernier, pour accomplir pleinement son mandat, se devrait d’être, au moins, maire ou adjoint au maire car à ce petit jeu quels mandats devrait avoir le président de la République pour accomplir le sien ?

Tout au contraire, j’ai plutôt le sentiment qu’un maire venu conseiller régional va bien plus représenter les intérêts de sa commune que l’intérêt de l’entité supérieure, il en va de même pour un député alors même que le constituant a souhaité que le mandat impératif était de nul effet.

Dans le même esprit, et parce que je ne crois pas aux hommes providentiels, je suis opposé au cumul des mandats dans le temps. Deux ? Trois mandats ? Cela peut bien entendu se discuter étant entendu qu’il ne s’agirait nullement d’exclure un retour sur la même fonction mais simplement d’envisager un délai de carence d’une mandature.

Cumuler les mandats dans l’espace et le temps c’est faire courir à la Démocratie un risque qu’il vaut mieux éviter car cette pratique comporte toujours bien des tentations pour des élus qui ne seront jamais que des hommes. Rien de moins, mais rien de plus. Montesquieu avait écrit : « Le pouvoir corrompt et le pouvoir absolu corrompt absolument… » L’un des moyens de nous prévenir en partie de ce fléau c’est de le limiter dans le temps et dans l’espace.

J’ai tenté, mon cher Daniel, de répondre honnêtement aux questions que tu as bien voulu me poser. Honnêtement cela veut dire en connaissant la limite de mes propres réponses, en sachant que rien n’est facile mais en ayant l’intime conviction que l’on ne peut se satisfaire du réel tel qu’il se présente à nous. Croire qu’on peut, d’un trait de plume, le rayer de la carte est illusoire mais croire qu’il est immuable et qu’on ne peut l’amender est une démission.

Nous vivons une époque où le vieux se meurt devant nos yeux effarés sans que la nouveauté pointe véritablement son nez sous une forme structurée, c’est une époque inconfortable et c’est dans cet inconfort que nos esprits hésitants tentent de percevoir l’aube nouvelle.

Je te remercie d’avoir porté attention à la présente démarche et de m’avoir ainsi permis de m’expliquer.

Bien amicalement,
Norbert Paganelli

Territoriales 2015 : Quelles pratiques démocratiques ?
Lettre ouverte à Norbert Paganelli

Voilà quelques mois, un nouveau collectif était fondé en Corse, avec un nom pouvant faire référence à celui du parti Podemos en Espagne : Pudemu (Nous pouvons). Son but affiché : « rendre la parole aux citoyens en dénonçant la politique politicienne ». Son leitmotiv : dénoncer le cumul des mandats qui favorise la « professionnalisation de la politique », au détriment du souci de l’intérêt public. Comme son inspirateur espagnol, il tend ainsi à substituer au traditionnel clivage Gauche/Droite un clivage Caste/Peuple.

A l’approche des prochaines échéances électorales, le collectif a en outre lancé un appel au vote blanc. L’écrivain Norbert Paganelli, l’un de ses fondateurs et son principal animateur, m’avait d’ailleurs proposé de rejoindre les premiers signataires de l’appel en question. Une offre que j’avais déclinée.

Toujours dans une optique de débat et d’échanges à l’approche des Territoriales, je reprends ci-dessous quelques-uns des arguments de la réponse que je lui avais faite, en les développant un peu. Comme il s’agit dès lors d’une lettre ouverte, chacun peut se saisir des éléments de réflexion amorcés de cette manière, et réagir…

Cher Norbert Paganelli,

J'ai lu avec attention le texte de l’appel au vote blanc proposé par le collectif Pudemu.
Très intéressant, comme le reste de la démarche entreprise.
Certains arguments font mouche, en particulier quand il est question de dénoncer la « professionnalisation de la politique » ou la « pauvreté des discours [politiques] vidés de leur substance ». Toutefois, je n’ai pas souhaité m’y associer, et cela pour plusieurs raisons. Il m'arrive certes d'intervenir dans le très dynamique groupe que tu animes sur Facebook, dans la mesure où il s’agit d’un lieu d’échanges intéressant, mais je ne suis pas membre de Pudemu ; et je tiens à conserver mon indépendance à l'égard des partis, des syndicats et... des collectifs...

Si les démocraties représentatives (ces « oligarchies libérales » dont parlait à juste titre Cornelius Castoriadis) me laissent sceptique, les démocraties directes ou participatives (ce vers quoi penche en fait une initiative telle que Pudemu) ne me convainquent pas davantage... Le texte fondateur du collectif envisageait par exemple une structuration autour de sortes de « comités citoyens », afin que le peuple puisse se réapproprier le débat public. Mais l’idée même de « peuple » (contre les « élites ») ne relève-t-elle pas de la fiction ? Qui est au juste ce « nous » qui figure dans la formule « nous pouvons » ? Comment l’identifier ? A quoi peut-il bien correspondre ? Peut-il seulement se manifester ?

Son existence supposerait l’uniformité d’une volonté - pour ne pas dire une « pensée unique » - qui ne demanderait qu’à s’exprimer. Ce qui en soi reviendrait déjà à nier la primauté de l’individu, ainsi que le pluralisme des opinions… Car sinon, comment choisir une orientation plutôt qu’une autre ? Qui va décider ou trancher ? Sur quels critères ? Pour le dire autrement, le « ce que le peuple veut vraiment » ne se révèle-t-il pas illusoire ? Et cela d’autant plus si on tient compte, dans une société profondément individualiste et éclatée, de toute cette partie de la population qui n’est pas prête à s’engager dans une quelconque « démarche citoyenne » ? Parce qu’elle n’en a pas le temps ; parce qu’elle consacre l’essentiel de celui dont elle dispose aux loisirs ; ou tout simplement parce qu’elle se désintéresse de la chose publique…

On en revient à la fameuse formule de Churchill :
« La démocratie [représentative] est le pire des régimes, mais je n’en ai pas trouvé de meilleur ».

Malgré tous ses défauts - et ils sont nombreux ! -, peut-on vraiment sortir d’une vie politique de partis et de « professionnels » rythmée par les échéances électorales ? Moi-même, en tant que citoyen et électeur, je ne sais pas encore ce que je vais faire aux prochaines Territoriales : peut-être voterai-je blanc, peut-être pas. J’essaie de regarder les propositions des uns et des autres. Je prends le temps de la réflexion. Je suis, oui, souvent très critique par rapport à ce que je lis ou entends.

Mais je ne me laisse pas non plus aller à mettre tous les hommes politiques « dans le même panier » : je pense que certains ont encore un idéal, et cela quel que soit leur bord... Il y aurait du reste un risque d’alimenter un « tous pourris » favorable aux extrêmes de le nier. Je ne suis même pas sûr d'être systématiquement opposé au cumul et au renouvellement des mandats : ces pratiques, malgré leurs effets pervers, possèdent aussi quelques arguments à décharge.

Par exemple, pour un élu national, il peut s’avérer intéressant de conserver un mandat local afin de rester au plus près des préoccupations « du terrain »... Quant au renouvellement, il est souvent, c'est vrai, révélateur d'une professionnalisation rebutante. Pourtant - cela n'arrive peut-être qu'une fois par siècle dans une ville -, il arrive aussi qu'un élu soit reconduit sur plusieurs décennies parce qu'il est vraiment compétent, d'un niveau exceptionnel, qu'il fait avancer les choses et qu'il a besoin d'un temps « long » pour aboutir...

Il me semble difficile, au bout du compte, de produire des avis tranchés et définitifs autour de toutes ces questions concernant le fonctionnement de nos grands régimes démocratiques contemporains. Et pourtant, les motifs d’indignation ne manquent pas !

Bien à toi, Cher Norbert Paganelli,

Daniel ARNAUD
Philosophe, écrivain
Auteur, entre autres publications, de La Corse et l’idée républicaine (L’Harmattan, 2006) et de La République a-t-elle encore un sens ? (L’Harmattan, 2011).

NOVEMBRE 2015

22 novembre 2015
educ


21 novembre 2015

GS

19 novembre 2015

Déplorer, maudire, ne pas comprendre, par Jérôme Ferrari

[Le Monde, 20/11/2015]

Peut-être sommes-nous entrés en guerre, peut-être sommes-nous entrés en résistance, je ne sais pas. Il y a sans doute bien des manières d’être en guerre et de résister. Les querelles sémantiques paraissent bien vaines. Mais je sais que Paris n’est pas Homs, et je crains fort que persister à boire un apéritif en terrasse ne transforme aucun de nous en Jean Moulin. Finalement, ce serait bien qu’on commence par se mettre d’accord sur le sens des mots. Avant d’entendre à la radio une ministre que je me refuse à accabler, j’ignorais, par exemple, que les stades de foot étaient des temples de la "fraternité", sur lesquels déferlent régulièrement, comme chacun sait, des tsunamis d’amour. De même, je ne suis pas très sûr de bien comprendre ce qu’une autre ministre, qu’il est également superflu de nommer, appelle "lieux de culture". L’émotion est immense, elle est légitime, et elle explique évidemment que règne une certaine confusion dans le choix du vocabulaire.

Cette émotion, je n’ai aucune difficulté à la comprendre, elle est aussi la mienne, même si je demande que l’on me permette de n’en rien dire ici. J’en ai mesuré l’ampleur au cours d’un week-end sidérant passé sur Facebook. Elle est indéniablement sincère quoiqu’elle m’ait parfois semblé quelque peu ostentatoire et, pour tout dire, indécente, d’une indécence irréprochable ne provoquant qu’une nausée vague mais persistante, une gêne comparable à celle qu’on ressent lorsque, au cours d’un enterrement, des inconnus pleurent plus fort que la famille du défunt. Il me semble que respecter le deuil de ceux qui ont perdu des proches, c’est comprendre que notre peine et notre empathie, si sincères fussent-elles, ne peuvent se comparer à l’infini chagrin qui est, hélas, le leur et n’appartient qu’à eux. Mais l’horreur des attentats et la nature même des réseaux sociaux n’invitent évidemment pas à la retenue.

