A lingua nostra

Statut et perspectives du corse, débats

Dernière mise à jour : 02/09/2021

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1 . Statut actuel et perspectives

Le discours sur la langue corse est resté longtemps - et est encore quelque peu - biaisé par des présupposés idéologiques ou politiques. Pour les Italiens, surtout pendant l'entre-deux-guerres, le corse est un dialecte italien comme les autres.

En réaction contre les visées irrédentistes mussoliniennes, les Français - dont de nombreux Corses - ont alors eu tendance à exagérer outre mesure les différences avec l'italien. Pourtant tous les spécialistes, italiens ou non, considèrent que le corse se rattache aux langues italiques.

La politique française a consisté de tous temps à imposer le français sur tout le territoire national :

Par l'Ordonnance de Villers-Cotterêts (1539), François Ier interdit le latin, le breton et l'occitan pour les actes officiels et impose le francien.

Dès 1768 Louis XV tente d'imposer le français en Corse. Après la Révolution, on cherche à faire disparaître l'italien de l'usage écrit et officiel. La Convention avec l'abbé Grégoire réprime les "patois" en 1793-94. Cependant, jusqu'au milieu du XIXe siècle, le français, bien que langue officielle, est supplanté par le corse pour la conversation et par l'italien pour la culture écrite et les jeunes Corses ont longtemps continué à aller en Italie poursuivre leurs études.

A partir du Second Empire, l'italien s'efface : interdit en 1852 dans les actes d'état civil, il disparaît peu à peu dans la pratique des notaires, des avocats, des prêtres. En 1938, les autorités religieuses rendent obligatoire le prêche en français.

Se trouvent bientôt seuls en présence le corse, langue parlée, et le français, langue officielle. Les deux idiomes appartenant à deux aires linguistiques différentes, ils ne peuvent être complémentaires comme l'étaient le corse et l'italien.

La substitution brutale du français à l'italien a transformé la situation de complémentarité corse/italien en une situation de diglossie/concurrence entre deux langues dont l'une ne pouvait plus être le dialecte de l'autre.

Il ne restait donc plus au corse qu'à disparaître ou à devenir lui-même une langue écrite.

On ne peut actuellement parler de bilinguisme (deux langues officielles ou de statut équivalent).

Au contact du français pendant deux siècles, le corse a survécu, mais a subi une francisation du lexique pour les objets postérieurs au XVIIIe siècle, alors que dans le même temps les Italiens forgeaient des néologismes.

Et peu à peu, on assiste à une francisation se traduisant par la substitution d'un gallicisme au mot corse ("lunetti" au lieu de "spichjali", "una buata d'allumetti" pour "una scatola di fulminenti").

Parallèlement, les formes grammati­cales ont également subi l'influence du français et généré des barbarismes, par exemple : "vene di sorte" décalqué de "il vient de sortir".

La question est de savoir si l'on veut sauvegarder le corse. Dans l'affirmative, laisser faire l'évolution "naturelle" ne peut qu'aboutir à l'extinction totale de la langue corse, par suite de la diminution fatale du nombre de locuteurs par décès des anciens, perte de l'usage de la langue par les jeunes générations dont une partie quitte la Corse, abâtardissement de la langue sous l'influence du français (gallicismes), qui fait irruption dans chaque foyer par les media.

Par conséquent, une démarche volontariste est nécessaire. Dans les années 70, une large prise de conscience s'est produite, se traduisant par l'affirmation de la personnalité et de l'identité culturelles corses et la volonté de sauvegarder le patrimoine culturel, notamment dans la poésie ou le chant.

Cette prise de conscience a - enfin - abouti en 1974 à la reconnaissance officielle du corse comme langue régionale.

En effet, la loi Deixonne, votée en 1951, qui autorisait l'enseignement facultatif du basque, du breton, du catalan et de l'occitan, ne s'est pas appliquée au corse, qui n'était pas considéré comme une langue ré­gionale, mais comme une langue allogène, de même que l'alsacien.

Cette première étape ne suffira pas à sauver la langue : il faudra pour cela que les Corses aient la capacité de créer des oeuvres modernes en corse et qu'ils aient la volonté d'utiliser le corse quotidiennement dans la vie courante et dans les media, en faisant vivre la langue. En effet, bien souvent, les locuteurs butent sur un mot n'existant pas en corse traditionnel et n'ont pas forcément l'idée de puiser dans le fonds lexical : Ainsi, on peut entendre : "cordes à sauter, ùn ci n'hè più ?" ou lire : "So Corsu, aghju l'autocollant" !!! Cela n'est pas très grave, il vaut mieux faire des "fautes" plutôt que s'abstenir de parler.

On ne défend une langue qu'en la pratiquant. Contre la disparition du corse, on ne peut que dresser l'énergie de la volonté.

La survie du corse ne se fera pas contre quelqu'un mais par les corses eux-mêmes. Il ne s'agit pas d'opposer le corse au français, mais de permettre une coexistence harmonieuse des deux langues. Il faut accepter une identité multiple.

D'aucuns jugeront cette démarche inutile. Quel intérêt y aurait-il, à notre époque de mondialisation, à tirer du quasi oubli une langue ne concernant pas plus de 200 000 personnes ?

Le premier intérêt, c'est que, comme dans toute langue, il y a dans la langue corse des expressions admirables.

D'autre part, sait-on que l'irlandais, langue officielle de l'Irlande, n'est parlé que par 3% de la population ? Que tout jeune luxembourgeois apprend le luxembourgeois, le français et l'allemand ?

En outre, dans le monde méditerranéen actuel, la possession d'une langue de filiation latine peut être une chance, et non un handicap. Le développement de l'enseignement du corse ne saurait être considéré comme un luxe inutile ou comme une manifestation d'indépendantisme, mais peut, s'il est fait de façon intelligente, être un enrichissement et une ouverture sur l'ensemble des pays du bassin méditerranéen.

Enfin, notre époque se caractérise à la fois par une mondialisation des échanges et de la culture et par une volonté de conservation des racines.

Il y a d'ailleurs contradiction entre les prises de position françaises de défense du plurilinguisme en Europe ou dans le monde (cf. le Québec ou l'ONU) et le peu d'empressement mis à appliquer ce principe aux langues régionales en France. On peut dire que la politique linguistique de la France a une cohérence téléologique profonde, la défense du français, qui la mène à des stratégies variées et en fin de compte à une incohérence théorique non moins profonde. La seule cohérence, non assumée officiellement, est que la France ne défend pas partout les mêmes principes, parce qu'elle veut défendre la langue française, et non des principes universels comme le respect de toutes les cultures ...


2. Actualité, débats

20/11/2022

Un atelier de chant pour transmettre le corse

Par: Jean Dealma
Publié le: 20 novembre 2022
Dans: Culture - Loisirs

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Marcu Biancarelli dirige l'atelier dédié au chant polyphonique au sein de l'association Praticalingua, section Avretu

L'association Praticalingua participe à la transmission de la langue corse à Porto-Vecchio via la section "Avretu", implantée dans un local d'Omara éditions, au carrefour du collège Maria de Peretti. Un nouvel atelier en immersion linguistique, celui du chant corse, a vu le jour début octobre.

Depuis, chaque mercredi soir à 18 heures, hommes et femmes se réunissent autour de leur animateur et adjoint au directeur de la Cinémathèque régionale de Corse, Marcu Biancarelli.

Lors de leur dernier cours, face au texte, les six hommes présents continuent l'apprentissage du Libera me, chant poignant de la cérémonie des funérailles. "L'atelier chant est ouvert à toutes les personnes désireuses d'apprendre ou de découvrir la langue corse. C'est un maillon parmi d'autres pour promouvoir notre langue. Le Libera me est le chant le plus simple de la messe des défunts, ce qui nous permet une approche de la polyphonie. Mais on ne s'interdit rien, et nous pourrons étudier d'autres chants issus des répertoires profane ou sacré ou de polyphonies à deux voix", détaille Marcu Biancarelli. Un apprentissage du chant qui se fait par petites phases et que l'intervenant explique aux participants avec pédagogie, sans oublier une petite pointe d'humour.

Apprentissage pour les enfants aussi

Présent aussi avec sa guitare, le coordonnateur du projet Pierre Decortes suit avec attention le groupe de chanteurs, et se dit heureux de l'intérêt porté par ces adultes au chant polyphonique. "C'est un vrai plaisir d'être ensemble pour partager ces moments et transmettre notre langue à travers le chant corse. D'ailleurs, comme à Sainte-Lucie ou au collège Maria-de-Peretti avec qui nous avons un partenariat, cette œuvre de transmission va se faire également par le biais d'un atelier chant dédiés aux enfants, ouvert le mercredi après-midi, que nous mettons en place avec le soutien de A casa di a lingua et de la Collectivité de Corse."

À travers ces ateliers en immersion, l'objectif est de poursuivre un apprentissage de la langue corse hors du cadre scolaire et de permettre, quel que soit son âge, de la chanter, la parler et la transmettre.

Cette volonté s'enracine grâce à tous ces bénévoles qui se donnent les moyens de sa survie et de son rayonnement.

Pour les enfants et adultes intéressés par l'atelier chant, les inscriptions peuvent se faire auprès de Pierre Decortes au 06.03.80.08.09.

Le corse, une langue en voie d’extinction

Le Devoir - Montréal - Publié le 29/06/2018

Ce quotidien québécois a publié une série de trois reportages sur l’île – et son identité. Ce volet est consacré aux menaces qui planent sur ce pan de la culture locale, que les jeunes et mêmes les électeurs nationalistes peinent à faire renaître.

Entre le mont Cinto qui culmine à 2 700 mètres d’altitude et le lac de Calacuccia, Jean-Yves Acquaviva cultive la châtaigne et élève des brebis. Dans son village de Lozzi, la plupart des 60 habitants permanents parlent le corse. Mais il ne faut pas se fier aux apparences, dit-il. Lorsque vint le moment d’inscrire son fils à l’école, sur 50 enfants, ce dernier était le seul à avoir appris la langue à la maison. Les autres en apprendront les rudiments à l’école, mais la plupart n’en auront jamais la maîtrise véritable.

“Les gens pensent que leurs enfants apprendront le corse à l’école avec trois heures d’enseignement par semaine. Mais il n’y a aucune société où l’on apprend sa langue uniquement à l’école”, dit celui qui est aussi l’auteur de deux romans et de nombreux poèmes et textes de chansons écrits en corse. L’écrivain ne se fait guère d’illusion : “Le corse est en voie d’extinction depuis trente ans. Certes, il n’est pas sur le point de disparaître, mais ça va arriver.”

Tout juste un quart des jeunes parlent corse

Pourtant, cet écrivain né en Bretagne d’un père militaire corse et dont la grand-mère ne connaissait que quelques mots de français n’a appris cette langue qu’à 12 ans. “C’est devenu pour moi, une nouvelle langue maternelle, dit-il. Si je peux écrire un roman en français, jamais je ne pourrai écrire de poésie dans une autre langue que le corse. Pour moi, écrire en corse est un acte de résistance. Mais je ne me fais pas d’illusions.”

Ce constat accablant est partagé par la plupart des experts. En dépit du fait que le corse est aujourd’hui offert à tous les niveaux du système scolaire de l’île, et qu’il est même obligatoire au primaire, on estime que seulement 26 % des insulaires entre 18 et 24 ans parlent le corse. Selon Jean-Yves Acquaviva, sur les 330 000 habitants de la Corse, moins de 100 000 parlent le corse, et la plupart de ces derniers ne l’écrivent pas. Un important réseau d’écoles bilingues a beau être en développement – quelques écoles d’immersion ouvriront même dès la rentrée 2018 –, le corse est une langue en voie de disparition selon les critères de l’Unesco.

Derrière le français, l’arabe et le portugais

“Malgré toutes ces mesures, l’extinction du corse est une évidence”, dit la linguiste Stella Retali-Medori de l’université de Corse Pascal Paoli à Corte, dans le centre du pays. Selon elle, si on le classe en fonction du taux de transmission dans la famille, le corse arrive derrière le français, l’arabe et le portugais. Avant d’entrer à l’école, à peine 2 % des enfants de l’île ont appris uniquement le corse avec leurs parents et environ 14 % ont appris le corse et le français. Les autres enfants de l’île ne sont élevés qu’en français et ne découvriront donc le corse qu’à l’école au rythme de ces trois heures d’enseignement par semaine.

“Même dans les villages, on parle de moins en moins le corse, dit Mme Retali-Medori. Moi, j’ai eu la chance de l’apprendre avec ma grand-mère. C’est un paradoxe. Avant, le corse était parlé par tout le monde, mais il n’était pas enseigné à l’école. Aujourd’hui qu’il l’est, il est de moins en moins parlé dans la rue.” La linguiste raconte qu’un jour un enfant l’entendant parler corse lui a demandé pourquoi elle s’exprimait en anglais. Cet enfant ne reconnaissait plus la musique de la langue. En Corse, elle constate tous les symptômes bien connus du déclin d’une langue. “On entend de moins en moins l’accent corse. On parle souvent une langue très polluée par le français. Même les toponymes sont de plus en plus en français. On a beau enseigner le corse, aujourd’hui, ce sont les conditions de sa pratique qui ne sont pas réunies.”

Une langue coupée de ses racines italiennes

Même les jeunes qui votent pour les partis nationalistes parlent souvent très peu le corse, note son collègue Jean-Michel Géa, qui voit d’ailleurs dans ce nationalisme un effet de compensation. “Cet attachement aux racines est souvent très conceptuel alors qu’en réalité, on bascule dans la société de consommation. Et ce basculement se fait évidemment en français.” Malgré une véritable poussée nationaliste chez les jeunes, souvent ils n’osent pas parler corse. Comme ils n’en ont qu’une connaissance approximative, ils ont peur de faire des fautes. Dès que quelqu’un s’adresse à eux en français, ils mettent le corse de côté. Autre signe évident du déclin d’une langue.

Parmi les causes de ce déclin, Stella Retali-Medori souligne que le corse a en quelque sorte été coupé de ses racines italiennes. “La rupture avec la Sardaigne et l’Italie a été déterminante, dit-elle. Bien sûr, il y a le tourisme massif, la démographie, les médias qui sont tous en français. Mais, dès qu’on coupe une langue de ses références littéraires, on en perd le prestige. Or, en corse, la langue littéraire a toujours été l’italien. On trouve d’ailleurs de nombreuses similitudes entre le corse et le toscan classique.”

Passer d’ “une langue qui se meurt” à “une langue pour le travail”

Depuis trois décennies, on assiste pourtant à une indéniable renaissance culturelle corse. Dans son petit théâtre d’Ajaccio, Locu Teatrale, Marianna Nativi se donne pour mission de transmettre la culture corse. Cette comédienne qui a été formée au conservatoire de Québec, où elle a travaillé avec Robert Lepage, donne des cours de théâtre en corse dans les écoles bilingues de la ville. En 2015, elle a même fait une grève de la faim pour empêcher la fermeture de son théâtre. “Est-ce qu’on va arriver à maintenir cette langue ? Le fait d’avoir vécu au Québec m’a rapprochée de ma langue. Il y a une réappropriation culturelle certaine dans la chanson et le théâtre, mais même les nationalistes souvent ne parlent pas le corse. Dans l’île, il n’y a même pas de conservatoire de théâtre. Il faut aller se former sur le continent. Les jeunes ont une passion pour le chant corse. Mais, certains jours, je suis pessimiste.”

Sur les murs de l’université de Corte, on lit sur une affiche qu’il faut passer d’une “langue qui se meurt” (a lingua si ne more) à une “langue pour le travail” (a lingua di u pane). Pour les nationalistes, la seule façon de freiner ce déclin serait de décréter la co-officialité du corse et du français dans l’île. “Il faut en faire un instrument de promotion sociale, dit le leader de Corsica libera, Jean-Guy Talamoni, qui est aussi professeur de littérature corse. Aujourd’hui, il est illégal d’exiger la connaissance du corse pour quelque emploi que ce soit. Pourtant, on sent une véritable demande dans la jeunesse.”

Rendre le corse “préférable” pour certains emplois

Même si Paris refuse de donner un statut officiel au corse dans l’île, le président du conseil exécutif corse, Gilles Simeoni, n’entend pas en demeurer là. Il compte, dit-il, contourner la loi et inscrire la connaissance du corse pour certains emplois non pas comme “obligatoire”, ce qui serait illégal, mais comme “préférable”. “On va aller jusqu’au bout des possibilités du système”, assure-t-il.

Les linguistes rappellent pourtant que, à l’exception de l’hébreu en Israël, on ne connaît guère de langue qui a pu renaître de ses cendres. Même les efforts de la république d’Irlande en faveur du gaélique, qui est une des langues officielles de l’Union européenne, n’ont pas donné de résultats probants. Pour Jean-Yves Acquaviva, l’État français n’a aucune raison de se sentir menacé par le corse. “La co-officialité pourrait peut-être pousser les gens à transmettre un peu plus la langue à leurs enfants, dit-il. Mais jamais le corse ne pourra concurrencer le français. Je suis très heureux de parler le français, qui m’offre la possibilité d’accéder à la littérature du monde entier. C’est irremplaçable. Pourtant, le corse fait partie de moi. C’est la langue de la liberté. Il y a parfois une certaine hypocrisie à brandir des drapeaux sans parler le corse. J’ai parfois l’impression qu’on court après quelque chose qui n’existe pas…”

Christian Rioux

Impostures nationalistes françaises

Deux articles de la loi du 8 avril 2021 relative aux langues régionales ont été déclarés inconstitutionnels le 21 mai. Le fond du problème n'est, cependant, ni linguistique ni juridique. Il relève d’un nationalisme français "banal" omniprésent et loin d'être inoffensif et s’inscrit dans le prolongement d’une véritable chaîne d'impostures.

Vendredi 21 mai 2021, le Conseil constitutionnel de la République française, saisi par soixante et un élus de la majorité (dont quatre ont demandé, postérieurement à la saisine, à ne pas être comptés parmi les signataires), a déclaré inconstitutionnels deux des principaux articles de la " loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion », qui avait été adoptée le 8 avril à l’initiative du député Paul Molac.

L'un des deux articles incriminés (l'article 9) autorisait le recours à des « signes diacritiques des langues régionales »] dans les actes d’état civil ». Il visait à permettre aux parents qui donnent des prénoms régionaux à leurs enfants de les faire orthographier en conformité avec les règles orthographiques des langues régionales. L’autre article (l’article 4) introduisait la possibilité de mettre en œuvre au sein de l’enseignement public » un enseignement immersif en langue régionale, sans préjudice de l’objectif d’une bonne connaissance de la langue française » (article 4). Il s’agissait de permettre aux enseignants d’établissements publics qui le souhaiteraient de pratiquer une pédagogie employée dans diverses écoles associatives et qui consiste à plonger les élèves dans un bain de langue régionale, en utilisant celle-ci comme langue d’enseignement et de communication et pas seulement comme objet d’étude. Destinée à amener au bilinguisme des élèves qui vivent toute l’année dans un univers exclusivement francophone, elle a fait ses preuves depuis plus de cinquante ans, sans affecter les capacités des élèves à pratiquer la langue française, bien au contraire : les résultats en français des élèves de l’enseignement immersif sont généralement supérieurs à ceux des monolingues francophones.

Les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel, si celle-ci n’est pas contournée, seront triples. En prohibant dans les actes d’état civil le recours aux signes diacritiques propres aux langues régionales (par exemple le tilde), elle exercera un effet de domination symbolique car elle interdit aux parents de donner le prénom de leur choix à leurs enfants. En déclarant que l’enseignement immersif est contraire à la constitution, elle empàchera les enseignants des écoles publiques d’expérimenter une méthode qui donne de meilleurs résultats que l’enseignement bilingue à parité horaire. Enfin et surtout, elle rendra illégale une pratique pédagogique qui est mise en œuvre avec succès depuis 1969 par des établissements associatifs, tant au Pays basque qu’en Bretagne, en Occitanie, en Catalogne ou en Alsace.

Cette décision ne constitue cependant pas un incident : elle s’inscrit dans une longue chaîne d’impostures nationalistes françaises.

La première imposture consiste à affirmer que le nationalisme en France serait périphérique : il se résumerait aux mouvements indépendantistes, d’une part, et aux organisations d’extrème droite, d’autre part, mais épargnerait la majorité de la population française. Or, il n’en est rien. Le psychosociologue Michael Billig a montré, dans son célèbre ouvrage Banal nationalism, que le nationalisme le plus répandu dans le monde est le nationalisme « central », qui vise à perpétuer les États-nations. Il est si omniprésent qu’on ne le voit plus. Ainsi les Français sont-ils constamment exposés, sans même s’en rendre compte, à des signes (flagging) qui leur rappellent quotidiennement qu’ils sont Français ; notamment les déictiques : « nous » pour désigner les Français, « ici » pour la France, « la nation » pour la nation française, etc. Les travaux d’Annick Percheron dans les années 1980 puis de Katharine Throssell dans les années 2010 ont montré la précocité de ce nationalisme français chez les jeunes enfants et son lien avec un besoin primordial de sécurisation. La vision du monde ainsi intériorisée en famille et à l’école primaire est chargée en émotion et donc très difficile à mettre ultérieurement en cause par des adultes qui s’en trouvent inconsciemment imprégnés.

La deuxième imposture consiste à réduire le nationalisme français à l’héritage de Barrès, Maurras et de la droite catholique qui s’opposait à la République à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. En réalité, ce sont les révolutionnaires de 1789 qui, les premiers, ont donné une place centrale à la nation, conçue dans une double dimension : presque ethnique (la nation française) et politique (un nouveau régime, fondé sur la majorité du corps social). Quant au mot « nationalisme », c’est pour stigmatiser l’immoralité du « patriotisme jacobin » qu’il a été la première fois employé en français, en 1798, nous apprend Raoul Girardet. C’est donc la Révolution française qui constitue le moment fondateur du nationalisme français. Les révolutionnaires ont transféré la souveraineté de la personne du roi à la nation, tout en découvrant que cette dernière n’était en réalité qu’une abstraction qui n’existait pas de facto. Ils ont donc décidé de la bâtir, en anéantissant toutes les formes de diversité régionale, qu’elles fussent juridiques, historiques ou linguistiques.

La troisième imposture nationaliste française consiste à laisser croire que la France serait le modèle de la nation «  civique ». Issue de la philosophie des Lumières et de la Révolution de 1789, en effet, la conception française de la nation serait exclusivement subjective, reposant sur la volonté de vivre ensemble, conformément à la célèbre formule d’Ernest Renan : « l’existence d’une nation est [ ] un plébiscite de tous les jours ». La conception allemande, en revanche, serait « ethnique » car assise sur des critères culturels objectifs, en particulier la langue, qui constitue pour Fichte le fondement de l’unité nationale. Or, cette dichotomie relève d’un « mythe manichéen » (selon les mots de Rogers Brubaker). Elle n’est pas fondée en théorie, car les arguments des uns et des autres, assez similaires au départ, ont été caricaturés et figés dans le contexte des rivalités nationalistes des années 1870 et de la question de l’Alsace-Lorraine. Elle n’est pas, non plus, fondée en pratique. D’une part, parce que l’unité de la France, loin d’avoir été établie sur la volonté de vivre ensemble, est le fruit de « faits de violence » , voire, selon Ernest Renan, « le résultat d’une extermination et d’une terreur continuée ». D’autre part, parce que, à partir de la Terreur (1793-1794), le lien citoyen est apparu trop faible aux pouvoirs successifs pour cimenter la nation, au point qu’ils ont choisi d’éradiquer les langues régionales afin d’imposer aux Français non pas une langue commune mais une langue unique, vecteur de communion nationale.

La quatrième imposture réside dans le contenu même du premier alinéa de l’article 2 de la constitution de 1958 : « la langue de la République est le Français ». En quoi le français serait-il « la langue de la République », en général ? Platon parlait-il Français ? Aurait-il dù le parler ? Et quel rapport entre le français et les divers régimes tant démocratiques qu’autoritaires (voire dictatoriaux), qui ont été instaurés en des lieux et des époques variés sous le nom de « République » ? Aucun. Mais, bien sûr, la formule « langue de la République » désigne implicitement la République fran&accedil;aise. Or, même en ce cas, en quoi le français serait-il plus républicain qu’une autre langue de France ? S’il s’agissait, comme l’espéranto, d’une langue construite dans le cadre d’un projet humaniste dont il véhiculerait les valeurs, on comprendrait qu’on l’appelle « langue de la République »… Mais ce n’est, en somme, que le dialecte de la bourgeoisie d’Île-de-France, dont l’usage exclusif a été imposé dans les documents relatifs à la vie publique du royaume de France en 1539 par une ordonnance de l’État monarchique toujours en vigueur aujourd’hui. Qu’y a-t-il de « républicain » là-dedans ? En réalité, il s’agit de la langue de l’État ; qu’il soit monarchiste, impérial, républicain ou autre (c’était aussi la langue de Vichy).

La cinquième imposture nationaliste française consiste à affirmer qu’il n’y aurait pas de minorités en France. Or, cette allégation est dépourvue de fondement scientifique et la France compte sur son sol davantage de minorités que beaucoup de pays du monde. Toutefois, ce terme « minorité » est réfuté et la réalité sociologique est voilée par un discours idéologique bien rodé : au nom d’une prétendue égalité républicaine, l’État ne saurait en effet reconnaôtre que des citoyens indifférenciés. En quoi, cependant, la non-reconnaissance de la différence serait-elle une garantie d’égalité ? Ce n’est, en réalité, qu’une garantie d’uniformité. Et il s’agit là d’une discrimination. Car, comme l’écrit Charles Taylor, « la société prétendument généreuse et aveugle aux différences est non seulement inhumaine (parce qu’elle supprime les identités), mais aussi hautement discriminatoire par elle-même, d’une façon subtile et inconsciente ». Pas toujours de façon si inconsciente, d’ailleurs, car le refus de reconnaître l’existence de minorités permet à l’État, tout en s’affirmant « patrie des droits de l’homme », de s’abstenir de signer ou ratifier tout ou partie de nombreuses conventions internationales relatives aux droits humains des minorités.

C’est dans le cadre de cette chaî;ne d’impostures nationalistes françaises qu’il convient d’analyser la décision du Conseil constitutionnel du 21 mai 2021. Peut-être le pouvoir la contournera-t-il ? L’ire qu’elle suscite dans une partie de la population à la veille des élections pourrait, en effet, lui être défavorable. Le problème demeure néanmoins d’un nationalisme français bien plus répandu qu’on l’imagine généralement, parfois inconscient, et qui se sent menacé par l’altérité, pas seulement régionale.

10/02/2021

stende

cortinum

16/05/2020

mai2020

20/04/2020

aio

16/01/2020

jferrari

08/01/2020

Sur le bout des langues

Michel Feltin-Palas
mfeltin-palas@lexpress.fr

Les langues régionales ennemies de la République ?

Selon certains, parler corse, basque ou picard reviendrait à verser dans un dangereux communautarisme. Ils ont tort.

C'est l'un des arguments qui reviennent régulièrement pour s'opposer aux langues dites régionales : leur pratique encouragerait le "communautarisme" et menacerait par là même la République. C'est la thèse défendue par de nombreux politiques, qu'il s'agisse de Jean-Luc Mélenchon et son fidèle Alexis Corbière, de Marine Le Pen ou, précisément, des Républicains de Christian Jacob. Or, cet argument me paraît totalement fallacieux, et je voudrais tenter de le démontrer ici en reprenant les termes de notre devise républicaine.

La Liberté. Où est la liberté quand il est quasiment impossible à un Alsacien, à un Basque ou à un Ultramarin d'étudier, de s'adresser à une administration ou d'exercer un emploi en parlant sa langue ? Que penseraient nos "Républicains" d'une telle "liberté" si, par hypothèse, l'Union Européenne obligeait demain ou après-demain les Français à utiliser l'anglais et non plus le français dans les universités, les bureaux et les entreprises en France ?

L'égalité. Où est l'égalité quand, de toutes les langues parlées historiquement dans notre pays, une seule permet l'accès aux diplômes, à l'emploi, aux médias nationaux, aux grandes scènes artistiques ? Que penseraient nos "Républicains" d'une telle "égalité" si, par hypothèse, le basque (par exemple) disposait seul d'un tel privilège ? Il est probable qu'ils trouveraient cette disposition outrageusement favorable auxdits Basques - ce en quoi ils auraient évidemment raison. "Obliger un enfant à utiliser la langue d'un autre pour avoir droit à la promotion sociale, c'est une curieuse définition de l'égalité, note le sociolinguiste Philippe Blanchet. Et c'est un argument terrible ! C'est comme si on disait à un Juif qu'il doit devenir catholique pour devenir fonctionnaire."

La fraternité. Où est la fraternité quand on impose une langue en recourant à des moyens scandaleux ? "Un Breton né vers 1960 m'a raconté s'être uriné dessus lors de son premier jour d'école. Il ne savait pas demander en français l'autorisation de sortir pour aller aux toilettes. L'instituteur a fait semblant de ne pas le comprendre et l'a battu." (1). C'était encore l'époque glorieuse du fameux "signal" (ou "symbole"), que l'on imposait à l'enfant surpris en classe à prononcer un mot en auvergnat ou en picard. "L'instituteur lui accrochait au cou un sabot ou un morceau de fer, dont le "fautif" ne pouvait se débarrasser qu'en dénonçant l'un de ses camarades. A la fin de la journée, le détenteur du "signal" était puni", rappelle la linguiste Henriette Walter. Et de poursuivre : "Étonnez-vous après cela que les langues régionales aient été associées à des sentiments de honte et de culpabilité et que les écoliers, devenus adultes, n'aient pas eu envie de les transmettre à leurs enfants !"

Que penseraient là encore nos "Républicains" d'une telle "fraternité" si, par hypothèse, seul l'anglais était demain autorisé à l'école et si les enfants surpris à parler français subissaient de telles sanctions ?

Entendons-nous bien. Je n'ai rien contre la République, au contraire. Et je n'ai rien non plus contre le français en tant que langue commune. Je m'oppose simplement à ce que celui-ci devienne la langue unique d'un pays historiquement plurilingue (2), tout comme je m'opposerais à ce que, dans l'Union européenne, l'anglais (ou l'allemand, ou l'italien, ou le letton) fasse disparaître un jour tous les autres idiomes du Continent. Et j'admets encore moins qu'une politique qui enfreint l'un des droits de l'Homme - car le droit de parler et de vivre dignement dans sa langue en est un (3) - soit menée par d'autoproclamés "Républicains" qui, en l'occurrence, bafouent les valeurs de notre belle devise nationale.

(1) "Je n'ai plus osé ouvrir la bouche". Philippe Blanchet et Stéphanie Clerc Conan. Editions Lambert Lucas, 128 pages, 15 euros.
(2) Selon le rapport de l'abbé Grégoire, rédigé en 1794, 80 % environ des Français ne parlaient pas français à la fin du XVIIIe siècle.
(3) L'article 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations Unies affirme la protection des droits des minorités religieuses, ethniques et linguistiques. En Europe, ils ne sont pas reconnus par la France, la Grèce et la Turquie.

19/12/2019

Bilinguisme et double langage

Il semblerait que la revendication de bilinguisme portée par la majorité nationaliste doive s'accompagner en public de ces maladies que sont le double langage et la langue de bois. Déconstruction d’une attitude qui finit par devenir une maladie mortelle pour la cause défendue.

Petit retour en arrière

C’était l'un des caractéristiques claniques que de tenir des discours différents en fonction du public visé. Dans ce domaine, les nationalistes semblent avoir hérité de leurs prédécesseurs au grand dam de celles et ceux (dont je suis) qui pensaient qu’une telle période était révolue. Démonstration par le souvenir : lors de la séance des 25 et 26 octobre 2018 de l’Assemblée de Corse, une motion présentée par le groupe Corsica Libera (indépendantiste) est approuvée à l'unanimité. Elle demande une spécialité en langue corse et “la modification en conséquence de l’arrêté n� 0162 du 16 juillet 2018 pour intégrer cette disposition” C’est clair et sans ambiguïté. Grâce aux efforts de la rectrice cette disposition devient effective. Elle est présentée devant le Conseil économique territorial sans soulever la moindre remarque des élus nationalistes qui y siègent. Quelques jours plus tard c’est le déchaînement. La spécialité qu’ils revendiquaient quelques mois auparavant est devenue l’instrument catastrophique d’une apocalypse linguistique, le cheval de Troie d’un “linguicide” dont la rectrice serait l’incarnation diabolique. Surenchère de tous les mouvements nationalistes. C’est certain : dans l’année les effectifs vont s'effondrer et la langue corse, de ce simple fait, va se retrouver reléguée au niveau de la langue des gestes. Pourtant, les nationalistes auraient pu se prévaloir d’une victoire puisque c'était grâce à eux que cette mesure était devenue chair. Eh bien non, avec cet art inimitable de se tirer des balles dans les pieds, les voilà qui la crucifie au risque de paraître incohérents suivis par des troupes qui semblent alors confondre langue corse et langue de veaux.

Toujours plus surprenants

Un an plus tard, le rectorat rend public les résultats des inscriptions en langue corse, résultats qui ne sont d’ailleurs nullement contestés. Les inscriptions sont en très légère hausse dans toutes les filières. Nous voilà loin d'"u sfundatu maiori" de l'effondrement absolu. Les chiffres font l’objet d’une réunion en Conseil économique académique. Les représentants de l’exécutif n’élèvent aucune contestation mais même mieux ils se félicitent des résultats obtenus. Pourtant, quelques jours plus tard lors d’une conférence de presse relatée dans Corse-Matin, Xavier Luciani, reprenant par ailleurs les chiffres du rectorat, affirmera que les élus “ont été tenus à l’écart” lors du Conseil académique territorial concluant que celui-ci n’était “qu’une chambre d’enregistrement”. Et pour enfoncer le clou, il dénonce le non-respect de la convention État-CdC concernant le plan de développement de l'enseignement de la langue et de la culture corses, signé en novembre 2015 par le recteur Lacombe et la majorité nationaliste point sur lequel il a raison. La convention en question se fixait des objectifs inaccessibles parce qu’il était tout simplement impossible de former en si peu de temps le nombre désigné d’enseignants. Mais il était également loisible aux partenaires nationalistes de le faire remarquer plutôt que de signer un document nécessairement caduc. Ils auraient ainsi démontré leur capacité à agir plutôt qu'à rester des observateurs passifs.

Les chiffres ne mentent pas

Deux faits d’abord. La langue corse est la langue minoritaire la plus subventionnée de toute l’Europe compte tenu du ratio démographique. Elle est également la plus subventionnée de toutes les langues minoritaires de France. Ce sont dix millions d’euros, pardonnez du peu, que l’État français verse chaque année pour cette cause. La CTC de son côté met 2,5 millions d’euros au pot. Au regard de telles sommes, les effectifs ont peu augmenté. C'est exact mais ils ont augmenté. Et puis où les nationalistes ont-ils vu que les seules responsabilités incomberaient à l'état tout seul ? Les élus, les enseignants, les familles seraient donc des paramètres neutres dans ce combat ? Il n'y aurait aucune responsabilité des formateurs, des décideurs locaux, du Cunsigliu di a lingua corsa ? Mais alors à quoi servent-ils ?

Et ailleurs ?

Mais regardons ailleurs. En Occitanie, des classes ont été fermées à Toulouse faute d’élèves. Au pays basque, la moitié des enseignements se déroulent dans des écoles confessionnelles ou privées telles que les iskatolas. Aujourd’hui les 37 iskatolas réunissent plus de 4000 élèves dont 1353 dans le secondaire. Pour une population à peu près identique à celle de la Corse le Pays basque compte donc moins d’élèves mais un enseignement autrement plus dynamique grâce au privé totalement inexistant en Corse. Fait incroyable, les concours de langue française/basque manquent de candidats. Seuls 49 professeurs couvrent le secondaire contre un peu plus d’une centaine en Corse. La langue bretonne bénéficie elle aussi de cette dualité privé-public avec l’existence des écoles Diwan et l’enseignement catholique. Pour une population de 3,5 millions d’habitants, 8000 élèves ont suivi cette année l’initiation à la langue bretonne. Là encore on fera la comparaison avec la Corse. En tout 14.000 élèves étaient concernés par l’un de ces modes d’enseignement du breton (ou plutôt des langues de Bretagne), de la maternelle au lycée, pour l’année 2016/2017. Mais en définitive le problème se situe dans l’attitude extraordinairement conflictuelle qu’entretiennent les nationalistes corses avec l’état tout en s’interdisant les expériences d’écoles privées. Le résultat est criant : dans toutes les régions qui ont connu le conflit public-privé (et notamment confessionnel) les relations avec les représentants de l’état sont relativement harmonieuses. Sans tenir compte de la réalité financière extrêmement positive pour la Corse, les nationalistes donnent le sentiment de toujours privilégier le quantitatif plutôt que le qualitatif. Ainsi veulent-ils que tous les postes soumis à concours soient pourvus nonobstant le niveau des candidats. Qu'importe qu'ils soient de mauvais enseignants pourvu qu'on puisse justifier un niveau d'emploi flatteur. Pourtant c'est la règle d’un concours que de prouver un certain bagage de connaissances. Et ce pour le bien des enfants. Peut-être y’a-t-il une question de formation des candidats ?

Le fond de l’affaire ?

Parce que je crois que les élus nationalistes ne sont pas des idiots je me suis interrogé sur le pourquoi de cette schizophrénie et de ce double langage. Puis j’ai remarqué que François Alfonsi député européen (qui n’avait pas été soutenu par le PNC et Indipendenza) avait appelé à une manifestation en faveur des langues corses avec pour mission « d’encercler le ministère de l’éducation nationale ». Là, ce sont à peine 300 personnes qui se sont retrouvées à battre le pavé parisien. Mais le mot d’ordre était de dénoncer la réforme du bac et plus particulièrement la spécialisation (celle exigée puis dénoncée par la majorité nationaliste) étendue à toutes les langues minoritaires. Placés devant cette radicalisation, les élus nationalistes interlocuteurs du rectorat pouvaient-ils faire « moins bien » sauf à passer pour des « collabos » notamment quand on est militant du PNC qui, en cette période préélectorale, fait alliance avec les indépendantistes ? Et voilà que le STC educazione manque à l’appel de l’anti-étatisme permanent, provoquant le courroux public de Xavier Luciani. Bref on l’aura compris, la langue corse sert une fois de plus d’argument aux médiocres querelles qui déchirent en cette période pré-électorale les diverses tribus nationalistes. Un éclair pourtant dans cette longue nuit ô combien lassante : le discours de Jean Guy Talamoni qui place remarquablement bien les enjeux de l’apprentissage de la langue vernaculaire. C e qui se joue aujourd’hui est ni plus ni moins l’avenir de notre langue. D’un côté, nous avons des nationalistes qui n’ont de cesse de démontrer que sans l’état ils ne sont rien sinon d’éternels opposants incapables d'imaginer la plus petite victoire. Et à force de valoriser en toute occasion leurs échecs, ils finiront bien par convaincre leur propre électorat qu’ils ne servent à rien et que seul l’état peut tout.

Sachez brandir bien haut la bannière du futur

Et ce serait une injustice. Car c’est grâce à eux, à leurs incessants grognements de vieux cabots fidèles à une cause , à une histoire, à un peuple, c'est grâce à leurs sacrifices et à leurs colères parfois inaudibles que, bon gré mal gré, l’état a été forcé de devenir le pilier indispensable de cette renaissance linguistique. Mais bon dieu de bois qu'ils sont mauvais communicants, ces râleurs, impénitents pessimistes, qui préfèrent la défaite de Ponte Novu à la victoire du Borgu, le 8 décembre et l’hiver au 15 juillet (date de la proclamation de l’indépendance par Pasquale Paoli) et à l’été. En dépit de toutes leurs qualités, ils ne parviennent pas à mettre de la couleur dans leurs idées et confondent la lumière ascendante de l’aube et celle déclinante du crépuscule. Mais quand viendra-t-il le temps où ces observateurs grincheux de la langue corse deviendront enfin ce qu’ils aspirent à être : des acteurs dynamiques et positifs de leur propre peuple pour enfin distendre ce lien maléfique qui les enchaînent à l'État français tels d’éternels Prométhées. On ne conserve la confiance d’un peuple qu’à coups de victoires, en distillant l'espoir, jamais en égrainant un chapelet de pauvres déconfitures et en peignant un futur grisaillant. L’enthousiasme et l’honnêteté intellectuelle... Votre double langage digne de la pulitichedda finit par rendre illisible votre message et vous fait ressembler aux clans anciens. Sachez mettre en valeur vos triomphes et abandonnez les godillots éculés de l'ancienne politique. Vous en serez grandis et vous donnerez de nouvelles chances à la langue corse.

Gabriel-Xavier Culioli dans Le Journal de la Corse

Avril 2019

festa

alfonsi

lanfranchi

Mars 2019

Langue Corse : L’exemple Diwan ?

La mobilisation en faveur de la langue Corse pose la question d’initiatives associatives et privées pour en favoriser l’apprentissage, à l’exemple des écoles Diwan en Bretagne. Malgré l'existence de ce système depuis 41 ans, la langue bretonne perd 5 à 6000 locuteurs chaque année.

L’histoire débute en 1977, comme souvent par une initiative militante.
Reun L’Hostis est un militant Cgt, ce musicien Breton qui s’intéresse aux écoles associatives qui émergent dans plusieurs pays d’Europe, propose au maire de la commune de Lampaul- Ploudalmézeau de créer une garderie en langue bretonne.
Cette initiative va constituer les fondations du réseau d’écoles " Diwan" (germer, sortir de terre en breton). La première école primaire est créée en 1980, le premier collège 8 ans plus tard, et en 1994 le premier lycée " Diwan" ouvre ses portes à Brest.

De la maternelle au lycée

41 ans après, 4318 élèves sont scolarisés dans une école associative immersive et les effectifs ont augmenté de 20% en 5 ans selon les chiffres communiqués par le réseau. 47 écoles primaires, 6 collèges et un lycée, assurent ainsi une scolarité complète de la maternelle au baccalauréat.

L’enseignement est dispensé en langue Bretonne, les enseignants sont inspectés par l’éducation nationale comme les autres professeurs de l’enseignement public, et les élèves suivent les programmes officiels du Ministère dans toutes les matières. Le taux de réussite des "Diwan" au baccalauréat frôle les 98%, contre 90% à l’échelon national.

Les établissements sont essentiellement des écoles privées, sous contrat avec l’Etat qui prend en charge les salaires des professeurs. Avec un budget d’environ 5 millions d’euros par an, les écoles " Diwan " sont financées pour moitié par de l’autofinancement, des dons et des subventions. Par ailleurs, le réseau employait en 2017 environ 200 contrats aidés, menacés par la suppression de ce dispositif par le gouvernement.

De moins en moins de locuteurs

Mais en dépit du dynamisme du réseau " Diwan", la langue Bretonne perd environ 5 à 6000 locuteurs par an selon l’office public de la langue bretonne. 200.000 personnes parlent breton aujourd’hui, elles étaient 1,5 million au début du 20ème siècle toujours selon l’office.

Seuls 2% des enfants Bretons sont scolarisés dans une école " Diwan", ce qui, comme en Corse pose clairement la question du rôle de la société dans la sauvegarde de la langue. Le réseau des écoles " Diwan" a joué le rôle de courroie de transmission dans la réappropriation de la langue.

Mais l’école ne peut pas tout. Comme le rappelait justement Marceddu Jurecsek, le seul agrégé de Corse " L’école n’est pas là pour sauver la langue, si les Corses ne prennent pas leur langue en main on y arrivera pas " explique ce professeur au collège Laetitia d’Ajaccio. Pour lui il faut que les parents parlent Corse à leurs enfants, c’est la base de la transmission de la langue.

Janvier 2019

Michel Feltin-Palas
mfeltin-palas@lexpress.fr

Faut-il instaurer la "coofficialité" du corse et du français ?

En Corse plus qu'ailleurs, la langue est une question explosive (pardon pour le jeu de mots facile). En l'abordant cette semaine, je risque d'ailleurs de heurter les convictions de certains lecteurs. Je les prie par avance de bien vouloir m'excuser, mais l'enjeu me paraît d'importance.
L'occasion m'en est donnée par un excellent livre qui vient de paraître (1). Disons les choses d'emblée : son auteur est engagé, puisqu'il s'agit d'un élu nationaliste. Mais Romain Colonna est également maître de conférences en sociolinguistique, ce qui donne à son ouvrage toute sa valeur. On s'en doute : il défend avec vigueur la nécessité d'instaurer la coofficialité du corse et du français sur son île, en accordant à l'un et à l'autre le même statut, mais il le fait avec une qualité d'argumentation que l'on rencontre rarement dans un débat où la passion et l'inculture l'emportent souvent.
La forme qu'il a retenue est de surcroît très agréable. Cinquante mini-chapitres, composés systématiquement d'un titre écrit à la manière d'un tweet (donc en moins de 140 signes), développés sur une ou deux pages. Procédé très efficace qui lui permet de démonter quelques clichés et de promouvoir quelques idées-force. En voici quelques-unes :
- La coofficialité existe déjà dans certains Etats (Afrique du Sud, Suisse, Canada, Finlande...) et dans de nombreuses organisations internationales (Union européenne, Otan, OCDE...).
- Dans ces instances, la France revendique régulièrement la coofficialité pour s'opposer à la toute-puissance de l'anglais. Procédure que notre pays... refuse d'appliquer sur son propre sol.
- Parler est un phénomène naturel, mais le choix de la langue que l'on parle ne l'est pas. Il s'agit le plus souvent du résultat de décisions politiques, comme le montrent les exemples de l'espagnol en Amérique latine, de l'anglais en Amérique du Nord, de l'arabe au Maghreb ou... du français en Corse.
- Lors de sa visite sur l'Îlede Beauté, en février 2018, Emmanuel Macron a affirmé en substance qu'il était " favorable au bilinguisme, mais opposé à la coofficialité ". Le problème est que l'un suppose l'autre. " Penser que le corse peut vivre au côté du français sans avoir les mêmes droits, c'est imaginer qu'une 2 CV peut aller aussi vite qu'une Formule 1 ", résume Colonna avec un sens certain de la formule.
- La coofficialité ne consiste pas à enlever des droits au français, mais à en donner davantage au corse. En latin, rappelle l'auteur, " co " veut dire " avec ", pas " contre ". Il ne s'agit donc pas de chasser notre langue nationale de l'île, mais de renforcer les chances de la langue corse d'y garder une place, ce qui est très différent.
- Les adversaires de la coofficialité avancent souvent un argument qu'ils croient définitif : " Personne n'empêche un Corse de parler corse ". Cela est rigoureusement exact, mais revient à oublier une règle essentielle : les langues sont en concurrence entre elles et tout individu " libre " de choisir opte pour celle qui lui permet de trouver un emploi et de gagner sa vie. D'où, selon Romain Colonna, la nécessité de doter les langues " faibles " d'un véritable statut, via la coofficialité. Et de rappeler à juste titre cette maxime de Lacordaire : "Entre le fort et le faible, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit."
Quelle forme prendrait concrètement la coofficialité ? Romain Colonna n'est (volontairement ?) pas très précis sur ce point. Une chose, cependant, paraît claire : l'éducation bilingue deviendrait obligatoire durant toute la scolarité, afin que tout enfant de Corse maîtrise les deux langues, tandis qu'un grand plan de formation serait ouvert aux adultes et aux nouveaux arrivants. Ce dernier élément est essentiel. Contrairement à certains arguments caricaturaux, la coofficialité ne s'inscrit pas dans une vision " ethniciste ".
Pour autant, personne n'est dupe. Derrière ce combat pour la langue, les nationalistes cherchent évidemment à faire avancer des idées politiques. Une démarche qui illustre l'une des plus vieilles règles de la linguistique : un idiome ne sert jamais seulement à communiquer, il permet aussi à un groupe de se définir comme un groupe. Et cette "conscientisation" peut de fait favoriser les combats autonomistes, voire indépendantistes, comme le montre l'exemple catalan.
Cela dit, la réciproque est tout aussi vraie. Quand l'Etat français refuse d'accorder des droits significatifs aux langues minoritaires, lui aussi agit pour des raisons politiques, au nom de " l'indivisibilité de la République ". Cette attitude peut se comprendre, à condition de reconnaître qu'elle se traduit par une régression dramatique de la diversité culturelle. En ce sens, le débat sur la coofficialité est légitime et les arguments de Romain Colonna méritent des réponses sérieuses et argumentées.
(1) Pour une reconnaissance politique des langues. Le corse et la coofficialité. Romain Colonna. Editions Albiana, 138 pages, 12 €.

Novembre 2018

Une "langue corse officielle" en Corse ?
L'avis de Jean Chiorboli

C’est ce que l’on demande parfois, pour la bonne cause peut-être. Il est arrivé récemment que d’aucuns s’insurgent contre le prétendu “impérialisme” de certaines variétés corses au détriment d’autres qui feraient l’objet d'une censure délibérée.
J’ai déjà eu l’occasion de dire que la “fabrication d’une langue standard” est une solution discutable, y compris dans le cadre d’États centralisateurs. Il suffit de rappeler deux exemples.
D'abord la réforme officielle de l’orthographe française de 1990 que l’Académie a renoncé à imposer face à la “révolte” des “gilets conservateurs” dont le slogan était “Touche pas à mon POF (Paysage Orthographique Français).
Et aussi ce qui s’est passé en Sardaigne, où les différences entre les divers parlers sont plus importantes qu'en Corse, et où on a "fabriqué" une "langue sarde commune": officiellement adoptée par la Région Autonome Sarde en 2006, elle est employée encore aujourd’hui par une faible minorité. Notons que par comparaison la langue corse, non standardisée, a une (certaine) place dans l'enseignement public, et jouit d'un statut certes perfectible mais considéré comme privilégié dans le concert des "langues minoritaires".
En Corse le débat est ancien. En 1971 dans “U Muntese” n°138 Rinatu Coti écrivait notamment qu’il est “tout à fait UTOPIQUE de rechercher une UNIFICATION AUTORITAIRE ET ARBITRAIRE de notre idiome en sélectionnant tel vocable au détriment de tel autre, en vue d'établir les règles d'un BON USAGE ARTIFICIEL”, et que l’éventuelle “GRAPHIE COMMUNE” doit être basée sur “LA RÉALITÉ LINGUISTIQUE”, c’est à dire sur ce que nous appelons tout simplement L’USAGE, souvent maltraité (quelle que soit la variété utilisée), la plupart du temps par ignorance,

unite

Septembre 2018

vitesse

Août 2018

pratica

Juillet 2018

destin

Juin 2018

linguaviva

jureczek

bilinguisme

Mai 2018

onda

Onda corsa, une radio exclusivement en langue corse.

Amichi ogni ghjornu pruvemu à pruponevi affari novi nantu à a vostra radiu:

Eccu per avà cosa pudemu favvi sente:

-"e chjacchjere di Culombu" : un incontru tra a squadra di Onda corsa è un invitatu.

-"l'aria di un tempu" : tempi fà cuntati da Doria Gavini

-"capu à capu cun a nostra cultura" : Unu di a squadra di onda corsa vi presenta un invitatu cun un intervista ochju à ochju

-A cronica di "U sgaiuffu di a Piazzetta": Onda corsa sparte un articulu o di più selezionati nanti à u situ d'u nostru amicu di a piazzetta

-Cathy leghje per voi: Cathy Campana selezziuneghja letture per spartele cun voi.

-"I ricordi di Petru Pà" : tutti cunniscite stu situ magnificu, induve si ponu sente canzone corse arregistrate à l'impruvisu, in lochi sfarenti cun ghjente passiunata, canterini prufeziunali ma micca solu...

-"Si po ride" : rise,scaccanate, macagne, l'appuntamentu per quelli chì volenu ride appena

Tanti altri prugrami anu da vene, speremu pudevvi fà passà belle stonde ascultendu Onda Corsa

26 mai 2018

festa

18 mai 2018

Disparition : Si n’hè andatu Pasquale Marchetti

pm
L'universitaire et linguiste Pascal Marchetti est décédé le 17 mai 2018 à l'âge de 93 ans. / © DR

Pascal Marchetti est décédé jeudi à l'âge de 93 ans. Universitaire, linguiste, il a œuvré pour la normalisation de la langue corse et publié de nombreux ouvrages linguistiques et historiques.

Par Maïa Graziani, GB / France 3 Corse ViaStella - 18/05/2018

« Intricciate è cambierine », « L’Usu corsu » et « Méthode Assimil : le corse sans peine ». Quiconque s’est intéressé à la langue corse a déjà feuilleté ces ouvrages. Trois livres qui résument l’œuvre de Pascal Marchetti.

Agrégé d’italien, il enseigne la langue de Dante aux élèves des lycées parisiens Louis le Grand et Henri IV. Il enseignera ensuite le français dans les universités italiennes de Bologne et de Naples.

"Un homme multilingue"
Passionné par la langue corse, le linguiste participe au riacquistu et publie en 1971 « Intricciate è cambierine » avec Dumenicu Antone Geronimi. Un manuel de référence qui codifie l’écriture du corse et participe de sa normalisation.

La même année, il publie « L’usu Corsu », un dictionnaire trilingue en corse, français et italien. Toute sa vie, l’universitaire a milité pour rapporter la langue corse dans l’aire linguistique et culturelle italienne.

"ll avait envie de travailler sur la langue corse, sur la culture corse, de les rapprocher à d'autres langues, la langue française et italienne notamment, mais avec quelque fois des parties en anglais ou même en allemand, se souvient Aimé Pietri. "C'était un homme multilingue."

En 1975, Pascal Marchetti publie la « Méthode Assimil : le corse sans peine ». Un manuel d’apprentissage destiné aux débutants.

Mais pour le professeur de corse Ghjiseppu Turchini, qui participe à l’enseignement du corse en immersion au sein de l’association Prattica Lingua, "c'est plus une méthode qui s'adresse aux pratiquants déjà confirmés et je pense que cela en dit long sur le personnage qu'était Pasquale Marchetti".

Depuis l’annonce de son décès, les hommages se succèdent sur les réseaux sociaux.

Si n’hè andatu Pasquale Marchetti... unu impegnu maiori è influenti pà a lingua corsa... un travaddu di cudificazioni oramai intigratu da tutti... cuntemu bè di cuntinuà à fallu campà. À RINGRAZIÀ ! Parlemu corsu!

Si n’hè andatu Pasquale Marchetti Firmerà u so travagliu tamantu di a lingua in quelli libri è manuali fundatori A.T. Pietrera

Très attaché à son village de San Nicolao di Moriani, il avait publié en 2011 « San Nicolao : notes et documents ».

Via Stella rediffusera samedi 19 mai à 17h l'émission "Par un dettu" présentée par Petru Leca (enregistrée en avril 2014).

18 mai 2018

festabesoin

2 mai 2018

scrivemu

23 février 2018

Ghjurnata di a lingua materna

linguamaterna

16/02/2018

ghetto

Langue corse: l'hypocrisie de Macron

Par Michel Feltin-Palas, 07/02/2018

Emmanuel Macron a refusé d'accorder au corse un statut de co-officialité tout en se déclarant favorable au bilinguisme. Or, l'un ne va pas sans l'autre...

macron

Emmanuel Macron lors de son discours à Bastia, le 7 février 2018 en Corse.
Symboliquement, les nombreux drapeaux étaient tous français et européens - ©afp.com/Ludovic MARIN

Comme on pouvait s'y attendre, Emmanuel Macron a refusé mercredi dans son discours de Bastia d'accorder à la langue corse un statut de co-officialité sur l'île. Toutefois, il s'est dit "tout à fait favorable à l'esprit du bilinguisme", ce qui peut apparaître comme une avancée. à� ceci près... qu'il n'est pas possible d'obtenir l'un sans l'autre.

On aimerait croire en effet que l'on peut arriver à une situation de bilinguisme sans donner des droits égaux à la langue corse et à la langue française. Or, toutes les situations internationales montrent que ce n'est pas le cas, comme on peut le voir par exemple sur l'excellent site de l'université de Laval, au Québec. Quand, sur un territoire, deux langues cohabitent, mais que l'une d'elle est favorisée au détriment d'une autre, c'est naturellement vers la plus puissante que les populations se tournent. Et cela est tout à fait logique dans la mesure où il en va de leur promotion sociale et de l'avenir de leurs enfants.

Nous pourrions tous parler provençal

La France en est d'ailleurs un "parfait" exemple. Depuis des siècles, le français est la seule langue des diplômes, de l'emploi, des sciences, de la culture "noble"... C'est pour cette raison qu'au fil du temps, les Alsaciens, les Bretons, les Gascons ou les Picards ont "spontanément" décidé de ne pas transmettre leurs langues historiques à leurs enfants. Si la France était née depuis Marseille et non à Paris, c'est la langue de Frédéric Mistral qui aurait disposé du même statut, et nous parlerions tous provençal !

On pourrait croire que cette tendance à l'unilinguisme est l'une des conséquences inéluctable d'une "modernité" contre laquelle on ne pourrait rien faire. Sauf qu'il n'en va pas de même chez certains de nos voisins. En Suisse, par exemple, pays développé s'il en est, le suisse alémanique se porte à merveille à Berne et à Zurich, tandis que le français est florissant à Genève. Cela parce que ces deux langues bénéficient d'un statut égal dans la vie publique, intellectuelle et économique, tout comme l'italien et le romanche dans leur zone géographique respective. Plus éclairante encore est la situation, désormais célèbre, du catalan. Cas d'école quasi parfait puisqu'il s'agit d'une langue "régionale" parlée dans deux pays voisins. Or, qu'observe-t-on ? Le taux de locuteurs avoisine les 50 % outre-Pyrénées tandis qu'il est estimé chez nous à... 1 %.

On le comprend : aucune langue du monde n'est destinée à disparaître. Tout dépend des politiques publiques dont elle est l'objet. Or, force est de constater que celles menées jusqu'à présent par la France aboutissent à des résultats désastreux. Dès lors, dire, comme Emmanuel Macron, que l'on est "favorable au bilinguisme" sans prendre les seules mesures qui permettraient de le mettre en place concrètement relève soit d'une totale incompétence soit d'une totale hypocrisie.

Sur le marché du travail, c'est l'anglais qui est exigé

Le chef de l'Etat a certes avancé un argument de fond pour justifier sa position. "Jamais je ne pourrai accepter qu'on réserve tel ou tel emploi à celui qui parle corse, car là, ce serait un moins", a-t-il expliqué. Sans se demander si, depuis des siècles, l'obligation pour des millions de Français de renoncer à leur langue historique n'était pas, elle aussi, un "moins". Sans s'interroger ce qu'il deviendrait du français au Québec si les anglophones raisonnaient de la même manière. Et sans comprendre qu'il se trompe d'adversaire : dans de nombreuses offres d'emplois déposées en France, c'est l'anglais qui est exigé...

En réalité, la véritable raison de l'opposition du chef de l'Etat est ailleurs et elle est connue : comme tous ses prédécesseurs, il souhaite la disparition des langues régionales, de crainte que leur pratique ne réveille les sentiments identitaires et ne menace l'éclatement d'un pays culturellement disparate, le seul en Europe à voir cohabiter sur son sol les cultures latine, celte, germanique et basque. L'argument est audible, mais, à l'évidence, Emmanuel Macron n'a pas osé l'avancer.

Longtemps, notre pays a lutté avec acharnement contre les langues régionales - le rapport de l'abbé Grégoire, en 1794, était titré: "De la nécessité d'anéantir les patois". Aujourd'hui, il se contente de les laisser disparaître.

Source : L'Express

«L'officialisation de la langue corse n'est pas l'ennemie de l'unité républicaine»

  • Par  Alice Develey
  • Publié le 09/01/2018 à 12:29
  • INTERVIEW - La langue corse ne sera pas la deuxième langue officielle de la France a déclaré le gouvernement. La linguiste, spécialiste du corse Stella Retali-Medori, explique au Figaro, pourquoi cette reconnaissance est pourtant vitale pour la sauvegarde d'une langue «en voie de disparition».

    Depuis soixante ans, très exactement, la langue française est la langue de France. Officielle, nationale, elle est aussi exclusive. Cela signifie que hormis lui, nul autre idiome ne peut prétendre la remplacer. Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l'Intérieur et chargée du dossier corse, en visite à Ajaccio l'a encore rappelé aux indépendantistes ce vendredi 5 janvier: «La langue de la République française est le français, une revendication des nationalistes n'est pas envisageable.»

    Une déclaration de principe audible? Pas sûr. «La co-officialité n'est pas synonyme de juxtaposition de deux nations», rappelle la linguiste et spécialiste du corse Stella Retali-Medori. Elle explique au Figaro pourquoi la reconnaissance de la langue corse, actuellement «en voie de disparition», n'est pas contraire à l'Histoire de la France.

    LE FIGARO - Le gouvernement a déclaré vendredi soir, que la co-officialité de la langue corse et du français n'est pas envisageable. Pourquoi cela ne pourrait-il pas l'être?

    Stella Retali-Medori - Si le gouvernement a montré des signes d'ouverture politique pour la Corse, la question linguistique reste un objet de crispation qu'il conviendrait enfin de dépasser. L'officialisation du corse, comme celle d'autres langues régionales ou non territorialisées se heurte à un obstacle constitutionnel mais également à une représentation des langues qui est ancrée dans les mentalités depuis la Révolution Française et qui empêche une reconnaissance institutionnelle des langues de France.

    On considère, dans cette perspective, que la diversité linguistique serait l'ennemie de l'unité républicaine. Or, cette perception du fait linguistique est erronée. En effet, si l'on étudie la situation de divers pays du monde, y compris les pays frontaliers de la France, la diversité linguistique est généralement bien acceptée voire valorisée. Il y a donc un paradoxe, pour le pays qui se revendique comme étant la patrie des Droits de l'Homme de nier, voire de souhaiter anéantir toute forme de diversité linguistique. On en vient même, dans cette approche, à oublier que le français lui-même est soumis à divers phénomènes de variation qui sont d'ailleurs indispensables à sa vitalité.

    Si la co-officialité de la langue venait à passer, cela ne signifierait pas que les panneaux de signalisation seraient tous écrits en corse, jusqu'à Paris. Il faudrait imaginer ce qui est déjà en vigueur par exemple en Catalogne, en Espagne. Il y a évidemment une distinction à faire entre le niveau régional et le niveau national.

    Pourquoi est-il important pour les Corses d'officialiser le statut de leur langue?

    C'est important sur le plan symbolique car il y a un fort désir des Corses de reconnaissance et de valorisation de leur identité, spécialement linguistique. Les élus corses, et quelle que soit leur orientation politique, l'ont d'ailleurs montré en votant un statut de co-officialité à la Collectivité Territoriale de Corse en 2013 alors que Paul Giacobbi était président de l'exécutif.

    «Si l'école est assez bien dotée sur le plan de l'enseignement du corse, la transmission familiale est en perte de vitesse considérable»

    C'est aussi important pour permettre une politique linguistique en faveur de la vitalité du corse qui soit efficace, et qui aille bien au-delà de la problématique de l'enseignement de la langue pour laquelle il y a eu, depuis une trentaine d'années, beaucoup de progrès qui ont été réalisés. En Corse comme ailleurs, le recul voire la perte de la pratique linguistique conduit à un appauvrissement culturel dont les insulaires sont conscients et qu'ils veulent éviter. La co-officialité n'est pas synonyme de juxtaposition de deux nations ; la réduire à cette perspective est une erreur. La considérer sur un plan régional permettrait de décrisper la situation.

    La langue corse est-elle vraiment menacée?

    Le corse est enseigné dans les écoles de l'île par le biais de deux dispositifs essentiels: des sites bilingues où corse et français sont des langues d'enseignement et de communication, des écoles où le corse est enseigné à raison de trois heures par semaine. Si l'école est assez bien dotée sur le plan de l'enseignement du corse, la transmission familiale est en perte de vitesse considérable.

    On peut envisager qu'il y a deux raisons à ceci: la représentation de la langue résultant de la politique linguistique de la France conjuguée -et cela va de pair- à une méconnaissance du corse dans son fonctionnement, son histoire, sa valeur culturelle, mais aussi une posture attentiste des insulaires car la revendication institutionnelle sur la langue a concentré les énergies alors qu'il appartenait aussi aux Corses de la transmettre, naturellement (en famille, dans les commerces, etc.), sans qu'un cadre officiel ne soit nécessaire.

    Cette façon d'acquérir une langue, qui reste la plus efficace, s'est heurtée par le passé à une représentation négative de la langue qui a conduit à la délaisser, et elle se heurte aujourd'hui à la baisse du nombre de locuteurs qui ne permet plus un apprentissage ample et naturel de la langue alors que les Corses aspirent à sa sauvegarde et sa revitalisation.

    À combien se chiffre le nombre de corsophones de nos jours?

    Il est difficile de quantifier le nombre de locuteurs, sachant qu'en outre, parler le corse peut revêtir, comme pour d'autres langues, divers niveaux de compétences. Les dernières enquêtes sociolinguistiques qui ont été commandées par la Collectivité Territoriale de Corse évaluent à 2% le taux de transmission familiale et à 14% les pratiques bilingues dans les familles. Ces taux sont extrêmement faibles et font entrer le corse, selon les critères de l'UNESCO, dans la catégorie des langues en voie de disparition.

    «La langue corse est une voie royale vers le plurilinguisme»

    Mais le corse est aussi parlé dans le nord de la Sardaigne, et cela pourrait représenter une chance pour la pratique linguistique dans notre île, comme l'a compris le nouvel exécutif. Les affinités du corse avec les parlers frontaliers d'Italie et la présence multiséculaire de l'italien comme langue véhiculaire pourraient représenter une chance inouïe pour notre langue car elle peut alors être appréhendée comme une variété d'échanges transfrontaliers privilégiés avec l'Italie et être une porte d'accès aux autres variétés romanes, donc une voie royale vers le plurilinguisme.

    La langue est-elle un facteur d'intégration en Corse?

    Oui, les immigrés présents dans l'île ont, lorsque la vitalité de la langue le permettait, acquis bien souvent la langue et se sont totalement intégrés dans la société insulaire lors des décennies précédentes voir des siècles passés. Des familles immigrées inscrivent aussi leurs enfants en cours de corse avec un désir manifeste d'intégration comme j'ai pu le constater lorsque j'enseignais dans le secondaire. L'adéquation langue - identité reste forte, tout au moins dans les représentations.

    La langue corse serait donc originellement une langue de partage...

    Le corse est né de la romanisation de la Corse, et donc de l'implantation du latin dans l'île pendant l'Antiquité. Conquise en même temps que la Sardaigne, l'île a connu une latinisation profonde et, à l'instar de l'ensemble des territoires latinisés de l'Empire romain, le latin a progressivement évolué pour donner naissance à une variété néo-latine très proche de l'ensemble des parlers de l'Italie centrale et méridionale, dont le toscan qui a donné naissance à l'italien.

    La séparation effective entre le latin et les langues qu'il a fait naître date du IXe siècle, période à laquelle la Corse est tournée vers la Toscane et l'Italie centrale. Comme d'autres variétés romanes elle a emprunté du lexique aux langues germaniques, à l'arabe, à l'ancien français et l'ancien occitan, à diverses variétés italiennes, ainsi qu'au latin par voie savante pendant le Moyen Âge.

    Sur le territoire français elle est donc une langue originale, au même titre que le catalan du Roussillon par exemple, tout en présentant des affinités avec l'ensemble des autres variétés issues du latin puisqu'elles possèdent cette source commune. Le corse a un lexique et une syntaxe qui sont semblables en de nombreux points avec l'ensemble des langues romanes, dont le français fait bien entendu partie, tout en étant suffisamment différente pour justifier sa reconnaissance.

    Source : Le Figaro du 09/01/2018

    adami

    La lingua corsa è ufficiale! ...In Gallura.

    Venerdì dieci novembre 2017, il presidente del consiglio esecutivo della Corsica, Gilles Simeoni, e Agostino Pirredda, Presidente delle comunità dei comuni dell’Alta Gallura, hanno firmato un « protocollo d’intesa Gallura-Corsica per la promozione delle lingue e culture galluresi e corse ». Questo perché il gallurese, che ha uno statuto di co-ufficialità in gallura, di fatto è un’altra variante del còrso. Quindi la lingua corsa è già co-ufficiale. Ma in Italia, non in Corsica!

    Vorrei quindi partire dalla Gallura per fare una panoramica dei modelli che potrebbero aiutare la lingua corsa e sopravvivere e rifiorire.

    La salvezza delle lingua corsa, modelli europei, dalla Sardegna al Paese Basco

    Evoluzione della popolazione bascofona per fascia d’età, CAE, 1981-2011 (%)

    • Anzitutto, parlerò del Paese Basco, non per la sua lingua, radicalmente differente di tutte le lingue del gruppo latino, all’origine sconosciuta, ma per il suo “riacquisto” culturale e linguistico. Da una lingua in pericolo mortale ad oggi, lingua viva, parlata da quasi tutta la popolazione basca. Vediamo sul grafico l’evoluzione fra 1981 e 2011 : parlendo dei giovani, in 1981 19,1% dei 10-14 anni parlavano basco, oggi 84%, risultato della politica linguistica delle “ikastola”, scole in immersione con l’uso unico del basco da 3 a 6 anni, e della co-ufficialità del basco in Spagna. Alcun dubbio, la co-officialità del corso, accoppiata alla volontà assoluta dei corsi di parlare la lingua puo salvarla della scomparsa.

    • Il sardo invece, è une lingua appartenente al gruppo romanzo delle lingue indoeuropee, considerata da molti studiosi la più conservativa delle lingue derivanti dal Latino. Anche il còrso è derivato da un latino, e non è quindi un « dialetto dell’italiano » ma piuttosto come una lingua sorella delle parlate italiane, molto influenzato principalmente dal toscano, ma in alcune parti anche dal sardo e dal genovese.

    Ripartizione geografica dei dialetti della lingua corsa.

     

    Nel nord della Sardegna, c’è una lingua, il gallurese, di origine corsa, e influenzata dal sardo parlato in Gallura.

    Quindi, il progetto tra corso è gallurese si inserisce nello scopo di salvare la lingua corsa dandogli un carattere internazionale. Infatto, in Italia il corso è riconosciuto, è lingua ufficiale in Sardegna… ma mica in Corsica.

    Sappiamo anche che il corso e l’italiano sono lingue sorelle e, fra di loro, si trova il gallurese, nato dal corso, influenzato dal sardo e dall’italiano e, soprattutto, parlato da locutori italofoni. Parliamo spesso di isole sorelle, designando la Corsica e la Sardegna, separate di 12 chilometri, con un’identità geografica, storica (il regno dell’Aragon), e sopra di ogni cosa, linguistica con due parlati, antichi e vicini al latino.

    Il 28 aprile 2016, in occasione della ricorrenza de “Sa die de sa Sardigna”, durante il consiglio regionale tenutosi a Cagliari a cui ha partecipato anche Jean-Guy Talamoni, presidente dell’assemblea della Corsica che ha parlato in còrso, il consigliere regionale Giuseppe Meloni ha tenuto per la prima volta un discorso in un’assemblea regionale interamente in gallurese (finora c’erano state varie parti di discorsi, ma mai uno completo) e il suo collega Pierfranco Zanchetta ha fatto lo stesso nella variante maddalenina (isulana).

    Di questa iniziativa del governo nazionalista còrso, possiamo capire una volontà di aprire la Corsica al suo ambiento geografico che non è francese : l’Italia ovviamente, di cui culturalmente ha fatto parte quando non era uno Stato ma un’area culturale, ma anche la Catalogna, altro paese del Mediterraneo occidentale con una forte identità e una lingua neolatina.

    Perché è importante di ricordarsi il “figlio sardo” del corso, il gallurese? Perché è necessario salvare la nostra lingua, quella degli nostri antenati, dandogli una dimensione mediterranea, con cui possiamo comunicare con milioni di locutori. Sviluppo interno delle scuole bilingue ed in immersione, del còrso nella società, al lavoro, per « guadagnarsi il pane », e sviluppo esterno con l’apertura a tutte le lingue che, durante secoli e secoli, hanno scambiato, vissuto, con il corso : così, magari, la nostra lingua camperà.

    Pubblicato il 20 novembre 2017 da Marc-Antoine Faure Colonna d'Istria

    Source : corsicaoggi.

    Linguaviva

    lingua

    A Festa di a lingua

    festa

    Rencontre Parlemu corsu - CTC

    developper

    La lingua còrsa riassume in sé le parlate locali di tutta l’Italia

    Ci si domanda come mai le parlate che compongono la lingua còrsa sono spesso assimilate, sul piano fono-morfologico, sintattico e lessicale, alle varietà dialettali centromeridionali dell’Italia. Dove “dialettali” non ha accezione negativa ma indica semplicemente le lingue locali. La spiegazione può essere data attraverso le classificazioni dei dialetti italiani, tuttavia, non sempre tra loro concordanti, sebbene, tra quelle maggiormente attendibili, figuri la Carta dei dialetti d’Italia, realizzata da Giovan Battista Pellegrini nel 1977, in virtù di inchieste svolte sul campo, i cui dati sono confluiti nell’Atlante Italo-Svizzero, a cui si rifà, pur se con alcune modifiche, la carta approntata da Francesco Sabatini nel 1997:

    carta-dialetti-sabatini-1997

    Pellegrini ha, altresì, introdotto il concetto di italo-romanzo, riferendosi all’intero panorama dialettale della penisola italiana e delle isole ad essa adiacenti, che adottano quale lingua di cultura (lingua guida o lingua tetto) l’italiano.

    Dal punto di vista dialettologico, è interessante la distinzione che lo stesso Pellegrini opera tra i dialetti settentrionali, in uso nelle aree collocate a nord di un’isoglossa definita ‘linea La Spezia-Rimini’ (una linea immaginaria che collega la città ligure con quella sulla costa adriatica settentrionale), il cui percorso si snoda dal versante tirrenico a quello adriatico, valicando l’Appennino tosco-emiliano, e i dialetti centromeridionali, parlati a sud di tale confine.