Il est donc nécessaire que l’émotion s’exprime, même maladroitement, mais on ne peut admettre qu’elle le fasse sous la forme coercitive d’une injonction. Car une telle injonction revient à condamner d’avance comme complice ou criminel tout effort d’exercice du jugement. On assiste, comme c’était déjà le cas en janvier, à un renversement aberrant de la maxime spinoziste: il nous serait permis de rire, déplorer et maudire mais en aucun cas de comprendre. Car "comprendre", bien sûr, c’est "excuser" – et on a honte, dans un pays qui a une si haute opinion de sa stature intellectuelle, de devoir écrire que cette équivalence est d’une insondable stupidité. Mais notre amour de la dichotomie est immodéré. On en restera donc à la dénonciation unanime de la "barbarie". C’est effectivement très simple, et c’est plus confortable.

Cela nous évitera de nous interroger sur une société qui veut se reconnaître dans un texte, prétendument publié dans le New York Times [en réalité, un commentaire posté sous un article par un internaute], compilant les clichés les plus grotesques sur la France – et l’on voit que l’émotion n’interdit pas qu’on tire d’une tragédie un bénéfice narcissique. Qui oserait critiquer cette société si festive, si subtilement transgressive, qu’elle suscite, en raison de sa perfection même, la colère des méchants ?

Cela nous évitera de constater que lesdits méchants en sont très majoritairement des produits, et il nous sera épargné de poser cette question terrible: que se passe-t-il, en France, pour qu’une idéologie aussi répugnante que le salafisme devienne un objet de désir ? – et chercher à comprendre cela, j’ai encore honte d’avoir à l’écrire, ce n’est excuser aucun criminel, cela n’empêche même pas qu’on fasse tout pour les punir.

Cela nous évitera de nous demander si la stigmatisation aveugle et collective d’une partie de nos concitoyens n’est pas le moyen le plus sûr d’encourager la radicalisation – ce que savent bien les "barbares" qui ne font pas l’erreur, eux, de ne pas chercher à comprendre leur ennemi.

Cela nous évitera de nous horrifier en entendant une journaliste de France Inter demander en toute décontraction à un parlementaire si la proposition ignoble de Wauquiez d’ouvrir un Guantanamo à la française n’est pas, après tout, une si mauvaise idée que ça.

Cela nous évitera enfin de nous demander si ce que nous risquons de perdre maintenant, à la vitesse inouïe qui est toujours celle des catastrophes – ce que nous avons, je le crains déjà, commencé à perdre – n’est pas plus fondamental que le champagne, l’odeur du pain chaud et les cinq à sept dans un hôtel parisien.

Jérôme Ferrari

SNCM : le tribunal retient l’offre de Patrick Rocca

Les Echos | Le 20/11




Fin de suspense pour la SNCM. Le tribunal de commerce de Marseille a annoncé ce vendredi avoir retenu l’offre de reprise du transporteur Patrick Rocca.

La SNCM est enfin fixée sur son sort. Après de multiples reports, le tribunal de commerce de Marseille a rendu sa décision ce vendredi. Il a indiqué avoir retenu l’offre de reprise du transporteur corse Patrick Rocca, qui prévoit le maintien de 873 emplois sur 1.400 CDI actuellement employés par la compagnie maritime.

Marins en grève samedi

Trois autres repreneurs étaient en lice : l’ancien président du port de Marseille Christian Garin, Corsica Martima, groupement d’entrepreneurs corses mené par François Padrona et enfin Baja Ferries, la compagnie américaine de l’armateur français Daniel Berrebi. La reprise de la compagnie sera effective au 1er janvier 2016.

A noter que l’intersyndicale de la SNCM a déposé un préavis de grève de 24 heures renouvelable pour ce samedi, tandis que des centaines d’emplois sont menacés au sein de la compagnie.

Rappel chronologique

Janvier 2005. L’Etat actionnaire de la Société nationale Corse-Méditerranée décide de faire entrer à son capital un opérateur privé afin d’éviter le naufrage de la compagnie publique déjà en grande difficulté.
Mai 2006. La privatisation partielle de la SNCM est actée.
Novembre 2008. Veolia prend la barre de la compagnie. La SNCM est désormais détenue à 66% par Veolia Transport (filiale commune à 50-50 de Veolia Environnement et de la Caisse des dépôts et Consignations, plus tard rebaptisée Transdev), à 25% par l’Etat et à 9% par les salariés.
Avril 2013. Le patron de la SNCM, Marc Dufour présente un « plan de la dernière chance » pour la compagnie qui continue d’accumuler les pertes.
Mai 2013. La Commission européenne demande à la SNCM de rembourser 220 millions d’euros d’aides publiques qu’elle assimile à des aides d’Etat. En novembre, elle réclamera 220 autres millions.
Mai 2014. Marc Dufour est débarqué pour cause de divergences de vues avec l’actionnaire majoritaire, Transdev. Il sera remplacé par Olivier Diehl.
Novembre 2014. Le 4, la SNCM se déclare en état de cessation des paiements. Le 28, le tribunal de commerce de Marseille place la compagnie en redressement judiciaire.
Novembre 2015. Le tribunal de commerce de Marseille choisit Patrick Rocca parmi les quatre candidats à la reprise de la compagnie.


En savoir plus sur http://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/



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OCTOBRE 2015

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21/10/2015

Castagniccia : l'incroyable découverte de deux cercueils de l'âge du Bronze

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La découverte est rarissime à l'échelle de la Méditerranée occidentale. Deux sépultures en bois remontant à 1200 av. J.-C. ont été localisées à Lano. Chantier de haut vol, à la clé, pour les archéologues partis les récupérer

C'est le type de chantier qui marque forcément la carrière d'un archéologue." Franck Leandri, conservateur régional de l'archéologie à la direction des affaires culturelles, en a les yeux qui brillent encore. Le week-end dernier, lui et ses confrères ont mené à bien la récupération des restes de deux cercueils en bois remontant à l'âge du Bronze final - soit aux alentours de 1200 av. J.-C. - dans une cavité située à flanc de falaise, sur la commune de Lano, en Castagniccia. Des vestiges proprement exceptionnels, car ils s'avèrent très rares à l'échelle de la Méditerranée occidentale. "La seule référence connue jusque-là se trouve aux Baléares", glisse Franck Leandri.

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C'est grâce au matériel et aux compétences des spéléologues d'I Topi Pinnuti, que les archéologues ont pu accéder au site.

Au temps de Cucuruzzu et Filitosa

En début d'année, lorsqu'ils sont contactés par les spéléologues Jean-Claude La Milza et Jean-Yves Courtois (lire page ci-contre), les archéologues sont loin d'imaginer la portée de la découverte réalisée par ces derniers. "Il était question de morceaux de bois et d'ossements humains. Nous pensions que ces vestiges remontaient au plus loin au Moyen Âge, confie le responsable du service régional d'archéologie. Une première datation a été effectuée sur des ossements dans un laboratoire en Pologne. Lorsque nous avons appris qu'ils étaient évalués à 1200 av J.-C, cela nous a énormément surpris. Mais, une seconde datation, portant sur les échantillons de bois, réalisée dans un laboratoire américain, a apporté la confirmation que nous espérions."

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Un dispositif impressionnant et très technique a été mis en place pour sortir les vestiges de la cavité dans laquelle ils dormaient depuis plus de 3 000 ans.

À ce moment précis, les scientifiques savent qu'ils tiennent un site de première importance. Alors que l'on mettait à l'abri des dépouilles au creux de cette falaise, la Corse était en train de se couvrir de statues menhirs. Une période passionnante, qui correspond à celle des sites de Cucuruzzu et de Filitosa, mais dont on ne sait pas grand-chose en matière de pratiques funéraires. Ces cercueils en bois sont une opportunité inouïe. Comment ont-ils traversé le temps ? Sans doute en raison d'une association de paramètres, liés à l'environnement calcaire dans lequel ils ont été placés, l'altitude de la cavité (1 000 mètres) et l'essence retenue par ceux qui les ont façonnés. À savoir l'if, autrefois courant en Corse, qui a la caractéristique d'être imputrescible. Sachant que plusieurs civilisations anciennes voyaient aussi en lui un puissant vecteur, facilitant le passage vers l'au-delà...

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Les vestiges des sépultures sont arrivés à Grenoble, lundi dernier, dans un laboratoire spécialisé en matière de conservation. Pour assurer leur transport en toute sécurité, des caisses sur-mesure avaient été prévues.

Au mois de juin dernier, quatre archéologues, accompagnés par les spéléologues, se rendent à nouveau à Lano pour préparer le vaste chantier archéologique qui s'est déroulé samedi et dimanche derniers. "Sans les spéléologues, nous ne serions jamais arrivés à nos fins. Le maire, Pierre Leschi, nous a aussi beaucoup aidés, souligne Franck Leandri. Un prélèvement aussi délicat, à flanc de falaise, constituait une première sur l'île. En terme de logistique, cela tenait de l'opération de sauvetage en montagne."

Par Sebastien PISANI

Plus d'informations dans Corse-Matin du 21 octobre

Source URL:
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18/10/2015

Vannina Bernard-Leoni et les voyages

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"Et si on vend la Corse ?"

07/10/2015

La dernière sortie d'Yves Calvi dans " C dans l'air ". Mais est-ce nécessaire d'en parler ?

Pudemu, pour en finir avec la politique politicienne

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Traduction: Droite, Gauche et nationalistes, tous dans le même sac…

Le mouvement Pudemu est né en septembre dernier et veut changer la manière d’exercer la politique en Corse. Son porte-parole, Norbert Paganelli, revendique une démarche populaire afin d’en finir avec la politique politicienne. Il pourrait même constituer une liste afin de faire entendre sa voix.