    Proprio a quest’ultimo raggruppamento dialettale il Pellegrini ascrive i dialetti di Corsica (le varianti locali della lingua corsa) insieme ai dialetti toscani, parlati appunto in Toscana, ai dialetti mediani, il cui dominio riguarda, a sud della ‘linea Roma-Ancona’, le Marche centrali, l’Umbria, il Lazio ad Est del fiume Tevere e l’Abruzzo aquilano, mentre a nord della suddetta linea sono denominati «mediani di transizione», perché caratterizzati dall’assenza di alcuni tratti distintivi delle parlate di area mediana e dotati, di contro, di caratteristiche in comune con le varietà toscane, ai dialetti (alto)meridionali, la cui area di estensione comprende il meridione estremo delle Marche e del Lazio, buona parte dell’Abruzzo, nonché il Molise, la Campania, la Basilicata, la Puglia (tranne la penisola salentina) e la Calabria settentrionale e ai dialetti meridionali estremi, in uso nel Salento, nella Calabria centromeridionale e in Sicilia.

    Tuttavia occorre, in proposito, evidenziare il fatto che le varietà dialettali còrse, riflettendo anche tratti linguistici in comune con i dialetti del Nord Italia (ad esempio, la lenizione o indebolimento tipicamente settentrionale di t etimologica in d, rilevabile in forme come pudemu ‘possiamo’, pescadore ‘pescatore’), pur gravitando, sostanzialmente, nell’orbita dei dialetti centromeridionali, si posizionano, come le varietà toscane, in un’area di confine compresa tra il mondo romanzo orientale, cui appartengono i dialetti mediani e meridionali, unitamente al rumeno, e quello romanzo occidentale, del quale sono partecipi i dialetti settentrionali, alcune caratteristiche dei quali accomunano questi ultimi a lingue come il francese, il provenzale, lo spagnolo, il portoghese, il catalano (cfr. D’Achille, P. 2016, L’italiano contemporaneo, Bologna, Il Mulino, pp. 16-17).

    I dialetti còrsi, inoltre, secondo quanto riferisce nel merito Loporcaro (2009, Profilo linguistico dei dialetti italiani, p. 117), nel passaggio dall’inquadramento delle varietà toscane a quelle centromeridionali, trovano collocazione in base a diverse classificazioni, che hanno determinato vari apparentamenti: con la costellazione dialettale toscana, ad opera di Cortelazzo (1988, Ripartizione dialettale, LRL IV, pp. 445-453) e Tavaglini (1972, Le origini delle lingue neolatine, Bologna: Pàtron, p. 395), con quella del Centro-Meridione, da parte di Guarnerio (1902-05, Il sardo e il còrso in una nuova classificazione delle lingue romanze, AGI 16, pp. 491-516) o con la compagine dialettale sarda, per impulso di Lausberg (1976, Linguistica romanza, I, Fonetica, Milano, Feltrinelli, p. 78), tenendo conto di un dato inoppugnabile, la toscanizzazione, quale fenomeno comparso in età medievale e, tuttora, gradatamente più accentuato verso l’area di nord-est della Corsica e tale da far immaginare difficile qualsiasi netta demarcazione, secondo quanto hanno argomentato, in proposito, Nesi (1988, Korsisch: Interne Sprachgeschichte. Evoluzione del sistema grammaticale, LRL 4, pp. 801-802) e Dalbera-Stefanaggi (1991, Unité et diversité des parler corses. Le plan phonologique. Parenté génétique et affiné, Alessandria: Edizioni dell’Orso, pp. 310-322).

    Partendo dalle caratteristiche fonetiche, è interessante rilevare che i dialetti còrsi si distinguono, ad esempio, dal toscano per l’innalzamento di –O finale in [u], evidente in esiti quali vagu ‘vado’, pilgu ‘piglio’, foku ‘fuoco’, cui si affianca la chiusura parallela di –E finale in [i], distintiva delle varietà meridionali dell’isola, che emerge da termini come mari ‘mare’, pani ‘pane’, sétti ‘sette’. Ciò fa intendere che il sistema vocalico atono (cioè non accentato), distintivo delle parlate còrse meridionali, presenta le medesime condizioni strutturali di quello dell’area contigua sassarese-gallurese, nonché del siciliano, a differenza dell’esito vocalico e in fine di parola, il cui uso resiste nei dialetti còrsi centrali e settentrionali.

    A metà strada tra le concordanze col sardo, da un lato, e quelle col toscano, dall’altro, si posizionano isoglosse, che assimilano le varietà dialettali còrse ai dialetti dell’Italia centro-meridionale come l’abbassamento timbrico di [o] ad [a], ad esempio in aliva, l’occorrenza del betacismo, cioè dello sviluppo di [v] in [b], in forme come bègu ‘vedo’, cercu a bboi ‘cerco voi’, la ricorrenza dell’esito consonantico velare [g] in vagu ‘vado’, che ricorda il corrispondente tipo lessicale napoletano vakə/vagə, come anche del fenomeno della retroflessione, che trasforma –LL- in [ḑḑ], per esempio in una voce come kavaḑdu, e che collega il còrso al Meridione italiano estremo e alla Sardegna.

    Sul piano della morfologia, colpisce la formazione del futuro sintetico còrso, che mostra concordanze con le corrispondenti voci verbali riscontrabili nell’Italia meridionale, poiché si presenta, al pari di queste ultime, con la forma piena dell’ausiliare alla I persona, ad esempio manderagghju ‘manderò’, paragonabile al corrispondente tipo del napoletano letterario mandarraggio, nel quale, però, l’esito originario –AR- è mutato, nel còrso, in –ER-, coincidente, dunque, col fiorentino, come pure l’occorrenza del possessivo enclitico in forme quali mámmata ‘tua mamma’, fratèllemu ‘mio fratello’, rintracciabili anche nel napoletano, mammətə, fratəmə.

    Un’ulteriore concordanza tra le varietà còrse e i dialetti del Meridione italiano si riscontra, sul piano sintattico, nell’uso del complemento oggetto preceduto dalla preposizione semplice a (o ‘accusativo preposizionale’), in riferimento a persone, ad esempio cercu ad ellu/a bboi ‘cerco lui/voi’, bègu a gghjuvanni ‘vedo Giovanni’ (cfr. Dalbera-Stefanaggi M.-J. 1997, Corsica, in Maiden e Parry, pp. 303-310), che trova corrispondenza nei costrutti napoletani cercə a issə/a bbujə, bbekə a giuannə, ma che si usa, nel còrso, anche in relazione a nomi propri di città, per esempio connoscu a Parigi.

    Un altro dato molto significativo, in proposito, è quello fornito da Olivier Durand (2003, La lingua còrsa, Brescia, Paideia, p. 39) in riferimento ad influssi linguistici derivanti dai contatti stabilitisi, nel corso della storia, tra Corsica e Meridione italiano: si tratta della presenza di alcuni prestiti lessicali, spesso adattati foneticamente al còrso, diffusi nelle città portuali dell’isola da pescatori campani e riscontrabili in forme quali accattà ‘comprare’ (ma nell’interno del territorio insulare cumprà), mùsculi ‘cozze’, caccià ‘togliere, tirar fuori’.

    L’illustrazione poc’anzi effettuata di alcuni tratti fenomenologici del còrso, equivalenti a diverse caratteristiche fonetiche, morfologiche e sintattiche, rilevabili nei vari raggruppamenti dialettali di area italiana, ha consentito di comprendere che la Corsica rappresenta una realtà linguistica, che, quantunque sia al di fuori dei confini politici dell’Italia, per ironia della sorte, riassume in sé il variegato mondo italo-romanzo. Dal punto di vista linguistico, l’isola è come una penisola in miniatura, dove le diverse varianti della lingua polinomica còrsa hanno a volte tratti tipici del toscano, altre volte del sardo settentrionale, dei dialetti italiani meridionali, o addirittura di quelli dell’italia del nord.

    I Corsi, dunque, anche quelli ormai definitivamente convertiti alla francesità, devono sapere che la fenomenologia linguistica che lega i dialetti còrsi a quelli italiani non può essere, per alcuna ragione, ritenuta casuale, poiché significherebbe negare la secolare partecipazione dell’isola al sistema culturale della regione geografica italiana e lo storico ruolo della lingua italiana come idioma di riferimento del còrso.  Questo, chiaramente, non ha niente a che vedere con implicazioni politiche, né vuole negare ciò che oggi il còrso è: una lingua che la sua comunità di parlanti vuole far crescere e mettere in grado di esprimere appieno il mondo moderno.
    Source : Corsicaoggi - Article de Giuseppe VITOLO – Images : Viv-it.org

    La première carte de l’île en langue corse avec la toponymie traditionnelle

    C’est le fruit d’un travail de 8 mois mené par un groupe d’auteurs sur une idée d'Henri Medori, le fondateur des éditions Aedis, qui publient cette carte dans plusieurs formats.  

    France 3 Corsica - Publié le 13/12/2016

    Da Dollare in punta di u Capicorsu à Bunifaziu sta prima carta di l’isula fatta sana sana in lingua corsa ripiglia tutti i nomi di paesi, di fiumi o di cime di Corsica. Si trovanu dinù nantu à stu documentu spiegazione nantu à a geograffia o l'amministrazone di l'isula. 

    Un travagliu di ottu mesi hè statu fattu da un gruppu d'autori da assestà la è racoglie i nomi anziani di i lochi. 

    Un travagliu in cumunu 

    Carlu Castellani, Sabella Cervetti, Petru Paulu de Casabianca, Ghjermena de Zerbi, Ghjacumu Fusina, Janine Castellani è Ferrandu Olmeta sò l’autori di sta carta pastificata è stampata in parechje misure sfarente.

    U prughjettu hè natu in mente di Henri Medori, patrone di l’edizione Aedis ch’anu stalatu un parte di i so scagni in Bastia, carrughju Luce de Casabianca, dapoi qualchì settimana.

    I particulari, e scole, ma dinù e culletività cum'è e merrie, i dipartimenti o a CTC... ghjè u publicu à u quale si vole Aedis addirizzà cù a so carta venduta à partesi da 20€ a pezza secondu à e misure.

    Una scelta economica ma dinu d'autore à salutà in piena cuntrastata nantu à l’avvene di a lingua nustrale è u so usu.

    scorsa

    Accadde oggi: il 4 agosto 1859 la Francia vieta la lingua italiana in Corsica

    La Corsica viene annessa alla Francia nel 1769, ma in realtà da un punto di vista culturale e linguistico essa è rimasta per lungo tempo un’eccezione rispetto alla parte continentale del Paese. Mantenne cioè le sue peculiarità.

    In particolare, il popolo mantenne l’uso del còrso, lingua parlata utilizzata nell’uso di tutti i giorni. Mentre la lingua amministrativa continuò ad essere l’italiano, già utilizzato da secoli dalla Repubblica di Genova e nella breve Repubblica Corsa di Pasquale Paoli.

    Molti atti pubblici continuavano ad essere scritti in lingua italiana, tanto che con un apposito decreto del 10 marzo 1805, veniva derogato per l’isola l’uso obbligatorio del francese.

    La situazione cambia nel 1859, e precisamente nella data di oggi: è infatti del 4 agosto di quell’anno la sentenza della Corte di cassazione francese che vieta totalmente l’uso dell’italiano in Corsica, proclamando il francese unica lingua ufficiale dell’isola.

    4agosto1859-cassazione-3

    La tempistica dell’intervento della Corte di Cassazione si iscrive nella volontà di uniformazione del Governo, che sul piano linguistico si trasforma in politica di uniformazione e assimilazione, volta anche a rafforzare il senso di appartenenza di tutti i territori francesi ad un’unica nazione.

    Ma probabilmente un altro fattore portò la Corte a legiferare in tal senso proprio in quella data. Infatti, poche settimane prima, nel luglio 1859, si era conclusa la Campagna d’Italia di Napolenone III contro l’Austria, a sostegno del Regno di Sardegna. Alcuni storici sostengono quindi che il divieto di utilizzo della lingua italiana e l’accelerazione al processo di assimilazione culturale fu dettato anche dai timori suscitati dall’avvio che la campagna aveva dato ai moti rivoluzionari italiani e dal pericolo che anche l’isola potesse esserne direttamente coinvolta.

    Il rischio concreto che la Corsica entrasse a far parte del nascente Stato unitario italiano non ci fu mai, ma la Francia potrebbe aver voluto correre ai ripari per evitare questa eventualità.

    Da quel momento iniziò il processo che spezzò il legame storico e di parentela tra lingua italiana e còrsa, che si trovò progressivamente a contatto con la sola lingua francese, con inevitabili conseguenze sulla formazione della lingua còrsa, che al francese iniziò ad attingere per prestiti e neologismi. Un’altra lingua neolatina, certo, ma sicuramente meno affine rispetto all’italiano.

    Source : Corsica Oggi

    democratie

    Langue corse et modernité

    Nul n’ignore aujourd’hui les conditions dans lesquelles s’est organisé et développé, d’abord par l’action associative et militante, puis de façon officielle, un enseignement du corse puisqu’il a été progressivement installé depuis une trentaine d’années aux divers degrés du service public de l’éducation. Pourtant, et si l’on excepte les documents proprement didactiques ou pédagogiques qui ont accompagné et illustré abondamment cette progression, les ouvrages de réflexion générale sur cet objet particulier sont plus rares. J’ai moi-même publié une étude synthétique qui avouait l’ambition d’embrasser l’ensemble d’une problématique, c'est-à-dire de s’intéresser non seulement à l’histoire de cette idée d’enseignement particulier depuis ses enracinements profonds jusqu’à ses cheminements complexes plus récents, mais aussi de procéder à l’examen pluridisciplinaire des influences diverses, d’inspiration locale, italienne ou française, qui ont constamment agi sur l’objet et l’ont peu à peu transformé en ce qu’il est à présent devenu (1).

    Cette étude m’a porté à m’interroger sur les blocages de toute sorte qui ont considérablement handicapé dès l’origine et gênent encore quelque peu le développement serein de cet enseignement. En effet, les bilans nombreux tirés de cette expérience laissent parfois transparaître quelque insatisfaction sur ses résultats globaux. D’autre part, la critique épingle souvent des lacunes persistantes vers une généralisation souhaitée et jamais atteinte, et en tout cas une insuffisance d’ancrage solide dans les jeunes générations, pour ne citer que les observations couramment entendues. Or, si ces insuffisances tiennent à des défauts d’organisation imputables au système scolaire ou à l’efficacité des méthodes pédagogiques, il n’y a rien qui ne se puisse corriger et améliorer à terme. Si c’est la qualité même de la langue employée qui est en cause (mauvaise appréciation ou faible prise en compte par les praticiens actuels, maîtres ou élèves, de ses fondements historiques au profit d’usages privilégiés de la production contemporaine) rien n’empêche a priori une révision concertée et prudente des parcours voire de possibles réorientations idéologiques. Si les réticences sont plus profondes et relèvent d’autres instances que techniques ou pédagogiques, si elles s’alimentent à ce que les sociolinguistes nomment « le sens commun » circulant dans la communauté des locuteurs, soit une sorte de volonté populaire, -plus malaisément consultable sans doute mais considérée généralement comme l’assise principale de toute revendication linguistique- c’est alors toute la problématique qui mériterait d’être réexaminée et d’autres hypothèses de réflexion engagées.

    Dans cette éventualité, je voudrais en tenter une aujourd’hui que je vous demanderais de recevoir comme une simple contribution, naturellement offerte à la discussion et amendable autant que nécessaire, à un débat devenu pour tous fort complexe. Si je prends autant de précautions de style, c’est que je voudrais contester l’idée que l’on ne met pour ainsi dire jamais en doute et qui tient lieu de poutre maîtresse à toute spéculation sur notre devenir identitaire : il s’agit de l’assimilation langue corse/tradition ou mieux expression linguistique corse/société traditionnelle. Mon hypothèse serait donc que les réticences persistantes, plus ou moins consciemment exprimées, à accepter résolument un enseignement du corse dans ses formes et résultats actuels, ont pris anciennement naissance dans cette adéquation immuable et ne se sont jamais tout à fait résorbées malgré le mouvement massif qui a marqué au cours de ce siècle le passage à la modernité de notre société traditionnelle.

    Pourtant, s’il est reconnu que notre idiome est bien né des formes de vie anciennes qu’il reflétait, il faut bien admettre qu’il a tout de même survécu à leur extinction lente et à leur disparition progressive. On s’aperçoit en outre qu’un nouveau et ardent désir de parler corse s’est désormais emparé de notre communauté : il est sensible dans le discours et, observons-le, par la manifestation d’une conscience, d’une ambition et d’une mobilisation militante jamais égalées dans notre histoire. On pourrait même avancer que ce désir semble avoir pris naissance de et à partir de ce mouvement de régression des formes traditionnelles, comme si les formes mêmes de la modernité, à mesure qu’elles gagnaient comme partout du terrain, lui avaient insufflé une force et un élan nouveaux. Cela dit sans méconnaître certaines ambiguïtés inhérentes à toute attitude qui prétend s’abreuver à l’ancien (sinon y revenir) avec les instruments et les ambitions du moderne et du contemporain. (2)

    Nous touchons ici en effet à une réelle difficulté conceptuelle dans la mesure où l’on n’accepte pas toujours aisément, ni pour soi ni pour les autres, le choix d’une lecture délibérément moderne de la réalité culturelle vécue sans quelque soupçon de trahison d’une certaine forme de fidélité transcendante. Force nous est pourtant d’admettre que c’est d’un tel mouvement, d’un tel choix –et quelle qu’en fussent en définitive les motivations profondes- que sont nées toutes les pratiques actuelles de transmission du corse, puisque la société traditionnelle ne voulait ou ne pouvait plus assurer massivement cette sauvegarde ni cette transmission. Ajoutons que celles-ci se font essentiellement à présent par l’institution scolaire à qui il revient par conséquent de formaliser ce rapport de la langue corse au savoir, au monde, aux autres, ainsi qu’elle le fait pour la langue officielle (3)

    Sans doute est-il nécessaire de préciser ici, pour clarifier l’argumentation, quelques éléments définitoires : j’entends par traditionnel ce qui serait simple résultat d’héritage, sans questionnement ni remise en cause. D’ailleurs l’identité porteuse du legs, valeurs et usages, laisse peu de latitude à la contestation puisque ce sont les anciens dans leur sagesse qui les transmettent à des légataires à charge pour ceux-ci d’en faire de même pour leur propre postérité. On a souvent décrit, en Corse comme ailleurs, les indicateurs de la conformation des individus aux lois de cette société traditionnelle : l’individu aurait fort à faire s’il voulait conquérir une autonomie d’opposition à ce qui le confine dans le statut de membre indifférencié de sa communauté. Le phénomène du clan, par exemple, est l’une des images caricaturales de ces fonctionnements assujettissants. Les conduites d’entraide, de soumission, de fusion dans un réseau familial, amical, politique ou autre existent ailleurs et à des degrés divers. La question de « l’intervention », par exemple, relève des mêmes processus : qui n’a pas reçu mission d’intervenir au nom d’un tel, parent ou ami, dans le but d’assurer une meilleure efficacité (ou prétendue telle) à une démarche administrative, une demande d’emploi, un examen ? Cette attitude est tellement répandue dans notre communauté qu’elle est généralement reçue comme naturelle et compréhensible par tous. Or, elle est, comme partout, inacceptable pour un esprit soucieux d’équité, de justice, de simple démocratie, dès lors qu’il suppose passe-droits, favoritisme, manœuvre ou trafic d’influence. Le rejet individuel, et je suppose majoritaire, que l’on peut avoir de pareils comportements n’empêche pas qu’ils persistent majoritairement. C’est là un exemple de la difficulté qu’il y a à s’opposer isolément à des pratiques aussi enracinées. C’est pourquoi la rébellion reste, par confort individuel ou conformisme facile, plus rare que ne pourrait l’attendre tout observateur extérieur. (4)

    Or, la marche vers la modernité s’inscrit justement dans la contestation des déterminations traditionnelles : à partir du moment où l’individu tente de prendre ses distances, il rompt avec l’identité socioculturelle héritée. Ce que je proposerais d’appeler ici modernité ne sera cependant pas la rupture complète ou la trahison patente de l’héritage socioculturel mais la volonté de prise de distance, de recul objectif. Ce choix à contre-courant est toujours difficile, mais il, correspond à l’éclosion du sujet, c'est-à-dire de l’individu devenu capable de renverser progressivement le regard porté sur le monde et sur lui-même, de le gérer autrement et d’en maîtriser le rapport nouveau. Cette difficile tentative d’autonomisation de comportements marque justement le dur passage de l’adolescence à l’âge adulte et est trop connue pour que l’on s’y attarde ici.

    Si l’on examine cette question identitaire sous un angle seulement linguistique que constate-t-on ? Que jamais la langue n’a été envisagée autrement que comme le fruit de cet arbre communautaire où il a mûri et s’est développé. On remarquera que ce rapport étroit de l’idiome à la société qui lui a donné naissance est le plus naturel qui soit. Mais cette qualité confère une sorte de vertu transcendantale qui interdit toute modification de statut sous peine d’atteinte grave à l’essentiel. Dès lors, toute action sur la langue ne pouvant être que de maintenance et de sauvegarde, on n’osera jamais impliquer l’idiome dans un projet dynamique, si séduisant fût-il. La langue dite maternelle (5) est et reste affaire d’affect, de sentiment, de cœur. Sa transmission même doit rester naturelle : pas de meilleure pédagogie que le sein de la mère ! Même lorsque cette transmission s’est à l’évidence épuisée, et quelles qu’en fussent les raisons, on le déplorera certes, mais on rechignera à appliquer les remèdes éprouvés de la pédagogie moderne. Mieux vaudrait qu’elle sombrât corps et âme avec la société-mère que de supporter qu’elle puisse revivre par les modernes apports de l’audiovisuel, du magnétoscope, de la création actualisée…et que d’autres que les autochtones puissent l’apprendre comme on peut apprendre n’importe quelle langue au monde.

    Cette présentation peut paraître outrancière : on admettra pourtant qu’elle n’est pas dénuée de vérité. Malgré les efforts militants de l’Entre-deux- guerres déjà où l’on proposa une production littéraire revigorée dans tous les genres, des traductions, une pédagogie historique et culturelle, c’est l’idée de maintenance qui guide toujours la pensée et l’action. Rarement ce combat sera pensé dans la perspective de la modernité. Rarement le rôle assigné à ce que l’on appelait alors le « dialecte » sera vu autrement qu’en termes affectifs et réducteurs en somme, alors que l’on supposait toutes les puissances glotto-politiques à l’une ou l’autre des deux grandes langues européennes auxquelles le corse avait eu historiquement affaire. Ce sont des attitudes qui ont été aujourd’hui largement décrites et analysées comme caractéristiques de la situation de « diglossie » : il est donc inutile d’y trop insister. Dès la fin du XIXème siècle, l’inclination du cœur n’aura donc pas suffi à empêcher les choix de la raison, du moins ceux qu’impose la réalité économique et sociale du pays. La langue « porteuse », comme on dirait aujourd’hui, a lingua di u pane, c’est bien le français : non dans l’absolu du raisonnement linguistique mais dans l’élan d’un beau réalisme pragmatique que contestèrent alors bien peu de responsables. C’est donc la fonction officielle et efficiente d’une langue omnipotente et nouveau-venue que l’on entérine. Comme pour mieux réserver en contrepartie son intimité, sa tendresse éternelle au vernaculaire.

    Il ne s’agit pas de juger des attitudes passées, puisque les éléments conjoncturels autant que les déterminations socio-historiques et culturelles de l’époque sont là pour expliquer des phénomènes massifs que l’on a enregistrés dans toutes les régions soumises à des problèmes comparables. Mais aujourd’hui n’observons-nous pas des réticences qui sans avoir la même portée générale que naguère pourraient être considérés comme relevant du même ordre ? Est-on si prêt chez nous, mis à part quelques militants, à parier sur une revalorisation totale du statut du corse ? Ou alors que signifieraient les arguments que l’on oppose fréquemment et dans tous les milieux à sa co-officialisation, même prudente et progressive ? Comme si, en somme, et malgré tous les discours et mots d’ordre offensifs entendus ici ou là, on répugnait à s’attaquer sérieusement à un chantier administratif certes ambitieux mais non irréalisable. Comme si, en son for intérieur et malgré le consensus politique, chacun doutait réellement des potentialités, des chances et de l’avenir de la langue locale : comme si une « grande » langue européenne présentait seule des aptitudes à l’indispensable ouverture, à l’universalité.

    J’entends bien qu’on puisse m’opposer qu’une telle question ainsi sommairement présentée ne rend pas compte de sa complexité contextuelle véritable, et je l’admets volontiers, mais je pousse, comme observateur qui se défend de juger, un raisonnement dans sa logique. Je puis même concéder que les Corses les plus éclairés et conscients n’ont jamais réellement douté des potentialités de leur idiome, mais qu’une sorte de principe de réalité les aura guidés dans l’alternative cruciale de la maintenance ou de l’abandon. Ainsi donc des générations d’insulaires auraient abandonné leur langue, non pas parce qu’elle aurait été incapable intrinsèquement des mêmes performances que les langues officielles, mais parce que la plupart de ceux qui prétendaient véhiculer des concepts modernes, un savoir universel, des idées politiques d’avenir, l’ont fait en français et non en corse. Je pourrais sans crainte utiliser le présent, si j’en juge par l’importance que tient le corse dans la presse locale pour ce qui concernerait, par exemple, le débat d’idées, le discours politique, la critique littéraire, ou même la simple information.

    Il y a donc tout lieu de croire que l’on n’a pas voulu (ou pu) créer de la modernité par le corse : même si l’évolution des techniques et des savoirs a largement modifié la vie dans l’île à tel point que nul n’y a échappé, la langue représente encore et surtout tel outil agricole, telle pratique rurale, telle expression populaire, telle désignation pastorale…qui sont montées en épingle, exhibées pour leur inégalable beauté, leur particularisme, leur caractère intraduisible…alors même que l’on moquera à longueur de journée la néologie, les maladresses créatives, les tentatives d’actualisation que certains s’escriment à oser.

    Sans doute n’aurait-il pas été théoriquement impossible de contrecarrer l’arrachement linguistique –ou plutôt le double arrachement puisque la Corse a été dépossédée à la fois de son vernaculaire villageois et de son véhiculaire italien- au profit de l’omnipotent français qui s’avançait avec tous les atours de la légitimité et de l’officialité. Mais il eût fallu d’abord éviter l’assimilation mortifère passé/tradition/langue parce qu’elle a été vécue comme regret, nostalgie, valeur en perdition. Il eût fallu ensuite une masse critique, force communautaire d’opposition et de proposition, qui a souvent fait défaut à l’île pour des raisons qui ne furent pas toujours seulement démographiques. Au lieu de cela, la politique jacobine héritée de la Révolution trouve dans toutes les régions de France des situations peu aptes à la contester positivement : chez nous, l’attrait de l’empire colonial, une politique à courte vue, d’éternelles luttes intestines… créent le terrain le plus favorable à l’éradication de l’idiome local, puisque telle était la cohérence du projet d’uniformisation linguistique de gouvernants qui estimaient pouvoir favoriser ainsi l’accès de tous à la modernité des pratiques et à l’universalité des savoirs.

    Au début du XXème siècle, période ressentie partout comme celle des grands changements dans les modes de vie et de brutales ruptures, la Corse accède aussi à cette modernité, mais plus encore que d’autres régions avec le sentiment de la double appartenance linguistique et du déséquilibre diglossique corrélatif : d’où souvent une souffrance populaire réelle dont les histoires drôles, les chansons hybrides ou l’imagerie simpliste ne donnent qu’une idée probablement euphémisée. Ce qui est certain, c’est que bien des familles cessent alors d’alimenter la chaîne de la transmission orale en ayant conscience de ne pas avoir tout fait pour sauver l’essentiel d’une relation affective par la langue de l’intimité, mais peut-être consolées par l’argument mille fois entendu et répété de la rentabilité, de l’efficacité, du modernisme. (6)

    Les données étant différentes aujourd’hui, comment expliquer, dans toute sa complexité, ce nouvel appétit de langue corse ? Par le fameux réflexe de survie, sorte de soubresaut avant la mort programmée, comme on l’entend encore ? Ce n’est pas à exclure absolument, mais je préfère pour ma part proposer autre chose et chercher plutôt un éclairage du côté de la crise que subissent de plein fouet les valeurs du modernisme. J’emploie à dessein le mot modernisme pour mieux l’opposer à modernité en ce que le premier pourrait n’être que l’excès du second, en quelque sa démesure. C’est en effet l’idéologie offensive du modernisme contre les croyances traditionnelles, contre l’attachement communautaire, et autres attitudes considérées comme réactionnaires et passéistes parce que jugées néfastes à l’essor de la raison, de la science, du progrès et de la liberté individuelle, qui a précipité dans la déconsidération certaines valeurs liées au local, au particulier, au subjectif, vécues dès lors comme spécificités régionales ou pesanteurs archaïques.

    En d’autres termes, n’est-il pas possible aujourd’hui, au niveau de connaissances et d’expérience atteint dans le domaine qui nous concerne ici, de concilier la fidélité à une culture et à une tradition avec des modes de vie et de pensée modernes, c'est-à-dire non susceptibles de donner prise pour autant aux amalgames simplistes de l’enfermement rétrograde ou du rejet xénophobe ? On peut penser, au contraire, que ce qu’on enregistre de dérives présentes, ici comme ailleurs, et qu’on explique parfois la perte des repères sociaux et culturels, pourrait n’être qu’aporie du sens, difficulté logique à lire du sens en situation d’impasse, alors même que l’aspiration est bien celle, même confusément perçue et exprimée, de cohérence essentielle. Pour que cette aspiration légitime ne cède pas aux sirènes des sectarismes de toute sorte que nous découvrons quotidiennement, ne vaut-il pas mieux penser et faire en sorte que la modernité allie connaissance objective et subjectivité partagée ? Entre raison et subjectivation, entre aspiration légitime à l’universel et construction autonome du sujet, il ne doit pas y avoir antinomie inconciliable mais bien association productive. Du coup l’identité ne se borne plus à la seule tradition communautaire mais inclut naturellement la volonté individuelle de construire une vie moderne, fondée sur une culture propre et une mémoire collective, sans renonciation aux principes élevées de la raison et de la démocratie. Autrement dit, elle articule harmonieusement appartenance à une communauté et aspiration individuelle à l’universel. Et de cette définition reprécisée la langue locale peut et doit être un vecteur positif et stimulant, un instrument dynamique de l’ouverture et de la tolérance, d’autant plus efficient qu’il sera bien accepté par la communauté de ses locuteurs, sûr de lui et serein.

    Jacques Fusina
    Source : http://www.mediacorsica.info

    Notes :

    (1) Fusina J. (1994) L’enseignement du corse : histoire, développements, perspectives, Ajaccio, Squadra di u Finusellu, 317p.

    (2) Cette position a été revendiquée souvent par la revue Rigiru, principal organe du renouveau littéraire au début des années 1970 où s’exprimaient la plupart des écrivains représentatifs de ce que l’on a appelé ensuite « génération de 1970 ». Ces acteurs culturels voulaient redonner vie à l’expression littéraire corse en usant d’approches conceptuelles contemporaines, sans penser trahir ce qu’ils considéraient comme patrimoine inaliénable d’une tradition. Revisiter certes, voire critiquer la production antérieure, sans cesser de s’abreuver aux sources de l’authenticité : c’étaient là les données affichées de la nouvelle création littéraire.

    (3) Ce thème a été abordé pour le basque par Francis Jaureguiberry dans une courte et percutante étude intitulée Le basque à l’école maternelle et élémentaire, Université de Pau et des pays d’Adour, Pau, (1993)

    (4) Il faudrait d’ailleurs pouvoir distinguer pour une analyse plus informée ce qui relève de l’acceptation apparente (écoute complaisante de la requête et assentiment apparent sans engagement véritable) et ce qui relève de l’intervention réelle. Le solliciteur, souvent sollicité lui-même, n’est parfois qu’un maillon passif du processus et se contente de transmettre une requête qu’il n’approuve pas forcément : ce type de situation moins rare qu’on pourrait le croire est bien symptomatique des ambiguïtés du statut identitaire.

    (5)Sur cet aspect et sur bien d’autres abordés ici, on pourra consulter mon article Défendre la Corse ? (pp.73-103) in ouvrage collectif Corse, défense d’une île, Marseille, éditions Autres Temps, 196p.

    (6) Voir encore ici les similitudes avec la Pays Basque, Jaureguiberry, op. cit.

    29/04/2016

    Lingua scorsa

    Julian Mattei - 28/06/2015

    Serà forse ora di parlà corsu chì u francese si ne more... Trà di noi, dimu la franca, l'idea pò ancu dà u surrisu. Micca à tutti, ben intesa. Sò vinti trè anni avà ch'ella hè stata messa in ballu quella cartula europea - beata per certi - di e lingue dette regiunale è minuritarie. Sapete, quella cartula ch'ella s'era firmata a Francia in lu 1999 sottu à guvernu Jospin, sapendu puru chì u cuntenutu di u testu ùn era tantu in accordu cù a Custituzione. Trà di noi, in sti tempi di voti magiuritarii à buzeffu, ci ramenta qualcosa...

    A murfina

    Ma eccu chì, sedeci anni dopu à a firma, sbocca à l'ispensata a vuluntà di ratificà a cartula. Un bellu gestu fair-play da l'intercessione di u San Francè, dopu à parechji seculi ruspati da u cilindru cumpressore giacubbinu da stirpà ogni cultura lucale à nome di a santa Republica « una è indivisibile ». Ùn ci scurderemu dinù chì dapoi sedeci anni, n'hè passata acqua sott'à i ponti è per via di quessa qualchì lingua annigata. Hè cum'è per u ballò, u tempu apprufitta sempre à i vincidori. Ma pocu impreme, per unepochi di difensori di e lingue, per via di a so presa di pusizione à favore di a cartula sti pochi tempi Hollande hè guasi diventatu un salvatore. Scusate s'o facciu fiascà a festa, ma vulè sciaccà appena di murfina à i malati à l'ultime stonde di a vita ùn hà mai fattu di qualchissia un eroe. Moltu più chì sta misura facia parte di e so prumesse di campagna... trè anni fà.

    Fulclori barbari

    Intantu, stu dibattitu in giru à a cartula mette à palesu parechji affari. Prima, chì a quistione di a lingua ferma sempre un puntellu propiu puliticu. Per prova, l'usu di u francese, minuritariu fin'à u discorsu di l'abbate Grégoire - ùn scriveremu micca Gregoriu, a si piglieria à male - nant'à a necessità di stirpà i « patois » in lu 1789, s'hè pigliatu a suprana nant'à e lingue dette « regiunale ». Era l'epica di quellu fantasmu di l'identità naziunale è l'avvenimentu di a tindenza francese à cunfonde l'ugualità cù a sumiglia. D'altronde, ùn era Stendhal à scrive chì « le premier instrument du génie d'un peuple, c'est sa langue » ?

    À tempu, l'annunziu di a ratificazione hà discitatu unepochi di « beaufs » di l'uniformismu chì mandanu à spassu sta cartula carca à eresie chì minacerebbe di ressucità i fulclori barbari. Quelli ch'omu pensava d'avè messu sottu terra dapoi tant'anni. Forse capiscerà un ghjornu u guvernu chì a cultura « naziunale » hè sviluppata abbastanza da pudè campà senza l'aiutu di a viulenza legale...

    Bye bye cuufficialità ?

    Eppuru, chì purteria à a lingua corsa a ratificazione di sta beata cartula europea ? In i fatti, pocu affare. A cartula ùn hè micca u Graal, malgradu ciò ch'elli ponu amentà unepochi di pulitichi più avvezzi à fà uperazione di cumunicazione chè à leghje u fondu di i ducumenti. Da anni è anni, per via di a mossa pupulare in giru à a lingua è di l'azzione regiunale, si sò guasi appiecate de facto e misure di a cartula, in l'audiuvisivu publicu è in scola per u più. Moltu più chì a cartula hè stata firmata a minima da u guvernu Jospin. Eppuru, malgradu i fatti digià in anda, u pesu simbolicu per u guvernu hè tamantu, chì impuneria una mudifica di a santa Custituzione. Dimu e cose altrimente : a ratificazione ùn hè micca per dumane, è ancu s'ella si face ci hè da scumette chì i naziunalisti chì anu u surrisu oghje a senteranu passà amara dumane chì e so rivendicazione seranu forse per esse tramandate o... abbandunate. Bye bye cuufficialità. Micca troppu à tempu.

    « Lascià esse »

    Ferma quantunque necessariu di fidighjà e cose cum'elle sò : s'è i redattori di a cartula avianu propiu a vuluntà di mantene a preziosa è bellissima diversità culturale di l'Unione, anu quantunque sottu intesu in i testi chì tuccava à u putere puliticu à prumove sta diversità. Eppuru, al di là di a sfera publica, a quistione culturale, cum'è quella di e religione, di l'industrie, hè dinù quella di a sucetà civile è di u settore privatu, per via di una mossa pupulare cum'è quella ch'ella cunnobbe a Corsica quarant'anni fà, in un altru cuntestu.

    Tandu oghje tuccheria à u Statu à esse u guardianu di u « lascià esse », chì hè sempre stata a norma à fà a lege. Puru s'è in certe circustanze hè u bisognu à abatte a lege.

    08/03/2016

    loyaute

    06/03/2016

    coofficialite

    04/03/2016

    L’intolérable éditorial de Christophe Barbier ou les conséquences de l’inégalité des langues

    Les Corses opteront-ils pour le suicide en réclamant l’indépendance? (éditorial de C. Barbier publié dans l’Express)

    Le 28 juillet 1885 Jules Ferry prononça à l’Assemblée nationale son discours sur les races inférieures et supérieures et s’exprima en ces termes:

    “Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai! Il faut dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures. [...] Je répète qu’il y a pour les races supérieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures.”

    Même à l’époque un tel discours était osé et, avant la brillante réplique donnée deux jours plus tard par Clémenceau, c’est Maigne qui riposta immédiatement dans l’hémicycle: “Oh! Vous osez dire cela dans le pays où ont été proclamés les droits de l’homme!”. Puis il fut suivi par de Guilloutet: “C’est la justification de l’esclavage et de la traite des nègres!”

    Ces références à 1789 et 1848 étaient fort justes, car même si elle fut un état esclavagiste, raciste et colonialiste, la France se distingua particulièrement dans le combat de l’émancipation de l’homme. Et, passant des problématiques de race à celles de religion, elle sut aussi développer le concept de laïcité. L’affaire Dreyfus, la loi de 1905, le travail entrepris autour de la Shoah permirent de prendre le pas sur cette vieille souche antisémite française qui fut particulièrement active à certains moments de l’histoire de ce pays – on se souvient de Simone Veil qui racontait comment elle devait cacher son insigne de scout juive dans les transports en commun du Nice des années 30. Si la France put traiter en profondeur les problèmes touchant à la race et la religion, il n’en fut pas de même pour les langues et les cultures. Ainsi on ne peut être surpris de retrouver dans la bouche de l’éditorialiste de l’Express (Christophe Barbier 22/12/2015) ce vieux mélange de sentiment de supériorité et de paternalisme:

    “Aux cultures basque, bretonne, alsacienne, picarde ou berrichonne, celle qui prospère à Bastia, Ajaccio ou Corte n’a rien à envier. Mais la culture française, mélange et transcendance de ces apports régionaux, est d’un ordre infiniment supérieur.”

    La juxtaposition des mots “infiniment” et “supérieur” pourrait prêter à sourire si tout l’éditorial n’était pas aussi problématique pour le fait corse. Linguistiquement d’abord, le corse est pour Christophe Barbier “un dialecte chaleureux et chantant, peu propice aux envolées oratoires tout en atteignant parfois de touchants accents de gravité.”

    Curieuse façon de catégoriser les langues… Comme le dit Ngalasso Mwatha, Professeur de sociolinguistique et de linguistique à l’Université Michel de Montaigne:

    “Aujourd’hui on admet généralement que chaque langue organise la pensée et dit le monde d’une façon propre, et que toutes les langues peuvent tout dire avec des moyens différents mais tout aussi efficaces.”

    La vision de Christophe Barbier n’est finalement pas loin de la définition du Nouveau Petit Robert de la Langue française de 2009 qui donne le mot patois comme un “parler local, dialecte employé par une population généralement peu nombreuse, souvent rurale et dont la culture, le niveau de civilisation sont jugés inférieurs à celui du milieu environnant (qui emploie la langue commune)”.

    Et, comme dans la définition du dictionnaire, l’éditorialiste passe de la langue à la culture:

    “Seules la langue et la culture françaises ont accédé à l’universel. Il n’y a pas de Voltaire ni de Hugo corses, et c’est le français que l’on entend dans les cénacles olympiques, grâce à Coubertin, comme dans les travées des Nations unies, grâce à de Gaulle.”

    Faut-il rappeler que dès septembre 1793 la Terreur des jacobins définit l’éradication des “parlers locaux” comme un objectif politique? Comme le disent les députés Urvoas et Jung dans leur essai “Langues et cultures régionales : en finir avec l’exception française”, tout ceci a “largement contribué à forger le surmoi jacobin qui, pour le grand malheur des langues et cultures régionales, imprègne encore largement la haute administration et la classe politique françaises.” Les parlementaires vont jusqu’à parler de 5 siècles de discrimination dont la loi Deixonne sera le premier réel contrefeu en 1951 même si, disent-ils, “la représentation nationale, dans les années 1950-1970, reste massivement et parfois violemment hostile aux langues régionales” et que “le pouvoir exécutif, enfermé dans ses vieux réflexes anti-patois, ne donne guère l’exemple”. Et pourtant, la langue corse ne figurait pas dans la loi Deixonne et dut attendre 1974 pour faire son entrée dans l’enseignement. On voit mal comment dans ces conditions une autre langue que le français pourrait se développer… Loin de vouloir excuser, comprendre ou réparer – n’est-ce pas là le propre de celui qui défend des valeurs universelles? N’est-ce pas là la vraie attitude de l’homme civilisé? – l’éditorialiste poursuit avec un certain cynisme en estimant que la Corse ne saurait en aucun cas se suffire à elle-même : langue “dialecte”, culture d’un ordre inférieur à la française, elle est aussi économiquement dépassée car “indépendante, elle ne pourra devenir qu’un paradis fiscal inondé d’argent sale et doublé d’un vaste écomusée pour hordes de touristes” et sera à nouveau “un confetti encombré de chèvres et de châtaigniers”.

    L’historien Patrick Weil est bien plus éclairé lorsqu’il définit l’égalité des droits comme ce qui fut le premier moteur de construction de la nation française et, de nos jours, c’est l’égalité des langues et des cultures qui permettra à Paris et à la Corse de trouver une relation aussi apaisée qu’équilibrée. Un tel éditorial, avec ses concepts d’infériorité et de supériorité, semble surgir d’un passé révolu et ne peut que desservir son propre objectif en accroissant le désir d’émancipation des Corses. Car si l’homme du XIXème a vécu dans un système lui faisant intérioriser et admettre l’infériorité de sa langue et sa culture, celui du XXIème n’est plus dupe de rien. Et plus le temps passera, plus se développera une conscience corse à laquelle désormais plus rien ne fait obstacle. Et une telle conscience, poussée par l’exécutif local, aura le plus grand mal à définir sa place dans un carcan dérivé du jacobinisme. D’autant plus que cet exécutif ne cessera de s’appuyer sur l’esprit de la Convention internationale des Droits de l’Enfant et la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, toutes deux signées par la France mais jamais vraiment appliquées. Que vaut donc la signature de la France en ce domaine? Renan disait:

    “L’homme n’est esclave ni de sa race, ni de sa langue, ni de sa religion, ni du cours des fleuves, ni de la direction des chaînes de montagnes. Une grande agrégation d’hommes, saine d’esprit et chaude de cœur, crée une conscience morale qui s’appelle une nation.”

    Le temps est venu désormais de savoir si on souhaite l’inscrire dans une optique égalitaire et humaniste ou bien si on persiste dans un système fondé sur une hiérarchie héritée de la Terreur.
    V.Delòs

    Source : http://ostau-occitan.org/

    3 mars 2016

    cooff

    25 février 2016

    parlami 15 février 2016

    Langue corse, diversité linguistique et discriminations

    Auteur : Romain Colonna, Maître de conférences (sociolinguistique, études corses, éducation), Université de Corse Pascal-Paoli

    La jouissance des droits et libertés fondamentales doit être assurée, « […] sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. » (Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés Fondamentales, art. 14. Conseil de l’Europe, 1950).

    Les dernières élections territoriales en Corse des 6 et 13 décembre 2015 ont porté à la tête de l’Assemblée de Corse et de son exécutif une majorité nationaliste corse.

    Lors de sa prise de fonction, le nouveau président de l’Assemblée territoriale a prononcé un discours de quelques minutes en langue corse (après avoir fourni une traduction aux médias) sur les quelques heures qu’a duré l’installation de la nouvelle Assemblée. Depuis, nous avons assisté à un véritable déchaînement médiatico-politique à l’encontre de la langue corse et de la Corse, aux relents parfois franchement xénophobes, mettant en avant principalement l’article 2 de la Constitution française : « La langue de la République est le français. » Cet article est devenu le support d’un discours simpliste et spécieux, à la limite de la haine dans certains cas, signifiant en creux des lacunes graves en matière de politique linguistique et culturelle d’une nation moderne telle que la France.

    Outre le fait que l’Assemblée de Corse ait voté majoritairement en faveur d’un projet de coofficialité pour le corse et le français en mai 2013, nous voudrions rappeler, en notre qualité d’universitaires faisant des langues et des locuteurs, du droit et de la démocratie linguistiques nos principaux terrains d’étude, que l’utilisation territoriale d’une langue autre que le français ne devrait souffrir d’aucune contestation. Au contraire, celle-ci s’inscrit dans un combat vers plus de justice sociale et de progrès démocratiques, ceci dans le respect des libertés fondamentales. Accepterait-on que soit mis en question le droit des femmes ou de personnes d’une autre couleur de peau de participer aux élections ?

    À travers cet article 2, nous assistons depuis plusieurs années maintenant à une confusion entre l’ordre prétendument naturel, dominant et majoritaire d’un côté et l’ordre normatif de l’autre. Confusion à laquelle s’ajoute une forme d’essentialisation autour de la langue française érigée en véritable religion d’État.

    Le droit de choisir sa langue

    Pourtant, la plupart des textes internationaux rappellent avec force le droit imprescriptible et fondamental à la pluralité linguistique et l’interdiction de toute discrimination pour « motif » linguistique, en particulier la Convention européenne des droits de l’Homme (1950), la Convention relative aux droits de l’Enfant (ONU, 1989), la Déclaration universelle sur la diversité culturelle de l’Unesco (2001), toutes ratifiées par la France. La démocratie, même française, ne saurait y échapper, se résumer à la seule acceptation du français et se confondre de façon exclusive avec lui.

    En 1994, examinant la Loi relative à l’usage de la langue française, dite loi « Toubon », le Conseil constitutionnel en a lui-même annulé certaines dispositions considérées comme trop attentatoires aux libertés : « La liberté proclamée par l'article XI de la Déclaration [des Droits de l’Homme et du Citoyen] implique le droit pour chacun de choisir les termes jugés par lui les mieux appropriés à l'expression de sa pensée. »

    La liberté d’élaborer un sens commun et pluriel qui ne se réduise pas à la seule langue française ne peut en aucune façon être remise en question, malgré l’aveuglement sur ce droit fondamental dont nous constatons les débordements dans ce cas d’espèce. Nous dénonçons toute forme de discrimination linguistique.

    Tendance glottophobe

    Ce déchaînement médiatico-politique inouï nous renseigne sur la tendance glottophobe à l’œuvre, sur une certaine conception univoque et agressive de la société française et sur l’idéologie hégémonique du monolinguisme français. Idéologie elle-même issue d’une conception homogénéisante, voire ethnicisante de la France, de sa population, de ses liens sociaux. Rappelons que la France ne respecte pas ou peu les textes fondamentaux de protection des droits et de lutte contre les discriminations. Elle est régulièrement condamnée par la Cour européenne des Droits de l'Homme, et pas seulement sur le plan linguistique, la France.

    Nous voudrions ajouter, enfin, que les discriminations linguistiques forment un obstacle majeur à l’éducation inclusive, plurilingue et interculturelle telle que la préconise par exemple le Conseil de l’Europe et que la société politique et médiatique doit tendre au respect de la diversité culturelle, religieuse et linguistique, et même à en faire une ressource et un exemple pour une société réellement humaniste et démocratique.

    Luc Biichlé (Maître de conférence de sociolinguistique, Université d'Avignon)
    Philippe Blanchet (Professeur de sociolinguistique, Université Rennes 2)
    Stéphanie Clerc Conan, (Maître de conférences en sociodidactique des langues, Aix-Marseille université)
    Romain Colonna (Maître de conférences en sciences de l’éducation, Université de Corse)
    James Costa (Maître de conférences en sciences du langage, Université Sorbonne Nouvelle Paris 3)
    Phyllis Dalley (Professeur de sociolinguistique et de didactique des langues, Université d’Ottawa au Canada)
    Mylène Eyquem-Lebon (Maitre de Conférences de sociolinguistique, Université de La Réunion)
    Alain Di Meglio (Professeur en cultures et langues dites « régionales », Université de Corse, Directeur du Centre culturel universitaire de Corse)
    Leila Messaoudi (Professeur de sociolinguistique, Université Ibn Tofail de Kénitra au Maroc)
    Jean-Michel Eloy (Professeur émérite de sociolinguistique à l'Université de Picardie Jules Verne)
    Gilles Forlot (Professeur de sociolinguistique et didactique des langues, INALCO, Paris)
    Jean-Michel Géa (Maître de conférences en sciences du langage, Université de Corse)
    Christine Hélot (Professeur en anglais, Université de Strasbourg)
    Alexandra Jaffe (Professeur d’anthropologie linguistique, California State University aux États-Unis)
    Ronan Le Coadic (Professeur de langue et culture bretonnes, Université Rennes 2)
    Stefan Moal (Maître de conférences en langue et culture bretonnes, Université Rennes 2)
    Pascal Ottavi (Professeur en cultures et langues dites « régionales », Université de Corse)
    Marielle Rispail (Professeur en sociolinguistique et didactique des langues, UJM St Etienne)
    Didier de Robillard (Professeur en sciences du langage, Université François-Rabelais de Tours, ancien Président du jury de CAPES de créole)
    Marie Salaün (Professeur d’anthropologie de l’éducation, Université Paris Descartes)
    Dominique Verdoni (Professeur en cultures et langues dites « régionales », Université de Corse, Directrice de l’ESPE de Corse)
    Alain Viaut (Professeur de sociolinguistique, Université Bordeaux Montaigne) Nadine Vincent (Professeur de sociolinguistique, Université de Sherbrooke, Québec)
    Andrea Young (Maitre de Conférences HDR en anglais, Université de Strasbourg)

    Source : https://theconversation.com/

    28/01/2016

    marshall

    immersion 28/10/2015

    senat
    27/08/2015

    Corses et Alsaciens se rencontrent pour défendre les langues régionales

    A Sisco a eu lieu mercredi un colloque autour de la défense des langues régionales, organisé par l'association Elsàss-Corsica Europa. Défenseurs de la langue corse et défenseurs de la langue alsacienne se sont rencontrés... 

    A l'initiative de l'association Elsàss-Corsica Europa, s'est déroulée mercredi à Sisco, dans le cap corse, une rencontre entre défenseurs de la langue corse et défenseurs de la langue alsacienne. Ce colloque a réuni des acteurs de la promotion et de la valorisation des 2 langues, agissant dans les domaines institutionnel, intellectuel, éducatif, social et économique...

    En Alsace comme en Corse, l'annonce de l'Elysée concernant la ratification de la charte européenne des langues dites "régionales et minoritaires" laisse beaucoup de militants circonspects...

    alsace

    opportunite

    vogel

    15/08/2015

    Charte des langues régionales : une libre opinion de Rumanu Colonna

    colonna
    10/06/2015

    Charte des langues régionales : Hollande lance le processus de ratification

    Dans une lettre datée du 1er juin et révélée par "Le Télégramme", François Hollande indique qu'il a demandé à Christiane Taubira de préparer un projet de loi de réforme constitutionnelle qui permettrait la ratification de cette charte. Avec comme objectif son adoption par le Parlement, "dans les meilleurs délais".

    Cette Charte européenne des langues régionales et minoritaires, c'est un serpent de mer de la politique française puisqu'elle a quand même été signée en 1992 par les Etats membres du Conseil de l'Europe. Et que sa ratification a été repoussée à de multiples reprises depuis 23 ans. C'était même une des promesses de campagne de François Hollande.

    Le choix du congrès

    La ratification de cette charte impose une réforme constitutionnelle puisque la Constitution de 1958 stipule que la langue de la République est le français. Dans cette lettre publiée par Le Télégramme,  datée du 1er juin et adressée au député PS du Finistère Jean-Jacques Urvoas, le chef de l'Etat choisit de faire adopter cette réforme par le Parlement réuni en Congrès, "la voie la plus appropriée" plutôt que l'organisation d'un référendum. Il a donc demandé à la ministre de la Justice Christiane Taubira de préparer le texte, dont il souhaite "qu'il soit inscrit à l'ordre du jour du Parlement dans les meilleurs délais".

    Ce que dit la Charte des langues régionales

    De façon générale, cette Charte fait obligation aux Etats signataires de reconnaitre les langues régionales et minoritaires en tant qu'expression de la richesse culturelle. Elle a donc des implications en matière d'enseignement mais aussi par exemple en matière judiciaire. Elle prévoit ainsi "que les juridictions, à la demande d'une des parties, mènent la procédure dans les langues régionales ou minoritaires" et donne "à l'accusé le droit de s'exprimer dans sa langue régionale ou minoritaire".
    De même au niveau administratif, les autorités doivent "veiller à ce que ces autorités administratives utilisent les langues régionales ou minoritaires" et "à ce que ceux de leurs agents qui sont en contact avec le public emploient les langues régionales ou minoritaires dans leurs relations avec les personnes qui s'adressent à eux dans ces langues."

    Cliquer ici pour télécharger la charte.

    14/04/2015

    bonifacien

    04/02/2015

    dite

    zia

    19/01/2015

    thiers

    thiers

    31/12/2014

    fantastique

    14/12/2014

    tradilingue

    01/08/2014
    L'Express publie une série d'articles sur "la grande aventure du français".

    La grande aventure du français : Comment le dialecte des rois est devenu le français

    Par Michel Feltin-Palas
    Source : L'Express

    L'ancien dialecte des Rois de France aurait pu devenir notre langue commune. Il a été imposé comme langue unique. Au nom de valeurs "universelles" parfois contestables... 

    Le Français le plus célèbre du monde n'est pas connu sous son vrai nom. Napoléon est en effet né Napoleone di Buonaparte. Mais voilà : en France, on "parisianise" les noms de famille. C'est ainsi : dans notre beau pays, les rapports entre la langue et l'Etat sont particuliers.Il est vrai que, dans la lente apparition de notre Etat-nation, la langue a toujours constitué un enjeu majeur. Pour une raison simple à comprendre : chez nous, l'unité politique a précédé l'unité linguistique, ce qui n'est pas le cas de l'Allemagne ou de l'Italie.  

    Pour ne rien arranger, l'idéologie s'en est mêlée. Les révolutionnaires se sont persuadés que la pensée nouvelle ne pouvait s'exprimer qu'en français. Dans le même mouvement, ils ont associé l'Ancien Régime aux langues régionales, "des idiomes grossiers qui ne peuvent servir que le fanatisme et les contre-révolutionnaires", selon l'expression du conventionnel Bertrand Barère. Ils ne se sont pas contentés, comme la monarchie, d'instaurer le français comme langue de l'administration. Ils ont considéré qu'il fallait l'imposer au peuple. 

    L'abbé Grégoire publie ainsi, le 16 prairial an II, son célèbre rapport sur "la nécessité et les moyens d'anéantir les patois" - "anéantir"! -, où il note avec effarement que le français n'est parlé que dans une quinzaine de départements (sur 83). Le terme "patois" est conforme aux préjugés des élites de l'époque, fussent-elles les plus éclairées.  

    L'école telle qu'instituée par Jules Ferry, en 1881.
    L'école telle qu'instituée par Jules Ferry, en 1881.
    © Jacques Pavlovsky/Sygma/Corbis

    Dans son Encyclopédie, d'Alembert choisit ainsi cette définition : "Patois : langage corrompu tel qu'il se parle dans presque toutes les provinces. On ne parle la langue que dans la capitale." Des a priori qui perdurent aujourd'hui. Qui étudie Frédéric Mistral, prix Nobel de littérature en 1904 pour une oeuvre écrite en provençal ? Qui connaît le poète languedocien Pierre Goudelin (Pèire Godolin, de son vrai nom), considéré au XVIIe siècle comme l'égal d'Homère et de Ronsard? 

    "La Révolution a donné la parole à la bourgeoisie"

    Ceci excuse-t-il cela ? La Révolution mène cette politique culturellement criminelle au nom de sentiments nobles. On prétend "élever" le peuple en lui donnant accès à la "meilleure" langue. On entend réduire la fracture entre les masses et la classe supérieure, qui accède aux places et au savoir grâce à sa maîtrise du français. 

    Quelques esprits marginaux proposent pourtant d'atteindre l'égalité par une autre voie : le français comme langue commune, et non comme langue unique. Ce plurilinguisme sera rejeté au nom de l'unité, confondue avec l'uniformisation. D'où ce paradoxe, souligné par le lexicographe Alain Rey : "La Révolution prétendait donner la parole au peuple. Linguistiquement, elle l'a donnée à la bourgeoisie." 

    La Révolution sera cependant trop brève pour permettre de traduire les idées de l'abbé Grégoire dans la réalité. Qu'à cela ne tienne : les régimes suivants s'en chargeront. L'Empire d'abord (dans les lycées, créés par Napoléon, le français est seule langue d'éducation). La Restauration, ensuite ("il faut absolument détruire le langage breton", écrit en 1831 le ministre de l'Instruction publique à ses préfets). La République, enfin. 

    Le spectre de la Belgique, minée par sa querelle entre Flamands et Wallons

    C'est la IIIe du nom qui, dans ce domaine, se révélera la plus efficace. Là encore, Jules Ferry et ses contemporains agissent avec des sentiments élevés. Tout comme la colonisation prétend "civiliser les races inférieures", l'école publique est censée élever tous les Français au rang de citoyens. Et, en bonne logique républicaine, cet objectif ne saurait être atteint que par le français, seul porteur de valeurs universelles, tandis que les parlers régionaux sont supposés enfermer leurs locuteurs dans un dangereux communautarisme.  

    Un raisonnement spécieux, relevé notamment par l'historienne Mona Ozouf (Composition française, Gallimard). "L'école, au nom de l'universel, humiliait la particularité. Mais l'école ne professait-elle pas en réalité sans le dire une particularité aussi, la française, qu'elle dissimulait sous le manteau de l'universel?" 

    Il n'empêche : cette interprétation domine toujours aujourd'hui. Ainsi, en 1992, seul le français entre dans la Constitution. Ce nouvel alinéa de l'article 2, introduit notamment pour protéger notre langue contre l'anglais au moment de la mise en place du grand marché européen, va se retourner contre... les langues régionales. En 1999, le Conseil constitutionnel l'invoque en effet pour interdire la ratification de la charte européenne les concernant. Celles-ci finiront bien par faire leur apparition dans la loi fondamentale, en 2008, mais simplement au titre de "patrimoine de la France". Un article qui ne leur apportera rien de concret. 

    Depuis une cinquantaine d'années, pourtant, les gouvernements ont changé de discours et même de pratique à leur égard. Ici ou là, on peut les apprendre à l'école. Très symboliquement, la délégation générale à la langue française s'occupe aussi "des langues de France". Mais aucun ministre n'a osé prendre les seules mesures qui modifieraient radicalement leur situation : leur utilisation massive dans l'enseignement, les entreprises et les administrations. Pendant des siècles, l'Etat français a planifié leur disparition. Aujourd'hui, il les laisse simplement mourir... 

    Pour se justifier, les tenants du jacobinisme culturel évoquent le spectre de la Belgique, "minée" par sa querelle entre Flamands et Wallons, et de l'Espagne, "menacée" par les identités basque et catalane. L'argument est sérieux. Mais, curieusement, les mêmes oublient volontiers la Suisse qui, comme des dizaines de pays, vit paisiblement avec plusieurs langues officielles. Quand ils ne se contredisent pas en exigeant, pour les francophones du Québec, des mesures que Paris refuse sur son sol pour ses propres langues minoritaires. 

    Oui, décidément, dans notre beau pays, les rapports entre la langue et l'Etat sont particuliers... 

    À principes nouveaux, vocabulaire nouveau

    En politique, les mots sont des armes. Les révolutionnaires de 1789 l'ont bien compris. Malgré les guerres extérieures, malgré les révoltes sociales, malgré les soubresauts incessants, la maîtrise de la langue reste à leurs yeux une priorité. Et tous les domaines sont concernés : les noms des villes (Fontenay-le-Comte devient Fontenay-le-Peuple) ; ceux des espaces publics (la place Louis-XV, future place de la Concorde, devient place de la Révolution) ; le calendrier (vendémiaire, pluviôse,floréal, fructidor...) ; "citoyen" et "citoyenne" remplacent "monsieur" et "madame". Le tutoiement est institué. Les poids et mesures sont unifiés, avec l'adoption du système métrique. Tout cela est pensé : en se rendant maître du vocabulaire, il s'agit de rompre avec les valeurs de l'Ancien Régime et de conquérir les esprits. De la "race des seigneurs" exaltée par Hitler aux "ennemis du peuple" dénoncés par Lénine, bien des régimes reprendront ce procédé dans les décennies qui suivront. 

    Une lutte à mort contre les langues régionales

    C'est par volonté politique, et non en fonction de ses qualités intrinsèques, que le français a été choisi pour langue nationale.
    Une oeuvre de longue haleine : au XVIIIe siècle, 22 des 25 millions de Français ne le comprennent pas... 

    Ronsard, Hugo, Baudelaire, Rimbaud, Eluard... Nos plus grands poètes ont chanté l'amour. Pourtant, amour n'est pas un mot français. Ou, plus exactement, c'est un terme que notre idiome national a emprunté à l'une de ses plus dangereuses rivales : la langue d'oc. Nul besoin d'être un grand latiniste pour le comprendre. Puisque dolor a donné douleur et flor, fleur, amoraurait dû devenir ameur.  

    Pour percer ce mystère, il faut revenir à la fin du Moyen Age. A cette époque, les civilisations d'oc sont à leur apogée. Les troubadours dominent l'Europe littéraire et chantent, précisément, l'amour courtois. Séduite, la cour de France subit leur influence et adopte leur vocabulaire. 

    Si le français est devenu notre langue nationale, ce n'est donc nullement en raison d'une quelconque supériorité linguistique. "Le français était au départ un dialecte comme les autres, mais il était celui du roi, souligne le linguiste Claude Hagège...  

    C'est par volonté politique, et non en fonction de ses qualités intrinsèques, qu'il a été imposé au pays. Les langues régionales possèdent une richesse au moins comparable, sinon supérieure, au français. Ainsi, en poitevin, subsiste le genre neutre, en plus du masculin et du féminin. Et en gascon, l'imparfait du subjonctif continue d'être pratiqué, même à l'oral." 

    Il est toujours utile d'adopter la culture du puissant

    La domination de l'idiome du souverain était d'autant moins assurée qu'il est longtemps resté numériquement marginal. "Au XVIIIe siècle, seuls 3 des 25 millions de Français le comprennent, rappelle Alain Bentolila (La Langue française pour les nuls, First éd.). Essentiellement à Paris et dans les régions proches : la Champagne, la Beauce, le Maine, l'Anjou, la Touraine, le Berry." Partout ailleurs, les langues régionales dominent. 

    Les artisans, les paysans, les commerçants, les ouvriers resteront longtemps fidèles à leur culture. Ce sont les nobles et les bourgeois qui, les premiers, adopteront la langue nationale. Par souci de distinction sociale. Et par intérêt : il est toujours utile d'adopter la culture du puissant ! C'est ainsi que le parlement de Toulouse officiera en français avant même l'ordonnance de Villers-Cotterêts (1539). "Il s'était pour ainsi dire volontairement colonisé", constatait durement, mais justement, l'écrivain et historien du langage Claude Duneton dans un ouvrage très sensible (La Mort du français, Plon). Il s'agit d'ailleurs d'un invariant de l'Histoire. Les "élites" gauloises passèrent très tôt au latin ; entre 1939 et 1944, les collaborateurs inculquèrent l'allemand à leurs chères têtes blondes (c'est le cas de le dire). Dans des circonstances moins tragiques, le même phénomène se répète aujourd'hui avec l'anglais... 

    Ce n'est qu'au XXe siècle - hier, à l'échelle de l'Histoire - que la francisation du pays pourra être considérée comme achevée. Pour y parvenir, il aura fallu quelques bouleversements majeurs : l'enrôlement de millions d'hommes dans des armées gigantesques, notamment pendant les deux guerres mondiales ; l'urbanisation galopante du pays ; l'apparition de médias de masse ; les migrations en nombre de population.  

    Il aura fallu, aussi, l'oeuvre continue de la République et de la monarchie, sur près d'un millénaire. Et le recours à des méthodes qu'on n'accepterait plus aujourd'hui, tel ce "signal" imposé à l'enfant surpris en classe à prononcer un mot en breton, en auvergnat ou en alsacien. "L'instituteur lui accrochait au cou un sabot ou un morceau de fer, dont le "fautif" ne pouvait se débarrasser qu'en dénonçant l'un de ses camarades, rappelle la spécialiste Henriette Walter (1). A la fin de la journée, le détenteur du "signal" était puni. Etonnez-vous après cela que les langues régionales aient été associées à des sentiments de honte et de culpabilité et que les écoliers, devenus adultes, n'aient pas eu envie de les transmettre à leurs enfants !" 

    Au temps de la mondialisation, une quête de racines

    Il aura fallu, enfin, instaurer une inégalité de fait : à partir du XIXe siècle, toute ascension sociale en dehors de la langue française devient impossible. Dans l'intérêt de leurs enfants, les parents cessent peu à peu de leur parler auvergnat ou flamand à la maison. Déjà privées de moyens, de statut et de prestige, interdites à l'école comme à l'université, les langues régionales vont alors reculer aussi dans la vie quotidienne. 

    Depuis quelques décennies, toutefois, elles connaissent un indéniable renouveau. Elles s'enseignent, se publient, se chantent, se répandent sur Internet... Elles ont regagné en prestige ce qu'elles ont perdu en locuteurs. Comme si, paradoxalement, elles correspondaient à l'esprit d'un temps où les Français, perdus dans la mondialisation, se cherchent des racines. Il est tard, bien sûr, très tard, même, mais il n'est peut-être pas trop tard.  

    Non, le parisien n'est pas devenu le français

    En 1180, Conon de Béthune, chevalier de son état, s'enhardit à réciter des vers devant Philippe et son épouse, Isabelle de Hainaut. Convaincu que le picard, dont le prestige littéraire est reconnu, est une variante légitime de la langue française, le poète n'hésite pas à glisser ici et là quelques "mots d'Artois". Linguistiquement, il a raison. Politiquement, il a tort. La reine et le roi lui en font reproche. A leurs yeux, un seul parler doit avoir droit de cité à la cour : le leur...  

    La différence? La norme est d'abord géographique : c'est le dialecte de l'Ile-de-France qui va être imposé comme langue "nationale" au détriment des autres dialectes d'oïl (picard, champenois, normand...) et plus encore des langues "autres" (basque, breton, corse, provençal...). La norme est aussi sociale.  

    Car ce n'est pas la langue "basse" du peuple de la capitale qui sera choisie quand il s'agira de codifier le français, mais la variété "haute", en vigueur dans l'Eglise, dans les universités et à la cour. Deux variétés intercompréhensibles, mais bel et bien différentes. Un choix décisif. Au fil des siècles, la distance va s'accroître entre le français du peuple et le français tel qu'il est censé être pratiqué... 



    29/07/2014

    Langue corse à Levie

    levie

    Le projet de l'Adecec

    25/07/2014

    adecec

    La langue corse à l'honneur

    spassighjata

    festa


    01/06/2014

    extsud

    stalucia

    04/03/2014

    Una Parolla tanti discorsi

    Una Parolla tanti discorsi, un’emissione in lingua corsa prisentata da Guidu Benigni è Toni Casalonga .

    L’invitati so infurmati prima di a parolla scelta. Sta parolla diventa u suggettu di l’emissione : puesia, litteratura, detti è pruverbii, varietà dialettale, etimulugia, stalvatoghji….. tuttu ci passa.

    A découvrir ici :
    http://www.telepaese.tv/Ritrattu/Una_Parolla_Tanti_Discorsi

    29/01/2014

    Langues régionales: large majorité à l'Assemblée pour la ratification de la charte

    Les députés ont voté mardi 28 janvier en faveur d'une modification de la Constitution permettant de ratifier la charte européenne des langues régionales, par une large majorité de 361 voix contre 149.

    Le vote est au-delà de la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés. Si une proportion comparable se retrouve au Sénat, le seuil nécessaire pour modifier la Constitution par la voie du Congrès (réunion des deux chambres à Versailles) sera atteint.

    A gauche, les groupes de la majorité ont voté pour. Huit socialistes (sur 270) ont toutefois voté contre, dont les trois chevènementistes, et trois se sont abstenus.

    Au sein du groupe GDR (Gauche démocrate et républicaine), le Front de gauche s'est divisé avec six voix pour et quatre voix contre alors que les cinq députés ultramarins ont voté pour.

    A droite, si l'UDI a voté pour, l'UMP s'y est majoritairement opposée par 131 voix contre 40 et 15 abstentions. La plupart des députés UMP ayant voté pour sont originaires de Bretagne ou Alsace, mais on y trouve aussi François Baroin ou des députés de Paris comme Philippe Goujon.

    Parmi les non-inscrits, les trois députés d'extrême droite ont voté contre alors que le centriste béarnais Jean Lassalle a voté pour.

    Protéger et promouvoir

    La charte, rédigée en 1992, est destinée à protéger et à promouvoir l'emploi des langues "régionales ou minoritaires" (à l'exception des langues des migrants) dans l'enseignement, les médias ou les services administratifs. Sur les 47 Etats membres du Conseil de l'Europe, 33 l'ont signée et 25 l'ont ratifiée

    Le processus de ratification en France a été gelé après une décision du Conseil constitutionnel de juin 1999 estimant qu'elle était contraire à l'égalité devant la loi de tous les citoyens d'une part et au fait que "la langue de la République est le français" (article 2 de la Constitution).

    Fort de cette large majorité, et si elle se confirme au Sénat, le gouvernement devrait proposer un projet de loi constitutionnelle reprenant les termes de la proposition de loi.

    Pour réviser la Constitution, les textes déposés par des parlementaires doivent être obligatoirement approuvés par référendum alors que ceux présentés par le gouvernement peuvent être adoptés par le Congrès.

    Cela a conduit l'UMP Guy Geoffroy à dénoncer une "hypocrisie". Vous avez inventé le tour préliminaire à une révision constitutionnelle", a-t-il lancé au gouvernement.

    31/01/2014

    question

    Henri Guaino dénonce "un retour au Moyen-Age" concernant les langues régionales.

    Le député UMP Henri Guaino a qualifié de "retour au Moyen-Age" la ratification de la charte européenne des langues régionales.

    La ratification de la Charte européenne des langues régionales a donné lieu mercredi soir à l'Assemblée à un discours véhément mais isolé de l'UMP Henri Guaino contre "un retour au Moyen-Age", moqué en retour par les députés bretons et corses présents.

    Cette charte, signée par la France en 1999 mais jamais ratifiée en raison de blocages constitutionnels qu'une proposition de loi socialiste se propose de lever, est destinée à protéger et à promouvoir l'emploi des langues "régionales ou minoritaires" (à l'exclusion des langues des migrants).

    "C'est un retour aux principautés et aux féodalités du Moyen-Age", s'est enflammé M. Guaino dans un long discours avec moult références historiques et littéraires pour défendre "l'exception française". "Vous vous trompez de pays, de culture et d'histoire. la France n'a surmonté sa diversité anthropologique que par un Etat centralisateur et unificateur", a-t-il affirmé en dénonçant des "groupes de pression en Europe aux idéaux ethnicistes".

    Applaudi par de rares UMP comme le souverainiste Jacques Myard, M. Guaino s'est fait "allumer" sur les autres bancs, essentiellement constitués de députés bretons et corses.

    "Tout ce qui est excessif est insignifiant", lui a lancé le radical Paul Giacobbi. "Les poilus à Verdun tombaient en parlant deux langues, ça les empêchait pas de tomber pour la France", a répliqué le socialiste François Pupponi

    Critiquant "les certitudes d'un autre âge" d'Henri Guaino, le rapporteur du texte, le socialiste breton Jean-Jacques Urvoas, a souligné "que la République ne s'est pas écrite en français". Beaucoup de Français ne le parlaient pas en 1789 et Jean Jaurès "commençait ses discours en français et les finissait en occitan", a-t-il affirmé.

    "Toute langue, si modeste soit-elle, a le droit de vivre", a-t-il plaidé. "Si le breton n'est pas enseigné dans nos prestigieuses universités parisiennes, il l'est à Harvard, Oxford ou Cambridge", a-t-il ajouté.

    L'UDI Thierry Benoit (Ille-et-Vilaine) a dit avoir "un amour charnel pour cette langue qu'est le gallo" et assuré que son groupe "défendra bec et ongles" la Charte.