Vous êtes à l’origine de ce collectif, quel est votre objectif ?
Nous souhaitons, avant tout, donner la parole à ceux que l’on n’entend jamais afin de réfléchir collectivement à l’avenir de cette île. Il s’agit là d’une volonté de changer radicalement la manière de faire de la politique.
Dans votre texte fondateur vous critiquez cette hyper-professionnalisation de la vie politique…
Oui, puisque certains n’exercent plus d’autre métier que celui de politicien professionnel souhaitant, avant tout, être reconduits dans leur fonction tout en cherchant à obtenir d’autres mandats. Nous observons que nous avons aujourd’hui les enfants, voire les petits enfants de ceux qui étaient en place il y a tant et tant d’années. Nous pensons qu’il n’est plus possible de continuer à fonctionner de cette manière et il faut absolument que les organisations politiques quelles qu’elles soient, s’attachent à présenter des candidats ayant un autre profil et ne disposant pas d’autres mandats. Nous observons, hélas, que sur bien des listes figurent des candidats qui disposent d’autres mandats et depuis fort longtemps. Ce cumul des mandats dans le temps et dans l’espace doit s’achever afin que davantage de personnes puissent participer à la vie politique.
En devenant un professionnel de la politique, l’élu se coupe du peuple qu’il est censé représenter et cela jette un discrédit sur la démarche politique qui dans son essence est noble puisqu’elle vise à défendre l’intérêt général. Inversement, en n’ayant qu’un seul mandat, l’élu consacre toute son énergie à la mission que le peuple lui a confiée.
Comment pouvez-vous agir concrètement ?
Nous allons faire connaître notre position qui, pour l’instant, n’est présente que sur les réseaux sociaux en organisant prochainement une conférence de presse destinée à toucher un public plus large. En nous nommant Pudemu nous avons voulu faire un clin d’œil au mouvement espagnol Podemos précisément parce que ce mouvement état composé de personnes ne venant pas du sérail politique et qui ont réussi à ouvrir un vaste débat sociétal. Il est vrai que notre positionnement n’est pas identique car Podemos se situe clairement à gauche alors que nous avons parmi nous des gens de gauche, de droite et des nationalistes. Toutes ces personnes disent clairement qu’il faut changer de manière de faire de la politique en ouvrant largement le débat. En fait, nous pouvons agir très concrètement sur le débat même sans être présents au sein d’une liste, par exemple en invitant les électeurs à biffer les noms des personnes qui détiennent déjà un mandat… Cette revendication du mandat unique est vraiment révolutionnaire par les conséquences qu’elle peut impliquer…
Pensez-vous intervenir directement dans la campagne électorale ?
Intervenir oui, d’une manière ou d’une autre. Pour ce qui est de notre participation à la constitution d’une liste nous en discutons entre nous et avec d’autres…

SEPTEMBRE 2015

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Centre culturel Alb'Oru : le trait d'union entre une ville et sa population

Publié dans Corse Matin le jeudi 24/09/2015

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David Devaux et Pierre-Jean Monti sont les architectes qui ont conçu le projet du centre culturel.
Photos Océane Baldocchi

Pour les architectes qui ont pensé Alb'Oru, il ne s'agissait pas seulement de concevoir un bâtiment, de lui donner vie sur le papier et d'en détailler les plans. David Devaux et Pierre-Jean Monti, des cabinets DDA et Atelier Architecture, connaissaient parfaitement l'enjeu. Ils ne devaient pas seulement envisager un centre culturel mais le point culminant d'une rénovation urbaine entamée voilà plus d'une décennie.
"Il s'agit du pivot du projet ANRU. Le lieu devait être attractif et agréable pour tous les âges, pour faire en sorte que les Bastiais se l'approprient, se rencontrent et s'évadent vers d'autres univers", explique David Devaux.
La première idée était de conserver un maximum d'espaces verts qui entourent le site pour rendre le bâtiment visible, au-delà des limites du quartier.
Puis, l'intention visée par les deux architectes a consisté à gommer du paysage les entraves.
Barrières, clôtures, portails ont été bannis du vocabulaire pour concevoir un espace où l'intérieur se mêle à l'extérieur.

Une boîte dorée suspendue dans les arbres

"Le premier niveau apparaît comme suspendu dans l'espace vert, c'est une sorte de boîte dorée qui dialogue avec les habitants, le quartier et le reste de la ville et demeure en relation avec l'horizon, note Pierre-Jean Monti. Il reste en continuité avec le proche environnement. D'ailleurs, il n'est plus question aujourd'hui de centre culturel des quartiers sud mais de l'Alb'Oru qui appartient à toute la population."
Le challenge était de haut niveau mais à l'appréciation du résultat, le public se rendra compte aisément que le but a été atteint. À l'intérieur, tout converge autour de la médiathèque et de la salle de spectacle. Cette dernière, ancrée dans le sol, s'élève sur les trois niveaux que compte le centre culturel. Les visiteurs peuvent y accéder directement par l'entrée du haut. Elle est isolée et a été pensée au départ spécialement pour recevoir de la musique amplifiée. Finalement, le duo d'architecte a apporté sa petite touche personnelle en offrant un niveau d'acoustique parfaitement adapté au chant polyphonique. À l'étage, la médiathèque s'étend sur quelque sept cents mètres carrés et là encore, l'espace demeure complètement ouvert sur l'extérieur.
"L'idée était qu'on pouvait prendre un livre et sortir dans le parc, ce qui n'est pas possible en général dans une bibliothèque, poursuit David Devaux. Les coursives qui se trouvent tout autour de la médiathèque permettent au public d'être aussi en extérieur. Elles seront aménagées avec des fauteuils pour en faire un coin propice à la lecture, à la détente et pourquoi pas à la méditation."
Les espaces de travail, de consultation ne sont pas cloisonnés. Une salle d'animation propice pour organiser des stages ou des réunions associatives complète l'étage.

Un projet, deux visions municipales

Pour lier le spectacle à la lecture, tout le hall d'entrée devient un lieu de rencontres et d'échanges.
"Il est en continuité avec l'accueil, il permet de prendre un café, en lisant son journal et le soir il devient un foyer ou sert de préambule aux spectacles. C'est un trait d'union entre les deux niveaux."
Le projet pensé par l'ancien maire Émile Zuccarelli et son équipe s'est poursuivi sous la mandature de Gilles Simeoni.
Pour les architectes, la transition a amené avec elle, son lot de modifications, les deux majorités municipales ne nourrissant pas tout à fait la même vision du projet.
"Nous avons agrandi la médiathèque d'une centaine de mètres carrés et ajouté deux studios de musique afin d'offrir plus d'espace au public. Pour cela, nous avons réduit les lieux destinés au stockage ou à l'intendance de l'Alb'Oru", précise Pierre-Jean Monti. Enfin, à l'extérieur, un petit théâtre de verdure complète l'équipement et permettra d'organiser plusieurs manifestations notamment l'été.

Il ne reste plus au public qu'à se laisser tenter par une visite guidée, ce week-end pour juger du travail accompli. Avant de donner au lieu ce qu'il n'a pas encore, une âme.

Lire le dossier complet dans Corse-Matin du 24 septembre

Une nouvelle salle à Calvi

ccc

Corsu mezu mezu

mezu

Ce fromage qui n'est pas en odeur de sainteté...

03/09/2015

casgiu

Il est arrivé une drôle de mésaventure à Denis Solier qui tient, au centre de la cité calvaise, un commerce de fruits, de légumes et de produits corses.

Il a reçu la visite d'un émissaire de la direction de la consommation et de la répression des fraudes. Cette dernière avait été rendue destinataire d'une lettre d'une touriste du nord de la France qui se plaignait d'un fromage de Calenzana qu'elle avait ramené dans ses bagages.

Elle n'a pas supporté l'odeur, et elle a aussitôt conclu qu'on lui avait refilé un "casgiu" avarié.

Évidemment l'inspectrice, qui avait flairé le tuyau bidon, s'est rapidement rendu compte que les fromages de M. Solier étaient parfaitement conservés.

Seule la connerie n'est pas périssable...

Source : Corse Matin

AOÛT 2015
AOÛT 2015

inC

Rencontres de Calenzana : des menaces malgré le succès.

calenzana

Tribune libre : "Quand le FLNC ridiculise l'Etat français"

Je découvre seulement maintenant (29/08/2015) cette tribune sur le blog de "Massimu"
source : http://blogs.mediapart.fr/blog/massimu/...

13 juillet 2015 | Par Massimu

Le 13 juillet 2015, un an après l'annonce de sa démilitarisation progressive, le FLNC confirme dans un communiqué l'abandon définitif de la lutte armée. Faisant la nique à tous ceux qui croyaient, en jouant la montre, précipiter le retour de la prétendue "violence politique" en Corse, le front fait à nouveau preuve de maturité, mettant à la fois la société corse et un Etat soi-disant démocratique au pied du mur. Quand les clandestins ridiculisent les ministres.

En juin 2014, ce fut un mélange de stupeur, de soulagement et d'inquiétude. Le FLNC arrêtait ses activités militaires après 38 ans de lutte (1). Qui allait jouer les garde-fous ? Combien de temps allait durer le passage de pouvoir "protecteur", cet étrange transfert de compétences des bombes vers les lois, des cagoules aux cravates ? Des incertitudes qui ont secoué une société qui jusque-là, se montrait parfois critique enves le mouvement clandestin, et qui se retrouve paradoxalement désemparée lorsque les grand frères en treillis ne sont plus là. Comme un adolescent qui veut quitter la maison familiale à 18 ans et qui, quelques semaines plus tard, rentre pleurer dans les jupes de sa mère, apeuré par le monde des adultes. Car il était facile de critiquer l'action du front lorsqu'on savait que de toute manière, il était là, et qu'il protègerait les intérêts des Corses quelles que soient leurs opinions, leurs origines ou ambitions. Mais quand le rempart tombe, quand l'armée de l'ombre tente d'éclairer le peuple, tout le monde se retrouve en première ligne face aux agresseurs, qu'ils prennent le visage d'une multinationale, d'une banque ou d'un Etat. Et c'est tout de suite beaucoup moins drôle. Alors, beaucoup de Corses se sont mis à espérer le retour d'une lutte armée, se persuadant qu'ils n'avaient pas les épaules pour mener le combat démocratiquement. Un an plus tard, le Front prend le contrepied de cette morosité générale, enfonce le clou avec un communiqué plus qu'optimiste et remet définitivement le couvert de la paix : les armes n'auront plus cours, c'est définitif. Il n'y a donc plus que deux choix : la mobilisation générale ou la disparition du peuple corse.