    "Vous n'avez pas le monopole de la France, M. Guaino", lui a lancé la ministre de la Culture Aurélie Filippetti. "Vous semblez penser que l'homme régional n'est pas entré dans l'histoire mais la diversité est constitutive de l'histoire nationale. Plus on apprendra de poèmes de Frédéric Mistral en provençal, plus on apprendra de Victor Hugo."

    Séminaire sur « les langues régionales ou minoritaires en Europe aujourd'hui »

    Conseil de l'Europe - 06/12/2013

    Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe organise les 9 décembre (après-midi) et 10 décembre (matin) 2013 au Sénat (Palais du Luxembourg) à Paris un séminaire sur « Les langues régionales ou minoritaires en Europe aujourd'hui », en coopération avec le Secrétariat de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaire du Conseil de l'Europe (Direction Générale de la démocratie).

    La protection et la promotion des langues régionales ou minoritaires est l'un des objectifs du Conseil de l'Europe en tant qu'élément essentiel de l'héritage culturel européen. A cet égard, il a adopté en 1992 la Charte des langues régionales ou minoritaires, à ce jour ratifiée par 25 Etats membres.

    Ce séminaire sera l'occasion d'un état des lieux de la situation des langues régionales du point de vue de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe. Le rapport sur « les langues européennes menacées de disparition et diversité linguistique au sein de l'Union européenne » adopté par le Parlement Européen en septembre 2013 sera notamment présenté. Une attention particulière sera également accordée au rôle des autorités locales et régionales dans la protection et la promotion des langues régionales ou minoritaires.
    Des sessions spécifiques seront consacrées d'une part, aux six Etats membres du Conseil de l'Europe (Albanie, Azerbaïdjan, Géorgie, République de Moldova, Fédération de Russie et « L'ex-République yougoslave de Macédoine ») qui se sont engagés à ratifier la charte au moment de leur adhésion mais ne l'ont pas encore fait, et d'autre part à la France et l'Italie qui ont signé la charte mais ne l'ont pas ratifiée.

    Ouvert par Jean-Vincent Place, Sénateur de l'Essonne (France), Président du Groupe de contact entre le Comité des Régions de l'Union européenne et le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, et Herwig van Staa, Président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, le séminaire rassemblera des représentants gouvernementaux et régionaux, ainsi que des représentants de la société civile.

    Parmi les intervenants figurent François Alfonsi, rapporteur du Parlement européen, Co-Président de l'Intergroupe pour les minorités traditionnelles, les communautés nationales et les langues et Vesna Crnic-Grotic, Présidente du Comité d'expert de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires du Conseil de l'Europe ainsi que Paul Molac, co-président du Groupe d'études Langues régionales de l'Assemblée nationale de la République française . Plusieurs membres du Congrès interviendront sur la situation dans leurs pays respectifs. Jean-Claude Frécon (France, SOC), Président de la Chambre des pouvoirs locaux du Congrès conclura le séminaire.

    Une Conférence de presse se tiendra à l'ouverture du séminaire, le 9 décembre à 14h00 dans la salle Clémenceau du Palais du Luxembourg, Paris (France). Les journalistes intéressés sont priés de faire parvenir leurs coordonnées pour accréditation à Pauline Cadéac ( pauline.cadeac@coe.int). Ils devront se présenter le jour du séminaire, aux accueils du Sénat (15 ou 15ter rue de Vaugirard).

    Le rapport de François Alfonsi sur les langues menacées

    aaalfonsi

    Corsisation des toponymes : Le péril sarde ?

    par Jean Chiorboli le 1er Décembre 2013
    Source : corsenetinfos.frl

    Dans une précédente chronique (http://www.corsenetinfos.fr/Toponymie-corse-Un-eclairage-tres-mal-venu_a3549.phpl), nous avons évoqué un article qui fustigeait la "frénésie de corsisation" en matière de toponymie... corse.  L'auteur de l'article (http://www.france-corse.fr/toponymie-un-eclairage-bienvenu_a409.phpl) affirmait notamment que les graphies corsisées du type ZICAVU sont "insolites" et "ridicules": sans doute considérait-il que ZICAVO était plus conforme à "l'héritage toscan".

    Un autre article reproduit ci-dessous reprend le même thème d'une manière (apparemment) plus tolérante. Les auteurs de la "protestation... contre le projet de modification de la toponymie officielle corse de la part de l'Exécutif corse" disent ne pas s'opposer à la double inscription (par exemple SAN GAVINO et SAN GAVINU), mais craignent "la suppression, partielle ou totale, du "toponyme traditionnel".

    Observons d'abord que la "suppression" évoquée n'est nullement à l'ordre du jour, et que le "courant de pensée" attentatoire à l'aspect "traditionnel" de la toponymie corse n'est pas mieux identifié. Concernant la politique linguistique en Corse il existe maints "courants de pensée" plus ou moins défendables ou "politiquement corrects" selon le point de vue, certains soutiennent le projet de "co-officialité", d'autres s'opposent au bilinguisme français-corse dans l'île et prônent au contraire un bilinguisme français-italien (qui exclurait donc la langue "traditionnelle").

    Les "courants de pensée" évoqués (souvent de manière caricaturale: anti-corse, anti-italien, anti-français...) provoquent, de part ou d'autre, les mêmes cris d'orfraie. C'est de bonne guerre, dans tous les domaines: on s'oppose en soulignant les dangers réels ou supposés de tel ou tel changement.

    Similitudes et incompabilités

    Le danger est en réalité lié aux sens différents qu'on donne à certains mots: que signifie "corse", "italien", "traditionnel"...?

    Pour revenir à la toponymie, est-il certain que ALZETO soit plus "traditionnel" que ALZETU? La forme ALZETU a une signification claire en corse ("aulnaie"), changer la voyelle finale en -O n'en fait pas une forme "traditionnelle", encore moins italienne (*ALZETO ne signifie rien en italien "officiel").

    Outre les différences lexicales, certaines incompatibilités phonétiques et graphiques entraînent des aberrations. Les formes officielles *TEGHIME et TANGHICCIA (2B) transcrivent de la même manière (-GHI-) des phonèmes différents. La différenciation de ces formes, impossible dans le cadre du système graphique italien, nécessite de recourir au système corse qui seul permet d'opposer TIGHJIME et TANGHICCIA (dérivés respectivement de TEGHJA "lauze" et de TANGU "ronce", "épine", "prunellier", moyennant les suffixes "collectifs" -IME et -ICCIA).

    Les auteurs de la "protestation" craignent par ailleurs que la "chasse aux italianismes" s'étende aux patronymes: "Va-t-on imposer aux Alessandri de s'appeler Lisandri "?

    Rappelons d'abord qu'aucune loi ne peut "imposer" un changement de patronyme. Dans certaines régions le retour aux "racines" a concerné également les patronymes: au Pays Basque par exemple, la graphie majoritairement espagnole des noms de famille a été remplacée par la graphie locale (basque), mais seulement à la demande des porteurs qui en ont exprimé le souhait. En Corse il n'existe aucun "courant de pensée" revendiquant la corsisation des patronymes. Personne ne peut donc " imposer aux Alessandri de s'appeler Lisandri".

    Remarquons au passage que LISANDRI est un nom de famille connu en Italie. Il suffit de parcourir l'annuaire téléphonique l'italien pour relever LISANDRELLI; LISANDRINI; LISANDRINO; LISANDRO; LISANDRONI; LISSANDRELLI; LISSANDRELLO; LISSANDRI; LISSANDRIN; LISSANDRINI; LISSANDRO.

    Tous ces noms de famille sont évidemment issus d'un prénom : en français "Alexandre", en corse "Lisandru" (c'est le prénom corse le plus attribué depuis 20 ans), en "italien" Alessandro. Mais de nombreuses autres formes régionales du prénom existent, par exemple "Lisciandro" en Sicile. Le célèbre écrivain italien Alessandro Manzoni était "Don Lisander" pour les Milanais. Et "Lisandro" est le nom d'un personnage mis en scène par  l'auteur dramatique vénitien Carlo Goldoni.

    Personne n'oblige donc les ALESSANDRI (Corses ou Italiens) à changer de nom. Mais prétendre que la forme ALESSANDRI (et Alessandro) sont seules correctes ou plausibles relève de la méconnaissance des réalités corses et italiennes, ou de l'imposture. ALESSANDRO comme ALZETO ne sont pas autre chose que la forme écrite (selon la graphie "officielle" du moment et la compétence des scribes) de formes orales diverses, à une époque où la presque totalité des habitants de la Corse (et de l'Europe en général) étaient analphabètes.

    Langue de "nos ancêtres" ou langue des "élites"

    Quant à "la langue que nos ancêtres, oralement ou par écrit, ont pratiquée au long des siècles", évoquée par les auteurs de la protestation, il est abusif de la réduire à la langue des "élites" de telle ou telle époque historique. Rappelons (selon la définition du CNRTL) que l'élite est constituée par une "minorité d'individus auxquels s'attache, dans une société donnée, à un moment donné, un prestige dû à des qualités naturelles (race, sang) ou à des qualités acquises (culture, mérites).

    La langue de la masse populaire a rarement (ou jamais) coïncidé avec la langue des élites. C'est un peu moins vrai à notre époque de démocratisation de l'enseignement et de mondialisation, mais la langue d'aujourd'hui, celle du peuple comme celle des élites, acquiert de nouvelles "traditions" qui - "per forza o per amore"- viennent enrichir "l'héritage culturel et linguistique de la Corse, dans ses diverses expressions", selon l'expression des auteurs de la "protestation" en question. Ces derniers se disent attachés aux "différents usages et niveaux, ceux frappés par la désuétude et ceux encore vivants". Nous aussi pensons qu'ils "sont tous également respectables".

    Cependant nous serions tentés de poser une question: la Sardaigne, sa langue, sa culture, ne sont-elles pas aussi respectables, n'ont-elles pas contribué à la formation de ce que les auteurs de la "protestation" appellent "notre identité communautaire"? Ces derniers, craignant de voir "défigurer la physionomie" de la Corse, évoquent de manière surprenante les conséquences d'une corsisation toponymique (outrancière?).

    "Évitons un massacre qui n'aboutirait d'ailleurs qu'à donner à la Corse un aspect sarde" , déclarent-ils. Quel est l'intérêt, la motivation d'une telle remarque? Faut-il comprendre qu'on doit-on éviter à tout prix toute similitude avec la Sardaigne?  

    "Le mille Italie"

    A l'époque de la "Dame de Bonifacio" la Corse et la Sardaigne, depuis 20.000 ans géologiquement réunies en un seul bloc, ont été séparées par un étroit bras de mer, pendant quelque temps encore franchissable par le chapelet d'îles corso-sardes. Depuis leur formation qui date d'une quarantaine de millions d'années, les deux "isule surelle" ont été beaucoup plus proches du continent. On estime que les premiers déplacements d'animaux et d'hommes ont pu emprunter la "route toscane" au Nord et à l'Est. Mais outre le rôle de l'Italie, il convient de prendre en compte celui de l'Orient par le "pont sicilien", ainsi que celui de l'Afrique au Sud et à l'Ouest. Bref un ensemble corso-sarde "ouvert" tous azimuts.

    La Corse a été définie comme "l'île des émigrés" (F.Braudel) et, aussi loin qu'on puisse remonter dans le temps, elle est caractérisée par l'hétérogénéité de sa population même si elle a connu au cours de son histoire de longues périodes d'isolement.

    On a beaucoup parlé de la "Sardegna surella" à l'occasion des récentes et dramatiques inondations qui on frappé l'île voisine. Les Corses ont toujours manifesté de la sympathie pour leurs semblables frappés par le malheur. Il ne s'agit pas seulement de sentiments "italophiles". Le terme n'est approprié que si on fait référence aux "mille Italie", et si on évite de confondre l'Italie, voire la planète entière, avec une seule de ses régions. Au-delà de tout rapport exclusif et sclérosant, le seul moyen pour la Corse de préserver son identité est de rester ouverte "tous azimuts.

    Précisons notre pensée. De notre part il serait malhonnête de prêter des sentiments anti-sardes aux signataires de la "protestation" évoquée. Manifester de la sympathie pour telle ou telle "civilisation" ne signifie pas forcément qu'on méprise les autres. Il importe cependant d'être clair: toute formulation ambigüe se prête aux interprétations tendancieuses, et peut être récupérée ou mise au service de telle ou telle idéologie. Évitons de laisser penser que le débat se réduit à un affrontement entre "Corsi" et "Pinzuti", entre "Lucchesi" et "Sardignoli" (les boucs émissaires ne manquent jamais, même si leur nom ou leur origine varie selon l'époque).

    La Corse aura à relever, aujourd'hui comme hier ou demain, de multiples défis. Évitons les attitudes partisanes, les choix clivants, la majoration des similitudes ou des différences. L'actualité récente nous conduit à mettre au premier plan la Sardaigne, et plus particulièrement la Gallura: nous participerons dans quelques jours à un colloque "corsu-gallurese" à PALAU.

    Formulons l'espoir que d'ici là la région aura pansé quelques-unes de ses plaies...

    Jean ChIORBOLI 25 Novembre 2013

    Une proposition délirante

    Source : (http://www.wmaker.net/avivavoce/Toponymie_a143.phpl )
    Toponymie

    Nous publions une protestation rédigée par Jean-Claude Casanova(*), Pascal Marchetti, Marie-Jean Vinciguerra et Paul Colombani contre le projet de modification de la toponymie officielle corse de la part de l'Exécutif corse. Ce texte a été remis à Pierre Ghionga, membre de l'exécutif et porteur de la proposition.

    (*) Précision : il s'agit bien entendu du fondateur de la revue Commentaire et non du créateur de l-invitu !

    La question de la toponymie en Corse.   

    La toponymie corse fait parfois l'objet de demandes de modification. Un courant de pensée voudrait lui ôter son aspect traditionnel au motif qu'à quelques exceptions près les noms de lieux revêtent une forme italienne qui a été conservée après le passage de la Corse dans l'orbite française. Cela nous paraît extrêment dommageable.

    Nul ne s'oppose évidemment à la double inscription qui figure déjà sur de nombreuses plaques signalétiques corses. Mais la suppression, partielle ou totale, du toponyme traditionnel rencontre nombre d'obstacles théoriques et pratiques.

    Du point de vue théorique il faut bien se rendre compte qu'il s'agirait là d'une rupture avec une tradition multiséculaire. Il est au moins paradoxal qu'au moment où la Corse s'attache à retrouver ses racines on lui inflige un déracinement supplémentaire. Ces toponymes ont été considérés unanimement au cours des siècles comme la forme écrite connue dans toute la Corse, à côté de la prononciation locale qu'elle n'a nullement contrariée.

    Voyons l'argument « colonialiste ». La République de Gênes aurait imposé par la force sa langue à une population corsophone parlant une langue étrangère. Cette interprétation fait fi de toute l'histoire linguistique de l'aire géographique et culturelle italienne. Il convient tout d'abord de remarquer que le parler propre de Gênes, le génois, est bien plus éloigné de l'italien que ne l'est le corse. On se trouve donc en présence d'un colonisateur qui aurait « imposé » au colonisé un idiome plus proche de celui du colonisé que le sien propre. Ce qui ne peut que conduire à s'interroger. En fait, au cours des siècles, dans cette aire géographique, une koinè, une langue de communication, s'est peu à peu imposée aux différents états (et avant les états aux différents usagers), qui l'ont adoptée tour à tour. C'est une langue basée certes sur le toscan (c'est pourquoi on l'appelait toscan), mais pas uniquement, dont l'histoire est relativement complexe. Ce qui est certain c'est qu'elle a été adoptée peu à peu sans conquêtes, que son usage a précédé en Corse la conquête génoise, qu'elle a été considérée comme la leur par les Corses et que son usage a persisté longtemps après que la Corse fut devenue française. Il est certain qu'en raison de la proximité géographique et linguistique elle aurait été adoptée par un hypothétique état Corse indépendant, qu'elle a été celle de la Corse de Paoli et celle du royaume anglo-corse. On doit donc remercier Gênes et la France d'avoir respecté cet état de fait, il serait paradoxal que les Corses eux-mêmes en viennent à renier leur tradition. On peut regretter que Bastia, Corte ou Ajaccio n'aient pas été Florence, mais l'Histoire a parlé, nous sommes ce qu'elle a fait de nous. Remarquons par ailleurs que cette chasse aux italianismes pourrait s'étendre aux patronymes. Va-t-on imposer aux Alessandri de s'appeler Lisandri ?

    L'héritage culturel et linguistique de la Corse, dans ses diverses expressions, représente une valeur de civilisation et l'élément essentiel de notre identité communautaire.Les différents usages et niveaux, ceux frappés par la désuétude et ceux encore vivants, de la langue que nos ancêtres, oralement ou par écrit, ont pratiquée au long des siècles, sont tous également respectables. Nous n'entendons en renier aucun, ni les opposer artificiellement l'un à l'autre. Nous n'accordons aucun crédit à la fable selon laquelle appartiennent à une langue qui nous serait étrangère nos propres noms, ceux de nos villes et de nos villages et de la moindre portion de notre sol, nos ancienne chroniques et nos archives. S'il en était ainsi, nous serions tous des étrangers dans notre propre pays et la connaissance de notre passé nous serait interdite, ce que nous ne pouvons évidemment admettre.

    Mais ces changements risquent également de rencontrer des difficultés pratiques.

    Du point de vue touristique, est-on sûr que des vacanciers habitués à entendre parler de Propriano, Calvi etc. vont les reconnaître lorsqu'on leur parlera de Prubbià, Carbi etc. ? Les Corses eux-mêmes ne s'y retrouveront pas dès que l'on sortira de leur région. Et Ajaccio ? La prononciation française actuelle ne s'explique qu'en raison de la vieille orthographe italienne Ajaccio (au lieu du moderne Aiaccio). Va-t-on demander aux habitants du monde entier de parler d'Aiacciu (prononcé Ayatchou ou Ayaxiou) ville natale de Napoléon ? L'Ajaccienne va-t-elle devenir l'Ayaxienne, les ayaxiens vont-ils chanter « Dans Ayaxiou ville sacrée » ? Sans compter que toute la Corse dit « Aiacciu », mais la forme locale est « Aghjacciu ». Laquelle choisira-ton ?

    Enfin on propose de laisser le choix aux communes qui le désireront de garder leur ancien nom. A-t-on réfléchi à l'hétérogénéité qui en résulterait ? Est-il envisageable que Castellu di Rustinu voisine avec Valle di Rostino, qu'il y ait des San Gavino et des San Gavinu, des Lugo et des Lugu etc. ? Evitons un massacre qui n'aboutirait d'ailleurs qu'à donner à la Corse un aspect sarde. En Sardaigne, une histoire différente en a décidé autrement. La toponymie corse actuelle est le produit de l'Histoire, respectons-la.

    Un nouvel espace pour la langue Corse avec Ghjacumu Thiers

    Par Jacques RENUCCI jrenucci@nicematin.fr
    27/11/2013

    Quel que soit l'avenir institutionnel de la coofficialité, le débat qu'elle a suscité a soulevé une évidence. Les politiques ont leur rôle à jouer, certes, mais la pratique du corse doit prendre une dimension citoyenne - à travers ce que Ghjacumu Thiers nomme « un processus de normalisation »

    On ne fera pas son curriculum vitae d'enseignant, de chercheur et d'écrivain. Homme d'engagement, et pas seulement au centre culturel universitaire, Ghjacumu Thiers se définit comme un « retraité dynamique » qui, tout en creusant le sillon d'un œuvre, veut continuer à donner de l'espace, de la visibilité à la langue corse. Son action s'insère dans une dimension internationale où on confronte les expériences, les initiatives, où on établit des passerelles. « Récemment, j'étais à Bucarest, avec une représentante de la chaire Unesco, c'était passionnant ; nous sommes appelés à conclure des accords qui promettent d'être fructueux. Les pays émergents bénéficient de la part de l'Europe d'appuis importants que nous n'avons plus… J'ai repris un certain nombre de contacts que j'avais établis au temps d'Imedoc - aux Baléares, en Sardaigne entre autres - et je dois dire que je me régale… Avec un auteur d'Alghero, par exemple, nous avons monté un maillage avec la Catalogne qui est passionnant. »

    Le corse comme support au latin

    Comment entre-t-on en langue corse, à une époque où n'existent pas les structures adéquates ? Par hasard. Ghjacumu Thiers se souvient : il a découvert le corse - « Je le parlais sans savoir que je le parlais » - juste après la réforme de 1968. « L'inspecteur pédagogique régional de Nice m'avait confié pour la Haute-Corse le recyclage en latin de professeurs d'enseignement général de collège qui se trouvaient versés dans les CES, où ils devaient enseigner le latin-initiation sans en avoir jamais fait. »

    Dans la grande salle de la bibliothèque du lycée Marbeuf, le jeune agrégé de lettres classiques, pour commencer son cours, écrit une phrase élémentaire en latin au tableau. « C'est comme en corse ! », s'exclame un collègue de l'auditoire. Une révélation. « Cela m'avait saisi, dit Ghjacumu Thiers. Rentré chez moi j'ai réfléchi. Je me suis fait la remarque : tu parles une langue qui est susceptible de faire progresser tes élèves et tu la négliges. Je me suis littéralement jeté là-dedans… À partir de là, je me suis corsisé parce que j'en ai ressenti le bénéfice pédagogique. Ce n'est qu'après que sont venus les côtés idéologique et politique. »

    De la langue utilitaire à la langue essentielle, il n'y a qu'un pas, et c'est l'écriture qui le fait franchir, l'écriture et le style. « C'est ce rapport qui me passionne dans l'écriture. J'ai connu à ce sujet une expérience malheureuse. Lorsque j'ai écrit A Funtana d'Altea, mon éditeur m'a demandé une traduction en français. La personne qui devait s'en charger est tombée malade. Je bouillais d'impatience… Je me suis lancé moi-même dans l'entreprise et j'ai écrit Les Glycines d'Altea. Lorsque l'ouvrage a été imprimé, il était comme un objet détaché de moi, je me suis même fait la réflexion que je n'en étais pas l'auteur ! Je suis persuadé que les deux langues ne fonctionnent pas de la même manière. Dans la personnalité du bilingue, elles vivent deux aventures différentes, et cette différence tient à leur statut - l'une par rapport à l'autre. »

    Un ancrage dans la romanité

    Cela dit, le français, c'est l'assurance de sortir de la confidentialité, la diffusion au grand nombre, mais on peut aller au-delà de cet horizon. « Nous avons mis en place un atelier international de traduction, dit Ghjacumu Thiers, et nous venons de publier une anthologie de la poésie corse en portugais. Une vraie merveille. La personne qui s'en est chargée travaille avec nous depuis dix ans. Elle est compétente dans les langues romanes et a vécu longtemps dans l'intimité de cette production poétique. Je me souviens que lors d'un atelier à la villa Ramelli, nous avons buté sur le mot 'examen'. En faisant le détour par le latin, nous avons résolu le problème… Le retour aux racines de la latinité, c'est une aventure que l'on retrouve avec les Roumains : des mots qui sont devenus archaïques chez eux sont encore actuels et en usage chez nous. »

    Alors, le corse, langue universelle ? Presque, du moins dans son aire méditerranéenne, où il représente une sorte d'antériorité brute dans laquelle chacun peut trouver un miroir. « La première fois que j'ai donné une conférence en Italie, dit Ghjacumu Thiers, j'ai commencé en français ; on m'a dit que la majorité de l'assistance ne comprenait pas. Je n'avais jamais fait d'italien, et on m'a demandé alors de m'exprimer en corse. En toute modestie, j'ai fait un tabac ; j'ai même eu droit à une standing ovation. Plus que mon discours, ce qui avait intéressé l'auditoire, c'était la consonance, la sonorité d'une langue ancienne. Depuis, j'ai travaillé l'italien, pour qu'on s'attache au fond autant qu'à la forme… ».

    Le corse suit donc son destin, avec des perspectives de coofficialité. Mais, si une langue c'est aussi une pensée, une somme d'acquis, ne risque-t-on pas de subir un phénomène d'acculturation de l'intérieur, par la parole dominante avançant masquée ? « Sur ce point, explique Ghjacumu Thiers, j'ai une réflexion qui est celle de la sociolinguistique. Il s'agit de dépasser par des actions que l'on appelle de glottopolitique la situation actuelle. Avec la glottopolitique, on implique des axes de politique linguistique de haut niveau - de dimension institutionnelle par exemple -, mais aussi les réactions des sujets. Nous estimons qu'au fond le sujet patron de sa langue, de sa pensée, de son environnement culturel, est aussi soumis à des déterminations qui lui viennent de l'environnement social, en particulier du statut des langues. »


    «I Misgi»: fenêtre sur cour

    Avec ce roman, Jacques Thiers nous livre un nouveau pan de son univers romanesque. Plus exactement, il nous offre un angle de vue différent sur le même objet. Cette fois, c'est le regard d'un enfant qui nous introduit dans une cour d'immeuble, monde clos et autonome, métaphore d'une ville si souvent explorée par l'auteur. Un regard d'enfant privé de toute innocence, ce qui arrive plus souvent qu'on le croit. Ce qui, en fait, est la règle.

    Les thématiques habituelles sont évidemment présentes, comme s'il était impossible à un écrivain corse d'écrire le moindre texte de quelque importance sans y revenir, immanquablement : la guerre et la vengeance se retrouvent une fois de plus sous la plume de l'auteur, comme dans In corpu à Bastia. S'il ne s'agit en rien d'un remake, les deux romans constituent bien en revanche des éléments d'un même ensemble.

    La guerre est celle de 14-18. « Évidemment », serait-on tenté d'écrire, tant la Grande guerre est, depuis quelques années, omniprésente dans la littérature insulaire, d'expression corse ou française. Quelques exemples, et non des moindres, suffiront pour s'en convaincre : Ombre di guerra de Jean-Yves Acquaviva, Murtoriu de Marc Biancarelli, Le sermon sur la chute de Rome de Jérôme Ferrari… Il n'est pas aisé de rendre raison de ce phénomène. Sans doute le processus d'inscription dans l'imaginaire collectif est-il, ces derniers temps, parvenu à son stade de maturation. On sait que la transmission familiale a souvent été entravée par la répugnance de certains témoins à exhumer des souvenirs douloureux. Parfois, cette transmission a pu sauter une génération, se faisant de grands-parents à petits-enfants, de grands-oncles à neveux… Et puis il a fallu le temps de la méditation, individuelle et collective. Finalement, tout cela aura pris un siècle, celui que nous bouclerons l'an prochain avec les commémorations prévues.

    Autre élément majeur de notre imaginaire, la vengeance. Dans ce texte, elle s'accomplit de façon étrange, entre deux personnages présentés de façon extrêmement nuancée. On vit ainsi, de l'intérieur, le parcours d'Orsu Dumenicu. Ce dernier est confronté à une situation difficile, l'intrusion dans sa vie du jeune Anton Dumè menaçant son équilibre personnel et familial. Après la mort de ce dernier, le lecteur partage les tourments d'Orsu Dumenicu dans sa tentative de rédemption : pour trouver le repos de l'âme, il ira jusqu'à se faire pénitent au Catenacciu. En vain : l'apaisement qui semblait se dessiner lors de la retraite précédant la cérémonie ne sera pas confirmé par cette dernière…

    La justice des hommes, incarnée par le commissaire, avait montré son impuissance. L'expiation par la souffrance volontaire se révèle inefficace. De même que la religion, pourtant servie par de belles et attachantes figures d'ecclésiastiques : Frate Klaus et, bien plus tard, Frate Antonello… Mais pour délivrer Orsu Dumenicu et donner une issue à la situation inextricable dans laquelle il se débat fiévreusement, il ne reste désormais que la solution de dernier recours, pratique traditionnelle s'il en est : la vengeance. Celle dont il sera victime. Pratique traditionnelle mais, ici comme dans de nombreux autres textes littéraires corses, ne constituant qu'une voie « par défaut » imposée par les circonstances.

    À la fin du roman, on se surprend, un peu confus, à être heureux du dénouement : Rosa, la veuve d'Orsu Dumenicu, est plus jeune et plus belle que jamais. La vie et l'amour ont raison de tout. Quant à ceux qui ne sont plus, ils auraient bien tort d'en prendre ombrage ! Le monde continue son chemin et comme dit le proverbe : « U mortu allarga u vivu »…

    Il est superflu d'ajouter que les personnages de Ghjacumu Thiers sont vrais. Ceux qui connaissent le reste de son œuvre ont déjà été confrontés à leur complexité. Une complexité qui est celle de la vie. Ces hommes et ces femmes, on a l'impression de les avoir côtoyés, de bien les connaître. Et pourtant ils nous surprennent.

    Telle la mer entourant le personnage principal - c'est-à-dire la ville -, l'épreuve d'artiste est toujours recommencée. Mais toujours autrement. En attendant la fresque dans son état définitif. Mais il faudra encore pour cela quelques romans…

    Jean-Guy TALAMONI


    La longue Route de la coofficialité

    Ralentir l'affaiblissement de la pratique du corse, puis lui donner une impulsion positive, ne date pas d'hier…

    Lorsque j'étais président du conseil scientifique de la langue en 2006, la mission que nous avait donnée l'Assemblée était : « Dites-nous comment sauver la langue corse », et cela devait aboutir à un plan de développement. Quelle responsabilité ! On a travaillé, fait intervenir des experts, y compris au niveau international, des gens qui peu ou prou avaient été mêlés à la remontée des langues dans leur situation ; nous nous sommes convaincus qu'il ne pouvait pas y avoir d'avenir réel de la langue s'il n'y avait pas ce que les Catalans - dans une politique qu'ils ont appliquée avec d'autres moyens que les nôtres - appellent la normalisation : pas normaliser la langue, mais rendre son usage normal. Je vois la coofficialité non comme la panacée, mais comme la condition minimale pour voir la langue opérer une remontée. Dans une société comme la nôtre, en pleine mutation démographique, la coofficialité, c'est d'abord un cadre. Il ne faut pas l'attendre comme quelque chose qui tombe du ciel ou de Paris ; il s'agit seulement de rendre possible ce qui l'est réellement et de lui donner un écho plus large dans la société.

    Il faudrait aussi que nous-mêmes soyons les militants de notre propre langue…

    Exactement, pour moi, c'est très clair. La coofficialité, ce n'est pas la remise à l'autorité politique de la responsabilité ; c'est le devoir pour la collectivité et les institutions de rendre normal l'usage de la langue et de jouer sur toutes les matrices qui peuvent être réactivées pour que la langue soit plus productive. Dans cet espace-temps difficilement mesurable - on ne peut pas l'imaginer sur une décennie ni même deux - il faut mettre en place le cadre dont je parlais, pour permettre à la volonté et à la créativité individuelles comme à la dimension éducative et culturelle de s'épanouir. Compenser les déficiences individuelles, favoriser l'accès de la langue à tous et activer sa valeur culturelle, voilà le but. Et nous militons pour que l'institution joue son rôle, ni plus ni moins.

    Source : "Corse Matin"

    IMPARÀ U CORSU

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    Un moyen évolutif d'apprendre la langue corse... bientôt sur INTERROMANIA


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    IMPARÀ U CORSU est un outil destiné à l’apprentissage du corse. Il représente globalement le niveau A du Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues (CECRL).
    IMPARÀ U CORSU, outil autonome et évolutif (1) (2), prépare aussi à l’utilisation de la Méthode INCORSU (niveau B) et INCORSU + (niveau C)
    IMPARÀ U CORSU est destiné à tous ceux qui désirent se familiariser avec la langue corse par simple curiosité ou pour acquérir quelques rudiments et peut-être poursuivre leur apprentissage.

    (1) Le suivi et la mise à jour des contenus et de la structure sont prévus.

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    NIVEAU DE LANGUE
    C’est le langage quotidien, loin de la recherche du « locuteur idéal ». Le parti-pris est résolument pédagogique. On veut être utile avant tout. On sait d’autre part que l’outil IMPARÀ U CORSU peut au besoin être complété, enrichi, corrigé, diversifié, par le dialogue avec les usagers.
    Les séquences sonores, nombreuses dans les différentes étapes et rubriques, ne font pas intervenir des locuteurs toujours virtuoses, mais le plus souvent des jeunes gens qui, eux-mêmes, sont en train de perfectionner leur expression en langue corse.
    Sans renoncer à l’expressivité du quotidien, la diction des différents exercices vise surtout à faire entendre le plus distinctement possible les articulations des mots et des phrases. IMPARÀ U CORSU, on le comprend, cherche surtout à donner un accès réel à la langue corse en offrant un moyen concret de l’acquérir soi-même, en particulier par la répétition.
    Certaines variations sont sensibles entre les réalisations phonétiques des mots et des phrases : elles tiennent à l’option « polynomique » (3) du corse.
    (3) La polynomie suppose non seulement la variation linguistique, mais aussi la tolérance à l’égard de la variation interne de la langue considérée.

    CONTENUS
    20 séquences présentant :
    1. Une conversation de base
    2. Des éléments de vocabulaire utile
    3. Des éléments de grammaire présentés dans une progression
    4. Des exercices destinés à renforcer la compréhension
    5. Des exercices de répétition (reproduire des tournures usuelles, des expressions proverbiales)
    6. Des exercices basés sur l’écoute de chansons
    La plupart des contenus sont présentés également avec leur traduction française

    CHEMINEMENT DE L’APPRENTISSAGE
    Selon son besoin individuel (volonté d’acquérir quelques bases, simple curiosité, désir d’un apprentissage gradué, consultation régulière ou épisodique) l’usager peut accéder à IMPARÀ U CORSU :

    • en suivant la progression des 20 séquences (comprenant des reprises d’exercices et des révisions)
    • en choisissant des rubriques transversales (ex : tous les dialogues, tous les verbes, tous les éléments grammaticaux, tous les exercices)
    • comme indiqué plus haut on pourra poursuivre l'apprentissage du corse avec: INCORSU (niveau B) et INCORSU + (niveau C)

    Langues régionales : Le combat de Marie-Jeanne Verny

    20 novembre 2013 |  Par JOURNAL CESAR

    Marie-Jeanne Verny, très impliquée sur la question des langues régionales (1), dont l’Occitan, a été partie prenante de la rédaction d’un texte argumentant l’importance de la langue régionale présenté aux députés, à l’origine d’une quarantaine de questions écrites à l’Assemblée nationale. Le tout récent vote par le Parlement européen du Rapport sur les langues européennes menacées de disparition et la diversité linguistique au sein de l’Union européenne (2) présenté par François Alfonsi, (eurodéputé du groupe Verts-ALE), constituant un événement important pour l’avenir de ces langues, état des lieux avec elle.

    Peut-on dire que vous êtes l’incarnation d’une schizophrénie française dans le sens où vos parents, natifs du Cantal, étaient bilingues, mais n’ont pas voulu apprendre l’occitan à leurs enfants pour qu’ils réussissent dans la vie. Et qu’ils sont morts avec l’incompréhension que leur fille soit devenue professeur d’occitan ?

    Marie-Jeanne Verny Certes, c’est très douloureux d’avoir vu partir les siens sans parvenir à les réconcilier avec cette part d’eux-mêmes… de revenir dans son village où les locuteurs de la langue ne la parlent plus faute d’interlocuteurs et s’excusent s’il leur échappe un mot de « patois » en votre présence, malgré vos tentatives pour les rassurer… Un savoir, une réserve langagière s’en va peu à peu… Nous recréons autre chose, bien sûr, mais le fil s’est cassé, la chaîne du langage s’est interrompue. Il y a une perte langagière et culturelle irrémédiable que je ne pardonne pas à cette France orgueilleuse de « SA » langue. Et je le lui pardonne encore moins comme communiste : avec parfois de bonnes intentions, elle a tué les langues des humbles, elle leur a imposé une intégration - laminage. Certes, on ne savait pas, au début du XXe siècle, qu’on pouvait apprendre la langue commune en gardant sa langue (régionale ou d’immigration) ; on ne concevait pas que l’on puisse être tranquillement bi ou plurilingue. Maintenant, on le sait et je suis féroce avec ceux qui veulent me donner des leçons de « républicanisme » du haut de leur ignorance crasse des richesses culturelles d’une République qui est autant la mienne que la leur, du haut de leur conception mystique et irrationnelle d’une nation monolingue et monoculturelle, du haut de leur culte d’une littérature française qui serait supérieure à toutes les autres – et que j’aime d’ailleurs, moi aussi, passionnément.

    Vous êtes la coordinatrice d’un livre sur l’école française et les langues régionales XIXe-XXe siècles. Entre la célébration de l’école publique qui fit de nos aïeux des citoyens et la dénonciation d’un enseignement nationaliste négateur de la diversité constructive de la société française depuis des siècles, où placer aujourd’hui le curseur ?