Cette mobilisation générale, elle n'a pas véritablement encore eu lieu. Elle en est au stade embryonnaire, portée essentiellement à l'assemblée par les indépendantistes, et dans la rue par la jeunesse, à laquelle le FLNC tire pour la seconde fois son chapeau dans son communiqué. Si les signes d'une unité globale se sont faits entrevoir (manifestation pour une solution politique à Ajaccio le 13 juin 2015 et mobilisation autour de la grève de la faim de la GI (2), entre autres), cette dernière, fragile, se craquèle, subissant les secousses des ambitions et des rivalités qui iront crescendo jusqu'en décembre, mois du scrutin le plus attendu par les Corses : le territorial.

Et l'Etat dans tout ça ?

Il y a quelques mois de ça je titrais "pour faire la paix il faut être deux". Si le premier acteur de la paix s'est fait connaître depuis fort longtemps et rappelle sa position aujourd'hui, le second traîne toujours la patte pour s'asseoir à la table des négociations. Si les conséquences politiques n'étaient pas aussi dramatiques, l'attitude de la France depuis un an pourrait prêter à sourire. Des ministres qui, tels des enfants vexés, non contents de ne pas accéder à la demande de paix, refusent toute avancée, tout dialogue ou signe de détente, se renfermant chaque jour dans leur stratégie du pourrissement vouée à l'échec : voilà la grandeur de la France au XXIe siècle. Ne voulant pas perdre la face devant son peuple qui n'a plus confiance en lui, l'Etat, incapable de régler des questions de politique internationale, de crise ou d'islamisme, montre ses muscles face à une petite île qui ne réclame rien d'autre que la démocratie et l'application de mesures votées dans une assemblée légitime. La France, qui ne vaut plus rien sur la scène internationale, se ridiculise de plus en plus dans sa gestion des conflits internes. C'est malheureusement la Corse qui fait les frais de la déliquescence de ce pays, miné par son jacobinisme, sa corruption, sa construction historique bancale et sa gestion désastreuse. Le monde n'a pas fini de rire, après ce 13 juillet où une armée de libération invaincue rappelle calmement à la cinquième puissance mondiale qu'elle est en train de se comporter comme la pire des dictatures. Ce même jour, Bernard Cazeneuve en visite en Corse s'est "refusé à tout commentaire" concernant le communiqué, et n'a pas répondu aux questions de la presse concernant l'amnistie des prisonniers politiques et recherchés. Pire que de dire non : ne pas savoir quoi dire. Le lamentable est atteint.

Si le dialogue de sourds entre une Corse apaisée et un Etat en tension n'aboutira à rien, l'option internationale, elle, s'avère payante. Depuis plusieurs mois, à Barcelone, à Bruxelles, à Edimbourg ou ailleurs en Europe, on s'intéresse au comportement étrange de la patrie de De Gaulle vis-à-vis de celle de Paoli. Une délégation de la GI reçue à Bruxelles pour évoquer ces problèmes début juillet (3), une conférence internationale organisée par Corsica Libera en présence de Michel Rocard et d'autres éminentes personnalités où l'on met le doigt sur le blocage et où on le dénonce, des articles sur ce sujet dans des quotidiens catalans... le jeu parisien commence doucement à se dévoiler à la face du monde et la solidarité s'organise. En pondant une telle communication aujourd'hui (4), sereine, déterminée et confiante, le FLNC appuie donc là où ça fait mal, noyant les espoirs de ceux qui veulent voir la Corse retomber dans une spirale violente, poussée à bout par le mépris attentiste et provocateur de Paris. Ainsi, le FLNC, par un simple texte, prouve qu'un clandestin peut être parfois bien plus mûr politiquement que des ministres apprentis sorciers, dont l'ignorance rivalise avec le manque de bon sens. Aux Corses de prendre définitivement leurs responsabilités, sans attendre le retour des anges gardiens qui ont, pour toujours, rangé leurs ailes au placard.

1 http://france3-regions.francetvinfo.fr/corse/2014/06/25/corse-le-flnc-depose-les-armes-506193.html
2 http://www.corsenetinfos.fr/Manifestazione-pe-una-soluzione-pulitica-Plus-de-2-000-personnes-defilent-a-Ajaccio_a15691.html
http://www.corsenetinfos.fr/Militants-de-la-Ghjuventu-Indipendentista-en-greve-de-la-faim-Encore-des-soutiens_a14886.html,
3 http://cuscenza-rp.tumblr.com/post/123121300514/paris-nous-tourne-le-dos-leurope-nous-tend-les
4 Texte intégral de la communication du FLNC : http://www.corsematin.com/article/derniere-minute/un-an-apres-le-flnc-interpelle-a-nouveau-letat.1865962.html

Histoires d'affiches...

Mise au pont du groupe Sumente :
Aprés de nombreux messages,de nombreux appels, suite aux propos tenus à l'encontre du groupe Sumente par Petru Guelfucci sur le forum de RCFM, je ne voulais pas faire de vagues, mais vu que tout le monde veut des reponses .....
Jeudi 20 août plusieurs appels et messages sur mon portable etant dans le Cap.....!!! tous les appels me demandaient ce qu'il s'etait passé avec Petru, car il avait appellé la radio et avait tenu des propos très virulents et proféré des menaces à l'encontre des membres de Sumente, soi disant que nous aurions enlevé des affiches sur la region de Cervioni où Canta 73 se produira le 26 août (Sumente a chanté le 20 à Linguizzetta ! ).
Donc trés choqués, nous avons appellé RCFM à notre tour le lendemain, pour bien expliquer la maniére d'être et d'agir au quotidien de Serge et Dumé, d'ailleurs repris en choeur par des amis de Sumente sur les ondes. U scopu di Sumente est le respect de tous et celui de sa TERRE, nous nous faisons les nettoyeurs des fossés lors de nos affichages (des tas de vieilles affiches jonchent le sol !!! ghjè un scandalu), nous n'enlevons jamais les panneaux de dates à venir, bien au contraire, nous les rattachons !!!! bon bref !!!
Nous avons été choqués d'être traînés dans la boue de la sorte et d'autant plus par ce personnage illustre, jusqu'à ce jour à nos yeux. Plusieurs messages de soutien depuis 2 jours maintenant : des groupes, des chanteurs, des anonymes et beaucoup d'amis !!! Pour couper court et arrêter l'affaire, sachez que Petru nous a telephoné et s'est excusé !!!! Donc dans ce monde difficile de la culture où malheureusement Sumente n'arrive pas à se faire reconnaître médiatiquement, arrêtons de polémiquer ! Et que le chant Corse continue encore plus fort que jamais ; n'oubliez jamais le slogan de Sumente ; u cantu ghjé a maggia chì addunisce i cori ma dinò i populi !

Regrettable mais hélas courant : on m'a relaté des faits semblables en Balagne... Il y a aussi les groupes qui "saturent" l'affichage et ne laissent aucune place aux autres. Ne pourraient-ils pas trouver un terrain d'entente ?

Marco Biancarelli : Revenir sur Prunelli

biancarelli

Sur le blog d'Edmond Simeoni...

Aleria 1975-2015 : le compte n'y est pas

Quand en 1975, nous avons pris les armes, symboliquement, mais publiquement et avec force, c’était pour montrer que la politique coloniale devait cesser, pour affirmer que notre peuple était vivant et avait droit, comme tous les peuples, à la vie et à la maîtrise de son destin. Vous avez aujourd’hui la réponse et, ce premier acte fondateur de la révolte corse contemporaine, a précédé la naissance du FLNC en Mai  1976 puis un renforcement et une diversification, un enracinement de toutes les luttes, économiques, sociales, culturelles qui durent encore aujourd’hui.

Quarante ans marquent un temps suffisant pour évaluer les résultats, réfléchir et chercher les voies et moyens, avec d’autres, d’ouvrir les pistes de l’avenir.

Le colonialisme français a-t-il modifié sa politique ? Assis sur le système claniste, il a corrompu, réprimé, louvoyé, ridiculisé la démocratie par les fraudes et le clientélisme, mais il n’a jamais cédé sur l’essentiel, « sa souveraineté et son unité qu’il veut immuables » puisque ceci  est inscrit dans sa Constitution.
Il a la conviction que le temps joue contre nous ; tant la démographie, que la propriété du sol et des maisons, et enfin l’exil de la jeunesse. IL joue la montre et gagne du temps ; c’est clair, irréfutable. Comment peut-on interpréter autrement la répétition de quatre Statuts en quarante ans ? Frileux, insuffisants, inefficaces, des hochets au rythme d’une réforme tous les dix ans, pour amuser la galerie et faire croire à sa bonne foi. Une seule véritable réforme d’Autonomie Interne aurait suffi….

Mais le masque est tombé aujourd’hui car l’Assemblée de Corse a formulé majoritairement des exigences, importantes mais non déterminantes pour notre avenir collectif. La réponse a été ferme, brutale, négative. L’hypothétique « Collectivité unique » en 2018 est da dernière trouvaille de Paris. Sans vergogne, avec cynisme, assurés qu’ils sont qu’elle ne résoudra rien. Et que le temps aura scellé notre pierre tombale.

Peut-on croire un instant que Charlemagne, Louis  XIV , Napoléon premier soient des accidents d’une histoire qui a fait de la grandeur et de la domination de la France le socle permanent de son existence collective ? L’esclavage, le colonialisme ne sont pas fortuits ; ils s’inscrivent dans la démarche constante d’hégémonie, de supériorité qui est masquée, mais ne trompe personne dans le monde, sous couvert  d’humanisme, du respect des Droits de l’homme, de démocratie, de paix.  La France et le Royaume Uni notamment, hyper nationalistes, allergiques à la moindre concession sur leur souveraineté, pensnet être les meilleures garanties que l’Europe politique, fédérale,  des peuples -la seule solution raisonnable- ne se fera pas.

J’ai eu la conviction que la France ne croyait qu’à la primauté de la force lors d’une rencontre, très révélatrice, avec François Mitterrand à Paris, en 1982, ; il m’a demandé si je pensais que le FLNC pouvait l’emporter militairement contre la France. Je lui ai répondu qu’il me créditait d’un quotient intellectuel assez bas car, je ne voyais pas comment la quatrième puissance du monde, dotée de l’arme nucléaire, armée du droit de veto, pouvait être mise échec par un modeste mouvement clandestin corse.  Ses yeux souriaient, savouraient avec cynisme mais cela devait changer rapidement quand, je lui ai demandé avec beaucoup de déférence, si,alors qu’il était Ministre de l’Intérieur du gouvernement de Guy Mollet , il avait fait guillotiner, en 1957, le militant communiste Yveton, partisan du FLN algérien. Et pourquoi ? Il a acquiescé et invoqué « la raison d’état ». J’ai fait remarquer à Mr Mitterrand que la France  avait gagné militairement en Algérie après les opérations Challe mais qu’elle avait quand même perdu la guerre car elle était adossée à une cause injuste et que la force, seule, n’était pas une garantie de victoire politique. J’ai terminé mon intervention, en lui disant que si je pensais que le FLNC pouvait gagner militairement, je serais depuis longtemps, un de leurs responsables. « Pourquoi ?  »  m’a-t-il demandé. « Parce que la politique française dans l’ile poussait à la révolte et à la rupture, comme en Indochine et en Algérie ».
Aujourd’hui, la donne est claire ; malgré les luttes inégales, les sacrifices, les avancées ponctuelles sur certains dossiers, la question du droit à l’existence, et à la reconnaissance, à la maîtrise du peuple corse sur sa terre n’est pas résolue. Pire, elle est niée, refusée.

Pire, les politiques impulsées et appliquées  par la France échouent dans d’innombrables domaines ; économie, social, culture, transports, société, violences etc ; Paris a dit « Non » aux propositions de l’Assemblée de Corse. Feindre de croire à une possible évolution positive de son attitude retarde la prise de conscience, freine la mobilisation. Nous sommes confrontés au défi le plus important de notre vie, depuis Pasquale Paoli : la survie du peuple et de la nation.

Nous avons les ressources – humaines ici et dans la diaspora, d’épargne, naturelles, techniques- pour arracher notre droit imprescriptible à vivre, en vertu de l’Histoire, du droit international ; et ensuite pour construire un Pays moderne, ouvert sur l’Europe et le monde, mieux développé, plus juste, dans le cadre d’un nouveau contrat avec la France, l’Europe, respectueux des intérêts légitimes des parties. Le combat doit prendre appui sur le dialogue, le débat, les luttes démocratiques et non-violentes pour bâtir un avenir de paix, de fraternité, de solidarité et de prospérité, non pas égoïste mais ouvert aux autres peuples.

Niolu le 13 Août 2015
Dr Edimondu Simeoni

La loi Macron ou le naufrage de l’État de droit

Rédigé le Mercredi 12 Août 2015

« Nous n’avons cessé de dénoncer les atteintes délibérées au patrimoine du peuple corse depuis des décennies et le dessein constant de la France, depuis Pontenovu en 1769, de nous priver de notre identité, de nos droits imprescriptibles à exister et à maîtriser notre destin ; la loi douanière scélérate de 1812 à 1912- elle détaxait les marchandises françaises arrivant dans l’île et taxait nos exportations, quel cynisme !!!- fait partie de l’arsenal de la dépossession ; la suppression des Arrêtés Miot procède de la même démarche ; la non-application de la loi sur la protection du littoral que les écologistes combattent avec pugnacité, détermination, compétence et avec de nombreux succès, est , avec la spéculation, un moyen grave de l’aliénation de la terre.

Et là, vient Macron, banquier de formation qui ne semble préoccupé ni par les problèmes de l’état de droit – gargarisme français, non-crédible- à usage international- ni par les notions de justice. Il complète la panoplie des armes de la dépossession en ajoutant, grâce à l’article 111 de sa loi, des inclusions qui sont un défi au droit, à l’honnêteté, à la dignité du peuple, à la démocratie.

Combien faudra-t-il encore d’exactions pour dessiller le peuple, mobiliser les élus, sensibiliser la population et passer à l’action de masse, démocratique et surtout non-violente , ? Il n’y pas de limite aux provocations et Paris – qui refuse le dialogue et les revendications de l’Assemblée de Corse- espère, suscite, des ripostes violentes pour se draper dans l’attitude vertueuse de l’état de droit et faire dégénérer la situation ; sa seule chance désormais de perpétuer sa tutelle coloniale sur l’île. Si le peuple corse connaissait la vulnérabilité de la France , face à une attitude déterminée, organisée du peuple corse de l’île et de la diaspora, avec un recours à l’opinion publique et à la conscience internationales, alors il s’engagerait sans tarder. L’allumage est laborieux !!! »



Emmanuel Macron
Emmanuel Macron

En matière d’urbanisme plus encore que dans d’autres domaines, la démission de l’État a pris, au cours des dernières années, des proportions spectaculaires en Corse : contrôle de légalité quasi-inexistant, non-respect assumé des décisions du tribunal administratif de Bastia, délivrance de milliers de permis illégaux, complicité dans l’adoption de PLU contraires à la loi Littoral, absence de contrôle a posteriori de la conformité des constructions aux autorisations accordées, etc.
 
Mais un pas supplémentaire - peut-être décisif - a été franchi avec l’adoption de l’article 111 de la loi Macron, entrée en vigueur le 6 août dernier. Cet article rend désormais impossible la démolition de constructions édifiées conformément à un permis de construire accordé illégalement, sauf sur de petites portions du territoire : principalement dans la bande littorale des 100 mètres, les espaces remarquables (et encore, à condition qu’ils aient été délimités dans un PLU, ce qui est rarement le cas en Corse), les sites classés ou inscrits, les zones Natura 2000.



Maitre Martin Tomasi
Maitre Martin Tomasi
En-dehors de ces secteurs, il ne servira plus à rien aux particuliers ou aux associations de déférer un permis de construire devant le tribunal administratif : même si le permis est annulé, la construction, elle, subsistera, son propriétaire s’exposant seulement au paiement d’une indemnité dérisoire.
 
En Corse, dans le contexte que nous connaissons, marqué par l’attribution de permis de complaisance, qui plus est souvent délivrés de façon tacite, cette réforme produira immanquablement des effets désastreux. En accordant l’impunité à ceux qui piétinent les règles d’urbanisme, elle est un véritable pousse-au-crime, et fait craindre une accélération brutale du phénomène d’urbanisation anarchique du littoral corse.

Saisissante illustration du délitement d’un l’État qui en vient à créer lui-même les dispositifs permettant de déjouer l’application de ses propres règles !
Devant cette faillite intellectuelle et morale, et face au désastre qui s’annonce pour la Corse, notre réponse ne peut être que politique. Elle doit consister à créer les conditions d’une autonomie véritable permettant aux corses d’assurer eux-mêmes collectivement, par l’adoption de règles adaptées, la préservation du patrimoine naturel de leur île. 

Maitre Albert Tomasi et Edmond Simeoni

edmond

Giacobbi et Rocca Serra, un tandem surréaliste

Rédigé le Mercredi 5 Août 2015

Le théâtre politique corse commence à s’animer- proximité de l’élection territoriale oblige - ; les tout premiers couteaux entrent en scène.  Deux ténors de la pulitichella locale sont abondamment intervenus dans la presse ; l’un pour glorifier son bilan et affirmer sa certitude de la victoire au premier tour, second tour et troisième tour ! Cibba ! l’autre pour se justifier laborieusement de créer une autre liste de droite, concurrente de l’officielle.

Ils ont en commun d’avoir une intelligence certaine, une très longue expérience, éprouvée, de la vie publique, une immodestie plus ou moins masquée ; Camille est un Corse matois, mâtiné de parisianisme tandis que Paul, rond, livre avec componction, des constats pour le moins contestables, avec une agressivité sous-jacente difficilement contenue. Ils ont en commun aussi la certitude d’être bien-nés, de sous-estimer les autres, d’êtres issus de deux dynasties, clanistes, rigides, - utilisant les mêmes moyens anti-démocratiques, concurrentes dans la compétition politique mais convergentes et complices de l’Etat-  qui se sont partagées la Corse depuis des décennies, avec le bilan brillant que chacun constate.
Giaccobi et Rocca Serra, un tandem surréaliste

Paul Giaccobi s’est présenté avec Maria Giudicelli récemment à Venacu – clin d’œil aux racines et à l’histoire de la saga familiale- pour annoncer, sans surprise leur tandem, à gauche, aux prochaines élections territoriales de décembre 2015. De sa communication actuelle, émergent des points notables :
C’est la dénégation : dénégation « il n’ y a pas de système Giaccobi » ;  « le succès repose uniquement sur le travail, le respect, l’humilité » ;  l’Etat remplit bien son rôle dans la lutte contre la Xyllella Fastidiosa ; « je n’ai aucun ennui judiciaire » ; il est, dit-il, victime de calomnies et d‘une certaine presse ; la situation de la CTC est , selon lui, globalement satisfaisante.

Prétendre que Paul Giaccobi n’a rien fait, dans sa mandature,  serait une contre-vérité : implication dans le problème du logement, création de l’Agence foncière etc, notamment, prouvent le contraire ; mais la liste des projets en souffrance est édifiante : Padduc, Miot, SNCM, déchets, énergie, revendications institutionnelles en panne ; idem pour la situation dont une partie non-négligeable est imputable à des facteurs extérieurs à l’île : économie en berne- chômage, précarité -, finances en berne. Mais, surtout, nier que cette mandature est celle du clientélisme arrogant, relève de l’inconscience ou du cynisme !!! Le grand dessein serait la Collectivité unique en 2018 !! Avec, outre les aléas d’une telle entreprise, le résultat incertain de l’élection présidentielle en 2017 et le handicap de ses rapports exécrables avec Hollande et Valls qui ne l’aident pas !!