    Ce livre réunit des contributions sur les diverses langues de France. La lecture de celles-ci montre que la réalité était plus complexe que le veulent les clichés : certes l’école, globalement, réprimait l’usage du « patois » mais il y avait aussi des maîtres qui, sans toujours enseigner les langues régionales pour elles-mêmes, en faisaient objets d’étude et de comparaison dans leurs cours. Aujourd’hui, je suis viscéralement attachée au service public de l’Education Nationale. Sans elle, la fille de paysans « schizophrène » dont il a été question n’aurait pas appris que le « patois » était une langue et n’aurait jamais eu l’idée de l’enseigner. Cette école publique, c’est là que sont les enfants qui vivent en pays d’oc, qui, dans leur immense majorité, ne demandent rien, parce qu’ils ne savent pas. C’est donc à eux que l’école publique doit s’adresser en leur proposant un enseignement d’occitan ou, au moins, une information sur l’occitan. D’ailleurs, la FELCO demande que les programmes français informent tous les enfants de France de la réalité plurilingue et pluriculturelle de leur pays. Exact contrepied des enfermements communautaristes ou des écoles arcadiques réservées aux enfants dont les parents ont les moyens culturels de demander une autre école.

    Quel état des lieux de l’enseignement de la langue d’oc peut-on établir ?
    En terme de public touché, la situation est grave, pour des raisons complexes, qui ne tiennent pas seulement à l’image de la langue mais aussi à la dégradation générale des conditions d’enseignement et des recrutements des maîtres : entre 70 000 et 80 000 enfants touchés à l’échelle du pays d’oc, c’est dérisoire. C’est pour cela que la FELCO compte à la fois sur les acquis de la nouvelle loi école et sur l’engagement (en fort progrès) des collectivités locales.

    Lors du projet de loi de Refondation de l’école de la République, nullement n’était évoquée la place des langues régionales (LR). Ce qui a conduit 17 associations dont la FELCO à engager un énorme travail de propositions d’amendements. Qu’est-ce que cela a donné ?

    Une avancée, car le texte antérieur était muet et nous avons gagné des articles de loi nouveaux qui réaffirment l’importance des LR dans l’école. Articles que les collègues, sur le terrain, pourront opposer à tel ou tel responsable administratif réticent. Car l’on pourra gagner tous les textes qu’on voudra, s’il n’y a pas de pression du terrain, leur portée sera forcément limitée. Nous avons aussi fait progresser la qualité du débat : nous avons suivi de près toutes les séances à l’Assemblée et au Sénat, nous n’y avons pas entendu les âneries antérieures, et la FELCO a maintenant des contacts de confiance avec un grand nombre d’élus qui ont apprécié le sérieux de nos dossiers.

    Dans nos colonnes, lors de sa venue à l’Estivada de Rodez, Jean-Pierre Bel (3), « président occitan du Sénat » (lui dixit) a dit qu’on avait besoin d’un cadre législatif qui favorise l’apprentissage des langues régionales et valorise ces cultures qui sont un grand atout pour notre pays. Où en est-on ?

    Cela reste un projet. Avec d’autres, nous allons travailler à ce qu’il avance.

    Pourquoi la bataille pour la ratification de la Charte européenne des langues et cultures régionales est-elle stratégiquement cruciale ?

    Je vais vous étonner, mais elle nous paraît plus symbolique que cruciale. Ceux qui se focalisent dessus ne semblent pas savoir que les articles que la France a signés (et non ratifiés) n’apportent rien de plus que la situation actuelle et sont même en-deçà des acquis de certaines langues, comme le montrent les travaux de notre collègue corse Romanu Colonna. Le plus important, dans tout cela, ce sont les débats que cela permet, un peu comme le rapport de François Alfonsi, récemment voté.

    En Corse, au pays Basque, en Bretagne, sinon en Catalogne, on a compris que le bilinguisme est un atout. Qu’apporte-t-il ?

    Je vais laisser s’exprimer le poète Roland Pécout, sur lequel j’ai beaucoup travaillé (4) : « Deux langues, c’est deux clés pour ouvrir le monde ». Je le vérifie tous les jours, et je plains beaucoup les monolingues chroniques.

    Les conventions de l’Unesco ont reconnu les enjeux du PCI (Patrimoine culture Immatériel). En tant que spécialiste de linguistique, littérature, poésie, que pensez-vous qu’apporte l’Occitanie et ses imaginaires dans ce passionnant débat de la mondialité ?

    Je suis très réticente face aux nationalismes quels qu’ils soient. Et je me réjouis – c’est paradoxal, n’est-ce pas ? – qu’il n’y ait pas d’autre Occitanie qu’un espace de langue, de culture, d’imaginaire. Je lis avec émotion les écrivains d’oc, quels que soient leur région d’origine et leur graphie, avec une prédilection pour les contemporains. Mon bonheur est de faire partager ces découvertes dans mon travail d’enseignante-chercheuse, mais aussi dans des événements publics comme l’Estivada de Rodez. C’est aussi de voir des musiciens se remettre à l’interprétation de textes littéraires, un retour après des années où les recherches musicales mettaient le texte en position subalterne, ou s’en désintéressaient, tout simplement. Mais j’ai besoin d’air, de rencontres, avec d’autres cultures, d’autres langues, minorisées notamment.

    Frank Tenaille

    1- Maître de conférences au département d’occitan de l’Université Paul Valéry à Montpellier, elle est aussi secrétaire de la FELCO (Fédération des enseignants de Langue et Culture d’Oc-enseignement public) et membre du réseau Langues et cultures de France. FELCO : 04 67 66 33 31, www.felco-creo.org
    2- Ce vote a été acquis par 645 députés sur les 765 du Parlement. Parmi les votes contre : les trois Front national (Le Pen père et fille et Bruno Gollnich), Philippe de Villiers, huit UMP, un PPE (dont Brice Hortefeux), ainsi qu’un seul élu de gauche, Jean-Luc Melenchon.
    3- Lire sur www.cesar.fr les ITW de J.P. Bel et R. Pécout
    4- La liste des travaux de M-J Verny sur le site : www.univ-montp3.fr/llacs/membres/marie-jeanne-verny/. Elle a aussi consacré un site à Roland Pécout : www.univ-montp3.fr/uoh/pecout

    A lire
    Hervé Lieutard et Marie-Jeanne Verny, « L’école française et les langues régionales,
    XIXe-XXe siècles », Montpellier PULM

    Langue corse: défense de la richesse et de la diversité de ses parlers

    Il y a quelques années, des intellectuels, hommes politiques, écrivains ou gens de théâtre avaient fondé un bulletin, A Spannata, qui avait pour devise Diversita fa ricchezza. Son propos ? Défendre et illustrer les parlers du Sud de la Corse, au nom de cette diversité qui, selon l’adage italien – mais en réalité selon le bon sens -, « fait richesse ». Dans quelques semaines, doit paraître aux Editions du Bord de l’Eau, dans la collection « Spondi », un dictionnaire, précisément des parlers du Sud de la Corse, en l’honneur de ce qui se parle dans la vallée du Taravo, autour du golfe du Valinco, dans la Rocca, l’Alta-Rocca, ou dans l’Extrême-Sud de l’île. Ce sont toujours ces parlers que veulent défendre les signataires du Manifeste pumunticu, inquiets de voir la diversité linguistique de l’île menacée par Dieu sait quelle centralisation ou quelle domination cismuntica… La presse s’est fait l’écho de cet appel, dont on peut trouver le texte auprès d’un de ses promoteurs, Rinatu Coti (r.coti@wanadoo.fr ).

    Il est bien certain que la création des langues européennes, leur codification, le développement de leur pratique, leur illustration par des œuvres classiques, a partout et toujours obéi à des impératifs politiques. Le français n’existe que parce qu’il en a ainsi été décidé : le souverain, l’appareil d’Etat ont décidé qu’aux quatre coins du royaume on parlerait français, langue dont a été entreprise, au XVIe siècle, la codification minutieuse. L’italien n’est pas né par hasard, mais parce qu’à un moment donné, il a été – politiquement – décidé que la langue de Dante, concrètement le toscan, deviendrait la langue officielle de la péninsule italienne. Ces langues, pour s’en tenir au français et à l’italien, se sont imposées en marginalisant les parlers locaux, provinciaux et régionaux, qui étaient vivaces et qui ont continué à vivre, demeurant la langue du cœur, des sentiments, de la vie quotidienne, de l’intimité des familles, véritablement la langue maternelle.

    La situation de la Corse est sur ce point exemplaire. L’île a longtemps vu coexister une langue vivace – le corse -, qui jusqu’au XXe siècle est parlée unanimement par toutes les catégories sociales, et, à côté d’elle, une autre langue, le latin – pour les usages écrits -, puis l’italien, puis le français, langue parfaitement codifiées, précises, exactes, qui remplissaient – et pour le français continue de remplir – toutes les fonctions officielles, publiques d’une langue, c’est-à-dire qu’elle permettait d’échanger avec d’autres que ceux de la tribu immédiate. La Corse s’est longtemps distinguée par ce bilinguisme, officieux, de fait, sinon officiel. Une langue pour les usages publics, pour la promotion sociale et l’élévation dans le monde, une autre pour les usages domestiques, villageois, locaux, microrégionaux dirait-on aujourd’hui. Ce bilinguisme a perduré tant qu’une grande partie de l’existence des personnes s’est déroulée là où elles étaient nées, dans le village, le canton, la vallée, l’environnement immédiat ; le corse a été pratiqué, cependant que, pour d’autres raisons, le français a rempli ses fonctions, et lui aussi été pratiqué.

    A partir du moment où les personnes se sont mariées ailleurs, sont allées étudier ailleurs, sont allées travailler ailleurs, la pratique du corse a décliné, d’abord parce qu’elle a baissé dans les familles. Tant qu’une langue est parlée à l’intérieur des familles, elle demeure vivante ; quand cette pratique régresse, la langue est menacée. Au XXe siècle, quand l’île s’est ouverte au monde, c’est ce qui est arrivé au corse.

    Comment faire pour sauver ce qui, à bon droit, peut être tenu pour un « patrimoine immatériel », sinon de l’humanité, du moins des habitants de l’île ? En dehors de la sphère privée, c’est difficile. Beaucoup ont pu craindre que la pratique du corse régresse, parce que cette langue n’était pas suffisamment rigoureuse pour permettre des échanges précis avec d’autres que ceux de l’environnement immédiat. Ils ont dès lors entrepris un bon effort pour codifier le corse, préciser le vocabulaire, fixer la syntaxe ; au XXe siècle – alors qu’il n’en existait pas – ont été établis grammaires et dictionnaires. Avec l’espoir que, disposant enfin de références rigoureuses, le corse serait davantage pratiqué.

    Qu’en est-il ? En l’absence de statistiques et d’indications fiables, il est impossible de répondre à cette question. Erosion de la pratique ? Dégradation de la qualité du corse parlé ? Meilleure connaissance de la langue, qui désormais peut également s’apprendre « dans les livres » ? Tout cela est difficile à dire avec certitude. On a l’impression – c’est maigre – que l’on n’a jamais fait autant d’efforts pour promouvoir le corse, et qu’on ne l’a jamais aussi peu parlé.

    En revanche, il est certain que les tentatives d’homogénéisation de la langue ont provoqué chez beaucoup de locuteurs corses – et dans une moindre mesure, parce qu’ils sont moins nombreux, chez les lecteurs -, des réactions contrastées. Depuis une trentaine d’années, les efforts pour sauver le corse ont souffert d’un double handicap. Le premier est que l’on a longtemps pu – et pas à tort – associer le combat pour sauver le corse avec le combat nationaliste ; beaucoup se sont écartés de la langue parce qu’ils repoussaient les idées. La situation, sur ce point, est sans doute en train d’évoluer, ce qui est heureux ; peut-être en vient-on à considérer que le corse est à tout le monde, et que le défendre, le faire vivre, l’illustrer n’est l’apanage de personne. Le deuxième handicap du corse dans les années récentes est celui que dénoncent les signataires du manifeste évoqué, qu’on pourrait appeler le « handicap cismunticu ». A la radio, à la télévision, à l’université, dans les ouvrages rédigés en corse, s’est imposée ce que les signataires du manifeste appellent l’« idéologie totalitaire » des formes du corse parlé dans l’en-deçà-des-monts. Le corse « dominant », celui principalement entendu sur les ondes et pratiqué par les enseignants, est celui « de Bastia » ou « de Corte », schématiquement de la Corse du Nord, de la portion de l’île autrefois appelée « Cismonte ».

    Pourquoi pas ? Pourquoi, s’il faut codifier le corse, ne pas retenir effectivement telle forme, et la faire prévaloir autoritairement sur les autres ? Français et italien, pour s’en tenir à eux, n’ont pas procédé autrement. Mais le cas de ces langues, et de ces dispositions autoritaires, se sont inscrites dans des contextes bien différents. Il s’agissait, à l’époque, au XVIe siècle, de créer des outils purement fonctionnels et pratiques, des sortes de systèmes métriques langagiers ; il fallait pouvoir se comprendre et n’avoir aucun doute sur le sens des mots. Pour le corse, le problème est différent : pour échanger pratiquement, les Corses disposent du français, et il s’agit de sauver une langue, appréciée pour l’essentiel pour ses mérites sentimentaux, et pour ses vertus charmantes, poétiques, reflets du monde rural où elle s’est forgée. Comment, dans cet ordre-là, imposer aux possibles locuteurs, telle ou telle prononciation, tel ou tel mot pour désigner choses ou concepts, telle ou telle graphie ? C’est impossible. Parlez à un habitant du Sud d’un babbo ou d’un cacaru, lui qui n’a jamais chéri que son missia n’y comprendra rien. Souhaitez-lui, à ce brave homme, en début d’année, pace e salute, il vous répondra paci è saluta… Les efforts de codification du corse, et la création, autoritaire, d’une forme officielle de la langue – qui est effectivement la seule solution possible pour donner à une langue la rigueur sans laquelle on ne peut l’enseigner ou l’écrire -, ces efforts butent sur l’oreille et les usages des locuteurs. Il suffit de quelques secondes, à un corsophone expérimenté pour savoir de quelle portion de l’île vient son interlocuteur également corsophone.

    S’il vient des environs, les deux se comprendront et parleront corse. S’il vient de trop loin, n’emploie pas le même vocabulaire – canu ou jagaru, pour désigner un chien ? -, les deux personnes préféreront, comme de toute éternité, recourir au français. C’est la raison pour laquelle dans les villes, Ajaccio et Bastia par exemple, la pratique du corse est circonscrite aux échanges à l’intérieur d’un quartier entre habitants originaires de ce quartier, exactement comme le corse se pratique dans les villages où il prouve, toutes générations confondues, une convenable vitalité ; dans l’univers urbain, les Corses corsophones parlent français, craignant s’il s’adressaient dans « leur » corse à leurs voisins, de ne pas être compris par eux.

    Un locuteur du Sud trouve étrange, pour ne pas dire étranger, le corse parlé par les habitants du Nord, dont le parler tend à se répandre sur les ondes et via l’Université. Ce corse du Nord, le Corse du Sud ne le reconnaît pas comme sa langue maternelle, celle qui lui est familière, celle grâce à laquelle il se sent appartenir à une même communauté fraternelle. C’est contre cela que se sont indignés les signataires du manifeste pumunticu. « Nous ne pouvons accepter, écrivent-ils, une graphie qui ne respecte ni notre phonétique ni notre phonologie, ni les tournures de phrases propres à nos microrégions qui seraient ainsi abandonnées ; en quelques mots, notre vision du monde qui disparaîtrait. (…) Nous nous élevons contre les prétentions ultramontaines d’unification du Corse et lutterons pour conserver nos parlers et notre graphie dans un contexte de liberté individuelle et collective… ».

    Conséquence de tout cela, en filigrane du manifeste en question : comment, si le corse devenait à être, à parité avec le français, langue officielle de l’île, comment prendre en compte la variété des parlers insulaires, entre lesquels  les différences ne sont pas qu’orales, mais bel et bien substantielles, et se traduisent notamment par des graphismes différents ? C’est, sur le plan pratique, d’une difficulté insurmontable, et nul ne peut, à la vérité, apporter au problème de la pratique du corse, a fortiori au problème du respect des variétés de ce corse, une réponse politique. Sauf à apporter – ce dont personne n’a besoin – une réponse dogmatique, illusoire, en définitive stérile et vaine. Sauf à prétendre créer, mais à usage interne, une espèce d’espéranto, qui ressemblerait à peu près autant au corse que l’espéranto aux autres langues de ce bas monde…

    LIBRE OPINION, par P.A. S.
    Source : http://www.france-corse.fr

     

    Tribune

    Dominique Bucchini: Le bilinguisme fait notre richesse

    bucchini

    Par Dominique Bucchini, président de l’assemblée de Corse.

    Le 17 mai dernier, l’Assemblée de Corse adoptait le projet de statut de co-officialité et de revitalisation de la langue corse. Il s’agit d’une date symbolique pour l’avenir de la langue corse.

    En effet, ce statut aurait d’importantes conséquences dans les différents domaines de la vie publique. Il vise à garantir l’emploi officiel du français et du corse à parité sur le territoire de la Corse et, pour y parvenir, entend encourager l’emploi du corse par tous et dans tous les domaines. Chacun se verra garantir l’accès à la connaissance et à la pratique du corse et les pouvoirs publics auront le devoir de faire respecter les droits des locuteurs. Ainsi – sans sous-estimer le temps et les moyens nécessaires –, nous pourrons édifier une société bilingue, dans laquelle les institutions, l’enseignement, les entreprises, les médias utiliseront paritairement les deux langues. Les citoyens pourront les employer indistinctement et sans discrimination dans toutes leurs activités. Ce vote est l’aboutissement d’un long processus marqué par plusieurs délibérations de notre Assemblée depuis 1983. Partant de positions parfois éloignées, nous avons su nous rassembler pour voter à l’unanimité le plan d’aménagement et de développement linguistiques 2007-2013. Et si certains élus ont toujours des réserves sur le principe de la co-officialité, il n’est pas indifférent qu’aucun ne se soit prononcé contre le projet de statut. Le groupe des élu-e-s communistes et citoyens du Front de gauche a voté favorablement, dans le droit-fil d’une démarche ancienne. Dans cette promotion du corse où le bilinguisme fait notre richesse, les communistes ont, des années 1930 à aujourd’hui, tenu toute leur place. Dès 1985, nous popularisions la revendication de la co-officialité, à partir des thèses de Jean-Baptiste Marcellesi apportant « une contribution décisive à la revendication linguistique ».

    Si le vote de l’Assemblée de Corse exprime une volonté largement majoritaire, nous avons conscience des obstacles – juridiques et politiques – qui demeurent. Qu’une telle évolution statutaire puisse faire débat, c’est compréhensible. D’abord parce que, si les langues régionales ont finalement été inscrites dans la Constitution, c’est à l’article 75 et sans réelle portée normative, tandis que l’article 2 de la Constitution stipule que « la langue de la République est le français ». Au-delà de l’état actuel du droit, il existe, en France, y compris à gauche, une certaine conception liant langue, nation et République, considérant qu’au principe d’indivisibilité de la République correspond l’usage d’une langue unique et que la promotion des langues régionales affaiblirait le français, en particulier face à l’anglais. Ce n’est pas à cette conception uniformisatrice, improprement attribuée aux Jacobins, que nous nous référons mais à une autre tradition du mouvement ouvrier, plus démocratique, nourrie de culture populaire ouverte à la diversité linguistique. Celle de Jean Jaurès plaidant pour l’apprentissage des langues méridionales ou du basque; de Marcel Cachin, engagé avec force dans la défense de la langue bretonne; celle d’Antonio Gramsci, qui recommandait « de tout cœur » que les enfants apprennent et parlent le sarde. Devrais-je ici rappeler les initiatives des parlementaires communistes pendant l’entre-deux-guerres et le fait que le dernier grand projet de loi sur les langues régionales ait été porté, en 1988, par notre regretté camarade Guy Hermier ? Nous sommes dans cette filiation et je n’ai pas le sentiment que parler deux langues nous rendrait moins français ni moins républicains! À travers la France, ce choix est partagé par nombre de militants du Front de gauche. La langue joue un rôle important dans la structure de la personnalité. L’identité personnelle est profondément enracinée dans son expression verbale. Il existe un lien fort entre la langue et le sentiment d’appartenance à un groupe. Plus encore que par le passé, l’identité de l’individu est multiple, chacun appartenant à plusieurs groupes sociaux. Dans la mesure où ils sont bilingues, les Corses construisent une culture provenant de deux sources différentes. Avec le français, la langue corse structure leur « vision du monde ». La personne bilingue « est un être communiquant qui forme un tout », dont la personnalité est formée non de deux cultures juxtaposées mais de leurs échanges, de leur interaction, de leur synthèse. Si bien qu’occulter l’une des langues constitutives de l’identité est une agression contre la personnalité entière, comme si l’on mettait, dit encore Gramsci, « une camisole de force » sur l’esprit.

    Aujourd’hui, nous voulons dépasser le conflit linguistique consistant, soit à accepter le choix diglossique et délaisser la langue originelle, soit s’enfermer dans le ghetto linguistique régional. Pour cela, il n’y a pas d’autre moyen que d’élever le statut de la langue minorée. Le développement humain autant que la démocratie réclament que l’on porte une attention particulière à la diversité culturelle et aux droits linguistiques. L’État s’est construit en France sur un mode très différent de l’Allemagne, de l’Italie ou de l’Espagne, et nous n’avons à importer aucun modèle. Il n’entre nullement dans mon propos de stigmatiser la France ; évitons les anachronismes et les simplifications abusives. La langue française a été la langue de l’unité nationale et un facteur de promotion sociale. C’est la langue de la République sur l’ensemble du territoire national et nous entendons la défendre et la promouvoir dans le monde, ne pas la laisser submerger par les langues « du marché », en particulier l’anglais. Mais force est de constater que l’unification au moyen de la langue s’est bâtie sur l’éradication des langues et des parlers locaux ; une telle uniformisation a appauvri la République. « C’est ainsi, comme l’écrivait Jean-Baptiste Marcellesi, que dans le territoire le plus diversifié en Europe du point de vue linguistique une langue commune a pu être diffusée au point de masquer l’existence d’autres systèmes qu’elle semblait avoir recouverts. » Ainsi la France doit-elle, à sa manière, rattraper son retard dans la reconnaissance des langues régionales. Elle doit ratifier la charte européenne des langues régionales et minoritaires signée le 7 mai 1999, complétée par sa déclaration interprétative, et mettre en chantier une grande loi sur les langues régionales de France. Toutefois, si la Corse participe de cette démarche d’ensemble, elle avance – du fait de son statut particulier reconnaissant ses spécificités, notamment culturelles – à son propre rythme et selon ses problématiques singulières. Sa représentation politique considère, en phase avec l’opinion publique, que la co-officialité est le cadre juridique qui, joint à un ensemble de mesures sociales, culturelles, éducatives et économiques, peut permettre de sauver et de développer la langue corse qui est aussi, de notre point de vue, une langue de la République.

    Source : "L'Humanité" du 14/08/2013


    Des raisons d'être optimistes

    biancarelli

    Les langues sont des hybrides

     

    ghjunga

    La théorie du complot ethnique de la charte des langues régionales

    En réponse au texte de Françoise Morvan publié en avril dernier sur Mediapart, l'historien Jean-Pierre Cavaillé critique la théorie du complot ethniciste de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires développée par quelques auteurs. « Ainsi, derrière tout acte militant non seulement en faveur de la ratification de la charte, mais tout aussi bien pour la reconnaissance voire même la transmission des langues minorées, c’est le spectre de l’ethnicisme qui tirerait les ficelles. »

    Rien n’est plus intéressant à étudier, mais aussi rien n’est plus terrible à subir que les théories conspirationnistes, car leur reconstruction de la réalité, à la fois délirante et hyperlogique, qui exploite la peur et attise la haine –ces passions tristes qui sont le poison de la politique–, possède un pouvoir considérable de persuasion dont les effets sont toujours nocifs. Les exemples ne manquent pas : les jésuites tramaient l’assassinat des rois de France ; ce sont les francs-maçons qui ont engendré dans l’ombre la Révolution française ; les juifs complotent pour dominer le monde ; c’est la CIA qui a manigancé les attaques du 11 septembre, etc., etc.

    En France (car il s’agit d’une théorie nationale, guère exportable), nous sommes confrontés à une théorie du complot anti-européenne et antigermanique, selon laquelle l’Europe, avec toutes ses institutions, ne serait rien d’autre que la couverture d’une politique secrète pangermaniste visant à rien de moins que la destruction des autres États nations –et en particulier de la France– au profit d’une Allemagne triomphante. Ainsi l’Europe serait-elle le brasier des États qui fait renaître le phénix du Reich des cendres du nazisme.

    L’Allemagne triomphante

    Yvonne Bollmann est l’une des représentantes majeures de cette théorie, obsédée par la soi-disant germanisation de l’Alsace et ce que l’on pourrait appeler la « question allemande » [1]. Ses arguments sont à ce point caricaturaux que je me suis toujours demandé comment elle pouvait être prise au sérieux par les universitaires qui l’invitent dans leurs colloques à prétention scientifique. Dans le cadre de cette théorie générale, Bollmann et quelques autres auteurs (en particulier Lionel Boissou, Pierre Hillard, Françoise Morvan) développent la théorie locale du complot ethniciste de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires, selon laquelle cette charte, les institutions qui l’ont portée (en particulier le Conseil de l’Europe), les vingt-quatre pays qui l’ont signée et ratifiée et tous ceux qui militent en France pour sa ratification, sont ou partisans ou dupes d’une conception politique racialiste et ethniciste, et travaillent en sous-main à l’édification d’une Europe des Volksgruppen, c’est-à-dire des ethnies et des tribus, grâce à laquelle l’Allemagne s’apprête à imposer sa domination impériale retrouvée. Soit, pour le dire avec Bollmann, « la Charte des langues est une chose allemande, inspirée par l’ethnisme, à l’opposé de la culture politique propre à la France, et destinée à la détruire » (table ronde du 14 mai 2004 organisée par François Taillandier, avec Michel Alessio, Yvonne Bollmann et Henri Giordan).

    Ainsi, derrière tout acte militant non seulement en faveur de la ratification de la charte, mais tout aussi bien pour la reconnaissance voire même la transmission des langues minorées, c’est le spectre de l’ethnicisme qui tirerait les ficelles. L’ethnicisme, à son tour, est entendu de manière univoque, dans cette reductio ad hitlerum systématiquement pratiquée par cette logique paranoïaque, comme crypto-racialisme et « donc », in fine, crypto-nazisme... Nous, qui œuvrons pour la ratification, serions « donc », en dernier recours, des nazis sans le savoir, encore que de multiples arguments pseudo-historiques soient déployés pour montrer que nous ne sommes dupes qu’à moitié, et donc à moitié, voire tout à fait complices du complot.

    Cette thèse délirante, selon laquelle la reconnaissance des langues minoritaires est le cheval de Troie d’une Europe ethnique (et allemande !), n’est pas nouvelle ; à parcourir les sites, les blogs et les forums, elle semble assez largement partagée dans les milieux souverainistes et libres penseurs (Réseau Voltaire, Libre Pensée, Riposte Laïque, Comité Valmy…). Au-delà, elle est instrumentalisée par beaucoup de ceux qui sont hostiles, non seulement à la ratification de la Charte, mais à toute reconnaissance des langues minorées. On la trouve énoncée jusque dans des revues universitaires comme Hérodote (voir à ce sujet, mon post de décembre 2007 : Hérodote radote. Langue et nation en France). Le combat mené contre les écoles associatives bilingues exploite aussi volontiers l’idée d’un complot du « communautarisme » contre l’école française de la République (voir, ici, l’Odieux complot de Calandreta dévoilé par les héros de l’école publique). Sauf que, dans ce cas, ce serait le libéralisme économique et le grand capital qui tireraient les ficelles et non plus l’Allemagne, mais il suffit de mettre en avant la promotion allemande du libéralisme pour associer les deux entités maléfiques derrière toute initiative, quelle qu’elle soit, en faveur de nos langues. Du reste, certains, comme Pierre Hillard, ont ajouté un chapitre au grand récit du grand complot en expliquant que les États-Unis ont pris le relais de l’Allemagne dans cette opération de destruction des États européens visant à imposer partout l’économie libérale sans plus aucune résistance (« Washington considère comme prioritaire de priver les Européens de leurs États pour mieux les faire entrer dans un libre-marché globalisé », article de P. Hillard, sur le site du Réseau Voltaire, se proposant de montrer que« Les Verts sont partisans d’une Europe des Ethnies »).

    Ainsi, l’écho de la thèse complotiste contre les langues régionales est-il beaucoup plus large et ce n’est pas sans une certaine stupeur que je l’ai trouvé exposé dans sa forme la plus pure par Françoise Morvan, passionaria des opposants au mouvement breton [2], « invitée » par la rédaction de Mediapart à présenter et défendre son point de vue, dans un article intitulé Contre la charte des langues régionales. Je vous invite à le lire, car il s’agit d’un chef d’œuvre du genre. Chef d’œuvre sans doute, car, pour étonnant que cela puisse paraître, j’ai entendu des avis embarrassés, voire positifs sur ce texte, jusque dans les milieux occitanistes [3].

    Histoire du complot

    C’est que, en faisant explicitement fonds sur les travaux de Bollmann et de Boissou, Morvan appuie son argumentaire sur « l’histoire » ; l’histoire du complot ethniciste ou, comme elle l’appelle, du « lobby ethniciste européen ».

    Il reviendrait à la FUEV (Föderalistische Union Europäischer Volksgruppen), encore dite UFCE (Union fédéraliste des communautés européennes [4]), aujourd’hui FUEN, d’avoir « concocté » et « rédigé » la Charte pour le Conseil de l’Europe : ainsi celle-ci est-elle « une arme de guerre contre les États-nations (et en premier lieu la France) ». Cette ONG fondée en 1949 serait, selon Françoise Morvan et les autorités auxquelles recourt celle-ci (Bollmann et Boissou), un réseau pangermaniste aux relents nazis. Ainsi la Charte serait-elle, en sous-main, un cheval de Troie ethnique visant, on l’a déjà vu, à la destruction des États nations. D’ailleurs, elle dévoilerait ses intentions cachées en octroyant des droits spécifiques à des groupes de citoyens –raison invoquée par le Conseil constitutionnel français pour bloquer sa ratification– ; la reconnaissance de ces droits collectifs ouvrant grand le chemin à l’affirmation ethnique. 

    La critique du complot est la preuve de son existence

    Le propre des théories complotistes consiste à développer des scénarios d’explication hyper-rationnelle à partir d’éléments isolés ayant un degré minimal de validité ou de probabilité liés les uns aux autres dans un système d’une cohérence infernale. Le complot, comme l’a bien analysé Pierre-André Taguieff (L'Imaginaire du complot mondial), est irréfutable, toute preuve visant à démontrer que le complot n’existe pas étant immédiatement renversée en preuve de son existence. Bien sûr, dans cette logique paranoïaque, ceux qui s’engagent dans cette voie de la déconstruction du pseudo-complot, comme je le fais ici, ne font rien d’autre que de « prouver » en fait qu’ils font partie des comploteurs. Taguieff a repéré quatre principes dans cette logique irréfutable : « rien n’arrive par accident ; tout ce qui arrive est le résultat d’intentions ou de volontés cachées ; rien n’est tel qu’il parait être ; tout est lié, mais de façon occulte. »

    Pourtant, le démontage de la logique conspirationniste est absolument nécessaire, vital pour le combat que nous menons, qui vise à affirmer haut et fort que les locuteurs des langues minorées ont droit à la reconnaissance culturelle et institutionnelle sans laquelle l’existence même de ces langues et des formes culturelles auxquelles elles sont associées se trouve purement et simplement niée. A ce titre, la Charte européenne a longtemps constitué pour nous, particulièrement en France, où il est si difficile de se faire entendre, une attente, un espoir. Quoi que nous dirons en sa faveur, les conspirationnistes nous répondront toujours et invariablement que derrière l’engagement pour les langues, nous cherchons à promouvoir secrètement une Europe des micro-nations, des ethnies, des races et des tribus sous domination allemande. Mais le bon sens n’est pas conspirationniste, il ne saurait l’être, il sait que nous vivons dans un monde contingent où l’accidentel, l’inattendu ne cesse de survenir, de troubler la carte et compromet souvent les complots les mieux ourdis (car il serait absurde évidemment de nier l’existence de cette forme de prise de pouvoir aussi vieille que l’action politique). Nous savons que les seules intentions et les volontés que nous pouvons prêter aux acteurs sont celles qui, d’une façon ou d’une autre, se déclarent dans les discours et dans les actes (autrement dit les spéculations sur ce que les acteurs pensent au fond d’eux-mêmes sont nulles et non avenues et conduisent d’abord à leur faire dire ce que nous voulons) ; nous savons qu’il est absurde de diviser la réalité historique entre un monde d’apparences fallacieuses et une réalité vraie strictement dissimulée ; nous voyons bien qu’il est faux de penser qu’un système de liens occultes unit tout ce qui arrive dans les affaires humaines ; si cela était le cas, la réalité serait autrement mieux ordonnée qu’elle ne l’est !

    La baudruche dégonflée

    Ce préambule me semble nécessaire pour envisager, justement avec bon sens, le récit pseudo-historique de Morvan et de ses sources. Je dis d’emblée que je ne chercherai nullement à me faire passer pour un spécialiste de l’histoire des institutions européennes et donc de la charte, et je me suis contenté de confronter ce récit avec des informations immédiatement accessibles sur le Net et en bibliothèque. Je sais que cela, évidemment, me discrédite d’emblée ; pourtant la seule manière de contrôler l’information lorsqu’on est un citoyen lambda, aujourd’hui, c’est de faire tourner son moteur de recherche, de consulter les ouvrages inaccessibles en ligne et de faire travailler sa jugeote.

    Ce que j’ai pu, et que donc chacun peut constater :

    1- Bien que la FUEV/UFCE/FUEN comporte dans son histoire des éléments pour le moins gênants et troublants, son assimilation pure et simple à une confédération de groupes d’extrême droite pangermaniste n’est pas possible, à aucun moment de son histoire (à commencer par sa fondation en 1949 par le breton Joseph Martray).

    2- Il est impossible de soutenir que la Charte a été rédigée par la FUEV, même si certains de ses membres composaient le comité d’experts qui en a produit la première mouture [5]. Tous les textes faisant sérieusement l’histoire de la Charte insistent sur les nombreux et radicaux remaniements dont elle a fait l’objet entre 1989 et 1992 par d’autres intervenants : experts et élus.

    3- le texte de la Charte, tel qu’il se présente à la signature et à la ratification, est étranger à une quelconque idéologie ethniciste ; du reste on y chercherait en vain le mot d’« ethnie ».

    4- A cela, il faut aussi ajouter, par simple rigueur et honnêteté, que l’assimilation de la notion d’ethnie à celle de race n’est effective que dans l’une des définitions possibles du terme, et c’est en opposition totale avec celle-ci que la plupart des mouvements en faveur des langues et cultures minoritaires qui parlent d’ethnie et d’ethnisme, le font aujourd’hui. Je le dis d’autant plus volontiers que je ne me retrouve absolument pas dans une conception ethniste ou ethniciste de l’Europe, de quelque façon que l’on définisse les termes.

    5- Enfin, comme l’ont montré divers analystes, la Charte ne reconnaît nullement des droits collectifs aux locuteurs des langues minoritaires (et là, bien sûr, ce n’est pas seulement la logique complotiste qui se nourrit de cette pseudo-évidence qu’il s’agit de mettre en cause, mais d’abord le raisonnement juridique sur lequel s’est appuyé le Conseil Constitutionnel en 1999).

    FUEV/ UFCE/ FUEN

    Je ne peux ici développer point par point ; ce serait une tâche nécessaire mais trop considérable. Il ne me semble pas qu’il existe de travaux d’histoire digne de ce nom en français sur l’histoire de la FUEV (je n’ai pu consulter celui, en anglais, du danois Jørgen Kühl: The Federal Union of European Nationalities. An Outline History 1949-1999, 2000, que la BNF ne possède pas). Ce que je vois en tout cas, c’est que les fédéralistes bretons Joseph Martray et Pierre Lemoine qui ont participé à sa création, gravement mis en cause par Morvan et La Libre Pensée, furent des résistants reconnus et médaillés. Il n’en demeure pas moins que la FUEV présente en effet des éléments compromettants dans son histoire ; le fait que sa revue (Europa Ethnica, créée en 1961) entretienne une relation assumée à ses débuts avec Nation und Staat, une publication antisémite compromise avec le nazisme qui a paru jusqu’en 1944. Cela est mentionné aussi dans la notice Wikipedia en allemand sur la revue, qui insiste par ailleurs sur le contenu irréprochable de la revue actuelle. Pourtant, selon un ouvrage cité par deux députées allemandes du parti des Verts (Die Grünen) [6], Annelie Buntenbach, Angelika Beer, qui ont mis en cause la FUEV au Bundestag en 1996 dans un texte que l’on peut lire en ligne (avec les justifications du Bundestag dans son choix de reconnaître la FUEV), certains de ses membres dirigeants et auteurs de la revue auraient encore, au moins jusque dans les années 1970, assumées des idées racialistes (un exemple de présentation du type racial des basques est donné par les auteures) et entretenu des liens avec l’extrême droite.

    Quant à la FUEN d’aujourd’hui, possédant un statut consultatif à l’ONU, elle est composée de groupes qui paraissent pour la plupart de centre droit (plusieurs sont membres du Parti populaire européen) et de droite, mais a priori non d’extrême droite (sous réserve d’inventaire). A noter que deux groupes représentants des communautés Roms (autrichien et allemand) en font partie (Kulturverein österreichischer Roma et Zentralrat Deutscher Sinti und Roma) [7]. La notice Wikipedia (Union fédéraliste des communautés ethniques européennes) en français est aujourd’hui toute à charge et elle n’offre guère de garantie ; il est surtout intéressant d’en lire la page de discussion.

    Je note aussi qu’aucun des groupes et partis de la fédération Régions et peuples solidaires, de sensibilité de gauche et dont la place dans les revendications linguistiques en France est des plus importantes, n’en fait partie ; il convient donc d’éviter toute forme d’amalgame de ce côté-là. D’ailleurs, malgré la nationalité de ses fondateurs, les associations françaises affiliées à la FUEN sont bien rares et de peu de poids (le Comité d’action régionale de Bretagne, les Flamands du Cercle Michel de Swaen et le groupe Elsass-Lothringischer Volksbund).

    La conclusion est que l’on doit ici laisser ouverte la discussion sur l’histoire de la FUEN, pour laquelle il m’a été impossible de trouver des documents non partisans (je ne me suis livré qu’à un premier débroussaillage de sources aisément accessibles), mais dont il y a fort à penser qu’elle présente d’indéniables points noirs. Il est tout aussi important de constater sa quasi absence en France (d’ailleurs aucun document interne n’est en français, ce qui bien sûr accréditera le complot anti-français !).

    Ethnie, notion plurielle et controversée

    Que les membres de la FUEN revendiquent, ou du moins utilisent volontiers et constamment la notion d’ethnie, cela est incontestable (elle se définit elle-même comme « the umbrella organisation of the autochthonous, national minorities and ethnic groups in Europe »), mais il faudrait avoir ici, à ce sujet, une discussion approfondie. Dire que l’ethnie n’est rien d’autre qu’une façon pudique de parler de la race (et en effet tel était le sens originel de la Völkstum allemande) est une fausseté et le renvoi de Morvan à un article de Bourdieu de 1980 est tout à fait insuffisant ; notre sociologue n’avançant cette assertion on ne peut plus discutable qu’au détour d’une parenthèse dans un texte par ailleurs fort intéressant (et méritant largement la discussion), (« L’identité et la représentation, éléments pour une réflexion critique sur l’idée de région », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 35, novembre 1980).

    Je ne suis pas sûr que les multiples composantes de la FUEN présentent une conception unifiée de l’ethnicité, c’est même peu probable, mais dans leur Charte pour les minorités nationales autochtones en Europe, que l’organisation présente comme son texte fondamental, est affirmé le principe selon lequel l’appartenance à une « minorité nationale » (qui est dans les textes de la FUEN une expression plus ou moins synonyme de « groupe ethnique »), est une affaire de « liberté individuelle », ce qui me semble d’ailleurs poser un problème de cohérence, car l’appartenance ethnique, quelle définition que l’on donne de l’ethnie, paraît bien être une donnée collective qui s’impose aux individus ; mais visiblement la FUEN s’est adaptée elle aussi à l’individualisme contemporain, fût-ce au prix de quelque contradiction.

    Certes, l’ethnie a longtemps servi de synonyme pour désigner la race ou pour nommer des caractéristiques sociales et culturelles dépendantes de la race, et son usage colonial n’est pas très loin de cette conception raciale, qui oscille entre un sens biologique et celui de nation vouée à demeurer subalterne. On peut d’ailleurs remarquer qu’il est encore très fréquemment utilisé, avec ce sens là de « nation au rabais », dans un contexte non européen, par ceux qui poussent des cris d’orfraie contre son usage dans nos contrées (ce qui en dit long sur la permanence du réflexe colonial). Mais le terme reçoit en anthropologie des acceptions différentes, étrangères à tout essentialisme, et renvoyant principalement à la revendication par une société donnée d’une identité de groupe (voir à ce sujet la très intéressante mise au point critique de Mariella Villasante Cervello et Christophe de Beauvais,Colonisations et héritages actuels au Sahara et au Sahel : problèmes conceptuels, état des lieux et nouvelles perspectives de recherche, XVIIIe-XXe siècles, L’Harmattan, 2007).

    En fait, dans le cadre européen, le concept d’ethnie est surtout associé à la question du fédéralisme. Comme l’a montré Henri Giordan dans un article qui mérite le détour (« Fédéralisme et minorités nationales en Europe ») : « le fédéralisme dit “intégral” ou proudhonien en Europe trouve ses origines dans le personnalisme, philosophie élaborée et diffusée notamment pendant les années trente, par les fondateurs et collaborateurs de la revue Esprit, parmi lesquels Alexandre Marc, Emmanuel Mounier, Denis de Rougemont. Ce renouveau n’est en aucune manière lié au totalitarisme nazi comme le sous-entendent certaines polémiques récentes. » Cette pensée opposait aux dérives totalitaires des grands États nations centralisées, un fédéralisme d’unités autonomes plus restreintes : régions et ethnies. C’est dans cette lignée que se situe le fédéraliste Guy Héraud, avec son Europe des ethnies (1963) où, foncièrement, le mot d’ethnie renvoie à la communauté linguistique et est étranger à toute forme de définition biologique. C’est de Héraud, avec lequel il correspondait, que s’est directement inspiré François Fontan ; mais là où Héraud concevait un emboitement du « monde » (fédéré), de la « région » et de l’ethnie (compétences linguistiques et culturelles), Fontan appelait de ses vœux des micro-(ou macro-)États nations ethniques (au sens des identités linguistiques).

    Ainsi faut-il le dire et le répéter, on peut être totalement opposé comme je le suis à une conception ethnique (au sens de Fontan et de ses quelques disciples, par exemple Ben et les membres du PNO), de l’organisation politique des hommes en société (chaque société dans son petit tiroir national et baignant dans son propre jus linguistique et culturel), mais il faut au moins reconnaître que cet ethnisme là n’a absolument rien à voir avec l’ethnicisme racialiste. Évidemment, pour les adeptes du complotisme tout cela revient au même, mais non pour nous, qui usons de notre bon sens.

    En tout cas, force est de constater que, si l’on met à part les tenants de l’ethnisme, nous n’employons jamais dans nos réunions, publications, manifestations le terme d’ethnie, non par dissimulation, mais parce qu’il est étranger à nos représentations et à notre vocabulaire, n’en déplaise à Morvan. On peut lutter pour la reconnaissance des droits des locuteurs de langues minorées, sans être le moins du monde ethniste en aucun sens, ni d’ailleurs (ce qui est tout à fait différent) le moins du monde fédéraliste. Ce serait par exemple faire injure à nos amis proches de l’enseignement de Félix Castan, qui assument explicitement un héritage jacobin en même temps qu’ils sont porteurs de revendications culturelles et linguistiques (ils ne sont certes pas une partie négligeable de nos modestes forces), que de les suspecter de crypto-fédéralisme, comme il est insultant et faux de taxer le mouvement en faveur de la ratification de la charte de crypto-ethnicisme.

    D’autant plus que, concernant la Charte elle-même, à moins d’inventer la présence d’un texte sous le texte, on y chercherait en vain une quelconque allusion à la notion d’ethnie, quelle que soit la définition que l’on en donne, et il est faux de dire que la charte ait été rédigée par des membres de la FUEV, même si certains ont participé à sa première mouture. Le processus de rédaction est décrit dans plusieurs études qui insistent sur les remaniements et les réécritures jusqu’à son adoption en 1992. Je me contenterai de renvoyer ici à l’article déjà cité de Dónall Ó Riagáin et à celui de Ferdinando Albanese, qui a suivi ce processus (« L’Évolution du Droit européen en matière de Droits linguistiques »).

    Droits collectifs ou individuels ?

    En fait, ce qui impliquerait au premier chef le concept d’ethnie, ce qui en trahirait la présence subliminale dans la Charte, serait les droits collectifs spécifiques qu’elle reconnaîtrait aux groupes de locuteurs ou minorités linguistiques. C’est l’interprétation du terme de groupe que fait par exemple le Conseil constitutionnel français en affirmant, contre la lettre du texte, que les groupes sont définis « par une communauté d’origine, de culture, de langue ou de croyance ». C’est d’ailleurs une telle communauté de langue qui est invoquée lorsqu’est affirmé que le français est la langue exclusive de la République (art. 2) et, comme Giordan l’a remarqué, il y a bien là une ethnicisation spontanée de la nation, qui s’éprouve dans l’exclusion (parce que soi-disant ethnique !) de toute revendication d’une reconnaissance de la diversité linguistique nationale. En fait, la notion de groupe de locuteurs, ni d’ailleurs celle de minorité, n’implique celle d’ethnie (même si l’on parle souvent, de manière abusive, de « minorités ethniques »), mais il est de toute façon erroné d’affirmer que la charte reconnaît des droits collectifs spécifiques.

    Albanese rappelle dans son article que la Charte « vise la langue et non le groupe social qui la parle. C’est la langue dans sa dimension culturelle, comme partie intégrante d’un patrimoine –régional, national, européen– qu’il s’agit de préserver, non comme véhicule d’une d’identité ethnique. Le concept même de “minorité linguistique” n’apparaît pas dans la Charte et l’expression “langue minoritaire” se réfère à une notion de fait et non juridique ou politique : une langue est minoritaire lorsqu’elle est parlée par un nombre de personnes “numériquement” inférieur au reste de la population ». Ne prenant en vue que les langues, la charte ne confère donc « ni des droits individuels ni des droits collectifs mais propose, dans chaque domaine où la langue est utilisée (enseignement, justice, autorités administratives et services publics, médias, activités et équipements culturels, vie économique et sociale), des mesures concrètes et précises sous forme d’options ».

    Mais la langue évidemment n’est rien sans ses locuteurs, et une langue ne saurait être un sujet de droit. Aussi, très logiquement, la charte s’accompagne-t-elle d’une Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, que la France refuse de signer (47 pays l’ont fait et la France est donc l’un des seuls à s’en être dispensée). Ce texte implique, nous dit Morvan, la reconnaissance de droits collectifs et d’abord de la validité juridique de la notion de minorité, exclue en France. Pourtant, l’on peut produire une définition purement factuelle (quantitative) de ce que l’on entend par minorité et surtout, comme le montre encore Henri Giordan (dans le même article sur le fédéralisme déjà cité), opter pour une interprétation en termes de droits individuels et non collectifs.

    Giordan ne produit pas cette lecture par opportunisme, mais pour des raisons politiques et philosophique de fond, qui l’opposent à l’ethnisme « linguistique » : « Les conceptions développées dans le souci de sauvegarder des langues ou des cultures menacées par un recours aux droits collectifs entraîneraient la création de réserves linguistiques dont la fonction est pour le moins discutable. Elles méconnaîtraient, en réalité, la dynamique même de la vie des minorités et des exigences de la création culturelle. » Aussi s’agit-il plutôt de « définir des droits individuels afin que chaque individu ait accès à la langue ou à la culture de son choix ». Il s’appuie sur Habermas qui, dans sa discussion avec Charles Taylor, remarque justement que « le point de vue écologique de la conservation des espèces n’est pas transposable aux cultures » : « Les traditions culturelles et les formes de vie qu’elles articulent se reproduisent normalement en convainquant ceux qui les appréhendent et les inscrivent dans les structures de leur personnalité, autrement dit en les motivant à se les approprier et à les développer de manière productive. Tout ce que l’État de droit peut faire c’est permettre cette opération herméneutique de la reproduction culturelle des mondes vécus. En effet, une garantie de survie priverait les membres d’une telle communauté de la liberté même de dire oui ou non qui est, aujourd’hui, nécessaire à l’appropriation et à la conservation de tout héritage culturel » [9].

    Or l’État chez nous, en refusant de signer les conventions et chartes internationales sur les minorités et les cultures minoritaires, et par bien d’autres moyens, loin de favoriser cette « reproduction culturelle des monde vécus », fait tout pour l’entraver, l’empêcher, la rendre impossible ; les miettes qu’il nous accorde, pour ne pas avoir à nous donner de droits, sont pitoyables. Morvan, avec une indécence que seule peut justifier sans doute la conviction du complot, se permet de ricaner sur ces « pauvres “langues régionales minorisées” » et déclare que ratifier la charte reviendrait à « verser des prébendes à des militants de toutes obédiences empressés d’exiger la traduction des textes officiels dans leur idiome ». Cela est stupide et malveillant ; mille mesures sont à prendre pour favoriser une reconnaissance publique des langues minorées avant de traduire « les textes officiels ». Du reste, on aimerait bien savoir ce que Morvan propose et préconise, car son discours ne semble comporter qu’une pars destruens sans jamais s’accompagner d’une pars construens, aussi minime soit-elle.

    La ratification, écartée finalement par Hollande, qui l’avait pourtant promise (refus dont Morvan se réjouit évidemment), serait pourtant une bouffée d’oxygène pour les locuteurs des langues minorées de France, elle apporterait ce minimum vital dont nous sommes privés. Elle aurait pour nous une valeur symbolique forte, et permettrait, loin de la verrouiller, de rouvrir la question du dénombrement et de la promotion culturelle de toutes les langues de France (rapport Cerquiglini). Du point de vue de la place de la France en Europe, cette ratification serait aussi et d’abord la preuve d’un « minimum de cohérence », comme le dit Giordan. Ce dernier en effet, fait remarquer que, « la France ne pourrait même pas poser sa candidature à l’entrée dans l’Union européenne si elle n’en était pas déjà membre ! », puisque « tout pays candidat à rejoindre l’Union européenne doit, simplement pour que les négociations puissent être ouvertes, satisfaire aux critères de Copenhague qui exigent la garantie du “respect des minorités et leur protection” ».

    La théorie du complot ethniste sert en tout cas –sans que l’on puisse certes parler d’un complot concerté !– à cautionner cette situation indécente. Un internaute, dans la ligne de commentaire accompagnant l’article de Morvan, remercie ironiquement l’auteure de lui avoir appris que le « Conseil de l’Europe est une organisation fasciste, raciste et complotiste » et de rappeler que « la quasi-unanimité des États de l’UE (25 sur 27, à l'exclusion de la seule France et de la seule Grèce) sont des États racistes ». On peut en dire autant des 47 pays qui ont signé la convention cadre et de l’ensemble des institutions européennes… Mais pour Morvan et ses amis, les ethnies, les hordes, les tribus sont à nos frontières, voire elles sont déjà dans nos murs ! Cela est tellement absurde que nous nous contenterions d’en rire, si ces idées, hélas, n’étaient aussi répandues dans l’Hexagone, portées par des groupes, associations voire partis politiques de droite et de gauche jouissant des faveurs de l’électorat et des médias. Nous espérons que ce travail, néanmoins, ne sera pas tout à fait inutile. 

    Jean-Pierre Cavaillé, historien, Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS)

    [1] Voir entre autres le compte-rendu critique de Lorraine Millot, paru dans Libération le 3 août 1999, « Frissons allemands », A propros de Yvonne Bollmann : La Tentation allemande, éd. Michalon : « À la première alerte, personne n'avait tellement voulu s'inquiéter. La Tentation allemande d'Yvonne Bollmann est un petit pamphlet tellement outré et loin du réel qu'on croyait bon de ne pas trop attirer l'attention sur lui. Comment en effet prendre au sérieux un livre qui jette d'entrée: “En Allemagne, on attend de la France qu'elle se soumette et se démette”? La thèse qui suit est à l'avenant : l’Allemagne ne rêve que d’“aller s'établir chez les voisins”. Elle exalte l'autonomie des régions et des minorités, en Alsace ou en Europe de l’Est, pour “déstabiliser la France” et ses voisins de l’Est. Son but: “démembrer les Etats actuels” pour mieux faire ressortir sa puissance. L'euro est un de ses instruments “pour faire danser toute l'Europe à l'allemande”. Ces lignes sont critiquées –et Bollmann défendue!– sur une infâme page internet dont le titre est tout un programme : “Touche pas à mon boche” » (site Euroscepticisme.com).

    [2] En particulier voir la description et les analyses de la « méthode » polémique de Morvan par Michel Treguer, Aborigène occidental, Mille et une nuit, p. 266- 272 et 342-387.

    [3] Rien de publié cependant, à ma connaissance. On lira la chronique vraiment indigente de François Taillandier dans L’Humanité du 2 mai dernier (Next language in Europe) auquel a répondu le Réseau Langues et Cultures de France, réponse que le journal a refusé de publier (malgré la proximité idéologique de ce groupe avec le quotidien communiste), mais qui se trouve en ligne, en commentaire de l’article. Voir également la réaction de René Merle sur son blog.

    [4] Morvan, comme beaucoup d’autres, écrit Union fédéraliste des communautés ethniques européennes, mais le site de la FEN, de manière d’ailleurs cohérente avec le sigle dit bien Union fédéraliste des communautés européennes

    [5] Morvan ne donne aucun nom, c’est toujours plus facile de rester évasif. Voici ceux que j’ai trouvés, des personnes ayant formé le premier groupe : Dónall Ó Riagáin, Joan Dorandeu, Yvo Peeters, Durk Gorter, Piero Ardizzone, Bruce Black. Voir, D. Ó Riagáin, La Charte européenne – Vers les Droits linguistiques de la personne humaine (in Para Charta, Direction générale de la culture, ministère de la communauté française, Morcinelle, 2001) ; parmi ceux-ci je n’ai pu identifier que Yvo Peeters, longtemps membre du parti belge flamand Volksunie, qui se déclare ethniciste, mais comme disciple de Guy Héraud et de Fontan.

    [6] Walter von Goldendach, Hans-Rüdiger Minow, Martin Rudig, Von Krieg zu Krieg: die deutsche Aussenpolitik und die ethnische Parzellierung Europas, Berlin, 1996.

    [7] Je lis chez Boissou, sans que la moindre source ne soit citée : « la F.U.E.V. refuse de reconnaître aux minorités turque, kurde, polonaise, Sinti et Roma qui vivent sur le sol allemand, le statut de "minorité ethnique", privant celles-ci du même coup du droit de faire valoir officiellement leurs propres revendications » (ce qui soit dit en passant est assez drôle de la part de quelqu’un qui ne veut justement pas entendre parler d’une quelconque reconnaissance de la notion de minorité nationale). On lit cependant, au sujet des Roms, sur le site de la FUEN une déclaration issue du congrès de 2011 : « Déclaration d’Eisenstadt – Solidarité avec les Roms », qui va dans le sens opposé.

    [8] Henri Giordan, « le Pouvoir et la pluralité culturelle », Hérodote, 2/2002, n° p. 181-182.

    [9] Habermas, Jürgen, « La lutte pour la reconnaissance dans l’État de droit démocratique », in L’intégration républicaine : Essais de théorie politique, Paris, Fayard, 1998, p. 226.

     

    Toponymie corse : Un éclairage très mal venu

    Rédigé par Charles Monti le Dimanche 2 Juin 2013

    Sous le titre "toponymie: un éclairage bienvenu" le site de France-Corse présente un billet signé A. Hurlot-Guiderdoni qui fustige la "frénésie de corsisation" en matière de toponymie ... corse

    L'article considère notamment que les graphies corsisées du type ZICAVU sont "insolites" et "ridicules". Comme il affirme la nécessité de préserver en matière de toponymie l'héritage toscan, on suppose donc qu'il préconise en l'occurrence de maintenir ZICAVO (qui n'a pourtant pas une allure très "toscane" en dehors de la voyelle finale).
    Concernant les (rares) noms de communes "francisés" comme SAINT-FLORENT, l'article ne se prononce pas mais on peut supposer qu'il préconise de le remplacer également par un nom toscan, en s'appuyant par exemple sur l'autorité de Wikipédia: "SAN FIORENZO, francese: Saint-Florent nome ufficiale dal 1848, in còrso: SAN FIURENZU". A moins que français et toscan soient à considérer l'un et l'autre comme politiquement corrects en Corse, la seule langue incongrue étant ... le corse.
    L'article n'évoque pas non plus les noms de lieux-dits ou les microtoponymes, fréquemment francisés dans les lotissements, par exemple "LES AULNES". Là encore on suppose que le nom corse (L'ALZI, qui ne signifie rien en toscan) serait jugé "insolite", et susceptible d'être exclu au profit de "GLI ONTANI", incompréhensible pour les Corses mais moins "insolite" (pour des visiteurs italiens...)
    A l'appui de ses thèses l'article de France-Corse convoque la "contribution fort utile  et à maints égards réconfortante  qu'apporte à la toponymie de la Corse  Mme Stella Medori , maître de conférence en  linguistique à l' université de Corte".
    Il appartient à Stella Medori de dire si sa position a été correctement interprétée par Madame Hurlot-Guiderdoni, qui par ailleurs n'a rien trouvé de mieux pour illustrer son article que de reproduire la couverture de l'ouvrage de Jean Chiorboli "Langue corse et noms de lieux" paru en 2008 chez Albiana.
    Le procédé est pour le moins surprenant, voire malhonnête. En effet il tend à faire croire que cet ouvrage (que Madame Hurlot-Guiderdoni n'a probablement pas lu) apporte une caution aux positions défendues par l'association France-Corse, ce qui n'est absolument pas le cas.
    Jean Chiorboli, Professeur à l'Université  de Corse, se propose donc, après consultation notamment de l'éditeur Albiana, de donner à cette affaire la suite qui convient."

    Un pianu pà a lingua corsa

    Hè sempre in traccia di scrive si u prugettu di statutu di a lingua mossu da l'esecutivu territuriale, chì ne raghjonanu sempre l'eletti, trà elli è cù e strutture cuncirnati, sindicati è associ d'insignanti, associ di parenti è sirvizii di u Statu. Ma, ancu sapendu ch'ellu ne cambiarà dinò calchì parte, si pò aghjà fà u puntu nantu à u so cuntinutu, assai più sviluppatu cà i pochi elementi chì sò intruti u più in a discussione publica.

    omaPrupone u ducumentu di l’esecutivu un istudiu ragiunevule di a situazione, custatendu chì finu ad avà si hè aspittatu tuttu da a scola, puru sapendu ch’ella ùn pò fà tuttu s’ella ùn hè aiutata da una azzione forte pà una prisenza suciale di a lingua : "...prima erani quasgi solu avviati pà a scola, è dinò parchì u dispusitivu ghjuridicu attuali scludi a lingua di unipochi di spazii di sprissioni". Chì l’altru elementu di primura pà i ridattori hè ghjuridicu : una bella parte di a suluzione saria in u cambiamentu di e lege : "una revisioni custituziunali parmittindu à a lingua corsa, lingua di Francia, di dispona di tutti i campi di sprissioni à nantu à u so tarritoriu indrintu à a Ripublica francesi"

    In issa logica, si dumanda ch’ella sia ricunnisciuta a lingua cum’è "l’elementu u più visibuli di l’identità culturali di a Corsica, un mezu di cumunicazioni è di criazioni è ancu un fattori chì favurizighja a cuesioni suciali, a so cunniscenza è u so usu sò i cumpitenzi linguistichi necissarii pà chì l’integrazioni di ugni parsona chì campa à nantu à l’isula si fessi sanu sanu, indrintu à una sucità bislingua, indipindentimenti di a so urighjini". Si prova à tempu à chisià a pulitizazione, signalendu ch’ellu entre u prugettu "in u quadru di un attaccamentu forti à a Ripublica Francesi, una Ripublica mudernizata è sirena in l’avvicinera di a so diversità interna, cunfurmamentu à a norma di u plurilinguisimu". Si trattaria dunque di cuntinuà a dicintralizazione è di fà nasce una ripublica di tippu federale, mancu à pena d’alluntanà si da a Francia.
    Parechji articuli entrenu dopu in i particulari, chì certi anu fattu nasce e riazzione più dure è u bisbigliu. U corsu saria "a lingua di tutti i stituzioni di Corsica è di ugni urganisimu publicu, usata à parità incù u francesi da u Statu è i sirvizii publichi in Corsica, è ancu i impresi è i media stituziunali ; a lingua di a tupunimia ; a lingua di l’insignamentu à cantu à u francesi, in i prupurzioni è sigondu à i mudalità difiniti da l’Assemblea di Corsica". A cuufficialità hè difinita cum’è un dirittu di i citatini, chì"ugnunu t’hà u drittu di cunnoscia i dui lingui ufficiali ; sprima si indifarintimenti è senza una scelta imposta in i dui lingui ufficiali, à l’urali è à u scrittu, in i so rilazioni incù i puteri publichi è in i so atti publichi privati ; essa accoltu in l’una o quidd’altra di i dui lingui ufficiali in i tarmini stabiliti da a prisenti leghji ; ùn subiscia discriminazioni pà via di a lingua ufficiali chì omu usa" .

    L’articulu 6 difinisce u Cunsigliu di a lingua corsa, in fatti aghjà criatu, cum’è "l’auturità linguistica. T’hà in cariga a prumuzioni, l’elaburazioni è a nurmalizazioni di a lingua. Hè cumpitenti pà ciò chì tocca à a  lessicugrafia, à l’unumastica, à a grammatica, à a litaratura è à l’Atlas linguisticu". Issu cunsigliu divintarà ciò ch’ellu ne farà u travagliu di i so membri. Ma hà qualcosa di stranu, chì ùn si currispondenu troppu u travagliu spicializatu chì si ne aspetta è a prisenza in drentu di l’eletti stessi, chì, in una ripartizione trà i gruppi pulitichi, sò stati numinati prisidenti di tutte e cummissione prima ch’elle si fussenu adunite, mentre chì i rapurtori sò universitari. Hè un pocu cum’è sì in Francia u ministru di a cultura si fusse sceltu cum’è sicritariu perpetuale di l’Accademia francesa. D’ogni modu spiremu chì issu cunsigliu a li farà à impone a so lighjittimitai cù u travagliu cuncretu.
     
    L’articulu 7 hà frasturnatu parechji insignanti : ci si  parla di "prugramma cuntestualizati è adattati à a Corsica intigrendu a lingua corsa", è quessa hè una dicisione accademica di l’anni nuvanta, aiutata da parechje publicazione ghjuvative di u CRDP. Ma dopu si vede chì "a CTC t’hà cumpitenza pà l’adattazioni di i prugramma naziunali è di l’urarii pà u prima è u sigondu gradu in u quadru di a so pulitica educativa". Ùn hè mancu à pena a manera di scrive i prugramma in Francia par avà, è si sò viste e riazzione quand’ì a maiuritai di dritta di l’Assemblea naziunale hà dicisu chì i prugramma di storia avianu da fà cunnosce u bè ch’ella avaria arricatu a culunizazione. Sò state forte e riazzione. Ben sicuru, quelli chì scrivenu i prugramma, u ministru di l’educazione i numineghja. Ma dopu ùn ci intarvene più, nè l’Assemblea naziunale hè incaricata di vutà li.
     
    Si parla dopu di giniralizà "un bislinguisimu francesi-corsu incù immersioni generalizati da a scola materna à l’Università". Par avà a forma par immersione, quella di e scole private assuciative Diwan o Ikastolas, chì avia da esse pussibule in li testi Lang di 2001, ùn sò state accittate in u insignamentu publicu da u cunsigliu custituziunale, chì hà cunsidaratu ch’ùn ci pudianu esse scole publiche senza francese à un mumentu di u parcorsu. Quì cum’è par assai pruposte ci vularia u cambiamentu di a Custituzione.
     
    U più chì hà fattu parlà hè l’articulu 9. S’ellu firmessi cum’ellu hè, "i parsunali insignanti è i parsunali amministrativi di i sirvizii accademichi è ancu i parsunali di Statu chì assigurani u cuntrollu pidagogicu sò missi à dispusizioni di a CTC pà via di una cunvinzioni incù u Statu pà l’appiicazioni di l’articulu 7 è di l’articulu 8". I sindicati si pò dì tutti ci sò upposti. È hè vera chì puri lighjendu è rilighjendu i testi un si trova mutivu chì valga par issa misura pà i insignanti più cà par l’altri mistieri. Pensanu forse l’eletti ch’ellu si và troppu pianu in u quadru statale, ma nulla dice ch’ellu si andaria più à a lestra sottu à u soiu u guvernu. Chì sì certi ùn seguitanu l’ordini di u rittore o di u dirittore accademicu, parchè pinsà ch’elli ubbidisciarianu di più à l’esecutivu ? È ci vole à tene à mente chì u statutu di funziunariu di u Statu hè statu in a storia, u più pà i maestri di e scole, una libarazione da u pesu in i paesi di i preti è di i mirrachjoli. Par avà hè statu questu un elementu di ruttura trà a maiuritai di l’eletti è u mezu educativu. Ma forse da issu male pò nasce un bè, chì i sindicati, upposti à issa misura, anu dettu guasi tutti d’esse à favore di u pianu di cuufficialitai in ginirale. Tandu bastaria à caccià issa misura da ch’ellu ùn fermi cà l’accunsentu...
     
    L’articulu 11 ellu dinò hà fattu a paura à parechji, chì privede chì tutti i posti in u insignamentu dumandinu una abilitazione in lingua corsa à u livellu B2, è chì puru l’aspittori di prima è sicondu gradu ùn possinu esse numinati cà s’elli sanu u corsu. Listessa par l’altri funziunari. Quì pare ch’ellu si tratti d’andà in Corsica più luntanu cà in lochi chì sò stati u mudellu di i ridattori di u testu, u Paese bascu spagnolu è a Catalogna, duv’ellu si cerca d’avè in tutti i duminii listessu parcintuale di lucutori cà in a sucitai (mittimu 30 % pà u bascu), mentre chì ind’è noi avariamu un ugittivu di 100%. Ancu sì a misura hà a so logica, ùn si pò riflette senza guardà u statu veru di a lingua in a sucitai : à u cuncorsu di prufissori di e scole bislingu, si ghjunghje ogni annu cù dificultai à ricrutà à tutti i posti, par mancanza di giovani chì sianu à tempu intarissati da issu mistieru, cumpetenti in lingua è cumpetenti in e discipline ch’elli anu da amparà à i sculari. Di sicuru si pò spirà una crescita rigulare di u so numaru, ma ùn si ponu fà i piani di i casamenti fin ch’elle mancanu e petre.
    Dui altri rimarchi, nantu à u cuntestu più cà nantu à u testu. Una nantu à l’universitai chì, in Corsica cum’è altrò, hà una missione doppia : hè un locu di ricerca, è à stu titulu hè lighjittimu ch’elli sianu chjamati i so circadori par valutà a situazione di u corsu in a sucità è in u insignamentu primariu è sicundariu. Ma da una altra banda, hè dinò un locu d’insignamentu, è à stu titulu deve esse valutata ancu ella, chì li tocca à pruduce issi travagliadori cursofuni di dumane mintuvati sopra. È si deve pudè risponde pà u insignamentu supiriore à listesse dumande cà pà u primariu è u sicundariu, masimu trattendu si d’una struttura autonuma chì hà di più libertai d’urganizà si. Prima à livellu quantitativu : quantu sò i scritti in i studii corsi, quantu l’altri studianti chì ricevenu i corsi di corsu, chì ci hè di bislingu in i corsi di i disciplini ? Dopu à livellu qualitativu. Si sà ch’elli passanu certi una certificazione. Ma chì parcintuale trà i studianti scritti ghjunghje à u livellu B2 di u quadru aurupeu, bramatu da u pianu ?
     
    Da rimarcà dinò chì a cullittivitai, chì face i piani trimendi è manda inghjalocu e pruposte par tutta a sucitai, pare di cumandà pocu in casa soia, chì u soiu u situ internet  (http://www.corse.fr) hè monolingu francese, mentre ch’ellu ci si truvava calcosa in corsu anni fà. Qui peut le plus peut le moins, dice u francese.
     
    Lascendu da cantu issi particulari, ci vole à salutà u travaglione fattu da l’eletti, pà u fondu è pà a forma. Chì u dibattitu nantu à a lingua ùn pare più pulitizatu mancu à pena, l’eletti di tutte e tindenze anu sapiutu truvà un accunsentu à prò di u corsu, è sò pronti à raghjunà cù tutte e cumpunente di a sucitai. A dificultai hè chì l’avvene hè ligatu cù una mudifica di a custituzione chì u raportu di forze puliticu naziunale ùn parmette d’esse ne sicuri. In isse cundizione, ci vole omancu à studià un "pianu B" cum’ellu si dice, in casu chì i pulitichi in Parigi ùn avanzinu à a lestra quant’è i nostri.

    Henri Letia

    Copyright Corsica

    Enseignement de la langue corse : Michel Barat "met les points sur les i"

    Publié le 14/01/2013

    (Alex Bertocchini - Alta Frequenza) - Michel Barat a procédé aujourd'hui (lundi) à la traditionnelle conférence de presse de rentrée, un exercice qui vient compléter, car les chiffres sont à présent définitifs, la conférence de presse de rentrée du début d'année scolaire. 260 millions d'euros ont été accordés à l'académie de Corse pour l'année 2012, auxquels il faut ajouter plus de 7 millions d'euros pour l'enseignement privé. Au-delà de l'aridité des chiffres, il faut savoir que presque 95 % de ce budget est consacré à la rémunération de quelques 4 187 emplois.

    Le recteur de l'académie de Corse a également voulu bien mettre « les points sur les i » en ce qui concerne l'enseignement de la langue corse. En effet selon Michel Barat, l'école ne peut pas se substituer à la société toute entière car la sauvegarde d'une langue sort très largement du cadre strict de l'éducation pour aller vers des considérations disons plus sociétales, et ce malgré les 9 millions d'euros injectés chaque année sur cette seule matière. Un rappel des réalités qui prend tout son sens au moment où les instances politiques de l'île planchent avec acharnement sur un nouveau statut pour la langue corse, on pourrait même rajouter sur un nouveau statut tout court.

    Bastia : La majorité municipale adopte la charte de la langue corse

    Les élus ont voté lors de la dernière séance du conseil le rapport autorisant la ratification de cette charte. « Un signe fort d’attachement à la langue » que les nationalistes réclamaient depuis longtemps

    « On aurait pu faire mieux mais c'est tout de même un premier pas et nous sommes satisfaits ». A Bastia, il arrive rarement que le groupe d'opposition et les élus de la majorité tombent d'accord. C'est arrivé pourtant lors de la dernière séance, à propos de la langue corse.

    Le conseil municipal a en effet décidé d'adhérer à la charte. En la ratifiant, le maire, Émile Zuccarelli, souhaite « donner un signe fort d'attachement » à la lingua nustrale.

    C'est par un vote unanime intervenu le 1er juillet 2005 que l'assemblée de Corse a élaboré ce document dans le cadre d'un plan stratégique d'aménagement et de développement pour la période 2007-2013. De nombreuses communes l'ont adopté dans l'île et du côté de la municipalité bastiaise, l'engouement n'était pas de mise au départ : « Nous avons été parmi les premiers à demander au conseil municipal de la ratifier et nous avons dû revenir à plusieurs reprises à la charge, reconnaît Fabienne Giovannini, membre du groupe d'opposition Inseme per Bastia. Nous avons toujours expliqué que la langue représente pour nous un facteur d'union et d'intégration au sein de la société corse ».

    Une commission pour l'étude de sa mise en œuvre a donc été créée à Bastia et elle s'est réunie pour la première fois au mois de novembre 2011, et à de multiples reprises depuis. Au terme de ces échanges, il a été décidé d'accepter quinze des vingt-neuf actions prévues pour atteindre le niveau II (sur III) de la charte.

    Suivi et obligation de résultats

    Cinq d'entre elles ont un caractère obligatoire et astreindront la collectivité à disposer de papier à en tête, de message d'accueil de répondeur, d'une signalétique externe et directionnelle, de cartons d'invitation, le tout en français et en corse.

    Par ailleurs, la commission a accepté une dizaine d'actions facultatives.

    Elles intègrent le bilinguisme par exemple sur les cartes de visites des élus, l'éditorial du journal de la ville, les invitations pour des manifestations organisées par la collectivité.

    Des actions de formation professionnelle devront aussi être proposées et un élu sera désigné comme référent pour la mise en œuvre de la charte. La création artistique n'est pas oubliée et une politique d'aide spécifique concernant la langue corse devrait être engagée.

    Les élus du groupe d'opposition espèrent maintenant une mise en œuvre rapide de l'ensemble de ces actions : « Il faut que les choses aillent vite à présent car c'est vrai que nous avons perdu du temps. Aujourd'hui, Bastia ratifie la charte de langue corse tandis que l'assemblée régionale s'engage beaucoup plus loin avec la co-officialité ! Nous aurions pu faire largement plus mais c'est déjà pas mal d'avoir pu atteindre le niveau II de la charte. Un suivi de l'ensemble des actions est prévu et il y a aussi une obligation de résultat », note Fabienne Giovannini.