Giaccobi et Rocca Serra, un tandem surréaliste
Camille de Rocca Serra remplit correctement son travail de député, par son assiduité, ses interventions sur la Corse ; par contre, après l’échec de 2010, il a totalement disparu de la scène régionale et l’absence quasi-totale de son groupe à la CTC, - en dehors de quelques sujets brûlants- depuis cinq ans, est scandaleux, inadmissible. Comment une force politique majeure de l’île peut-elle justifier l’inacceptable ? que pensent ses électeurs de ce mépris de la démocratie ? Les divisions internes peuvent-elles justifier de déserter la participation impérieuse et le devoir ? Il revient, revigoré par la prochaine échéance territoriale ; il veut axer sa campagne sur les «  valeurs » ? Lesquelles, celles qu’il a foulées aux pieds, en Corse, avec la dynastie ? Celles de l’humanisme, de la démocratie ou du clientélisme ?  Il dit notamment vouloir «  Rassembler, aller vers une jeunesse corse qui a du mal à se trouver car il y a absence d’offre… Université, formation, économie numérique, agriculture raisonnée, la jeunesse veut s’investir et il faut l’aider » (fin de citation à Corse  Net Infos). Surréaliste. Il s’adresse à une jeunesse qui connait le bilan calamiteux de clans, de l’Etat – tous gouvernements de gauche et de droite confondus- et sur lequel, il va bien falloir s’expliquer pendant la prochaine campagne ; une jeunesse qui sait que toutes les avancées majeures sont dûes au mouvement national et aux progressistes, contre les clans.

Nous approchons de l’épilogue : la Corse joue sa survie. L’île ainsi que le peuple corse de l’ile et de la diaspora ont des atouts majeurs ; la gauche, la droite, les nationalistes ont suffisamment de militants, d’électeurs, de compétences, pour construire, dans le dialogue, une plate-forme  d’émancipation, un programme pour éliminer le clanisme – y compris dans ses ramifications moins visibles- et constituer, après les élections et dans la transparence, un gouvernement d’union sur des bases claires, avec un contrat, des priorités, des échéances, un calendrier, dans le cadre euro-méditerranéen.

Ce qui frappe chez les chefs de clans, c’est le discours d’un autre âge, le refus de la réforme, le choix  d’arguments dépassés, l’absence de stratégie, de vision pour la Corse et un ensemble disparate de propositions, initiatives,  qui ne sauraient constituer un projet.

Tous ensemble, nous devons déraciner le système claniste qui ne peut plus et ne peut pas, ne doit pas trouver des cautions de véritables citoyens, attachés à la démocratie et à l’éthique car lui aussi est à l’origine de tous nos maux ; il n’est pas soluble dans la démocratie ; il nous faut contraindre l’Etat au dialogue. Alors viendront la liberté, le développement partagé, la justice sociale et la paix.
 
Dr Edmond Simeoni
Aiacciu u 5 d’Aostu 2015

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JUILLET 2015

A Bandera à Ghisonaccia

ghisonaccia

Tribune libre : Après l'affaire de Prunelli

tribune

JUILLET 2015

Le "Paroles de Corse" de juillet-août :

PdC_juillet

JUIN 2015

PdC_juin

Disparition de l’interprète et parolière Marie-José Casanova

mjc

L'interprète et parolière Marie-José Casanova est morte en Corse, son pays natal, à l'âge de 75 ans.

Avant de devenir parolière, Marie-José Casanova avait commencé sa carrière en tant qu'interprète. À la grande époque de Saint-Germain des Près, au début des années 60, elle a chanté avec talent les textes de Boris Vian. Elle prêtera aussi sa voix de diseuse au cinéma, notamment pour le film de Jean-Luc Godard, Charlotte et son Jules ( 1961) qui avait pour interprète principal Jean-Paul Belmondo, alors encore jeune premier idéal de la Nouvelle Vague.

À partir des années 70, elle va se consacrer exclusivement à l'écriture de chansons. Elle devient une auteur recherchée. Des stars comme Robert Charlebois et Sylvie Vartan utiliseront avec bonheur son talent. En 1984, elle va signer l'un des plus grands tubes de l'été de ces cinquantes dernières années. Pour le couple de chanteurs Peter et Sloane, elle couche sur le papier une déclaration d'amour enlevée qui touche tous les publics. Besoin de rien envie toi restera numéro un du Top 50 presque 4 mois. Un record.

Prunelli di Fiumorbu

prunelli

Malcolm Bothwell n'est plus

bothwell

Prunelli di Fiumorbu : la Corse, société multilingue et le déni de réalité

19 06 2015

Les événements de l’école de Prunelli di Fiumorbu, avant d’être rapidement noyés dans le flux de l’information, viennent nous rappeler que la question du racisme n’est ni ponctuelle ni éphémère. Qu’elle s’inscrit dans un contexte complexe, marqué par la crise économique, les doutes et les craintes provoqués par la mondialisation, la déshérence sociale, la confusion idéologique aggravée par les attentats du 11 janvier dernier. Qu’il existe aujourd’hui une réalité niée, déniée : la Corse est devenue une société multilingue, donc multiculturelle, à l’instar de la France dans son ensemble et de l’Europe de l’Ouest en général.
Lorsque l’on dit que la Corse est multilingue et multiculturelle, qu’entend-on exprimer ? Il ne s’agit, ni plus ni moins, que de décrire ce qui est : coexistent ainsi et, jusque-là, sans trop de heurts, une communauté historique, les Corses, des « Continentaux » ou « Pinzuti », des Italiens et Sardes d’origine, qui se sont toujours rapidement fondus dans la communauté historique, une communauté maghrébine, et non arabe, ainsi que stigmatisée dans les graffitis, une communauté portugaise, enfin un certain nombre de groupes issus des pays de l’est, depuis quelques années.

A l’exception des Continentaux et des Corses, toutes les populations immigrées sont venues sur notre sol pour obtenir des conditions d’existence moins âpres et un avenir plus clément pour leurs enfants.
En tant que Corses, c’est exactement ce que nous avons fait avant et après la guerre de 14 ; mais nous « n’émigrions » pas puisque nous rejoignions massivement les possessions françaises, les colonies. Les immigrés actuels occupent des emplois dont nous- mêmes ne voulons plus et dont nous voulons à tout prix préserver nos enfants ; nous exercions, dans les colonies ou en France continentale, des métiers qui, même subalternes, nous procuraient le sentiment d’une pleine intégration. Pourtant, intrinsèquement parlant, nous étions un peuple pauvre, et nous partions pour des raisons économiques impérieuses. Exactement comme les immigrés que nous côtoyons actuellement.

Dans cette Corse multilingue et multiculturelle, chacun parle (ou essaie de parler) sa ou ses langues : ceci est tout à fait légitime car il s’agit d’un usage spontané ou désiré, dont on ne peut se défaire comme par magie. Car la langue, n’importe laquelle, répond à des nécessités psychologiques et sociales. Mais nous vivons dans un pays d’idéologie monolingue et monoculturelle, selon l’article 2 de la Constitution. Penser qu’en France, ou en Corse, tout le monde parle le français, ou plutôt ne parle que le français, est au mieux, une douce illusion, au pire, un déni de réalité.
Le français est légitime et nécessaire, comme langue commune. Dans l’île, le corse tout autant, comme langue de la communauté historique et comme langue de cohésion sociale. Les langues immigrées ne peuvent en aucune façon y devenir officielles : elles sont reconnues institutionnellement dans les pays d’origine de leurs locuteurs (ce qui n’est que très récemment le cas pour le berbère, langue très usitée chez les Marocains de Corse), des médias les diffusent sans difficulté via le satellite et internet. Mais elles sont aussi nécessaires à ceux qui les parlent, et ceci pour au moins deux raisons :
- parce qu’elles correspondent à des besoins familiaux et individuels, affectifs, cognitifs, culturels;
- parce que leurs locuteurs ne savent parfois pas parler français, et qu’il faut bien leur laisser le temps de l’apprendre : ceux qui avons un certain âge avons bien connu des personnes âgées qui ne parlaient que corse, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui ; de plus, dans les administrations, bien souvent les fonctionnaires locaux étaient obligés de parler corse pour expliquer les demandes de l’administration et, ce faisant, les exigences de la loi française : ils ne trahissaient alors pas la France, ils la servaient.

Aujourd’hui, nombre d’écoles primaires de l’Académie sont bilingues, et cela ne choque plus personne. Les travaux du Conseil de l’Europe, depuis les années 90, préconisent le développement d’une éducation plurilingue et interculturelle : l’Europe est diverse, il faut éduquer à la diversité. Ce nouveau paradigme heurte la tradition monolingue des éducations nationales européennes et les mentalités qu’il a forgées. Mais il correspond à la réalité de nos sociétés.
Qu’ont cherché à faire les enseignants de Prunelli di Fiumorbu ? D’ouvrir, avec beaucoup de modestie et d’intelligence, la porte aux langues de leurs élèves. L’école est bilingue, elle accueille des élèves de plusieurs origines, elle fait entendre ces langues dans l’un des plus beaux hymnes dédiés à la paix et à la fraternité, Imagine, de John Lennon : ce faisant, elle reconnaît une réalité, elle ne l’impose pas.
Le seul couplet posant problème est celui chanté en langue arabe : pourquoi personne ne se récrie pour l’anglais ou l’espagnol ? Poser la question, c’est y répondre. Un faisceau de causes multiples, qu’une enquête précise permettrait de mettre en lumière, donnera par hypothèse la clé. Ce qui est stigmatisé ici, c’est la langue du faible, de celui qui, parfois, n’a même pas les mots pour défendre ses droits en français. Il n’est sans doute pas innocent que les faits se soient produits dans un bassin de vie où se manifestent à coup sûr des inégalités territoriales en termes de niveau de vie, d’accès aux services et à la culture.
Une demi-heure de répétition en langue arabe, dans trente-six semaines de cours, à raison de vingt-quatre heures hebdomadaires, va-t-elle bouleverser la donne scolaire ? Aucunement. Mais le chemin de l’école du XXIe siècle est là, celui de l’ouverture aux langues et aux cultures des élèves. En sachant bien entendu définir les exigences, les hiérarchiser et les ordonner. Sans dénier à aucun enfant, ni à ses parents, le droit d’être ce qu’il est au moment où l’école démocratique l’accueille pour le former.

Pascal Ottavi
Professeur des universités
Università di Corsica Pasquale Paoli

Imagine...

Imagine, de John Lennon: une chanson emblématique des années 1970 prônant la paix et la fraternité que des dizaines d'adolescents ont fredonnée. À Prunelli-di-Fiumorbu, village de 3400 habitants en Haute-Corse, deux institutrices avaient décidé d'utiliser le célèbre titre anglophone pour faire chanter les élèves à la fête de l'école, le 26 juin. Après avoir traduit les couplets de la chanson -accompagnée par d'autres-, elles avaient préparé les enfants à chanter chacun de l'un d'eux en français, corse, arabe, espagnol et anglais. Soit, comme le précise la radio Alta Frequenza, les langues parlées par les élèves de l'école.

Mais l'idée n'a pas plu à certains parents. Plusieurs d'entre eux ont protesté contre ce projet, jusqu'à s'en prendre directement aux enseignantes. Ces dernières auraient été interpellées à la sortie de l'école, tout comme le reste du personnel de l'établissement.

«Des parents ont précisé qu'ils ne voulaient pas que leur enfant parle l'arabe, nous étions prêts à l'entendre. Sauf que certains ne voulaient même plus qu'ils viennent à l'école -et ça ce n'est pas possible- sur ces temps où on aurait fait venir un intervenant d'arabe, une demi-heure, pour la prononciation», a détaillé l'une des institutrices au micro de France 3.
La fête annulée

Les enseignants de l'école primaire de Prunelli-di-Fiumorbu, un village à forte communauté maghrébine sur la façade orientale de la Corse, ont déploré dans un communiqué à l'attention des parents «l'amalgame entre langue et religion ainsi que la désinformation véhiculée par certains parents». Exerçant leur droit de retrait, ils n'ont pas assuré leur service lundi après-midi, accueillant les élèves sans leur faire cours. Ce mouvement doit être reconduit mardi. La fête de l'école a, quant à elle, été annulée, par crainte de «débordements».

«L'espace de neutralité dû aux élèves et la sécurité de personnes ne peuvent être garantis», a estimé l'équipe enseignante, rappelant que «les choix pédagogiques sont de la responsabilité de l'enseignant dès lors qu'ils respectent les programmes d'enseignement inscrits dans les instructions officielles». Le recteur d'académie, Michel Barat, leur a apporté son soutien, stigmatisant cette «attitude inqualifiable contre les valeurs que représente l'école». Des délégués de parents d'élèves ont également fait savoir que seule une minorité des parents s'opposait à ce projet multilingue.

L'inspection d'académie, évoquant dans un communiqué des menaces adressées aux enseignantes, a précisé que certains parents auraient fait savoir qu'ils comptaient «siffler les élèves au moment où les chants se feraient en arabe». Elle a décidé de déposer plainte contre X. Les institutrices ont toutefois précisé à France 3 et Corse-Matin qu'aucune menace directe n'avait été prononcé à leur encontre. «La pression, c'est sur l'école tout entière qu'elle s'est exercée», a expliqué l'une d'elle, indiquant que des rumeurs se sont répandues selon lesquelles la chanson serait intégralement chantée en arabe et que les élèves devraient bientôt suivre des cours de cette langue. La direction de l'école n'était pas joignable mardi matin pour préciser la nature des propos tenus par les parents et les suites attendues.

Source : Le Figaro

Une réaction salutaire parmi d'autres, celle du centre culturel AnimA :

Imagine…

Effarement ? Colère ? Tristesse ? Incompréhension ?

Tous ces sentiments se sont mêlés en apprenant l’annulation de la kermesse de l’école de Prunelli suite aux réactions de quelques parents s’opposant à ce que leurs enfants chantent un couplet de chanson en langue arabe, parmi d’autres langues…

L’histoire commençait plutôt bien avec le beau projet de faire chanter des enfants d’une même école, enfants de plusieurs langues et cultures « d’origine ». De les faire chanter dans plusieurs langues une chanson d’espoir,  parlant de fraternité humaine et de partage…

Mais la réaction n’a porté que sur la langue arabe, langue pourtant pratiquée en Corse par une partie « non-négligeable » (dans tous les sens du terme !) de la population. 

Nous ne connaissons pas les raisons de ces parents, mais ils ont en tous cas ouvert la porte à bien des commentaires de gens pour qui ce n’est pas une question de langue, glissant sans hésiter de la langue à la religion, à l’extrémisme religieux, Charlie, la Lybie, la Syrie…montrant dans le même temps où se niche concrètement l’intégrisme : dans ces réactions de rejet, d’exclusion, de mépris de l’autre et de sa culture.
Bref, des propos et des points de vue racistes, tout simplement.

Et nous en sommes aujourd’hui au point où la simple tenue d’une réunion publique est considérée comme problématique ! 

Alors bien sûr, cela ne peut pas laisser indifférents les membres d’un centre culturel basé sur l’ouverture, la rencontre et l’échange.

Affirmons simplement mais fermement notre désir de vivre, ici, avec ceux qui sont là, ensemble !

http://m.centreculturelanima.fr/

MAI 2015

Le "Paroles de Corse" de mai :

MAI 2015

Une nouvelle revue : "In Corsica".

incorsica

IN CORSICA N°1
★ Sortie en kiosque mercredi 6 Mai 2015 ★
IN CORSICA est un organe de presse indépendant, qui informe (c’est-à-dire qui rapporte les faits mais répond aussi aux questions que se posent les lecteurs, décrypte), développe l’esprit critique, la réflexion, et donne de la Corse elle-même une image plus conforme à sa réalité, à ce formidable potentiel – intellectuel, artistique, entrepreneurial – qu’elle ne cesse d’exprimer à l’ombre d’un traitement ordinaire de l’actualité.

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AVRIL 2015

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PdC

MARS 2015

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FEVRIER 2015

27 février 2015

Edmond Simeoni : "Marylise Lebranchu : la fin des simagrées"

lebranchusimeoni

Rencontre avec Jean-François Bernardini : "Non-violence : Un credo pour la Corse" le jeudi 5 février à 18h

Jean-François Bernardini était à l'Université de Corse pour une rencontre autour de la thématique "Non-violence : un credo pour la Corse". Organisée par le Centre Culturel Universitaire, en partenariat avec l'Association pour une fondation de Corse, cette rencontre a été organisée le jeudi 5 février 2015 au Spaziu culturale Natale Luciani à Corte.

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Jeudi 5 février 2015 à 18h
Rencontre avec Jean-François Bernardini
"Non-violence : Un credo pour la Corse"
Spaziu culturale Natale Luciani
Campus Mariani, Corte



Le Centre Culturel Universitaire, en partenariat avec l'Association pour une fondation de Corse, propose une rencontre avec Jean-François Bernardini autour de la thématique "Non-violence : un crédo pour la Corse" le jeudi 5 février. Après une première session réservée aux lycéens, Jean-François Bernardini proposera une session ouverte à tous à 18h au Spaziu culturale Natale Luciani, Campus Mariani à Corte.

"Non-violence : Un credo pour la Corse"
"Un fait inouï se développe depuis quelques temps, des femmes et des hommes se lèvent pour semer des graines de Non-­violence. C'est en Corse que se déroulent le plus de formations à la Non-­Violence, que des actions novatrices sont engagées. L'engagement de la Fondation de Corse Umani annonce des temps nouveaux" écrit François Vaillant, rédacteur en chef d'Alternatives Non‐Violentes. C'est une invitation à se mettre en marche vers ces temps nouveaux que Jean-­François Bernardini lancera à chacun des présents. Une invitation, un appel à porter un nouveau regard sur le monde, sur la Corse, et à devenir les acteurs et les artisans de cette Non-­Violence dont l'avenir et le présent ont besoin.


https://www.youtube.com/watch?v=MVSk8dZ4vkU

paix

PdC

JANVIER 2015

22 janvier 2015

Yvan Colonna : Requête déclarée recevable à Strasbourg


La Cour européenne des droits de l'homme a déclaré recevable la requête introduite par Yvan Colonna devant la Cour européenne des droits de l'homme après sa condamnation à la prison à perpétuité pour l'assassinat en 1998 du préfet de Corse Claude Erignac, a annoncé ce jeudi son avocat Me Patrice Spinosi.


Yvan Colonna : Requête déclarée recevable à Strasbourg

Cette première décision de la juridiction du Conseil de  l'Europe indique que l'affaire pose, à ses yeux, des problèmes de droit méritant d'être examinés sur le fond.
Un arrêt ne devrait pas être rendu avant 2017, a estimé son avocat.       
Yvan Colonna définitivement condamné en Juillet 2012 après un rejet de son pourvoi en cassation, qui s'est toujours dit innocent, invoque devant la Cour européenne des droits de l'homme, "différents manquements aux exigences du procès équitable qui ont émaillé les débats devant la cour d'assises d'appel" - qui l'a condamné le 20 juin 2011 - a précisé Me Spinosi.       
Yvan Colonna avance aussi l'atteinte à la présomption d'innocence " du fait des déclarations à son égard de responsables publics". 

Du Valinco à New York… Simple comme un entrechat

21 janvier 2015

Laura Maria Poletti, danseuse contemporaine, a fait ses gammes à Propriano avant de partir à la conquête du monde

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Dans la famille Poletti, la fille Laura Maria n'a rien à envier au père, Jean-Paul. Un caractère bien trempé. Il en faut. Et des prédispositions certaines pour l'art que chacun exprime à sa manière.

La voix, le chant, la musique, portés haut pour le père que l'on ne présente plus… La danse et l'expression scénique pour Laura Maria qui, à 22 ans à peine a déjà un bien joli parcours derrière elle. Un parcours qui a germé dans le Valinco, sur l'île qui lui tient tant à cœur, et qui conduit aujourd'hui la jeune danseuse jusqu'aux planches de New York où elle participe à un stage auprès d'un des plus grands chorégraphes.

Simple comme un entrechat… Ou presque.

Beaucoup de travail, une bonne dose de talent et un peu de chance… Que Laura Maria aura peut-être su forcer le moment venu. Un parcours que la jeune femme regarde avec fierté bien sûr, mais souhaite aussi mettre en avant, non pas tant pour elle-même, que pour ceux qui l'ont rendu possible, accompagné et ce particulièrement en Corse, dans sa microrégion de cœur le Sartenais-Valinco, où elle a fait ses premiers pas… De danse aussi.