    Avec cette décision prise en cette fin d'année, Bastia rejoint d'autres collectivités ou organismes qui avaient déjà franchi le pas : CNFPT, Ligue corse d'échecs, SCB, ACA, l'Agence du tourisme, Cadec, l'entreprise Vito...

    topo

    10 décembre 2012

    U cunsigliu di a lingua corsa: une nouvelle étape franchie

    Par Dumenicu Armani

    Politiques et universitaires seront ici sollicités pour permettre à la langue corse de continuerson évolution entamée depuis plusieurs années. Un dictionnaire officiel verra également le jour

    La fête de la Nation corse se déroulait samedi un peu partout dans l'île. Mais c'est sans nul doute à Corte que celle de la langue corse a eu lieu. D'ailleurs, d'un commun accord, tous les participants au lancement du conseil de la langue corse s'accordent à souligner l'importance de l'événement. Au terme de discours inauguraux, in lingua nustrale pour l'occasion, c'est dans un contexte de coofficialité - qui a d'ailleurs également été abordée - que le lancement de la commission a été acté. « C'est quelque chose qui nous manquait, se réjouit Pierre Ghionga, conseiller exécutif. Nous voulons parvenir à impliquer toute la société corse ».

    Au cours du discours inaugural, Dominique Bucchini, président de l'assemblée de Corse a rappelé la nécessité de « maintenir une société bilingue, et même de la développer. La langue représentant une part fondamentale de notre identité et notre patrimoine ». Différentes commissions entreront immédiatement en jeu. Pour un aspect à la fois pratique et scientifique. « Ce conseil doit être le bras de l'assemblée », n'a pas manqué de souligner Paul Giaccobbi, président du conseil exécutif de Corse.

    « Tout le monde est représenté »

    Une volonté de réappropriation par l'ensemble de la société insulaire. « Tout le monde ici est représenté, précise Pierre Ghionga.

    « À travers ces six commissions qui ont vu le jour, nous pourrons traiter différents aspects de la langue. Nous allons travailler, entre autres sur la lexicologie, la toponymie. Et même si je n'apprécie pas particulièrement ce terme, un dictionnaire officiel verra le jour ».

    Et Jacques Thiers de renchérir : « C'est une très bonne chose pour l'université d'être associée à ce conseil. Je dirai toutefois que ce nouvel outil s'inscrit dans la continuité d'anciens combats menés depuis bien des années déjà. Cette association entre politique et universitaire avait déjà été mise en place au cours d'un conseil scientifique que je présidais. Ce sont deux champs qui ont tout intérêt à se connaître, à se fréquenter et à échanger ».


    Les différentes commissions :

    La commission éducation : présidente Viviane Biancarelli, rapporteur Pascal Ottavi. La commission pour la toponymie : président Antoine Sindali, rapporteur, Stella Medori. La commission pour la promotion de la langue dans les médias et dans la création : président Antoine Orsini, rapporteur Pascal Ottavi. La commission pour la littérature corse : président Jean-Guy Talamoni, rapporteur Eugène Gherardi. La commission sociolinguistique : présidente Mattea Lacave, rapporteur Romain Colonna. La commission pour la terminologie de la langue corse : président François Tatti, rapporteur Alain di Meglio.

     

    7 Novembre 2012

    De la passion et des idées pour sauver la langue corse

    La coofficialité, l’enseignement et l’impérieuse nécessité d’en décomplexer l’usage ont été au cœur du débat lors de l’enregistrement de l’émission Place publique qui sera diffusée aujourd’hui sur RCFM

    Elle a longtemps été un motif de discorde. La source de débats houleux. Et parfois même la cause d'affrontements entre ceux qui en avaient fait le fer de lance de la revendication identitaire et d'autres qui ne voyaient en elle qu'un foyer potentiel de subversion. Il y a encore 20 ans, la question de la langue corse divisait la société insulaire. Aujourd'hui, elle suscite certes toujours autant de passion. Mais, elle est indéniablement devenue le sujet qui rassemble. Et si les voix ne sont pas toutes concordantes, il ne viendrait plus à l'idée de personne de contester l'impérieuse nécessité de la sauver.

    Comme on s'y attendait, l'enregistrement, lundi soir, de l'émission Place publique a rempli l'espace culturel Natale-Luciani, sur le campus universitaire de Corte. Cet état des lieux préalablement dressé a largement transpiré durant une heure et demie. Face à un auditoire qui regroupait diverses sensibilités et pratiquement toutes les tranches d'âges, trois interlocuteurs : Pierre Ghionga, conseiller exécutif chargé de la langue corse, Jean-Marie Arrighi, son homologue à l'Académie et Michele Leccia, président du collectif Parlemu Corsu. C'est à eux qu'incombait la tâche d'ouvrir et d'alimenter un débat animé par Noël Kruslin pour notre titre et Patrick Vinciguerra pour RCFM.

    Des avancées notables mais ...

    Et si ces derniers ont pris la peine de préciser que ceux qui le souhaitaient pouvaient s'exprimer en français, c'est essentiellement in lingua nustraleque les échanges ont eu lieu.

    À la question du jour « Comment sauver la langue corse ? »chacun a tenté d'apporter sa contribution de manière constructive. En partant d'un premier constat : les mentalités ont considérablement évolué. Et sur le terrain, les avancées sont notables. Création de la direction de la langue corse à la CTC et mise en place d'un cunsigliud'une cinquantaine de membres ; signature de la charte de la langue par un tiers des communes de l'île, des associations, des entreprises, des clubs sportifs ; progression sensible de l'apprentissage en milieu scolaire qui touche aujourd'hui 88 % des élèves.

    Mais, pour Pierre Ghionga, Michele Leccia, Jean-Marie Arrighi, comme pour la plupart de ceux qui se sont ensuite exprimés dans la salle, ces évolutions, si louables soient-elles, ne suffiront pas à sauver un patrimoine linguistique toujours menacé de disparition.

    Autre constat sur lequel tous les interlocuteurs sont formels : c'est en redescendant dans la rue, en revenant autour de la table familiale, sur le lieu de travail, dans les administrations et les commerces que la langue corse survivra. Et surtout en en décomplexant l'usage dans tous les moments la vie quotidienne et dans tous les espaces communautaires.

    Jean-Martin Mondoloni, seul intervenant à s'exprimer en français lors des échanges avec la salle, a insisté sur cette notion. « Il y a quelques années, la question aurait étéFaut-il sauver la langue corse ? Ce soir, nous sommes là pour réfléchir àComment la sauver ? C'est une progression considérable et c'est tant mieux, car il y a urgence. Dans le monde, une langue meurt tous les 15 jours. Le véritable enjeu aujourd'hui est de faire sortir la nôtre de l'école. Et de l'imposer dans la vie civile. »

    Car c'est tout naturellement autour du statut de coofficialité, présenté dans les grandes lignes par Pierre Ghionga, que s'est orienté le débat. Constituera-t-il une fin en soi ? Ou ne sera-t-il que le premier pas d'un plan plus ambitieux déjà réclamé par les militants du collectif Parlemu Corsu ? Faudra-t-il recourir à un référendum pour l'imposer ? Et surtout, suffira-t-il à sauver une langue qui alimente toujours des débats aussi passionnés ?

    epuru

    Par Isabelle Volpajola (ivolpajola@corsematin.com)
    Publié sur Corse-Matin (http://www.corsematin.com)

    16 mai 2012

    Le 2 juin à Savaggio, Parlemu corsu en porte-parole des écoles immersives

    Par S.O.
    parlemu

    Les membres du collectif Parlemu corsu ont annoncé la venue,
    le 2 juin prochain, d'une délégation de 20 personnes.
    Toutes travaillent pour l'immersion linguistique dans leur région.

    Photo : Jeannot Filippi

    Basques, Bretons, Occitans, Catalans, Alsaciens... Une délégation fera la promotion de l’immersion linguistique dans le primaire. Une expérience menée dans plusieurs régions et des résultats encourageants

    L'association fête, ce mois-ci, ses cinq années d'existence. Voué notamment à la promotion de l'immersion linguistique, le collectif Parlemu corsu franchit un nouveau pas avec l'organisation, le 2 juin prochain, d'une demi-journée dédiée aux expériences des régions qui se sont déjà lancées dans l'aventure.

    « Nous recevrons une délégation de vingt personnes au centre de Savaghju. Ces Basques, Catalans, Occitans, Bretons et Alsaciens font partie de l'institut supérieur des langues de la République française (ISLRF). Ils viendront préciser le fonctionnement des écoles immersives en France, ainsi que les résultats obtenus et l'intérêt pédagogique pour l'enfant », précise Micheli Leccia, porte-parole du collectif. L'après-midi s'articulera d'une conférence et d'un débat sur l'immersion comme nécessité pour la langue : « Nous nous battons pour que cette immersion se fasse dans les écoles publiques. Elle est plus efficace que le bilinguisme qui ne peut être réalisé dans de bonnes conditions même si depuis quelque temps, des avancées ont eu lieu, en particulier au niveau des institutions. Mais cela est encore trop peu pour que la société bilingue que nous souhaitons émerge réellement ».

    « Le français doit être parfaitement maîtrisé »

    La formation des plus jeunes apparaît aux yeux du collectif comme une pierre angulaire dans le processus : « Nous voulons que l'immersion à l'école devienne une réalité pour au moins deux établissements à la rentrée 2013. L'expérience, qui sera réalisée avec des enseignants et des parents volontaires nous apportera déjà de nombreuses réponses. Ce qui est proposé pour le moment, à savoir une « immersion » sur les 3/4 du temps n'est pas suffisant, même si c'est un point de départ. Nous souhaitons que tout ce qui a rapport à l'école soit en langue corse »,poursuit Micheli Leccia.

    À ceux qui craignent de voir le français délaissé, le collectif apporte d'ores et déjà sa réponse. Considérant que la maîtrise du français doit être totale, « il est introduit petit à petit selon les cycles du primaire, de façon à le maîtriser totalement à l'entrée en sixième, un peu à la manière de ce qui existe pour les langues étrangères. L'immersion n'est pas un frein à l'apprentissage du français comme le prouvent les expériences déjà menées sur le continent ».

    Si les responsables de l'ISLRF viennent à Savaggio, c'est notamment pour soutenir la démarche initiée sur l'île, «et nous espérons que les élus et toutes les personnes intéressées par l'immersion, et notamment les enseignants, nous rejoidront pour écouter et débattre. Le rôle du collectif n'est pas de porter entièrement la démarche mais de la soutenir parce qu'elle pourrait servir d'exemple».
     

    Programme :

    A partir de 15h30

    - Retour d'expérience sur le centre de Savaggio

    - Immersion à l'école : l'exemple du Pays de Galles

    - Fonctionnement des écoles immersives en france.

    Résultat et intérêt pédagogique pour l'enfant

    16h30

    Débat : l'immersion, une nécessité pour la langue

    A partir de 19h30

    Repas et animation culturelle avec l'école de chant Music'avvene et l'association Chjam'è rispondi.

    Participation : 10E.

    15/05/2012

    diversite

    09/05/2012

    immersion

    15/04/2012

    imersion

    24/04/2012

    langue

    19/03/2012

    L'Adecec en AG

    adecec

    Simana di a lingua corsa

    A Cullettività Territuriale di Corsica s’impegna à prò di a lingua corsa. Sustene è urganizeghja parechje manifestazione di prumuzione in direzzione di u grande publicu di manera à fà sente, vede è parlà a lingua in tutti i duminii di a vita suciale. 
      
    Prupone a prima « Simana di a lingua corsa » da u 4 finu à u 10 di ghjugnu 2012
      
    E scole, i centri di furmazione, e cumune, l’istituzione publiche, l’imprese, l’associ, e squadre spurtive, tuttu ognunu ci pò participà ! Urganizate una ghjustra, una manifestazione, ghjurnate “porte aperte”, ghjochi, cunferenze, letture publiche o cuncorsi di scritti in prosa o in puesia,  mustrate a vostra azzione à prò di a lingua, opere d’arte,  filmi, musiche è canti… 
      
    I prugetti sottumessi seranu valutati è aiutati secondu a realizabilità di u prugettu, a presenza di i partinariati è i risultati aspettati. Seranu prisentati nant’à l’almanaccu di a simana di a lingua : 
    http://www.corse.fr/linguacorsa

    Pudete telecaricà quì sottu u cartulare di risposta à a chjama. I prugetti sò da rimandà prima di u 30 di marzu 2012.

    http://www..corse.fr/linguacorsa/Chjama-a-prugetti-per-a-simana-di-a-lingua-corsa-2012_a41.php

    scola

    conseil

     


    FESTA DI A LINGUA CORSA IN PORTIVECHJU - TERZA EDIZIONI
    9, 10 GHJUNGHJU 2011 • 9, 10 JUIN 2011
    Porto-Vecchio

    Pà u terzu annu di seguitu, u novi è u deci di ghjunghju a cità di Portivechju, cu i cummuni di u rughjonu, fistighjarani a lingua nustrali.
    Pour la troisième année consécutive, les 9 et 10 juin la Ville de Porto-Vecchio avec les communes de l'Extrême sud fêteront notre langue.

    Après le succès des deux premières éditions de la fête de la langue corse, la Ville de Porto-Vecchio a souhaité associer à cet évènement les communes de l'extrême sud qui ont répondu « présent » à l'invitation.
    Le centre ville sera donc les 9 et 10 juin, le théâtre d'une manifestation pluridisciplinaire, où les scolaires pourront s'exprimer librement au travers de divers ateliers.
    Ce rendez-vous ne pourrait avoir lieu sans le concours de l'Education Nationale et sans l'implication des enseignants du primaire et du secondaire.
    Avec le soutien de la Collectivité Territoriale de Corse, la Ville de Porto-Vecchio s'investit pleinement dans la mise en valeur de son patrimoine linguistique et culturel.

    A vulintà e u piacè di tutti, d'adunisciasi pà sa terza manifistazioni, apri a strada a a sparghjera di a noscia lingua.

    Les jeudi 9 et vendredi 10 Juin 2011, de 9h30 à 11h30 et de 14h30 à 16h30, A Festa di a Lingua Corsa, investira le centre ville de Porto-Vecchio. Les écoles primaires et secondaires de la commune seront rejointes par les communes de Lecci, Serra di Ferro, Sainte Lucie de Porto-Vecchio, Conca et Bonifacio.

     

    parlemu

    parlemu

    11/03/2011

    parlemu
    07/03/2010

    langues langues

    22/7/2008

    Reconnaissance des langues régionales : c'est fait !

    Parmi les articles modifiés soumis au vote du Congrès, l'article 75.1 : "Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France".

    Après un dernier barrage des sénateurs, qui par 216 voix contre 103 avaient supprimé la référence aux langues régionales, le texte a finalement été intégré à la Constitution.

    26/5/2008

    Reconnaissance des langues régionales : enfin !

    Par le biais d'un amendement au projet de loi sur la réforme des institutions, l'Assemblée Nationale a voté à une très large majorité len faveur de la reconnaissance des langues régionales dans la Constitution. Quelle que soit l'issue du débat en cours sur la réforme de la Constitution, plus ne sera jamais comme avant

    Les opposants à une telle reconnaissance y ont toujours vu un risque pour l'unité du pays, se réclamant - quelque peu abusivement - de l'’héritage de 1789, alors que cette vision date surtout de la IIIe République. 

    Ci-après le communiqué de Sylvain Ettori, Président de la Maison de la Corse
    Renseignements : contact@maisondelacorse.org - www.maisondelacorse.org

    La Maison de la Corse se réjouit du vote à l'Assemblée Nationale aujourd’hui 22 mai, d’'un amendement au projet de loi sur la réforme des institutions visant à inscrire la reconnaissance des langues régionales dans la Constitution. Il s'agit là d'une revendication déjà ancienne, portée par la Maison de la Corse, comme par d'autres associations militantes pour la langue corse. Le vote d'aujourd'hui manifeste que ces voix diverses mais concordantes ont été enfin entendues.

    Une initiative validée à la quasi-unanimité par les parlementaires, qui annonce peut-être des évolutions législatives futures et surtout la ratification de la Charte Européenne des Langues Régionales. Nous n'avons pas à préjuger du résultat final du débat général sur l'ensemble de la réforme proposée, mais le vote massif d'aujourd'hui est le signe qu'en tout état de cause, la question des langues régionales a été prise en compte. La Maison de la Corse apprécie cette rupture des parlementaires avec l'’interprétation rigide et intransigeante des textes qui a prévalu jusqu’alors en la matière.

    L'’Histoire et la place des langues régionales font partie des questions dont l'évocation dans le débat hexagonal suscite des réactions souvent épidermiques. Les détracteurs d’'une reconnaissance des langues régionales voient dans les revendications linguistiques un risque d’'affaiblissement de l’unité nationale. Les partisans de cette vision qui lie intimement, et de façon fort discutable, unité politique et homogénéité culturelle, se réclament souvent de l'héritage Républicain de 1789. L'analyse historique confirme que la légitimation par l’'héritage des Lumières d’une politique linguistique particulièrement rigide est spécieuse. La politique linguistique conduite dans les années qui ont suivi la Révolution n'’était pas seulement accommodante, elle tendait même à favoriser l’'expression de la diversité linguistique locale.

    Comment pouvait-il en être autrement ? Quand on sait que Pasquale Paoli fut élu à Orezza le 9 septembre 1790 Président du Directoire Départemental et Général de la Garde Nationale. On voit mal le père de la Constitution Corse brimer sa langue maternelle. Sous la Troisième République, ont été conduites des politiques particulièrement sévères et injustifiées à l’'encontre des langues régionales, qui trouvent leur épilogue ce jour. On sait aujourd’hui que les identités sont superposables, et ce sans exclusive. Une motion a d'’ailleurs été proposée à l’'Assemblée de Corse, pour enseigner dès le primaire la langue corse, le français et l’'anglais. Dans un contexte de mondialisation, la capacité des individus à pouvoir aisément et rapidement raisonner à des échelles différentes et à les mobiliser simultanément est un atout précieux. C'’est un facteur de stabilité et la garantie de repères dans un contexte de mutation accélérée des territoires. A ce titre, la revendication d’'une reconnaissance des langues régionales n’'est pas un combat d’'arrière-garde ou le fruit d’'une volonté passéiste mais s’'inscrit bien dans la modernité.

    Les langues, fussent-elles régionales, participent à l’'identité et à la culture d’une région. Ce postulat constitue un motif déjà suffisant de sa protection et de sa reconnaissance. La révision constitutionnelle introduite en 1992 est venue implicitement consacrer cette conception pour le moins monolithique conduisant à refuser de reconnaître de façon satisfaisante la place des langues régionales. C’'est ainsi que depuis cette date, l’'article 2 de la Constitution précise que ‘’la langue de la République est le français’’. Cette modification dirigée contre l’'usage de l’'anglais dans le contexte de l’'époque n'’en est pas moins un verrou constitutionnel quant à une reconnaissance des langues régionales. Cette disposition pouvait sembler anodine jusqu’à ce que le Conseil Constitutionnel en fasse une lecture particulièrement rigide dans une décision de 1999 au sujet de la compatibilité de la Charte européenne des langues régionales signée par la France à Bucarest cette année-là avec la Constitution.

    Une révision constitutionnelle était donc nécessaire préalablement à la ratification de la Charte. Depuis, le dossier des langues régionales est resté gelé jusqu’à ce que le gouvernement accepte la tenue d’un débat sans vote le 7 mai dernier à l’'Assemblée Nationale. Cette inflexion sensible intervient dans un contexte marqué par la publication le 3 mars 2008 d’'un rapport de l’'ONU à l’'issue de la mission en France d'’une experte indépendante, en septembre 2007.

    Ce rapport relate largement les critiques évoquées plus haut quant à la politique linguistique de la France. Il insiste sur le déclin des langues régionales, faute de statut officiel, et déplore l’'absence de politique cohérente en ce sens ainsi que l’'insuffisance des efforts engagés en renvoyant à la Déclaration sur les droits des minorités de 1992. L'’experte recommande à la France de prendre ses dispositions en vue de ratifier la Charte Européenne. Elle appelle par ailleurs l’'Etat à ‘’favoriser l’'enseignement en langue régionale ou minoritaire, dans les premières années du primaire, pour les élèves qui le souhaitent.’’

    Le contexte de l’'inflexion de la position gouvernementale constitue une opportunité de mettre fin à une exception française qui n’'est plus acceptable. La Maison de la Corse toujours plus présente au sein du ‘’réseau corse’’ (www.maisondelacorse.org), félicite tous ceux qui se sont engagés dans cette entreprise, tout en rappelant que quel que soit l'intérêt des proclamations de principe, il reste à trouver des applications concrètes. Nous savons qu'un texte de loi doit être élaboré en prolongement du débat du 7 mai à l'Assemblée et du 13 au Sénat. Le vote d'aujourd'hui vaut bénédiction constitutionnelle pour un tel texte. Il reste à le mettre en forme, par un travail sérieux de réflexion et de consultation des associations représentatives de la langue corse comme des autres langues concernées.

    Sylvain Ettori

    Reconnaissance des langues régionales : le débat

    A verser au débat : non pas les pitoyables interventions de Michel Charasse ou d'Angelo Rinaldi, mais celle, plus argumentée, mais tout aussi criticable, de Jean-Luc Mélenchon devant le Sénat, qui résume la position des "républicains" fiers-d'être-jacobins...


    Le sénateur socialiste Jean-Luc Mélenchon fait partie de ceux qui ont mené le combat contre l’inscription de la reconnaissance des langues régionales dans la Constitution. Il explique ses raisons.

    A vous entendre on a parfois l’impression que vous êtes parti en guerre contre les langues régionales. Vrai au faux ?  

    Faux. Je ne suis pas en guerre contre les langues régionales. Je suis parfaitement conscient de leur contribution au mouvement culturel de la France.

    J’ai fait partie d’un gouvernement, le gouvernement Jospin, qui a pris des dispositions pour généraliser l’enseignement du corse.

    Mais pourquoi alors vous opposez-vous à cette inscription dans la Constitution ?

    Je m’oppose tout simplement à cette inscription parce qu’elle rendrait possible l’adoption de la Charte européenne des langues régionales (*). Je sais que tous ceux qui sont pour cette introduction veulent en faire un point d’appui pour la Charte. La plupart des dispositions que contient la Charte sont prévues pour des pays où il existe des minorités nationales. Ce sont des dispositions qui ont été censurées par le Conseil constitutionnel car il a considéré qu’elles attentaient à l’indivisibilité de la République. C’est sur ce point que se concentre mon rejet. Je rappellerai par ailleurs qu’on applique déjà la plupart des dispositions de la Charte.

    Plusieurs parlementaires socialistes, dont la plupart des Bretons, déplorent le «conservatisme exacerbé» de certains de leurs collègues. Vous sentez-vous visé ?

    Non. Si pour eux l’adoption de la Charte était un progrès, cela veut dire que l’on ne parle déjà plus la même langue. S’ils sont d’accord avec l’obligation de traduire en breton un contrat de travail, c’est que l’on n’a pas le même souci du principe d’égalité.

    Mais une langue minoritaire ou régionale peut-elle vivre si elle n’a pas de statut ?

    La langue bretonne n’est pas sans statut car elle est reconnue par la loi et enseignée. Le Conseil régional de Bretagne a d’ailleurs décidé de la situer à égalité avec le français. Par ailleurs, personne en France ne subit de discriminations du fait de son parler.

    (*) La Charte européenne des langues minoritaires ou régionales a été adoptée en 1992 par le Conseil de l’Europe. Elle vise à protéger et favoriser ces langues par une sorte de discrimination positive. Quatre pays ne l’ont pas ratifiée : la Grèce, le Portugal, la Belgique et la France.


    L'intervention de Jean-Luc Mélanchon devant le Sénat :

    "Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en montant à cette tribune, je suis persuadé que, quels que soient les points de vue que vous exprimez sur ce sujet, tous ici vous vous sentez aussi patriotes que moi-même, aussi attachés à l’unité et à l’indivisibilité de la République française que je le suis et dignes continuateurs du progrès constitué par l’ordonnance de Villers-Cotterêts : ce texte a établi le français comme langue du royaume, permettant à chacun de se défendre, de témoigner, d’attaquer en justice et d’être compris par les autres.

    Mais l’homme qui s’exprime en cet instant, fier d’être jacobin, ne parlant que la langue française pour s’adresser à vous ou bien l’espagnol, langue de ses grands-parents, et qui, s’il devait apprendre une autre langue, choisirait l’arabe, langue minoritaire la plus parlée dans la région d’à�le-de-France dont il est l’élu, ne vient pas devant vous pour discuter de la question de savoir si l’on est pour ou contre les langues régionales – ce qui est absurde – ou, pire encore, si l’on est pour ou contre la diversité culturelle : il s’agit de savoir si le cadre légal existant est adapté, car il en existe déjà un, ou si la France a besoin de ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires pour faire progresser la diffusion de celles-ci.

    Pour ma part, je n’accepte pas la caricature qui voudrait faire croire que la République française réprime ou méprise les langues régionales. Ce n’est pas vrai ! La France s’est dotée dès les années cinquante d’un cadre législatif très favorable aux langues régionales ; elle était même en avance sur beaucoup de pays d’Europe à cet égard.

    La loi du 11 janvier 1951 relative à l’enseignement des langues et dialectes locaux, qui porte le nom du socialiste Maurice Deixonne, a officiellement autorisé et favorisé l’apprentissage des langues régionales de France dans l’enseignement public : le basque, le breton, le catalan et l’occitan, auxquels se sont ajoutés ensuite le corse en 1974, le tahitien en 1981, et quatre langues mélanésiennes en 1992. De sorte qu’aujourd’hui, et depuis 1970, tous les élèves qui le souhaitent voient ces enseignements pris en compte pour l’obtention du baccalauréat.

    La loi Toubon de 1994 a confirmé ce cadre légal favorable et Lionel Jospin, par la loi du 22 janvier 2002, a mis des moyens particulièrement importants à la disposition de l’enseignement de la langue corse, si bien que quiconque le veut peut suivre un enseignement en corse à l’école, au collège et au lycée, à raison de trois heures par semaine.

    L’état a aussi contribué, en lien avec les collectivités locales qui le demandaient, à rendre possibles les signalisations routières bilingues, ce qui permet, dans certains départements, de pouvoir enfin lire les indications rédigées en français, qui étaient jusque-là surchargées de graffitis. Par ailleurs, de nombreuses régions font preuve d’innovation pour favoriser le développement des cultures et des langues régionales.

    Par conséquent, rien dans le cadre légal et réglementaire actuel, ni dans la pratique effective, n’est de nature à brider la pratique et la transmission des langues régionales. Et il n’existe pas une voix en France – pas même la mienne ! – qui s’oppose à ce que soient pratiquées les cultures ou les langues régionales. Si le nombre de locuteurs diminue et si leur à�ge moyen s’élève, il faut en chercher la cause ailleurs que du côté de la République et de la loi !

    La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires n’est pas un remède acceptable. Elle est loin de faire l’unanimité en Europe. Contrairement à ce que l’on entend souvent, trop souvent, la France n’est pas l’un des « rares » pays européens à ne pas avoir ratifié cette charte. Quatorze pays membres du Conseil de l’Europe ne l’ont pas signée, dont la Belgique, le Portugal, la Grèce ou l’Irlande, qui ne sont pas des états réputés liberticides. Je pense que personne ici n’a l’intention de comparer le comportement de la République française, quels que soient ses gouvernements, à ceux des gouvernements des pays baltes qui, eux, procèdent à une revanche linguistique à l’égard des russophones.

    Parmi ceux qui ont signé cette charte, comme la France, dix états ne l’ont pas ratifiée, dont l’Italie. Au total, vingt-quatre pays membres du Conseil de l’Europe se refusent donc à rendre applicable cette charte sur leur territoire. Cela peut être attribué non pas exclusivement à leur mépris pour les langues régionales minoritaires, mais probablement à d’autres causes ; j’évoquerai l’une d’entre elles tout à l’heure. La France est donc loin de constituer un cas particulier.

    La France applique déjà beaucoup d’articles de la charte sans avoir besoin de la ratifier. Vous savez qu’il existe deux types de dispositions : les préconisations impératives et celles qui sont optionnelles. Un grand nombre de préconisations impératives sont déjà appliquées ; je n’évoquerai, pour l’exemple – je vous en épargnerai la lecture –, que les articles 7-1-f, 7-1-g et 7-2. Parmi les préconisations optionnelles que la France respecte, on peut citer les articles 8-1-b, 8-1-c, 10-2-g.

    Il n’est donc pas vrai que nous ayons besoin de ratifier la charte pour en appliquer les dispositions qui ne sont pas contraires à notre Constitution, et c’est de celles-ci qu’il faut parler !

    J’ajoute, ayant été ministre délégué à l’enseignement professionnel et ayant eu à connaître de cette question, que la définition des langues minoritaires donnée par la charte est extrêmement discutable et confuse.

    J’observe qu’elle exclut de son champ d’application toutes les langues des migrants – je pense à l’arabe, à la langue berbère et à bien d’autres – comme si les citoyens qui les parlent du fait de leurs liens familiaux, alors qu’ils sont Français, devaient considérer ces langues comme des langues étrangères, comme si l’on demandait aux Algériens, aux Sénégalais, aux Maliens et à combien d’autres de considérer la langue française comme une langue étrangère à leur culture ! (Mme Alima Boumediene-Thiery s’exclame.) Pourtant, c’est ce que fait cette charte !

    Cette définition extrêmement confuse aboutit à ce que certaines langues soient reconnues comme minoritaires dans un pays et ne le soient pas dans l’autre, alors qu’elles sont parlées dans les deux pays dans les mêmes conditions. C’est le cas du yiddish, reconnu comme langue minoritaire aux Pays-Bas, mais pas en Allemagne ou dans certains pays de l’Est où il est tout autant parlé.

    Cette définition très floue peut être, finalement, discriminatoire et elle aboutit à des reconstructions de l’histoire. Je veux bien, chers collègues, que l’on parle de la langue bretonne, mais encore doit-on préciser qu’elle résulte du dictionnaire dit « unifié » de 1942 et qu’elle se substitue aux cinq langues qui existent réellement dans la culture bretonne.

    M. Gérard Le Cam. C’est vrai !

    M. Jean-Luc Mélenchon. à� cet instant, je ne ferai mention ni du fait que l’auteur dudit dictionnaire est un collaborateur des nazis, qui a été condamné à l’indignité nationale, s’est enfui et n’est jamais revenu dans notre pays, ni des conditions dans lesquelles ce dictionnaire a été rédigé et financé à l’époque.

    La définition retenue par la charte aboutirait, par exemple, à des absurdités concernant le créole, et bien injustement. Je me souviens d’avoir demandé, en tant que ministre délégué à l’enseignement professionnel, quel créole on devait enseigner ; j’y étais prêt, car cela facilitait l’apprentissage des élèves. Eh bien, trois ans après, je n’avais toujours pas de réponse, parce qu’il n’y a pas un créole, mais des créoles ! Par conséquent, on est amené à choisir, trier, exclure, discriminer de nouveau au moment où l’on croit intégrer. Ce n’est pas pour rien que nos institutions écartent ce type de charte !

    Enfin, j’aborde ce qui constitue pour moi le cœur du problème. Il ne s’agit pas de dire que la sauvegarde des langues et cultures régionales nous pousse sur la pente qui conduit automatiquement à la sécession, au particularisme et au communautarisme. Telle n’est pas mon intention ! Mais j’ai bien l’intention de dire que le risque existe. Il ne saurait être question, sous prétexte de respect de la diversité culturelle, d’admettre un point en contradiction absolue avec la pensée républicaine : il n’y a pas lieu de créer des droits particuliers pour une catégorie spécifique de citoyens en raison d’une situation qui leur est propre.

    Le fait de parler une langue différente ne suffit pas à instituer des droits particuliers en faveur de ses locuteurs ! Or c’est ce que prévoit explicitement la charte : il s’agit d’encourager la pratique de ces langues « dans la vie publique et la vie privée ».

    S’agissant de la vie privée, je rappelle que le caractère laà�que de notre République interdit que les institutions gouvernementales et étatiques fassent quelque recommandation que ce soit concernant la vie privée des personnes.

    Quant à la vie publique, il est précisé que les états doivent « prendre en considération les besoins et les vœux exprimés par les groupes pratiquant ces langues ».

    à� l’évidence, ce texte a été écrit à l’intention de pays où des secteurs entiers de la population parlent une autre langue que la langue nationale et seulement celle-là, comme c’est le cas des minorités hongroises ou autres, qui existent dans divers pays de l’Union européenne. Mais en aucun cas il n’a été écrit pour la France, car dans quelles conditions peut-on désigner les représentants de ces groupes ? Va-t-on maintenant élire des représentants des locuteurs de telle ou telle langue ? Non ! C’est en totale contradiction avec l’idée d’égalité républicaine !

    Il ne peut être question de faire bénéficier de procédures en langues régionales devant les autorités judiciaires, comme le prévoit l’article 9 de la charte, ou devant les services publics, comme le décide l’article 10. Témoigner, poursuivre en justice, signer des contrats dans une autre langue que la langue française constituerait un recul par rapport à l’ordonnance de Villers-Cotterêts. Pourtant, c’est ce que prévoit cette Charte européenne des langues régionales ou minoritaires !

    Le Conseil constitutionnel a donc eu raison de dire, en 1999, qu’en conférant « des droits spécifiques à des “ groupes ” de locuteurs de langues régionales ou minoritaires, à l’intérieur de “ territoires ” dans lesquels ces langues sont pratiquées, [cette Charte] porte atteinte aux principes constitutionnels d’indivisibilité de la République, d’égalité devant la loi et d’unicité du peuple français. »

    Après l’exposé de ces raisons juridiques, philosophiques et républicaines, je voudrais enfin souligner, d’une façon plus personnelle, qu’il ne saurait être question de ne pas tenir compte de l’origine de la charte, à l’heure où beaucoup prétendent, à la suite de Samuel Huntington et de sa théorie du choc des civilisations qui est aujourd’hui la doctrine officielle d’un certain nombre de stratèges de la première puissance mondiale et de quelques autres pays, que, dorénavant, « dans le monde nouveau, la politique locale est “ethnique”, et la politique globale “civilisationnelle” ».

    Cette origine, sans doute nombre de mes collègues l’ignorent-ils ; c’est pourquoi je veux la leur apprendre.

    La charte, adoptée en 1992 par le Conseil de l’Europe, a été préparée, débattue et rédigée par plusieurs groupes de travail de cette instance qui étaient animés par des parlementaires autrichiens, flamands et allemands tyroliens. Leur point commun était d’être tous issus de partis nationalistes ou d’extrême droite et d’être membres de l’Union fédéraliste des communautés ethniques européennes, la FUEV selon l’abréviation allemande. Cette organisation est aujourd’hui dotée d’un statut consultatif au Conseil de l’Europe, et elle se présente elle-même comme la continuatrice du Congrès des nationalités, instrument géopolitique du pouvoir allemand dans les années trente ! Un des principaux laboratoires de l’élaboration de la charte fut ainsi le groupe de travail officiel du Conseil de l’Europe sur la protection des groupes ethniques, dont la création a été obtenue par la FUEV et qui est également connu pour ses travaux sur le « droit à l’identité », le Volkstum.

    Pour toutes ces raisons, la République française n’a donc rien à gagner à modifier sa Constitution pour ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Elle ne pourrait que se renier en le faisant. Elle doit, tout au contraire, continuer sa politique bienveillante et intégratrice, qui donne aux cultures et aux langues régionales toute leur place dès lors que la République est première chez elle ! (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et de l’UC-UDF)."

    13/2/2009

    Florilège des propos de quelques "intellectuels" français sur les langues dites "minoritaires"

    « Ainsi disparaitront insensiblement les jargons locaux, les patois de six millions de Français qui ne parlent pas la langue nationale car, je ne puis trop le répéter : il est plus important qu’on ne pense en politique d’extirper cette diversité d’idiomes grossiers qui prolongent l’enfance de la raison et la vieillesse des préjugés »

    Abbé Grégoire, député de la Convention, au comité de l’instruction publique, septembre 1793.

    « Le fédéralisme et la superstition parlent bas-breton ; l’émigration et la haine de la République parlent Allemand ; la contre-révolution parle italien et le fanatisme parle basque »

    Bertrand Barrière. Député de la Convention, 1794.

    « Il n’y a pas de place pour les langues régionales dans une France destinée à marquer l’Europe de son sceau »

    Georges Pompidou. Président de la République, 1970.
    Le même "humaniste" trouvait des excuses au coup d'Etat de Pinochet...

    « S’il faut apprendre une autre langue à nos enfants, ne leur faisons pas perdre leur temps avec des dialectes qu’ils ne parleront jamais que dans leurs villages »

    Robert Pandraud. Secrétaire d’état, 1992.

    « Ne conviendrait-il pas que, dans les organisations internationales (en l'occurence, le Concours de l'Eurovision !), nos représentants s’expriment en français ? Lorsque la langue française est menacée, il est choquant de voir la France représentée par le Breton.»

    Monique Rousseau. Députée du Doubs.

    « En 1996, 110 000 élèves fréquentaient les cours des langues régionales. Est-il encore nécessaire de renforcer l’enseignement de langues inutiles économiquement ? »

    Georges Sarre. Député de Paris

    « En dehors d'une certaine façon que les bergers ont en commun de siffler le soir pour faire rentrer les chèvres, la langue corse n'existe pas »

    Angelo Rinaldi, Académicien français, 2005


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