On peut vivre dans un petit village et voir grand

« C'est tout de même extraordinaire de montrer que tout est possible. J'ai commencé la danse à l'âge de 4 ans. Ma réussite concrétise des années de répétitions mais prouve surtout, qu'en Corse même en vivant dans un tout petit village comme Sainte-Marie Figganiella, on peut réussir et avoir accès à des résultats nationaux et internationaux, grâce au travail et à un bon entourage. C'est trop important de le rappeler à tous les jeunes insulaires… »

Et la blonde jeune femme ne manque jamais de remercier ses enseignantes de la première heure. Michèle Brinquin et Gwenäelle de l'Atelier du mouvement à Propriano. Peut-être un plus encore aujourd'hui que l'école de danse connaît quelques difficultés pour maintenir ses activités. « Sans elles, je ne serais pas où je suis aujourd'hui. Je leur dois au moins ça, c'est important de se battre pour conserver cet enseignement de qualité, par un professeur diplômé. Il faut que les jeunes se forment auprès des gens diplômés. Il est très difficile à obtenir et c'est un gage d'un encadrement sérieux. C'est un gros problème actuellement en Corse, en tout cas dans la microrégion d'où je viens. Et les priver de cet outil qu'est l'atelier serait vraiment triste. Elles sont tellement motivées et ont tellement l'envie de partager, de travailler que ce serait vraiment dommage. Pour elles et surtout pour les jeunes. »

L'importance de ces cours sur l'île, du plateau technique que pourrait même être le Valinco, les mots de Laura Maria le prouvent peut-être moins que sa réussite. Et celle d'une de ses condisciples, Ellen Giuia, qui vient également d'obtenir un EAT Jazz, première étape pour le diplôme d'État. « Deux sur un aussi petit groupe c'est significatif, il faut le souligner ! »

Bien déterminée à sauvegarder son art dans son île, la jeune femme en oublierait presque de parler de sa propre carrière naissante. Une bonne dose d'humilité rafraîchissante, pour celle qui a choisi la danse « parce que, honnêtement, je ne pouvais pas chanter… »

La répartition des talents et des dons avec le papa a en tout cas bien fonctionné… Pas sûr qu'il puisse effectuer les mêmes chorégraphies que sa progéniture. Des heures de vocalises, répétitions chorales etc. pour l'un, 7 à 8 heures d'étirements, pointes, entrechats, chorégraphies… Un engagement physique évident qui met à mal le corps, permet d'en tester les limites… Celles d'un esprit qui aurait vu trop petit, Laura Maria les a dépassées depuis longtemps. Au gré des rencontres, « les bonnes personnes au bon moment ». Mais aussi beaucoup de travail et de sérieux.

Workshop avec Trisha Brown

Dès son intégration à 13 ans dans la Compagnie du Jeune Ballet Corse. « Qui malheureusement n'existe plus aujourd'hui. » Elle y évolue jusqu'à ses 16 ans et a la « chance » d'y être repérée par Peter Goss, enseignant très réputé dans le milieu de la danse contemporaine qui venait donner des cours à la compagnie et était également professeur au Conservatoire national supérieur de danse de Paris. Il l'encourage à passer le concours d'entrée… « J'avais déjà essayé Lyon à 14 ans. Déjà fait un bout de chemin donc. Et là c'était le bon moment. » Alors qu'elle suit une scolarité normale jusqu'au bac. Par choix et pour la sécurité, Laura Maria obtient à quelques jours d'intervalle son diplôme scolaire et son ticket d'entrée dans la cour des futurs professionnels de la danse. Quatre années s'offrent à elle, normalement cinq, mais elle obtient son certificat en 2013, pour s'aguerrir à un milieu très dur. « Il y a tellement de monde ensuite sur le marché et si peu d'élus… »

Élue, Laura Maria va une nouvelle l'être en 2013 en réussissant un nouveau concours. Celui d'entrée à l'école belge PARTS, une institution très reconnue dans le milieu avec la chorégraphe Anne-Teresa de Keersmaeker et la compagnie Rosas, notamment. Un nouvel échelon. De nouveaux apprentissages et une véritable ouverture aux mondes avec des enseignants venus du monde entier pour des sessions de deux à six semaines.

Et une nouvelle fois, la danseuse en devenir est repérée et intègre un monument de la danse contemporaine, la compagnie new-yorkaise de Trisha Brown. « Le temps de deux dates en octobre dernier… Il était venu enseigner. La compagnie se produisait en France et avait besoin d'une fille… Je n'ai même pas passé d'auditions. » Le regard azur pétille au souvenir de ces scènes partagées avec un des pionniers de la danse contemporaine… Et l'aventure ne s'arrête pas là…

En ce début d'année 2015, l'enfant de Sainte-Marie Figganiella s'envole pour le rêve américain. Conviée après ses prestations par la compagnie à prendre part à un « Workshop » ou stage outre-atlantique. « Je suis évidemment privilégiée. Mais sans travail cela ne servirait à rien… » 15 jours 3 semaines à quelques pas de Broadway, le pas de danse est des plus réussis et met la barre haut pour la suite. La suite, c'est la saison des auditions qui a battu son plein ces derniers mois. « On postule partout. On passe des auditions à la chaîne pour essayer d'intégrer des compagnies renommées… Et je verrai aussi aux États-Unis s'il y a d'autres opportunités pour moi… »

Car pour l'heure c'est évidemment sur la scène que Laura Maria veut s'exprimer. En misant toujours sur le facteur chance, celui qui lui permettra d'éviter la blessure qui pourrait mettre un frein à son élan. L'école c'est bien mais la scène c'est autre chose évidemment. « Il est important qu'une éventuelle future transmission soit nourrie… Il faut creuser, chercher sa voie. Avoir du vécu pour ensuite transmettre quelque chose de puissant. » Car même s'il y a moins de limites physiques dans la danse contemporaine que dans le classique, les années filent à toute vitesse. Laura Maria n'a encore rien décidé mais la transmission, l'enseignement pourrait ensuite succéder aux performances scéniques.

Patrimoine immatériel

Elle en est encore loin, mais se réjouit d'avoir bénéficié d'un encadrement qui fait la part belle à la création, au travail personnelle, et aux chorégraphies, tout comme à l'histoire de la danse, l'analyse. « Il y a des passerelles, artistes oui mais aussi artistes qui réfléchissent sur leur temps. »

Ça nous rappelle quelqu'un tiens ! Un papa très engagé également qui n'était pas des plus rassurés au départ du destin choisi par sa fille. « Il était un peu inquiet bien sûr. Mais à un moment c'était difficile de ne pas laisser faire les choses. » Aujourd'hui, il n'est en tout cas pas peu fier. Et indirectement, lui et Laura Maria restent unis par la transmission…

La sauvegarde du patrimoine immatériel. « J'ai pris part à un projet de l'Union européenne avec une équipe de chercheurs. La danse contemporaine est quelque chose d'intangible et du coup on nous a bardés de capteurs… Ce qui était drôle c'est qu'une des personnes m'a demandé si je connaissais la Corse. Ils venaient de faire la même démarche avec le chant polyphonique et les paghjelle, classés au patrimoine mondial de l'Unesco… »

Ils… Son père, Jean-Paul, en fait. porte-voix mondialement reconnu pour cela et donc logiquement impliqué. Une drôle de coïncidence dont ils s'amusent aujourd'hui… Gardiens chacun de leur art, réunis dans une démarche de sauvegarde… La relève est en tout cas assurée pour ce qui concerne la danse avec Laura Maria. Et il ne faut pas lui parler d'émission comme Danse avec les Stars pour cela… « Le tort de ce genre d'émission de téléréalité c'est ce que cela donne l'impression que tout est facile et instantané… On manque d'un outil de grande diffusion pour démocratiser sans vulgariser… »

Une prochaine ambition pour ce jeune talent insulaire peut-être ? Qui n'est jamais à court d'arguments pour valoriser l'art et l'île… « Proportionnellement, je trouve qu'artistiquement la Corse est un formidable terreau artistique. » Une ambassadrice de charme partie porter elle aussi haut les couleurs de la Corse dans le monde et qui espère que d'autres seront dans son sillage. « Je n'ai qu'un seul message aux jeunes insulaires, ne pas se mettre de limites, de freins. Quand on veut, on peut. Voir grand, voir loin…»

Par Christine G.-Bacciochi

 

10 janvier 2015

Le témoignage de Paolo Fresu

paolo

Un texte de Gabriel Culioli publié dans "Le Journal de la Corse"

Charlie Hebdo n'a pas toujours été un modèle de bon goût. Charlie tirait sur tout ce qu'il estimait être un danger pour la liberté de penser. Il tirait souvent avec de la grosse artillerie et parfois beaucoup de vulgarité. Religions, idéologies etc. tout y passait y compris la Corse hachée menu avec cet esprit de beauf franchouillard que savait si bien dépeindre Cabu. Souvent, il faut oser le dire, nous avons été heurtés voire blessés par les attaques de Charlie à l’encontre de notre peuple qui, à travers des généralisations abusives, frisait lui-même ce racisme qu'il savait en général si bien dénoncer.
Mais qu'importe : Charlie avait le droit de s'exprimer quitte à affronter la colère démocratique de ses détracteurs. Car personne n'avait le droit de lui imposer le silence de quelque manière que ce soit et surtout pas en faisant couler le sang.

C'est en quoi le massacre qui a été perpétré dans ses locaux est un crime contre la liberté d'expression en général. Il a été exécuté par des hommes qui, sous d'autres cieux préconisent la lapidation à l'encontre des femmes adultères, l'amputation des "voleurs", le fouet pour les délits mineurs, la mort pour le blasphème.
Et s'il n'y a aucun choc de civilisation avec la culture musulmane modérée, il y a une guerre sans merci avec les partisans des dictatures, de toutes les dictatures, qu'elles soient religieuses ou idéologiques, de gauche ou de droite.

C'est pourquoi le Journal de la Corse reprend aujourd'hui le slogan « nous sommes tous Charlie », non pas par adhésion à l'entièreté des contenus de Charlie hebdo mais au nom de la défense de la démocratie la plus élémentaire et de la liberté d’expression, ce trésor gagné au prix de siècles de combats incessants contre nos propres intolérances politiques et religieuses.

PdC

Ciao Gregale

gregale

Portrait de Petru Paulu de Casabianca

13.12.2014
piazzetta

 

pdcdec

 

Stantari n°35 - Hiver 2014

stantari

Et enfin "Kalliste" :

kalliste

   


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